La Chanson de Roland/Léon Gautier/Édition critique/Notes et variantes

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Anonyme, édition de
Alfred Mame et Fils (p. 1-274).

NOTES ET VARIANTES


Dans ces Notes et Variantes, l’auteur a voulu :

1o Donner au lecteur les variantes utiles des manuscrits d’Oxford, de Venise, de Paris, de Versailles, de Lyon, etc., et des éditions de MM. Michel, Génin et Müller.

2o Expliquer et justifier, un par un, tous les changements philologiques qui ont été apportés au texte primitif pour en faire un texte critique. Combler, d’après les Refazimenti, les différentes lacunes du texte d’Oxford.

3o Corriger un certain nombre d’erreurs.

4o Éclaircir les passages obscurs du texte ou de la traduction et résoudre, s’il est possible, les principales difficultés qui, dans la Chanson de Roland, ont pour objet soit l’Archéologie et la Géographie, soit la Philologie et l’Histoire littéraire.


Pour plus de rapidité, on a employé quelques abréviations : O. désigne le manuscrit d’Oxford (Bibl. Bodléienne, Digby, 23) ; — V1. le manuscrit de Venise qui, parmi les mss. français de la Bibl. de Saint-Marc, est coté IV ; — V2. le ms. VII de Venise ; — P. le ms. de Paris (Bibl. imp. Fr. 860) ; — Vs. celui de Versailles ; — L. celui de Lyon (no 384) ; — Lo. le fragment Lorrain. ═ Mi. désigne l’édition de M. Fr. Michel ; G. celle de Génin ; Mu. celle de Th. Müller.


Vers 1.Emperere. Dans le manuscrit de la Bodléienne, on lit tantôt emperere, tantôt empereres. Nous avons partout adopté la première de ces formes, nous basant sur les principes suivants : 1° « D’après le texte d’Oxford, les Substantifs masculins et féminins de la troisième Déclinaison, qui n’avaient pas en latin une s finale à leur nominatif singulier (imperator, homo, vigor), ont donné naissance à des noms français qui, en général, ne prennent point cette s au cas sujet du singulier (emperere, hom, vigur). — 2° Ces Substantifs français devaient un jour, il est vrai, prendre cette s par analogie, et quelques-uns avaient déjà commencé de la recevoir ; mais cette évolution, à coup sûr, n’est pas achevée dans le texte le plus ancien de la Chanson de Roland. — 3° C’est ainsi que nous trouvons, au cas sujet du singulier : Traïsun (v. 1458) ; dulur (2030) ; muiller (2576) ; cunfusiun (2699 et 3276) ; honor, onur (2890, 922) ; car, de caro (2942) ; meillor (3532) ; vigur (3614) ; lion (2436) ; garçun (2437) ; ocisiun (3946) ; empereor (1942) ; major (1984) ; hom (3974, etc. etc.) ; prozdom (1474) ; chançun (1466) et cançun (1614) ; avisiun (836), etc. — 4° À cette règle générale on peut seulement opposer quelques exceptions qui s’expliquent trop bien par l’ignorance mille fois constatée du scribe de notre manuscrit : Dulors (v. 1437) ; puinneres (3033) ; amurs (3107) ; leons (2549) et campiuns (2244), sans parler ici de bers, qui peut se justifier, et de fels. Malgré ces exceptions, nous avons dû partout observer la règle. — 5° D’ailleurs, la forme emperere apparaît beaucoup plus fréquemment dans le texte original que la forme empereres ; la proportion est la suivante : 25 fois empereres ; 41 fois emperere.

Emperere est le cas sujet ; empereür le cas régime. Ces Substantifs sont de ceux que l’on appelle en Allemagne : Noms qui déplacent l’accent, et en France, mal à propos : Noms à déclinaison imparisyllabique. On en peut ainsi formuler la théorie : 1° Un certain nombre de noms français revêtent au singulier deux formes distinctes, l’une pour le sujet (emperere, sire, etc.), et l’autre pour le régime (empereür, seignur, etc.). — 2° Ces deux formes s’expliquent aisément par le déplacement de l’accent tonique, qui, dans imperator, senior, etc., n’est pas à la même place que dans imperatorem, seniorem, etc. — 3° M. Bartsch (dans la Grammaire qui suit sa Chrestomathie de l’ancien français, p. 480) divise en trois familles tous les Noms à double déclinaison : a. Ceux qui dérivent des noms latins en or, oris... b. Ceux qui viennent des vocables en o, onis. Et enfin, c : les « mots isolés », tels que niés, nevuld ; enfes, enfant, etc. — 4° Quelques substantifs de la deuxième déclinaison (tels, par exemple, que Carles, Marsilies, etc.), ont été, par analogie ou par extension, soumis aux règles de la « Déclinaison qui déplace l’accent ». (Carles, Carlun ; Marsilies, Marsiliun), etc.

Magne. O. Nous avons restitué magnes, à raison des règles de la Déclinaison romane. Voici ces règles : Première déclinaison romane (correspondant à la première déclinaison latine). Les Substantifs de cette famille ne prennent pas l’s au singulier, et la reçoivent toujours au pluriel. Pas de distinction entre le cas sujet et le cas régime. ═ Seconde déclinaison romane (correspondant à la seconde et à la quatrième déclinaisons latines). Les Noms et Adjectifs masculins de cette déclinaison reçoivent une s au cas sujet du singulier et au cas régime du pluriel (paiens, magnes, etc.) ; ils n’en prennent pas au cas sujet du pluriel ni au cas régime du singulier (paien, magne). ═ Troisième déclinaison romane (correspondant à la troisième déclinaison latine). 1° Les Substantifs masculins ou féminins, qui ont une s au nominatif singulier de la déclinaison latine, ont donné naissance à des Noms français qui suivent en général la règle de la deuxième déclinaison. — 2° Les Substantifs masculins ou féminins qui n’ont pas d’s au nominatif singulier de la déclinaison latine, ont donné naissance à des Noms français qui ne prennent pas en général l’s finale au cas sujet du singulier et qui, pour tout le reste, suivent ordinairement la règle de la deuxième déclinaison. Mais il y a déjà tendance, dans le texte d’Oxford, à ce que ces noms eux-mêmes prennent, par extension et par analogie, une s finale au sujet singulier. (V. notre première note.) — 3° Pour le cas sujet du pluriel, il y a quelque hésitation chez notre scribe. Le plus souvent, pour les noms masculins, il n’emploie pas l’s finale au sujet pluriel. (V. notre note du v. 20.)

═ La « Règle de l’s » (comme on l’a assez inexactement appelée) est commune à la langue d’oïl et à la langue d’oc. « Elle n’a pas toujours été suivie avec une rigueur absolue, et commence à disparaitre au xive siècle » : tel est aujourd’hui le sentiment général de tous ceux qui s’occupent de philologie romane ; telle est la proposition qui résume le plus exactement la doctrine commune sur cette règle dont l’importance a été exagérée. Quoi qu’il en soit, nous l’avons, dans notre texte critique, observée partout, et alors même que notre scribe ne s’y conformait point : 1° Parce qu’elle est étymologique. — 2° Parce qu’elle est observée dans tous les monuments de notre langue qui sont contemporains de la Chanson de Roland. — 3° Parce que, dans notre manuscrit même, elle est le plus souvent observée. (Dans les 500 premiers vers de notre poëme, elle est, pour le sujet singulier, violée 39 fois, observée 182 fois.)

Carles li reis, etc. Pour la légende de Charlemagne, v. la note du v. 96.

═ Nous donnons ici le Tableau (pour les voyelles) de la Phonétique de notre Chanson.

A
[Ā barre en chef] 
E (rarement AI ou EI ; plus rarement A).
[Ă barre en chef] 
E (rarement AI, A)
A en position 
Le plus souvent E (assez souvent A ; plus rarement EI et AI).
A avant la tonique 
A (E bien plus rarement).
A après la tonique 
E muet.
AN 
AN, EN, EIN, AIN (E très-rarement, par la chute de la nasale).
A[U̍ barre en chef] et AU avant la tonique 
O
E
̍ barre en chef] 
EI, E.
̍ barre en chef] 
E.

E en position 
EI, E (plus rarement I).
E avant la tonique 
E, EI.
EN 
EN, AN, AM (rarement EI, par la chute de la nasale).
EN après la tonique 
EN (pour l’écriture, et non pour la prononciation).
EU 
EU.
I
[Ī barre en chef] 
I (E).
I 
EI.
I en position 
I, E.
I avant la tonique 
E, I.
IN 
EN, AN, EIN (rarement IN).
IM 
EM
O
[Ō barre en chef] 
O, U.
O en position 
Presque toujours O (parfois U ; plus rarement OI, UI, OEI).
[Ŏ barre en chef] 
U, O (OE, OEI, OI, A).
O avant la tonique 
O, U (OI, OE).
ON. — OM. 
UN, ON, OIN. — UM, EM.
OR 
UR (OR).
U
[Ū barre en chef] 
U
U en position 
U, O (OE, OI).
[Ŭ barre en chef] 
U, O.
U avant la tonique 
U, OI, UI.
U[N barre en chef], UM 
UN, UM.
UN après la tonique 
EN muet (comme, par exemple, dans baptizarUNT, baptiserENT).

Vers 2.Set ans. Suivant l’auteur de Gui de Bourgogne, c’est vingt-sept ans que Charles aurait passés en Espagne. Mais la leçon de Gui de Bourgogne ne fut jamais populaire, et Génin a raison de citer ici la farce de Pathelin, « où maître Pierre se vante à sa femme d’être aussi savant que s’il avait été à l’école autant que Charles en Espaigne. » (V. aussi Martial de Paris, cité par Littré au mot Charlemagne de son grand Dictionnaire de la langue française. )

Ested. O. Le d se prend pour le t à la fin de quelques verbes, participes, noms et adjectifs du texte d’Oxford. Dans les mille premiers vers de la Chanson, le d final, à la place du t, ne se retrouve pas plus de 26 fois sur un millier de cas. Nous l’avons partout remplacé par le t, qui, d’ailleurs, est plus étymologique. ═ Toutefois, il est un mot très-usuel, où le d a définitivement pénétré, sauf de très-rares exceptions : c’est ad venant d’habet (abt). Nous l’avons partout laissé tel que notre manuscrit nous l’offrait ; car nous nous proposons, dans ce texte critique, de reconstituer notre vieux poëme tel qu’il aurait été écrit par un scribe instruit et soigneux, avec les règles générales de la langue de son temps et les règles particulières de son dialecte spécial.

Ad ested en Espaigne. — La Keiser Karl Magnus’s Kronike dit : « L’Empereur ayant soumis l’Espagne et la Galice… »

Vers 3.Tresqu’en la mer cunquist la tere altaigne. O. — Le manuscrit de Versailles et celui de Venise VII nous offrent : Conquist ou conquest la terre jusqu’à la mer altaigne, et nous avons adopté cette version comme plus logique et plus précise. — Altaigne est, de toute la famille dérivant d’altus, le seul vocable qui n’ait pas pris l’h (Cf. halt, halte, haltur). Dans l’appendice de son Dictionnaire étymologique (p. 560), M. Brachet dit, après M. Max Müller, au sujet de cette h initiale : « Cette aspiration est due à l’influence des formes germaniques correspondantes (hoch, etc.). » Sans rejeter absolument cette opinion, il convient d’observer que certains mots de notre texte, — les uns venus du germain, comme helme ; les autres du latin, comme honor, — prennent ou rejettent tour à tour l’h initiale, qui, d’ailleurs, n’impliquait pas l’aspiration et s’élidait très-légitimement.

Vers 4.N’i ad castel. Ad, employé dans ce sens, gouverne toujours après lui l’accusatif. En d’autres termes, castel et les mots analogues sont nécessairement régimes. « Il y a un roi », se traduirait, dans un thème étymologique, par : Illud ibi habet unum regem. Cette observation, trop élémentaire peut-être, est néanmoins utile pour expliquer certaines parties de notre texte critique. ═ Au lieu de remaigne O, lire remaignet. Toutes les troisièmes personnes du singulier, sauf des cas excessivement rares, se terminent, dans le texte d’Oxford, par un t qui est étymologique, mais qui, d’ailleurs, ne se prononçait pas. Le scribe a oublié cette règle huit ou dix fois peut-être dans tout son texte : nous l’avons rétablie partout.

Vers 5.Citet. O. À cause du cas sujet, citez.

Vers 6.Mun[tai]gne. Mü. On lit fort bien le mot entier dans le manuscrit d’Oxford ; les crochets sont inutiles. — « Il restait un château que l’Empereur n’avait pu réduire ; on rappelait Saragus, et il était situé sur une montagne élevée. » (Keiser Karl Magnus’s Kronike.)

Vers 7.Marsilie. O. À cause du cas sujet, Marsilies.

═ Nous allons résumer ici, d’après le texte de toutes nos chansons, « l’Histoire poétique, la Légende de Marsile, » et nous ferons successivement le même travail sur tous les héros du Roland. Nous espérons, par cette suite de monographies, résoudre d’avance quelques difficultés de notre vieux poëme, et mettre en lumière la physionomie réelle de tous les acteurs de ce grand drame. ═ C’est durant l’enfance et la première jeunesse de Charlemagne que Marsile fait sa première apparition dans notre Épopée. Le jeune roi de France, persécuté dans son propre royaume par Heudri et Lanfroi, fils de Pépin et de la fausse Berthe, est forcé de s’enfuir en Espagne, à la cour du roi Galafre, père de Marsile : c’est là qu’il se cache, durant plusieurs années, sous le nom de Mainet. Or, Galafre a une fille, Galienne, pour laquelle Charles se prend du plus vif et du plus charmant amour. C’est cet amour qui lui inspire ses premiers exploits ; c’est en pensant à Galienne qu’il triomphe de Braimant, ennemi de Galafre. Un jour enfin il se fait reconnaître comme « l’hoir de France », et épouse Galienne. Mais le frère de la jeune fille, Marsile, n’a point vu ce mariage d’un bon œil. Il est jaloux de Charles, il le veut perdre, il l’attire dans une embuscade. Charles déjoue la ruse, terrasse Marsile, et finit par lui pardonner. (Charlemagne de Girart d’Amiens, B. N. 778, f° 38 r° — 50 v°. Ce poëme, ou plutôt cette compilation, appartient au premier quart du xive siècle.) ═ Tout autre est le récit du Karl, de ce poëme allemand dont l’auteur est connu sous le nom de « Stricker » (1230). D’après cette légende, c’est Marsile qui, tout au contraire, aide fort gracieusement le jeune fils de Pépin à conquérir son royaume contre deux traîtres appelés Winemann et Rappoldt (Guinemant et Rabel). ═ Mais, le plus souvent, Marsile est représenté comme un adversaire de Charles même enfant. Nous le retrouvons, dans une des deux versions d’Otinel, sous les traits d’un roi d’Espagne qui s’est emparé de Rome et députe Otinel comme ambassadeur à Charlemagne. (Otinel, xiiie siècle, édition Guessard, v. 23 — 137 et ss.) Or, le messager païen se convertit et devient le plus terrible ennemi de son ancien maître. (Ibid., v. 211-659.) La guerre s’engage, et les chrétiens mettent le siége devant Attilie. Le poëte n’hésite point à faire mourir son Marsile à la fin de la Chanson, et de la main d’Otinel. (2660-2132.) ═ Le Karl Meinet (compilation du xive siècle, conçue il peu près dans le même goût que le Charlemagne de Girart d’Amiens) ne donne pas aussi rapidement le coup de mort à Marsile. L’auteur nous y représente « Ospinel » comme un roi de Babylone qui, après avoir défié les douze Pairs, lutte avec Olivier. Mais le Sarrazin se convertit et meurt après s’être fait baptiser. Or, il était fiancé à la fille du roi Marsile, à Magdalie. Celle-ci veut le venger, mais tombe au pouvoir de Roland et s’éprend trop rapidement du héros chrétien. Roland ne répond que trop facilement à cette trop ardente affection, et il faut qu’Olivier sépare violemment la fille de Marsile et le fiancé de la belle Aude. (G. Paris, d’après Ad. Keller, Histoire poétique de Charlemagne, pp. 489-496.) ═ Quoi qu’il en soit, tous les poëtes et tous les légendaires s’obstinent, malgré l’auteur d’Otinel, à faire vivre Marsile plus longtemps, et il convient, d’ailleurs, de considérer ce poëme comme une œuvre de la décadence. ═ En réalité, c’est dans l’Entrée en Espagne que le véritable Marsile se fait pour la première fois connaître. C’est contre Marsile que la grande expédition d’Espagne est dirigée. Il apprend par ses espions l’arrivée des Français, et, comme il est bon nigromans, écrit sur les bords d’un grand vase rempli d’eau les noms de tous les règnes de la terre ; puis, il place un batelet sur cette eau : « Le royaume vers lequel se dirigera ce petit vaisseau, sera celui que Charlemagne a l’intention de conquérir. » Le batelet s’arrête du côté de l’Espagne : Marsile pâlit d’effroi. (L’Entrée en Espagne, compilation poétique du commencement du xive siècle, mais renfermant quelques éléments du xiiie ; mss. fr. de Venise, n° xxi, f° 7.) Le roi païen envoie alors un bref à Charles, et ce « bref » commence tout comme un diplôme ou une lettre patente de la Chancellerie du roi de France (Nos, Marsile, par la Dex grace, etc.). La guerre éclate à la suite d’une très-fière réponse de l’Empereur, et c’est à son neveu Ferragus que Marsile confie le soin de chasser les Français. (Entrée en Espagne, f° 8-11.) Ferragus est un géant : il défie les douze Pairs, surtout Olivier et Roland. Les terribles duels commencent sur-le-champ, et onze Pairs sont vaincus et faits prisonniers. Roland, seul, reste invaincu. (Ibid., f° 11-31.) Mais Roland suffit, et, après un combat très-long, il renverse et tue le Géant. (Ibid., f° 31-79.) Marsile est attristé, mais non pas découragé de cette mort de son neveu : Malceris, en effet, résiste aux Français sous les murs de Pampelune, et son fils Isoré s’y couvre de gloire. (Ibid., f° 90-102.) Mais, malgré tant de courage, le jeune païen est fait prisonnier, et eût été mis à mort sans la généreuse intervention de Roland. (Ibid., f° 102-125.) Cependant Marsile et Malceris vont unir leurs efforts contre les Français, et « l’Augalie d’Orient », oncle de Marsile et de Baligant, propose d’incendier la Navarre. Une grande bataille s’engage, et c’est pendant le plus fort de cette journée que le neveu de Charles s’échappe, pour aller faire la conquête de Nobles. (Ibid., f° 125-213.) C’est ici que l’auteur de l’Entrée en Espagne abandonne Marsile, et fait voyager Roland en Orient. (Ibid., f° 217 et ss.) ═ Mais l’auteur de la Prise de Pampelune nous ramène vers Marsile, et la scène de notre légende est encore une fois transportée en Espagne... Marsile, de nouveau, met Malceris à la tête d’une armée immense. Une bataille terrible est livrée : l’Empereur des Français est sur le point de périr, quand il est sauvé par Didier le Lombard. (Prise de Pampelune, poëme du premier quart du xive siècle, éd. Mussafia, vers 1353-1830.) Deux ambassadeurs sont envoyés par Charles au roi païen : c’est Basan de Langres et Basile. Marsile les fait pendre, et ce souvenir est rappelé dans notre Chanson de Roland. (Ibid., v. 2597-2704.) Ganelon, qui était l’instigateur de cette première ambassade, ne se décourage point et en fait envoyer une seconde à Marsile : c’est Guron qui est chargé de cette très-périlleuse mission. (Ibid., 2740-2876.) Il est traîtreusement attaqué par Malceris, voit mourir ses deux compagnons et parvient à grand’peine à aller mourir lui-même, criblé de blessures, aux pieds de Charlemagne indigné. (Ibid., 3140-3650 f°.) Alors les Français battent Malceris (Ibid., 3851-5128), entrent dans Tolède (4838-4880) et dans Cordoue (5129-5704), prennent quatre autres villes, Charion, Saint-Fagon, Masele et Lion (Ibid., 5704-5773), et mettent le siége devant Astorga. (Ibid., 5773-6113.) ═ Dans le roman de Gui de Bourgogne (ce poëme est de la seconde moitié du xiie siècle), Marsile ne tient pas une moindre place. C’est à Marsile qu’en réalité le héros de la Chanson enlève successivement Cariaude, Montescler, Montorgueil, Augorie et Maudrane ; c’est Marsile encore qui est frappé quand Gui fait baptiser de force le Sarrazin Huidelon et trente mille païens. (Gui de Bourgogne, v. 392-3717.) Les jeunes chevaliers qui arrivaient de France, sous le commandement de Gui, ce jeune vainqueur, sont un jour réunis à l’ost de Charlemagne et y retrouvent leurs pères ; mais les uns et les autres n’en sont que plus animés contre Marsile. On veut en finir avec lui, et Charles, après avoir vu Luiserne miraculeusement engloutie (Ibid., 4137-4199), prend avec toute son armée le chemin de Roncevaux. (Ibid., 4300-4301.) ═ Dans notre Chanson de Roland, le rôle de Marsile est connu. C’est lui qui tient conseil contre les Français ; c’est lui que Blancandrin décide à agir par la ruse ; c’est lui qui se fait, avec ce perfide conseiller, le complice de la trahison de Ganelon et qui comble le traître de présents ; c’est lui qui attaque Roland à Roncevaux et qui, vaincu, lance, en s’enfuyant, de nouvelles troupes contre lui. Mais le roi païen a perdu le poing droit dans cette formidable bataille ; il prolonge très-péniblement son existence jusqu’à l’arrivée de Baligant, son vengeur, et meurt de douleur en apprenant la défaite de l’Émir. L’auteur de notre vieux poëme nous le représente, d’ailleurs, comme un homme faible et une sorte de Louis le Débonnaire. ═ Mais sa légende a reçu ici de très nombreuses et très-importantes modifications. D’après la Chronique de Turpin (entre 1109 et 1119, à l’exception des cinq premiers chapitres), Marsire est frère de Baligant, et tous deux sont chargés par l’Émir de Babylone de résister aux chrétiens. Charles envoie Ganelon en ambassade près de Marsire, et le beau-père de Roland le trahit par cupidité et non par haine. (Cap. xxi, De proditione Ganelonis.) D’ailleurs, les Français méritent le châtiment qui va tomber sur eux : ils commettent d’infâmes débauches avec les Sarrazines que leur a données Marsire. Les païens les surprennent, et tous meurent, à l’exception de Roland, Turpin, Ganelon, Baudouin et Thierry. (Ibid.) En ce moment suprême, Roland se fait montrer le roi Marsire dans la mêlée et le va tuer.(Cap. xxii, De passione Rolandi et morte Marsirii.) Puis, il meurt. (Cap. xxiii, De sancta tuba et de confessione et transitu Rolandi.) ═ Les auteurs espagnols, mal inspirés par leur haine contre la France, ne craignent pas de faire contracter, par leur Bernard dei Carpio, une alliance honteuse avec le Sarrazin Marsile, pour perdre la France et faire mourir Roland. (Rodrigue de Tolède, mort en 1247, Chronica Hispaniæ, cap. x et xi. — Cronica general d’Alfonse X, 1252-1285 ; édition de 1604, f° 31-32.) ═ Les Romances espagnoles nous montrent, au contraire, le roi Marcim s’enfuyant sur un âne : « Je te renie, Mahomet, » s’écrie-t-il ; et il perd tout son sang. (Les Vieux Auteurs castillans, de Puymaigre, II, 325.) ═ Le Ruolandes Liet (vers 1150) suit, pour la légende de Marsile, la version de notre manuscrit d’Oxford, et il en est de même des Remaniements du Roland (xiiie s.), de la huitième branche de la Karlamagnus Saga (xiiie s.) et des deux fragments néerlandais de Loos, publiés par M. Bormans (xiiie-xive s.) ; tandis que Philippe Mouskes (vers le milieu du xiiie s.), les Chroniques de Saint-Denis, le Roland anglais du xiiie siècle, Girart d’Amiens (commencement du xive s.), les Reali (vers 1350) et les Conquestes de Charlemagne de David Aubert (xve s.), suivent de préférence la Chronique de Turpin, tout en faisant parfois certains emprunts à nos vieux poëmes. Car ce sont, là comme partout, les deux grands courants : notre Roland d’une part et le faux Turpin de l’autre. Et nous arrivons ainsi jusqu’en 1478, jusqu’à la Conqueste du grand Charlemaigne des Espaignes, où il ne faut voir, d’ailleurs, qu’une édition de notre Fierabras, et qui, dans ses deux derniers chapitres, renferme tout un abrégé de la Chronique de Turpin. C’est ce résumé que la Bibliothèque bleue répand encore aujourd’hui dans nos campagnes les plus reculées. ═ Tous ces documents, sans exception, font mourir Marsile soit à Roncevaux, soit peu de temps après cet immense désastre. Mais un trouvère du xiiie siècle a voulu prolonger cette existence. C’est l’auteur d’Anséis de Carthage qui fut suivi par le rajeunisseur en prose du Charlemagne et Anséis. (Bibl. de l’Arsenal, B. L. F. 214.) « Anséis est, comme on le sait, nommé roi d’Espagne par Charles, qui peut enfin quitter l’Espagne et retourner en France. (B. N. ms 793, f° 1-2.) Le jeune roi fait aussitôt demander en mariage la fille de Marsile, Gaudisse. (Ibid., f° 2-4.) Mais tandis que la jeune païenne accourt à ces noces, Anséis déshonore, malgré lui, la fille du comte Isoré, son tuteur, et Gaudisse est renvoyée à son père. Inde iræ. (Ibid., f° 4-14.) Marsile alors entreprend une guerre d’extermination contre les chrétiens d’Espagne, et son principal allié est le comte Isoré lui-même, jaloux de venger le déshonneur de sa fille et dont la colère a fait un renégat. Rien n’est plus long que le récit de cette guerre. (Ibid., f° 14-56.) Anséis y eût succombé sans le secours de Charlemagne, qui traverse miraculeusement les eaux de la Gironde, entre en Espagne, y défait Marsile (Ibid., f° 59-71) et l’emmène prisonnier en France, où, pour venger Roncevaux, il finit par lui faire couper la tête. » (F° 71-72.) Cette dernière mort de Marsile est racontée assez pittoresquement par notre poëte… « Marsile s’étonne de voir à la table de Charlemagne des pauvres si déguenillés et des moines si maigres auxquels on fait si peu d’honneur, tout à côté de chanoines si gras et entourés de tant d’hommages. Et ce spectacle le scandalise, au point qu’il refuse absolument de se convertir à la foi chrétienne. C’est alors que Charles se décide à le faire mourir. » Cette « histoire des pauvres » se retrouve, d’ailleurs, dans le Traité de saint Pierre Damien : De Eleemosyna, et dans la Chronique de Turpin. Mais le faux Turpin a fait honneur de ce trait à Agolant, et saint Pierre Damien à Witikind. C’est, en réalité, une de ces légendes universelles et qu’on retrouve un peu partout sous des formes quelque peu différentes. ═ Quoi qu’il en soit, Marsile est cette fois bien mort, et aucun poëte n’a plus eu désormais l’audace de le ressusciter.

Vers 8.Mahummet. O. La forme la plus fréquemment employée dans notre texte est : Mahumet.

Vers 9.Mals. Ce mot vient de malum, qui est un neutre, et cependant il est écrit suivant la règle de l’s. C’est l’occasion pour nous d’établir la « Théorie des neutres ». ═ 1° Les neutres latins, dans la latinité populaire et surtout à la décadence romaine, étaient en partie devenus masculins. C’est un fait que M. Brachet a mis de nouveau en lumière dans sa Grammaire historique, p. 56. Il cite « dans Plaute : dorsus, œvus, collus, gutturem, cubitus ; dans les Inscriptions antérieures au quatrième siècle : brachius, monumentus, collegius, fatus, metallus, etc. ; dans la Lex Salica : animalem, retem, membrus, vestigius, precius, folius, palacius, templus, tectus, stabulus, judicius, placitus, etc. » Et M. Paul Meyer (Études sur l’Histoire de la langue française, de M. Littré, pp. 31, 32) a cité ce passage de Curius Fortunatianus : Romani vernacula plurima et neutra multa masculino genere potius enuntiant. Ce texte est capital dans la question. ═ 2° Cependant un certain nombre de neutres persévérèrent. Ceux-ci ne subirent pas la règle de l’s, tandis que les autres y étaient très-naturellement assujettis. ═ 3° La Chanson de Roland appartient à cette époque de transition durant laquelle un certain nombre de neutres latins sont devenus, en français, des masculins soumis à la règle de l’s, tandis que d’autres sont demeurés vraiment neutres et répugnent à prendre l’s au cas sujet du singulier. ═ 4° Ainsi d’un côté, nous trouvons, dans le texte d’Oxford, au sujet singulier : Cunseill (v. 179 et 604) ; pecchet (15 et 3646) ; corn (1789) ; coer (2019 et 2231) ; definement (1434) ; hardement (1711) ; blet (980) ; reprover (1706). Et, d’un autre côté, nous trouvons au même cas : Mals (v. 9) ; dreiz (2349, etc.) ; plaiz (3841, etc.) ; fers (1362) ; ors (2296) ; corners (1742). Il est même plus d’un mot, comme temple, qui est, au cas sujet, écrit tantôt avec et tantôt sans l’s finale. ═ 5° En résumé, un certain nombre de neutres sont devenus tout à fait masculins ; d’autres sont in via pour y arriver, mais n’y sont point encore. ═ 6° Nous avons respecté toutes ces formes dans notre texte critique, pour bien montrer à quel point en était parvenu chacun de ces vocables dans le dialecte et au moment où fut écrite cette version de la Chanson de Roland. ═ 7° Il faut ajouter qu’aux cas obliques du pluriel, tous les anciens neutres latins prennent l’s en français. Il n’y a pas d’exception à cette règle : Pecchez (v. 2365) ; mals (60) ; saveirs (74) ; milliers (109) ; guarnemenz (343) ; duns (845) ; vestemenz (1613) ; chefs (2094) ; coers (3628) ; corns (2132). ═ 8° Autre remarque : « Les adjectifs et participes, qui s’accordent avec des substantifs ou pronoms neutres, ne prennent pas l’s au cas sujet du singulier. Ex : Jamais n’ert jur que il n’en seit parlet (3905) ; — Por ço que plus bel seit (1004) ; — Un faldestoed... envolupet d’un palie alexandrin (408) ; — Il est juget que nus les ocirum (884), etc. » ═ C’est d’après ces règles que nous nous sommes dirigé dans tout notre Texte critique.

Vers 10.Marsilie. O. — V. notre note sur la règle de l’s (vers 1), à laquelle désormais nous ne renverrons plus notre lecteur.

Vers 12.Bloi. Nous avons traduit par bleu. Le sens de ce mot a été très-discuté, et l’on a surtout hésité entre les deux sens de bleu et de blond. C’est M. Génin qui a le plus vivement soutenu la première opinion (Roland, p. 340 et suiv.) ; c’est M. E. Gachet qui a le plus longuement motivé la seconde. (Glossaire du Chevalier au Cygne, pp. 626, 627.) Les arguments de M. Génin nous paraissent difficilement réfutables.

Perrun nous paraît signifier un large bloc de marbre plutôt qu’un « perron » dans le sens actuel de ce mot.

Vers 13.Lui. Dans tout le texte d’Oxford, il y a entre li et lui une distinction précise. Li n’est jamais employé que dans le sens strict du datif latin illi. Lui, au contraire, est employé : 1° comme régime direct : Mais lui meïsme ne volt metre en ubli (v. 2382) ; Lui e altrui travaillent e cunfundent (v. 380) ; Se lui lessez (v. 279) ; Pur lui afiancer (v. 41), etc. 2° Comme régime indirect : Aiez merci de lui (v. 239), etc. 3° Avec toutes les prépositions : L’anme de lui (v. 1510) ; pur lui (v. 842) ; vers lui (v. 958) ; en lui meïsme (v. 1036) ; devant lui (v. 4) ; entur lui (v. 2090) ; envirun lui (v. 13) ; encuntre lui (v. 376).

Milie. — Milie vient de millia ; mil vient de mille. ═ On dit mil pour un seul millier ; milie pour plusieurs. ═ Mil a, de plus, un sens indéterminé : En la grant presse mil colps i fiert e plus (v. 2090). D’une part, nous trouvons : Mil chevalers (v. 2442) ; mil Sarrazins (v. 2071) ; mil hosturs (v. 31), etc. ; et de l’autre : IIII.C. milie en ajustet (v. 851) ; XX milie Francs (v. 789), etc. ═ Milie s’emploie en outre substantivement : XV. milies de Francs (v. 3019), etc.

Vers 15.Seignurs. La « Théorie du vocatif » est assez difficile à établir d’après le texte d’Oxford. Il y avait évidemment confusion dans l’esprit de notre scribe et dans les idées de son temps. Tantôt le vocatif est admis à suivre la règle du cas sujet, tantôt celle du cas régime, et cela tour à tour et pour les mêmes mots. Ainsi l’on trouve à côté des formes-régimes : Ami, rei, Marsilie, Tierri, Pinabel, etc., les formes-sujets : Amis, reis, Deus, gentilz, amiralz, dreiz, chers, cumpainz, etc. Même anomalie au pluriel. À côté des formes-régimes : Seignurs, baruns, etc., on trouve les formes-sujets : Paien, chevaler, Franc, etc. Le même désordre, d’ailleurs, règne dans tous les textes du moyen âge, à tel point que M. Barstch a pu dire, dans la Grammaire qui suit sa Chrestomathie de l’ancien français : « Le vocatif singulier de la 2e déclinaison romane tantôt a, tantôt n’a pas d’s. » (P. 479.) Il importait toutefois, pour dresser notre texte, d’en arriver à une loi plus précise. Or, d’après la grande majorité des exemples fournis par notre manuscrit d’Oxford, il est certain qu’ici comme ailleurs, le scribe et son temps se réglaient vaguement sur l’orthographe latine. Quand le vocatif latin n’a pas d’s, en général (je dis, en général, et non pas toujours), le vocatif roman n’en prend pas. C’est cette règle que nous avons partout observée dans notre édition, tant au singulier qu’au pluriel des Substantifs et Adjectifs. Le seul critérium possible était ici l’étymologie : nous nous y sommes conformé.

Quel pecchet. V. notre théorie des neutres (v. 9). — Quel se rapportant à pecchet, neutre, vient de quale, et ne peut prendre d’s. C’est la loi générale de tous les adjectifs et de tous les participes neutres.

Vers 17.Nus. Le manuscrit porte nos. Partout, dans notre texte critique, nous avons imprimé vus et nus, alors même que le manuscrit donnait vos et nos. Nous nous sommes appuyé sur les principes suivants : 1° C’est tout à fait au hasard, et parfois À quelques mots d’intervalle, que le scribe emploie vos ou vus, nos ou nus. — 2° Une statistique exacte du nombre de cas où l’on trouve chacune de ces deux formes ne serait donc pas décisive en faveur de l’une ou de l’autre. (Dans le même nombre de vers, vus a été employé 33 fois, et vos 189 ; nus 55 fois, et nos 32.) Mais il faut remonter à des règles plus générales. — 3° Or, d’après la phonétique de notre texte, l’o latin, 7 ou 8 fois sur 10, se change en u (lequel u devait ici se prononcer ou). — 4° En conséquence, nous avons partout appliqué cette règle de la phonétique à nus et à vus comme à pur. Notre sentiment d’ailleurs est celui de Th. Müller, qui, au vers 1721, supplée vus et non pas vos. Enfin il convient de remarquer que, dans des couplets en u, on trouve également à la fin des vers nus et vos (2425, 2560, 2561). Cette raison n’est pas décisive ; mais elle a son poids.

Cunfundre. Les deux premières lettres sont effacées dans le manuscrit.

Qui. La forme employée 19 fois sur 20 dans notre texte est ki, que nous avons partout conservé.

Vers 18.Dunne. O. Nous avons préféré dunet : 1° parce que, 14 fois sur 16, le verbe duner est, dans notre texte, écrit avec un seul n ; 2° parce que toutes les troisièmes personnes, au singulier comme au pluriel, sont dans notre texte terminées par le t étymologique. Les exceptions sont très-peu nombreuses. ═ Le scribe, d’ailleurs, aurait dû employer ici le subjonctif, et écrire dunget. (Cf. le v. 2016.)

Vers 19.Tel gent. Tel et non pas telle, d’après cette règle fort connue : « Les Adjectifs latins qui n’avaient qu’une terminaison pour le masculin et le féminin, grandis, talis, fortis, etc., ont donné naissance à des adjectifs français qui n’ont également qu’une terminaison pour le masculin et le féminin : grant, tel, fort. Remarquons cependant que, dès le temps où fut écrite notre Chanson, cette belle règle commençait déjà à s’altérer, comme la règle de l’s. Ainsi l’on trouve grandes (vers 281 et 3656), au lieu de granz ; quele (vers 395, 927), au lieu de quel, etc.

Derumpet. Le manuscrit porte derupet.

Vers 20.Cume. Dans le texte de la Bodléienne, cume et cum sont distincts. Cume (sauf une seule exception, où l’erreur est évidente v. 765), ne s’emploie jamais avec un verbe, mais avec un substantif, un pronom ou un adjectif : Karles chevalchet cume fols (v. 3234) ; Cume celui ki ben faire le set (v. 427) ; Neirs cume peiz (v. 1625) ; Cume vassal i fiert (v. 1870), etc. etc. — Cum a quelquefois le même sens : Altresi cum un urs (v. 1827), et, dans ce cas, vient également de quomodo. Mais il s’emploie presque toujours avec un verbe : Issi seit cum vos plaist (v. 606) ; Faites la guere cum vos l’avez enprise (v. 210), etc. Il est d’autres cas où cum ne me semble pas dériver de quomodo : Cum jo serai à Loün en ma chambre (v. 2910) ; Cum jo serai à Eis en ma chapele (v. 2917), etc. C’est évidemment le sens de quum latin. Toutes ces distinctions nous paraissent très-nettes.

Hume. C’est ici un sujet pluriel, venant d’homines. Or, il y a hume et non pas humes. Il en est de même pour presque tous les sujets pluriels des Noms et Adjectifs masculins de la 3e déclinaison. Bien qu’ayant une s en latin, ils n’en prennent pas en français. Il importait sans doute de bien distinguer le cas sujet du cas régime : de là cette suppression de l’s étymologique. ═ Donc, en notre manuscrit, nous trouvons home et hume (v. 377, etc.) ; duc (v. 378) ; cunte (v. 378, 577, etc.) ; grant (v. 1830, etc.) ; parent (v. 1063, 1075, 3933) ; meillor (v. 449, 451) ; plusur, plusor (v. 995, 1434, etc.) ; barun (v. 2415) ; dragun (v. 2543) ; felun (v. 3814), traïtur (v. 942), dolent (v. 1608), sans parler des innombrables adjectifs verbaux et participes en ant. ═ Il y a cependant, dans notre texte, un nombre assez considérable d’exceptions à cette règle : Honurs (v. 3181) ; reis (v. 2649) ; martirs (v. 1134) ; serpenz (v. 2543) ; leuns (v. 1888) ; serjanz (v. 3967) ; cuntes (v. 2820) ; gentilz (377) ; granz (v. 2630) ; parenz (v. 3448) ; dolenz (v. 1813), sans parler ici du mot grailles, qui est douteux. ═ Mais enfin la règle s’est généralisée, et M. de Wailly la constate à toutes les pages de son Glossaire de Joinville. C’est sans doute par erreur que, dans sa Grammaire historique de la langue française (p. 148), M. Brachet a indiqué que pastores, au cas sujet comme au cas régime, donnait en français du moyen âge : pasteurs. C’est évidemment un lapsus.

═ La déclinaison de hom dans notre texte est la suivante, qui est contredite en très-peu de cas : Cas sujet : hom ou hum ; cas régime : home ou hume. Et, au pluriel : Cas sujet : home, hume ; cas régime : homes, humes. Au singulier, on trouve déjà om dans le sens de notre prétendu « pronom indéfini » on (v. 2230).

Vers 23.De castel. O. Mi. Mu. ═ La Keiser Karl Magnus’s Kronike traite Blancandrin de roi : « Un roi qui se nommait Blankandin. »

Vers 25.Chevaler. O. Cf. le v. 3818, qui nous offre la leçon correcte.

Vers 27.Al Rei. Lire : à l’Rei. Cette correction s’applique également aux vers 28, 48, 71, 123, 162, 196, 207, 216, 232, 245, 253, 265, 269, 306, 339, 351, 369, 416, 427, 484, 487, 496, 510, 569, 635, 676, 732, 733, 776, 832, 880, 920, 962.....

Ore. — Or. Mu. C’est à tort que MM. Génin et Müller ont cru lire on dans le manuscrit, qui porte ore très-visiblement. Nous laissons ore, persuadé d’ailleurs que l’e muet ne se prononçait pas, mais voulant laisser intacte une forme très-française et très-étymologique. Nous aurons à constater mille fois que la prononciation, dans notre manuscrit, est en désaccord avec l’écriture.

Vers 28.Carlun, cas oblique de Carles, par analogie, d’après Otes et Oton, Gui et Guion, etc.

Al orguillus, al fier. Mu. Nous laissons : e à l’fier, qui se trouve dans le manuscrit et prouve l’élision possible de l’e. Le manuscrit de Venise, n° IV, porte : Manda à Karll li orgoilos el fier. Le manuscrit n° VII : Mandez Karlon, à l’orgoillos e fier, — Foi e salut por vostre mesagier.

Vers 29. — C’est M. Müller qui a restitué [Fe]deilz. On ne peut, en effet, lire les deux premières lettres dans le manuscrit. ═ MM. F. Michel et Génin avaient imprimé Deuz.

Vers 30.Vos. O. — V. la note sur vus et nus (v. 17). — Leons. O. La très-grande majorité, la presque totalité des Noms qui sont aujourd’hui terminés en on, sont, dans le manuscrit d’Oxford, terminés en un. Nous les avons tous écrits avec un u. C’est toujours, en effet, la grande règle de phonétique d’après laquelle l’o latin devient u. Mais tantôt ce changement soulève dans nos textes une question de prononciation (vus, nus, pur) ; tantôt il indique une simple variante d’écriture, comme dans barun, traïsun, etc.

Vers 31.Camelz, O. — Pour cameilz, cf. v. 129, 645, 847. Trois fois sur quatre, ce mot se présente sous cette dernière forme. — Hosturs muez, c’est-à-dire « après la mue ». Génin (p. 343) cite un passage de Frédéric II, en son Art de la chasse : « Plumagium autem saurum seu non mutatum differt a mutato, in eo quod generaliter plumœ et pennœ post mutam sint meliores et alterius coloris. » (Cf. Ducange, au mot Saurus.)

Vers 33.Carre. O. ═ Carier, c’est « charroyer ». Le ms. de Venise n° VII porte : Cinqante chars li ferez charoier ; — Comblé seront de fins besanz d’or mer.

Vers 34.Bien. O. J’ai relevé 47 fois la forme ben dans le texte d’Oxford, et 27 fois la forme bien. De plus, l’i est ici très-évidemment parasite. Pour ces deux raisons nous avons partout imprimé ben. Il est clair d’ailleurs que le scribe se servait au hasard de l’une ou de l’autre de ces formes, puisqu’il les emploie l’une et l’autre à quelques mots de distance (v. 34, 36, 1,653, 1,654). Il n’avait évidemment de préférence pour aucune, et nous avons le droit de choisir, pourvu que notre choix soit scientifique.

Vers 37.Vos. O. — V. la note du v. 17, à laquelle désormais nous ne renverrons plus notre lecteur.

Siurez. Mu. Suirez. Mi. G.

A la feste seint Michel. (Cf. v. 152 : A la grant feste seint Michel del Peril.) 1° Il importe tout d’abord de remarquer la place considérable qu’occupe saint Michel dans tout notre poëme. C’est à la Saint-Michel que Charlemagne doit donner une grande fête à l’occasion de la soumission de Marsile et de la fin de la guerre (v. 37 et 53). Au moment où Roland va mourir, un tremblement de terre se fait sentir de Seint-Michel de Paris josqu’as Seinz (v. 1,428) ; et nous proposerons plus tard d’écrire : De Seint Michel del Peril josqu’à Reins. Enfin le dernier ange qui s’abat près de Roland mourant, c’est « seint Michel del Peril » (v. 2,994). L’auteur de la Chanson écrivait visiblement dans un pays où le culte de saint Michel était particulièrement en honneur, et les mots de « seint Michel del Peril » nous mettent aisément sur la voie. Comme il s’agit ici du fameux « Mont-Saint-Michel » près d’Avranches, il se pourrait que notre poëte fût de ce pays, et non pas anglo-normand, comme on l’a prétendu sans preuves. (V. notre Introduction, t. I, p. lxiv et suiv.) ═ 2° La « feste seint Michel » n’est donc pas le 29 septembre, jour où l’Église universelle célèbre la mémoire du saint Archange. Mais, si nous nous reportons à « Saint Michel du Péril » (v. 152) et à la grant feste seint Michel del Peril, ce serait le 16 octobre, jour où l’on célèbre la consécration par saint Aubert, évêque d’Avranches, de l’église du Mont-Saint-Michel. Un certain nombre de Martyrologes de France contiennent, en effet, cette mention : « Le 17 des calendes de novembre, au diocèse d’Avranches, l’Apparition du glorieux saint Michel à saint Aubert, évêque de cette ville, laquelle lui donna sujet de bâtir l’abbaye du Mont-Saint-Michel, dont le pèlerinage est devenu si célèbre... » Cette fête, dit Mabillon (Ann. Bened. lib. XIX), était célébrée dans toute la deuxième Lyonnaise, dans un nombre considérable d’autres églises et jusqu’en Angleterre. À l’appui de son opinion, Mabillon cite le synode d’Oxford, en 1222, qui ordonne ut dedicatio Sancti Michaelis in monte Tumba a rectoribus ecclesiarum devotissime celebretur. Rien n’était plus populaire que cette fête. Quant au nom de « seint Michel del Peril », il ne l’était pas moins. Dans la « Chronique de saint Pierre le Vif » (Spicileg. II, 740), il est question d’un illustre pèlerin qui se rend ad sancti Michaelis Periculum ; et, dans son Supplément à la « Chronique de Sigebert », Robert du Mont, abbé de Saint-Michel, dit que les rois d’Angleterre et de France, Henri II et Louis VII, se rencontrèrent, en 1158, à Avranches, ad montem Sancti Michaelis de Periculo maris. — 3° L’Apparition qui rendit ce lieu célèbre eut lieu en 708, (Mabillon, l. I.) Saint Michel apparut à saint Aubert, onzième évêque d’Avranches, et lui déclara que la volonté de Dieu était de voir une église en l’honneur de l’Archange sur le sommet du rocher de la Tombe (in monte Tumba, et plus tard ad duas Tumbas). L’évêque, incrédule comme saint Thomas, se refusa de croire à cette vision qui se renouvela une deuxième, une troisième fois. Saint Michel, pour punir Aubert, le frappa enfin à la tête ; et, à l’endroit frappé par l’ange, l’évêque aurait gardé toute sa vie « un trou que l’on voit encore à son crâne », dit un hagiographe du xviie siècle, le P. Giry. (Vies des Saints, 8 mai.) Mais Mabillon observe avec raison qu’avant le milieu du xe siècle, il n’est nullement question de ce dernier miracle. Il en cite pour preuve le « Récit d’un anonyme » (publié par lui-même et par les Bollandistes), lequel est antérieur au duc Richard Ier, et qui ne fait aucune allusion à l’évêque miraculeusement frappé. Quoi qu’il en soit, saint Aubert bâtit l’église, où de nombreux miracles ne tardèrent pas à éclater. Les Bollandistes, que nous résumons, parlent longuement de ces miracles et du pèlerinage auquel ils donnèrent lieu. Dès le viiie siècle, ce pèlerinage était un des plus fréquentés de l’Europe, comme l’atteste le moine Bernard dans son Itinéraire. On y mit des moines en 966, au lieu de clercs séculiers, et ce fait a été établi par les auteurs des Acta Sanctorum contre Mabillon, qui avait conservé quelques doutes sur l’exactitude de la date. L’église brûla une première fois sous le règne de Robert. (Glaber, lib. III, c. iii.) Une église nouvelle fut consacrée vers 1023, et de nouveau incendiée en 1112. Ce sont ces incendies, dus à la foudre, qui ont peut-être donné lieu à la légende de nouvelles apparitions du saint Archange sous la forme d’une colonne de feu. Nous n’avons pas à suivre plus loin l’histoire de ce célèbre pèlerinage. ═ Quelle que fût sa célébrité, il joue un trop grand rôle dans notre poëme pour que le poëte ne l’ait pas particulièrement connu.

Vers 38.Recevrez. Mu. Nous écrivons receverez. Le manuscrit d’Oxford, en effet, porte au-dessus du v une abréviation très-connue des paléographes (ủ), et qui supplée ordinairement er. Nous pensons toutefois qu’elle désigne ici e, tout simplement, l’r n’ayant pas lieu d’être redoublé dans nos futurs. Nous n’avons pas hésité à tenir compte d’une abréviation très-réelle et ineffaçable, qui, très-évidemment, avait un sens dans l’esprit de notre scribe, qui indique d’ailleurs l’étymologie d’une façon très-frappante et a son importance dans l’étude de la phonétique. Nous emploierons partout le même système.

Chrestiens. Partout ce mot est écrit dans le texte d’Oxford avec le Xp (Χρ).

Vers 39.Ses. O. Les formes sis et ses, mis et mes peuvent être considérées comme également bonnes et correctes. À quelques mots d’intervalle, le scribe emploie l’une et l’autre (v. 504 et 505, 544 et 546, etc.), et n’en préfère ouvertement aucune. Nous avons choisi les formes sis et mis, qui sont plus employées et ont l’avantage de se distinguer plus nettement des formes plurielles mes et ses.

Vers 40.Volt. O. Si nous avons partout adopté la forme voelt, ce n’est point parce qu’elle est la plus fréquemment employée dans notre manuscrit (21 fois, en y comprenant les formes voet et voel, qui se rencontrent, la première une, la seconde deux fois. Mais volt est employé vingt fois, et la différence n’est pas appréciable). Non ; si voelt nous a paru préférable à volt, si nous l’avons partout imprimé dans notre texte, c’est que la notation oe se retrouve à peu près uniquement dans la phonétique du même verbe. (La forme voel, voell ou voeill, pour volo, se rencontre quatorze fois dans notre ms., sans qu’aucune autre forme lui fasse concurrence ; voelent, quatre fois ; voellet ou voeillet, six fois.) Il semble qu’après cette constatation, nous n’avions plus à hésiter entre voelt et volt.

Vers 42.Vos. O.

Enveius i. O. E nevus u. Mi. Enveiuns i. G. et Mu. Nous avons ici à établir la « Théorie des 1res personnes du pluriel » d’après le manuscrit de la Bodléienne. Le scribe est loin d’avoir partout employé le même système (en ce cas comme en tant d’autres), et nous pouvons, au contraire, constater dans le poëme d’Oxford les trois systèmes qui se sont partagé les textes du moyen âge. Le premier de ces trois systèmes, le plus ancien et le plus étymologique, est représenté par les formes suivantes : Recevrums (v. 1922) ; fuiums (v. 1910) ; durriums (v. 1805) ; poums (v. 1695), etc. Mais on ne tarda pas à s’écarter de ce premier système, en adoptant deux flexions moins étymologiques. Tantôt on supprima l’s finale qui rappelait si bien la terminaison latine, et l’on eut des formes telles que asaldrum (v. 947) ; metrum (v. 952) ; averum (v. 972) ; purum (v. 1007), etc. etc. D’autres fois, au contraire (et cela dans le même texte), on modifia autrement le premier système : l’s fut conservée et l’m moins fortement prononcée fut changée en n : de là, dans notre Chanson, lançuns (v. 2154) ; devuns (v. 1009) ; feruns (v. 1256). Même on ira, dans le Roland, jusqu’à trouver, par le changement de l’u en o, la forme qui l’a décidément emporté sur toutes les autres : avons (v. 1923). Or, de ces trois systèmes, qui se trouvent également dans notre manuscrit, lequel devions-nous adopter ? Celui qui est, de beaucoup, le plus fréquemment adopté, c’est-à-dire le second : asaldrum, avum, etc. ═ Si nous avons ici imprimé enveiums, l’s doit être uniquement considérée comme euphonique, et c’est la seule fois qu’on la trouvera dans notre texte.

Vers 44.Le chefs. O. Erreur évidente.

Vers 45.Perduns. O. Mi. G. Mu. V. la note du v. 42.

L’onur. O. Mi. G. Mu. Nous avons partout préféré la forme honur, parce qu’étant plus étymologique, et ayant été en outre conservée dans notre langue, elle est celle aussi qui est le plus souvent employée dans le manuscrit. L’h, d’ailleurs, n’est pas ici plus aspirée que dans helme : D’osbercs e de helmes e d’espées à or (v. 1798) et dans hom : Bataille funt nostre hum (v. 1,758), etc. Il est donc très-légitime d’écrire l’honur. — Nous l’avons traduit par terre. Honor signifie en général un bien, un domaine ; au nord de la France, il est, par extension, devenu synonyme de fief. On a renoncé à l’opinion qui représentait l’honor du midi de la France comme un bien d’une nature particulière, qui aurait joui des droits féodaux sans en supporter les charges.

La deintet. Ce mot, sur lequel on a discuté, vient de dominitatem, et signifie la seigneurie, le domaine, et par extension les biens.

Vers 46.Seiuns. O. V. la note du vers 42. Nous n’y renverrons plus le lecteur.

= Cunduiz. O. Pour la règle de l’s, il faut cunduit.

Vers 47.Pa ceste. O.

Vers 49. — Sempres. Un certain nombre d’adverbes ont pris une s finale par extension ou analogie : Unkes et unches (v. 2639, 3531, 629, 1638, 1647, etc.) ; primes (v. 1924, 2845) ; alques (v. 95) ; sempres (v. 3721, 3729), etc. etc. Cette s n’a rien d’étymologique.

Vers 50.Francs. O. Il faut Franc. Les substantifs masculins, dérivés des noms de la 2e déclinaison latine, ne prennent pas d’s en français, au cas sujet du pluriel. (V. la note du v. 1.)

Vers 51.Meillor. O. Quoique la forme meillor se rencontre plus souvent dans notre texte que meillur, nous n’avons pas hésité à adopter cette dernière : 1° parce qu’une loi de phonétique tourne en u l’o latin dans la plupart des cas offerts par notre manuscrit ; 2° parce que cette loi s’applique particulièrement, dans notre texte ; à presque tous les mots dérivés des vocables latins en or, oris, ores. Nous ne pouvions manquer ici à une loi générale dont on trouve d’ailleurs plusieurs applications au mot qui nous occupe. (V. meillur et meillurs, v. 620, 1,850.) Notre but est, encore un coup, de restituer le texte d’Oxford tel qu’il aurait été écrit, au même temps et dans le même dialecte, par notre scribe lui-même, s’il eût été plus attentif, plus intelligent et plus instruit.

Vers 52.Ad Ais, à sa capele. Le Palais d’Aix-la-Chapelle, d’après nos vieux poëmes, se composait de douze Palais splendides groupés autour d’un Château plus magnifique encore. Au sommet du Palais principal était un aigle d’or colossal. (Karlamagnus Saga, Ire branche, 12-20, et Richeri Historia, lib. III, § 71, cités par G. Paris en son Histoire poétique de Charlemagne, p. 369.) Quant à la Chapelle, elle avait été construite sur les ordres de l’Empereur avec une incomparable magnificence. Par malheur, quand elle fut achevée, elle se trouva trop petite. Mais Dieu fit un miracle et l’élargit surnaturellement. (Karlamagnus Saga, I, 12, citée par G. Paris, l. I, et Girart d’Amiens, Charlemagne, B. N. ms. fr. 778, f° 105, r°.) Devant le Palais était ce perron, cette masse d’acier sur laquelle les chevaliers essayaient leurs épées. La légende assurait que c’était là l’antique résidence de « Granus », père de Néron, et l’auteur de notre Chanson de Roland, évoquant une tradition meilleure, affirmera tout à l’heure (v. 154) que Dieu, par un nouveau miracle, y fit jaillir une source d’eaux chaudes pour en faire présent à Charlemagne. (Cf. Philippe Mouskes, Chronique rimée, v. 2,410 et ss., et surtout le faux Diplôme présenté par les chanoines d’Aix à Frédéric Barberousse. ═ V. G. Paris, l. I, p. 109, et nos Épopées françaises dont nous venons de résumer deux pages, t. II, pp. 113-115.)

Vers 55.Nos. O. Dans la traduction de ce vers, lire nous au lieu de vous.

Vers 56.Curages. Ce mot peut fort bien ne pas être considéré comme dérivant d’un neutre latin : coraticum. On peut très-légitimement supposer la forme masculine : coraticus, qui explique très-naturellement le vocable français.

Vers 58.Mielz. O. Nous avons partout préféré melz. Melz est la forme la plus ancienne, la plus étymologique. On la trouve moins fréquemment dans notre manuscrit que mielz, mais assez cependant pour justifier ici notre application d’une loi générale sur la suppression de l’i parasite. (V. melz, vers 44, 516, 1091, 1872 ; meilz, v. 536.) Cf. notre note du v. 34 sur bien et ben.

Vers 59.Perduns. O. V. notre note du vers 42.

Vers 60.Aiuns. O.

Vers 61.Issi. Dans tout le texte d’Oxford il y a entre Issi et Ici bien plus qu’une différence orthographique. Issi, partout et toujours, a le sens d’ainsi et dérive d’in-sic. Exemple : Issi est neirs cume peiz (v. 1635). Tut issi cum il sunt (v. 2435). Issi seit cum vus plaist (v. 606), etc. Ici est toujours adverbe de lieu : E ! reis amis, que vus ici nen estes (v. 1697). D’ici qu’en Oriente (v. 401 et 3594). Plus près d’ici (v. 2735). D’ici qu’al nasel (v. 1996). — (Cf. les v. 1956, 3835, etc.)

Vers 62.Marsilie. O. Pour le cas sujet il faut Marsilies.

Vers 63.Clarin. Mu. imprime Clarun ; O. porte très-nettement Clarin. — C’est aussi la leçon de V2., qui reproduit ainsi qu’il suit tout ce passage : Il en apelle Clarin de Balaguer — E Priamus, Galan e Babuer, — Estormarin e Orebe son per — E Loenes e Marprimant de mer — E Blanzardin por sa raison monstrer. Ici, comme ailleurs, V2. se rapproche beaucoup de Vs. et n’en diffère guère que par des variantes orthographiques.

Balaguet. — C’est Balaguer en Catalogne, « le point le plus lointain qu’aient atteint les armes de Roland. » (G. Paris, Revue critique, 1869, n° 37, p. 173.) Roland se vante, en effet, de l’avoir conquis à Charlemagne (v. 200). — Balaguer (Ballegarium, Valaguaria, Bergusia ?) est une place forte à trois lieues de Lerida.

Vers 67.Joüner. Mu. On lit aussi bien, dans le ms., Joïmer.

Vers 68.Blancandrins. O. Pour le cas régime il faut Blancandrin.

Vers 70.Carlemagnes. O.

Vers 71.Cordres. Génin (p. 8), d’Avril (p. 147) et A. de Saint-Albin (p. 20) traduisent par « Cordoue ». Or, Marsile, qui est à Saragosse, envoie des messagers à Charlemagne qui est à Cordres. Les messagers font la route en un jour. S’il s’agissait de Cordoue, il leur aurait fallu traverser toute l’Espagne, et c’était un voyage de plusieurs semaines. Donc, en nous plaçant au point de vue strictement topographique, il n’est pas ici question de la véritable Cordoue. « Il est clair, en effet, que la ville désignée par le nom de Cordres est près des Pyrénées » (G. Paris, Revue critique, 1869, p. 174.) ═ Cette ville joue un très-grand rôle dans toute notre légende épique. L’auteur de ces Notes a découvert, dans le cycle de Guillaume, un poëme inconnu jusqu’à ce jour et auquel il a dû donner pour titre : « La Prise de Cordres. » (B. I. 1448, f° 164, xiiie siècle.) On y raconte la lutte d’Aïmer, frère de Guillaume, contre le roi Butor. Toutefois, ce n’est pas Aïmer, mais Guibert, un autre fils d’Aimeri de Narbonne, qui parvient à vaincre et à tuer le Roi païen. Tous les frères de Guillaume s’emparent ensuite de Cordres, de Séville et de presque toute l’Espagne... Il semble bien ici qu’il s’agisse vraiment de Cordoue. ═ En somme, nos épiques avaient dans la mémoire un certain nombre de noms célèbres, et les décernaient un peu au hasard. L’auteur de la Chanson de Roland est, à beaucoup près, le plus sérieux ; et néanmoins je le crois très-capable d’avoir complètement ignoré la situation de Cordoue, dont il ne savait que le nom et qu’il pouvait fort bien s’imaginer être au nord de l’Espagne.

═ Suivant la Keiser Karl Magnus’s Kronike, « l’Empereur assiégeait un château nommé Flacordes. »

Vers 72.Olives. O. Cf. le vers 80.

Vers 76.Fiez. O. Aucun mot ne se présente peut-être dans notre Chanson sous des formes plus variables. Nous trouvons feu, feus (v. 2680, 885, 3399) ; fiet et fiez (v. 472, 76) ; fieus (v. 315) ; fiu et fius (v. 432, 820). De l’étude de ces différentes formes il résulte que l’i parasite triomphe dans la plupart d’entre elles, ainsi que la diphtongaison eu et ou (fiu et fius devaient se prononcer fiou). ═ Lire feus, pour nous conformer à nos observations précédentes.

Vers 76.Vos. O. ═ Vulderez. O. — V. la note du v. 38.

Vers 77.De ço avum nus assez. Le sens est obscur, ou, pour mieux dire, il se présente deux sens. Les païens, en effet, peuvent s’écrier : « C’est assez ; nous avons bien compris ; » ou : « Des terres ! nous en avons assez. » C’est ce dernier sens qui a été jusqu’ici adopté par tous les traducteurs. V2. et Vs. se contentent de dire : Ben s’en deit hom pener. Une banalité qui n’explique rien.

Vers 78.Marsilie. O. ═ On remarquera que cette laisse masculine est assonancée en ei et qu’elle est fort distincte de la précédente, assonancée en e. Nous avons scrupuleusement respecté dans tout notre texte les formes orthographiques des mots qui terminent les vers et contiennent l’assonance. ═ Nous avions dans le couplet précédent : irez et porterez ; nous avons dans celui-ci : ireiz et portereiz.

Vers 79.Vos. O.

Vers 85.Recevrai. Mu. — V. la note du v. 38.

Vers 87.Avrat. Mu.

Vers 88.Avreiz. Mu. ═ Bon mesagier aurez. V2.

Vers 90. — Au lieu du Roi de Suatilie (?) V2. et Vs. nous offrent : Uns amirals cortois.

Vers 92.Muntez. O. Mu. Lire Muntet, à raison de la règle principale de la déclinaison romane.

Vers 94.Charle. O. Mu. — Parmi les formes multiples que reçoit ce nom (Charles, Carles, Karles, etc.), nous avons choisi celle qui, sans être éloignée de l’étymologie germanique, est, à beaucoup près, la plus fréquemment employée dans notre texte.

Vers 96.Empereres. O. V. la note du v. 1. — Se fait e balz e liez. O. Pour le cas régime, il faut : balt e liet.

═ D’après toutes nos Chansons de geste, comme aussi d’après toutes les autres sources françaises et étrangères, nous allons exposer la « Légende de Charlemagne ». Nous nous arrêterons ici à la grande expédition d’Espagne ; mais, plus tard, dans une dernière note, nous poursuivrons cette « Histoire poétique » jusqu’à la mort du grand Empereur. D’une part, ce sera : Charlemagne avant, et, de l’autre, Charlemagne après Roncevaux. ═ Nous avons dû, pour ce travail, nous servir du tome II de nos Épopées françaises ; mais nous avons pris soin d’adopter ici, avec un tout autre ordre, une forme toute différente et de rectifier un certain nombre d’erreurs. ═ Notre « Légende de Charlemagne » se divisera ainsi qu’il suit : I. Naissance, jeunesse et premiers exploits de Charlemagne. II. Expédition en Italie : Rome délivrée. III. Luttes de l’Empereur contre ses vassaux. IV. Avant la grande expédition d’Espagne. V. L’Espagne. ═ I. Naissance, jeunesse et premiers exploits de Charlemagne. Parmi les légendes relatives à la naissance de Charlemagne, parmi celles du moins qui sont parvenues jusqu’à nous, aucune ne paraît antérieure à la rédaction de la Chanson de Roland. La légende ou plutôt la fable de « Berte aux grands piés » ne s’est point fait jour avant le xiiie siècle, et c’est le poëme d’Adenès qui la mit le plus en lumière... « Berte, fille de Flore, roi de Hongrie et de Blanchefleur, est demandée en mariage par Pépin. (Berte, poëme composé vers 1275, édit. P. Paris, pp. 7-9.) Elle arrive, joyeuse, à Paris ; mais y est tout aussitôt circonvenue par des traîtres. Craignant que son mari ne la tue durant la nuit des noces, elle permet, elle demande à la perfide Aliste de prendre sa place dans le lit nuptial (Ibid., pp. 16-19) ; mais, victime de sa crédulité, la pauvre reine est chassée comme une inconnue, et c’est Aliste qui va longtemps passer pour Berte. (Ibid., pp. 19-26.) On connaît le reste. La véritable reine va, comme Geneviève de Brabant, se réfugier au fond des bois (Ibid., p. 32) ; elle pense y mourir de peur, de froid et de faim (Ibid., pp. 41-52, etc.), et, recueillie par un pauvre voyer, nommé Simon (Ibid., pp. 64-68), elle est, au bout de quelques années, reconnue enfin par son mari (Ibid., pp. 148-153), qui a depuis longtemps découvert la trahison d’Aliste. (Ibid., pp. 88-132.) Quelques mois après, naît Charlemagne. (Ibid., p. 180.) » Telle est la légende, sous sa forme définitive. ═ La « Chronique Saintongeaise » du commencement du xiiie siècle, est la première à en parler. ═ Le Charlemagne de Venise, du xiiie siècle (Mss. fr. de Venise, n° xiii), la reproduit aussi, mais en rattachant la serve Aliste à toute la famille, à toute la « geste des traîtres ». ═ Philippe Mouskes (vers 1240) donne une raison obscène au refus que fait Berte elle-même d’entrer au lit nuptial. ═ La Gran Conquista de Ultramar (fin du xiiie siècle) ne modifie pas la version d’Adenès. ═ Les Reali (vers 1350) et le roman de Berte en prose ( Berlin, Mss. fr., n° 130, prem. moitié du xve siècle) ajoutent quelques traits, plus anciens sans doute, à la Berte d’Adenès, qui cependant avait été composée vers l’an 1275. ═ La « Chronique de Weihenstephan » (xive siècle), précédée ici par le Karl de Stricker (vers 1230), nous montre Berte se faisant plus rapidement reconnaître par Pépin et le petit Charles élevé comme le fils d’un meunier. ═ Enfin la Chronica Bremensis de Wolter, du xve siècle, peu soucieuse de la dignité de Berte, la fait passer une nuit, dans la cabane d’un paysan, avec Pépin, qui ne l’a pas encore reconnue. (V. G. Paris, Hist. poét. de Charlemagne, p. 228.) ═ En résumé, l’on n’a pensé que fort tard à la mère de Charles, et la légende de son fils était presque achevée, lorsqu’on songea à composer la sienne avec de vieilles histoires, celles-là même qu’on mit plus tard sur le compte de Geneviève de Brabant. Ce travail n’était pas encore commencé quand fut écrite la Chanson de Roland. ═ Pour l’enfance du grand Empereur, la légende est également de formation très-récente. On n’en trouve aucune trace avant la « Chronique de Turpin ». (La rédaction est de 1109-1119, sauf les cinq premiers chapitres.) Les Enfances-Charlemagne de Venise (2e branche du Charlemagne, Mss. français, n° xiii, comm. du xiiie siècle) sont le premier document poétique où l’on fasse enfin de l’enfance du fils de Pépin le sujet d’un « récit à part ». Mais c’est Girart d’Amiens qui a donné à ces fables le plus de corps dans son Charlemagne, poëme très-médiocre du commencement du xive siècle. (B. N. 778, f° 22, v°. — 169, r°.) Les enfances de notre héros, d’après le Charlemagne de Venise et le poëme de Girart d’Amiens, sont faciles à résumer... « Donc, Berte est reconnue comme reine et devient mère de Charlemagne. Mais Pépin avait eu deux enfants de la fausse Berte, d’Aliste : Heudri et Lanfroi ne rêvent que de supplanter le jeune Charles. (Ms. 778, f° 23, r° — 24, r°.) Ils essaient de l’empoisonner, et le mari de Gilain, de cette sœur de Charles, est forcé d’emmener l’enfant en Anjou. Les deux traîtres, peu satisfaits de cette fuite, calomnient le jeune Charles et lui enlèvent toute sa popularité ; puis ils l’attirent à Reims, sous prétexte de l’y faire couronner. (Ibid., f° 24, v°.) Une lutte s’engage dans la salle même du banquet ; le fils légitime de Pépin insulte les bâtards et se refuse à les servir ; on l’arrache à grand’peine à leur fureur (Ibid., f° 27, v° — 28, r°.) Un serviteur fidèle, David, se charge alors de sauver « l’hoir de France ». Ils s’enfuient tous deux du côté de l’Espagne, traversent la Navarre, franchissent les Pyrénées, et, pleins d’effroi, ne s’arrêtent point jusqu’à Tolède. C’est là, c’est parmi les païens que va s’écouler l’enfance de Charles. (Ibid., f° 28, r° — 30, r°.) Pour se mieux cacher, l’enfant prend le nom de « Mainet », si fameux dans toute notre légende. Il se met au service du roi païen Galafre (Ibid., f° 30, 31) et, malgré David, se lance dans la bataille contre l’émir Bruyant, ennemi de Galafre. Il le tue, et on le fait chevalier. (Ibid., f° 32, r° — 35, v°.) Il délivre ainsi Galafre de tous ses ennemis et se prend d’amour pour la belle Galienne, fille du Roi. (Ibid., f° 35, v° — 38, r°.) Le récit de ces amours est charmant. (Ibid., f° 38 — 41, r°.) Cependant Charles ne s’amollit point, attaque et tue Braimant : nouveau triomphe. (Ibid., f° 46, v°.) Enfin il épouse Galienne, qui déjà s’est convertie à la foi chrétienne. (Ibid., f° 50, r°, v°.) C’est en vain que Marsile, frère de Galienne, conçoit pour lui une haine mortelle et essaie de le faire périr : Charles, une fois de plus vainqueur, ne songe désormais qu’à quitter l’Espagne et à reconquérir son royaume. Il commence par délivrer une première fois Rome et la Papauté, menacées par Corsuble. (Ibid., f° 55, r° et v°.) Il fait ensuite son entrée en France, et sa marche n’est qu’une suite de victoires. Heudri et Lanfroi, les deux traîtres, les deux fils de la serve, sont vaincus et châtiés. (Ibid., f° 64, r° — 66, v°.) Charles reste seul roi, mais il a la douleur de perdre sa chère Galienne... » (Ibid., f° 67, v°.) — Tel est ce récit, telle est cette « légende » des Enfances de Charles. Rien n’en transpire avant le xiie siècle. La Chronique de Turpin (cap. xiii et xxi) n’y fait que quelques allusions. ═ Le Charlemagne de Venise (comm. du xiiie siècle) est, par avance, d’accord avec Girart d’Amiens : seulement, les traîtres y sont appelés Landri et Leufroi et se font secourir, à la fin du poëme, par le trop célèbre Girart d’Aufraite. Charles, d’ailleurs, a eu affaire à un pape de la race de Ganelon, et n’a pu sortir d’embarras que grâce à l’appui du roi de Hongrie et au dévouement d’un cardinal dont il fit plus tard un pape. (V. l’analyse de M. Guessard,dans la Bibl. de l’École des Chartes, xviii, 397-402.) ═ Le Renaus de Montauban (xiiie siècle) nous offre à peu près la même légende. (Éd. Michelant, p. 266.) ═ Dans la Karlamagnus Saga du xiiie siècle (V. l’analyse de Gaston Paris dans la Bibl. de l’École des Chartes, xxv, 83-93), Charles s’allie, contre Lanfroi et Heudri, avec un voleur du nom de Basin. Caché derrière les rideaux du comte Reinfroi, il entend tout le complot tramé contre lui et le démasque. ═ Renaus de Montauban reproduit aussi cette légende, bien qu’elle s’accorde mal avec la précédente. (Éd. Michelant, pp. 266, 267) ═ Le Karl Meinet (compilation du comm. du xive siècle) raconte une histoire qui se rapproche assez de celle du Charlemagne de Girart d’Amiens, et qu’il emprunte à un Meinet néerlandais des xiie et xiiie siècles : « Haenfrait et Hoderich gagnent la confiance de Pépin, et même passent pour ses fils. Ces bâtards veulent se débarrasser de l’enfant légitime, qui leur échappe en se retirant chez Galafre... » ═ La Cronica general de Espana (xiiie siècle) se hâte, dès l’arrivée de Charles en Espagne, de le mettre en rapport avec Galienne, qu’il rencontre, qu’il délivre de Braimant, et à laquelle il fait connaître son véritable nom. ═ La Gran Conquista de Ultramar (fin du xiiie siècle) et notre Garin de Montglane (prem. tiers du xiiie s.) sont d’accord avec Girart d’Amiens. ═ Les Reali (vers 1350) veulent que les deux Bâtards aient empoisonné Berte, assassiné Pépin et forcé Charles à se faire moine à Saint-Omer. C’est seulement après le récit de ces faits que l’auteur italien se décide à reproduire la légende première. (G. Paris, Hist. poét. de Charlemagne, pp. 239-244) ═ Dans l’Entrée en Espagne (xiiie et xive siècles), il est fait allusion aux amours de Charles et de Galienne, qui étaient devenus une légende très-populaire. (Mss. fr. de Venise, n° xxi, f° 230, r°.) ═ En résumé, on ne trouve aucune trace des « Enfances de Charlemagne » avant le xiie siècle, et il n’y est fait aucune allusion dans la Chanson de Roland.

II. Expédition de Charles en Italie : Rome délivrée. « Un jour, les ambassadeurs du roi de France sont insultés par le roi de Danemark, Geoffroi. Charles, plein de rage, s’apprête à faire mourir le fils et l’otage de Geoffroi, le jeune Ogier, lorsque tout à coup on lui vient annoncer que les Sarrazins se sont emparés de Rome. (Chevalerie Ogier de Danemarche, poëme du xiie siècle, v. 174-186.) Charles, tout aussitôt, part en Italie, traverse les défilés de Montjeu (Ibid., 191-222), où il est miraculeusement conduit par un cerf blanc (Ibid., 222-283), et s’avance jusque sous les murs de Rome. Le pape Milon, son ami, marche à sa rencontre et lui fait bon accueil. (Ibid., 315-329.) Corsuble cependant, le Sarrazin Corsuble est maître de Rome, et n’aspire qu’à lutter contre les Français. (Ibid., 284-299 et 330-383.) Une première bataille s’engage. (Ibid., 384-423 et 448-467.) L’Oriflamme va tomber au pouvoir des païens, quand Ogier intervient et relève, par son courage et sa victoire, la force abattue des Français. (Ibid., 468-681.) On l’acclame, on lui fait fête, on l’arme chevalier. (Ibid., 682-749.) C’est alors que les Sarrazins s’apprêtent à opposer, dans un duel décisif, leur Caraheu à notre Ogier. (Ibid., 851-961.) Le succès est un moment compromis par les imprudences de Charlot, fils de l’Empereur. (Ibid., 1075-1224.) Néanmoins le grand duel entre les deux héros se prépare, et l’heure en va sonner (Ibid., 1225-1537) : Gloriande, fille de Corsuble, en sera le prix. Une trahison de Danemont, fils du roi païen, retarde la victoire d’Ogier, qui est fait prisonnier. (Ibid., 1538-2011.) Mais les Français n’en sont que plus furieux. Un grand duel, qui doit tout terminer, est décidé entre Ogier et Brunamont, le roi de « Maiolgre ». (Ibid., 2525 et suiv.) Ogier est vainqueur (Ibid., 2635-3041) ; Corsuble s’éloigne de Rome (Ibid., 3042-3052) et Charles fait dans la grande ville une entrée triomphale. Il a la générosité d’épargner Caraheu et Gloriande (Ibid., 3053-3073) et, chargé de gloire, reprend le chemin de la France. » (Ibid., 3074-3102.) ═ Telle est la version attribuée au vieux Raimbert de Paris (xiie siècle) et reproduite, avec amplification, par Adenès en ses Enfances Ogier (seconde moitié du xiiie siècle). ═ Le Charlemagne de Venise (comm. du xiiie siècle) nous offre une troisième forme de la même légende, qui ne diffère pas notablement des deux premières... C’est Dieu lui-même qui, par un ange, ordonne à Charles l’expédition d’Italie. Ogier n’est ici qu’un écuyer inconnu ; Caraheu reçoit le nom de Caroer, et il meurt à la fin du Roman, etc. ═ La Karlamagnus Saga, du xiiie siècle (en sa 3e branche) ; les remaniements en vers (Bibl. de l’Ars., B. L. F., 190, 191, xive siècle) et en prose (Éditions incunables qui reproduisent la version du manuscrit précédent) ; les Conquestes de Charlemagne, de David Aubert (1458), n’apportent à la légende aucune variante considérable. ═ Cette même légende n’a laissé aucune trace dans la Chanson de Roland, où cependant Ogier joue un rôle très-important (sans être toutefois compté au nombre des douze Pairs). Ogier est néanmoins un personnage historique, et sa légende s’est formée bien avant le xiiie siècle. Dans l’histoire poétique de Charlemagne, c’est l’élément le plus antique que nous ayons rencontré jusqu’ici. ═ Les Enfances Ogier nous ont parlé fort longuement d’une première expédition en Italie : Aspremont, plus longuement encore, nous fait assister à une seconde campagne de l’Empereur par delà les Alpes. C’est donc ici qu’il convient de résumer Aspremont... « Charles tient sa cour un jour de Pentecôte. (Édit. Guessard, pp. 2 et 3, v. 1-5.) Soudain, un Sarrazin arrive et défie solennellement le Roi au nom de son maître Agolant. L’ambassadeur païen s’appelle Balant. (Ibid., p. 4, v. 9 et suiv.) Charles pousse son cri de guerre, et la grande armée de France se met en route vers l’Italie. La voilà qui passe à Laon. (Ibid., p. 11, v. 77 et suiv.) Or, à Laon était enfermé le neveu de Charles, qu’on ne voulait pas encore mener à la guerre : il n’avait que 12 ou 15 ans. Roland s’échappe et rejoint l’armée. (Ibid., pp. 13-16.) Charles envoie Turpin demander aide au fameux Girart de Fraite, qui d’abord répond par un refus insolent, et veut assassiner l’Archevêque (Ibid., pp. 17-18) ; mais qui, sur les conseils pressants de sa femme, se décide à marcher au secours de l’Empereur. (B. N. Ms. 2495, f° 85, r° — 87, r°.) Alors toute l’armée franchit les Alpes et traverse l’Italie ; car c’est la Calabre qui doit être le théâtre de la grande lutte. Agolant, le roi païen, a un fils nommé Yaumont, qui est le héros du poëme. Yaumont lutte avec Charles et est sur le point de le vaincre, quand arrive Roland, qui tue le jeune Sarrazin et s’empare de l’épée Durendal. (B. N. Ms. Lavall., 123, f° 41, v° — 43, r°.) La guerre cependant n’est pas finie : il faut que saint Georges, saint Maurice et saint Domnin descendent dans les rangs des chrétiens et combattent avec eux (Ibid., f° 64, v° — 65, r°) ; il faut que Turpin porte au front de l’armée le bois sacré de la vraie croix ; il faut que Dieu, par un miracle sans pareil, donne à ce bois l’éclat du soleil ; il faut, à côté de ces efforts célestes, tout l’effort humain de Charlemagne, de Roland et de Girart, pour qu’enfin les Sarrazins soient vaincus. (Ibid., f° 65, 2° et suiv.) Agolant meurt alors sous les coups de Claires, neveu de Girard (Ibid., f° 81, v°) ; Girard lui-même s’empare de Rise (Ibid.), et l’on donne le royaume d’Agolant à Florent, neveu du roi de Hongrie. » (Ibid., f° 81, v° — 87.) ═ Les débuts de Roland sont autrement racontés, comme nous le verrons ailleurs, par l’auteur de Girars de Viane, par le Charlemagne de Venise, par Renaus de Montauban. ═ Les Reali sont conformes au récit précédent, mais lui donnent une Suite où Girart de Fraite est représenté sous les traits d’un renégat furieux, que ses fils sont forcés d’enfermer dans une tour. ═ Quant à l’Agolant de la Chronique de Turpin (de 1109 à 1119), il n’a rien de commun avec celui de la Chanson d’Aspremont. Tout d’abord il règne en Espagne, et non pas en Italie. En second lieu, c’est quelque temps avant Roncevaux que le faux Turpin place l’action de sa lutte avec Charles. Le roi païen tue 40,000 chrétiens ; une première fois vaincu, il se réfugie dans Agen ; mais il est encore battu à Taillebourg, puis à Saintes. C’est alors qu’il repasse les Pyrénées, et qu’il est définitivement vaincu et tué sous les murs de Pampelune. (V. les Épopées françaises, t. II, pp. 68-69.) Quoi qu’il en soit et pour en revenir à Aspremont, le dénoûment de ce poëme est le même que celui des Enfances Ogier : c’est l’Italie et Rome délivrées des païens.

III. Luttes de Charlemagne contre ses vassaux : 1° Girart de Viane. « Garin de Montglane, avec ses quatre fils, Renier, Mille, Hernault et Girart, est tombé dans une misère profonde. (Girars de Viane, poëme du commencement du xiiie siècle, éd. P. Tarbé, pp. 4-7.) Les Sarrazins entourent son château que baigne le Rhône ; mais ses fils le délivrent (Ibid., pp. 6-9) et se lancent dans les aventures. (Ibid., pp. 9-10.) Girart arrive à Reims pour se mettre au service de Charles avec son frère Renier. (Ibid., pp. 11-20.) Adoubés par l’Empereur (Ibid., pp. 20-21), ils lui rendent en effet mille services dont ils se font trop bien payer (Ibid., pp. 24-30), et Girart devient l’ennemi mortel de Charlemagne, qui lui avait d’abord promis la duchesse de Bourgogne en mariage, et avait fini par l’épouser lui-même. La nouvelle Impératrice, irritée contre Girart, lui fait baiser son pied, quand le jeune vassal pense baiser celui de l’Empereur. De là, toute la lutte qui va suivre. (Ibid., pp. 31-41.) Une guerre terrible s’engage entre les fils de Garin et Charlemagne. (Ibid., pp. 51-66.) Les deux héros de cette guerre seront, d’une part, Olivier, fils de Renier et neveu de Girart ; de l’autre, Roland, neveu de Charles. Aude, la belle Aude, sœur d’Olivier, devient l’amante de Roland : nouvelle complication, qui donne un intérêt plus vif à cette légende héroïque dont le principal épisode est le siége de Vienne. (Ibid., pp. 66-105.) La guerre devenant interminable, on se résout à l’achever par un combat singulier entre Olivier et Roland. (Ibid., pp. 106 et ss.) Le combat est admirable, mais demeure indécis. (Ibid., pp. 133-154.) Bref, la paix est faite ; Girart se réconcilie avec Charles ; Aude est promise à Roland, et l’on part pour Roncevaux. (Ibid., pp. 155-184.) » ═ 2° Les quatre fils Aymon... « Charles tient cour plénière. Il se plaint de la rébellion de Doon de Nanteuil et de Beuves d’Aigrement : même il s’apprête à rassembler contre ce dernier toutes les forces de son empire. (Renaus de Montauban, poëme du xiiie siècle, mais dont il a existé des rédactions antérieures ; édit. Michelant, pp. 1-3.) Aymon de Dordone, qui est un autre frère de Beuves, proteste courageusement contre la colère de l’Empereur. Charles le menace, et Aymon se retire fièrement de la Cour avec tous ses chevaliers. C’est ici que commence la lutte entre l’Empereur et le duc Aymon, qui est soutenu par ses quatre fils, Renaud, Alard, Guichard et Richard. (Ibid., p. 3, v. 8-30.) Le roi de France, pour mettre fin à cette guerre, envoie à Beuves d’Aigremont un ambassadeur que le rebelle met à mort. (Ibid., pp. 3-8.) Un second messager, qui est le propre fils de Charles, Lohier lui-même, est envoyé au terrible Beuves. Son insolence le perd, et Lohier meurt dans une bataille qui a pour théâtre le château de Beuves. (Ibid., pp. 8-16.) Désormais la guerre est inévitable ; elle commence. (Ibid., pp. 19-27.) Le duc Beuves échoue devant Troyes, et une défaite de l’armée féodale suffit pour anéantir toutes les espérances des coalisés. (Ibid., pp. 30-37.) Charles pardonne à ses ennemis, mais fait assassiner le duc Beuves, qui s’acheminait vers Paris. (Ibid., pp. 37-44.) Aymon, lui, fait la paix assez bassement avec l’assassin de son frère ; Doon de Nanteuil et Girart de Roussillon font de même. La guerre semble finie. (Ibid., pp. 44-45.) Là-dessus, les quatre fils Aymon viennent à la cour de Charles et y sont faits chevaliers, adoubés. (Ibid., pp. 45-47.) Leur fortune semble assurée, quand certaine partie d’échecs vient tout changer. Le neveu de l’Empereur, Bertolais, joue avec Renaud : survient une dispute et, d’un coup d’échiquier, Renaud tue son adversaire. (Ibid., pp. 51, 52.) Le meurtrier et ses trois frères s’enfuient au plus vite de la Cour où ils sont menacés. Leur père est le premier à les abandonner. Leur mère, leur mère seule leur demeure fidèle. Ils se retirent dans la vieille forêt des Ardennes. (Ibid., pp. 52, 53.) C’est là qu’ils vont se cacher durant sept ans ; c’est là que va commencer leur « grande misère ». Ils sont poursuivis par Charlemagne, qui fait le siége de leur château de Montrésor. Un traître est sur le point de le livrer à l’Empereur, et les fils du duc Aymon, affamés, sont forcés de s’éloigner de ces murs où pendant cinq années ils ont arrêté l’effort de tout l’Empire. (Ibid., pp. 53-74.) Ils errent dans la grande forêt, et le cheval de Renaud, Bayard, leur vient en aide par sa force et son agilité merveilleuses. (Ibid., pp. 74-85.) Mais la faim les éprouve de plus en plus ; tous leurs chevaliers meurent ; ils vont mourir aussi. (Ibid., pp. 85, 86.) Leur mère, qui a quelque peine à les reconnaître dans ce misérable état, leur offre en vain l’hospitalité. (Ibid., pp. 87-89.) Ils sont forcés de se remettre en route, chassés par leur propre père, et s’acheminent vers le Midi, où les mêmes aventures les attendent. (Ibid., pp. 89-96.) Le roi Yon, qui régnait à Bordeaux, les voit un jour arriver dans cette ville avec leur cousin, le fameux enchanteur Maugis. (Ibid., pp. 96, 97.) Les nouveaux venus aident le roi de Gascogne dans sa lutte contre les Sarrazins, et délivrent une fois de plus la Chrétienté envahie. (Ibid., pp. 97-107.) Cependant Charlemagne les menace toujours, et ils se construisent un château (Mont des Aubains ou Montauban). C’est là qu’ils espèrent pouvoir résister à Charles. (Ibid., pp. 107-111) Renaud, en attendant la guerre probable, épouse la sœur du roi Yon. (Ibid., pp. 111-114.) À peu de temps de là, Charles, revenant d’Espagne, aperçoit le château de Montauban. Fou de jalousie et de rage, il en prépare le siége. Roland y prend part et rivalise avec Renaud. La lutte éclate, elle se prolonge, elle est terrible. (Ibid., pp. 114-144.) Mais le roi Yon lui-même trahit les quatre frères, et ils sont sur le point de tomber entre les mains des chevaliers de l’Empereur. Un combat se livre : Renaud y fait des prodiges. (Ibid., pp. 142-192.) C’est Ogier qui est chargé d’exécuter les ordres de Charles contre les quatre frères, mais il rougit de seconder une trahison : Maugis, alors, délivre les quatre frères. (Ibid., pp. 192-219.) Renaud, en vassal fidèle, désire d’ailleurs se réconcilier avec Charlemagne. (Ibid., pp. 230-246.) Mais, hélas ! les ruses et les enchantements de Maugis ont irrité l’Empereur ; et il exige qu’on lui livre le magicien. (Ibid., pp. 249-254.) Sur ces entrefaites, Richard, frère de Renaud, tombe au pouvoir de l’Empereur, qui le veut faire pendre. Mais les douze Pairs se refusent nettement à exécuter cette sentence (Ibid., pp. 254-267), et Renaud, averti par son bon cheval Bayard, délivre son frère. La lutte recommence avec une rage nouvelle. (Ibid., pp. 267-285.) Nouvelles ruses de Maugis, nouvelles batailles : Charles devient le prisonnier de Renaud, qui se refuse à tuer son seigneur. (Ibid., pp. 285-337.) L’Empereur ne sait pas reconnaître une telle générosité et assiége de nouveau Montauban, où la famine devient insupportable. Par bonheur, un mystérieux souterrain sauve les quatre frères. (Ibid., pp. 337-362.) Cependant la guerre est loin d’être finie : il faut que Richard de Normandie soit fait prisonnier par les rebelles ; il faut que les Pairs forcent l’Empereur à conclure la paix ; il faut qu’ils aillent jusqu’à abandonner Charles. (Ibid., pp. 362-398.) Enfin la paix est faite, et elle est définitive. Renaud s’engage à faire un pèlerinage à Jérusalem, et arrive dans la Ville sainte au moment même où elle est attaquée par les Sarrazins. Il la délivre (Ibid., pp. 403-417), et refuse d’en être le roi. (Ibid., pp. 407, 408.) Il revient en France ; mais sa femme est morte, mais ses fils sont menacés par toute la famille de Ganelon et d’Hardré ! Il a la joie d’assister à leur triomphe. (Ibid., pp. 418-442.) C’est alors que, dégoûté des grandeurs humaines, il s’échappe un jour de son château et va, comme maçon, comme manœuvre, offrir humblement ses services à l’architecte de Cologne. (Ibid., pp. 442-445.) Sa force et son désintéressement excitent la jalousie des autres ouvriers, qui le tuent. (Ibid., pp. 445-450.) Mais Dieu fait ici un grand prodige : le corps de Renaud, jeté dans le Rhin, surnage miraculeusement au milieu de la lumière et des chants angéliques ; puis, comme un autre saint Denis, il guide lui-même jusqu’à Trémoigne les nombreux témoins de ce miracle. (Ibid., pp. 450-454.) C’est plus tard seulement qu’on reconnut le fils du duc Aymon, dont l’intercession faisait des miracles, et saint Renaud, canonisé populairement, reçut les honneurs dus aux serviteurs de Dieu. » (Ibid., pp. 454-457.) ═ 3° Ogier de Danemark. « Ogier était le fils de ce roi de Danemark qui avait jadis outragé les messagers de Charles. Otage de son père, il avait été retenu prisonnier par l’Empereur, qui même voulait le faire mourir. Nous avons vu plus haut comment il avait mérité le pardon de Charlemagne en combattant contre les Sarrazins envahisseurs de Rome, en luttant contre Caraheu et Danemont. (Chevalerie Ogier de Danemarche, poëme de Raimbert, xiie siècle, 174-3102.) Le Danois, vainqueur, se repose depuis longtemps à la cour de Charlemagne. Mais une partie d’échecs va changer sa fortune, et il en est de lui comme de Renaud de Montauban. Son fils, Baudouinet, est tué par le fils de l’Empereur, Charlot, qu’il a fait échec et mat. (Ibid., vers 3152-3180.) Ogier l’apprend ; Ogier veut tuer le meurtrier ; mais, assailli par mille Français, il est forcé de s’enfuir et va jusqu’à Pavie demander asile au roi Didier, qui le fait gonfalonier de son royaume. (Ibid., 3181-3541.) Charlemagne le poursuit jusque-là et réclame du roi lombard l’expulsion du Danois : Ogier jette un couteau à la tête de l’ambassadeur impérial. (Ibid., 4074-4288.) Charles veut se venger à tout prix. Les Lombards défendent Ogier : guerre aux Lombards. Une formidable bataille se livre entre les deux armées, entre les deux peuples. Didier s’enfuit ; Ogier reste avec cinq cents hommes devant tout l’effort de l’armée française. Sa résistance est héroïque, mais inutile. Il est forcé de se retirer devant cent mille ennemis. (Ibid., 4534-5883.) C’est pendant cette fuite, ou plutôt durant cette retraite, que, devenu tout à fait fou de colère, Ogier égorge lâchement Amis et Amiles. (Ibid., 5884-5891.) Mais la poursuite continue, continue toujours. Par bonheur, Ogier a un admirable cheval, Broiefort, qui prend enfin son galop à travers ces cent mille hommes et sauve son maître cerné dans un château. Le Danois parvient à s’enfermer dans Castelfort : le siége de Castelfort va commencer. (Ibid, 5892-6688.) Dans ce château Ogier est seul, tout seul, et il a devant lui toute l’armée de Charlemagne. Son ami Guielin a succombé, tous ses chevaliers sont morts, et c’est l’Occident tout entier qui semble conjuré contre le seul Danois. (Ibid., 6689-8374.) Ne pouvant rien par la force, il essaie de la ruse, et il fabrique en bois de nombreux chevaliers qui étonnent l’ennemi et l’arrêtent. Malgré tout, il va mourir de faim et sort de ce château. Il en sort pour égorger l’Empereur, et essaie en réalité d’assassiner Charles, qui cependant s’est montré pour lui plein de générosité et de douceur. Mais, de nouveau poursuivi, Ogier est enfin fait prisonnier, et le voilà captif à Reims. (Ibid., 8375-9424.) Charles veut l’y laisser mourir de faim ; mais Turpin sauve le Danois, dont la captivité ne dure pas moins de sept années. L’Empereur le croit mort... (Ibid., 9425-9793.) La France cependant est menacée d’un épouvantable danger : elle est envahie par le Sarrazin Brehus : Ogier seul serait en état de la sauver, et c’est alors que Charles apprend que le Danois vit encore. (Ibid., 9794-10082.) L’Empereur tombe aux genoux de son prisonnier, de son ennemi mortel, et le supplie de sauver la France. Mais Ogier est implacable, et n’y consent qu’à la condition de tuer de sa propre main Charlot, auteur de la mort de son fils. (Ibid., 10081-10776.) Et déjà, en effet, il lève son épée sur le malheureux fils de Charlemagne, quand un ange descend du ciel pour empêcher ce meurtre. On s’embrasse, on s’élance au-devant de Brehus. (Ibid., 10870-11038.) Les Sarrazins sont battus ; Brehus est tué par Ogier, qui a vainement cherché à le convertir. (Ibid., 11039-12969.) Le Danois, décidément réconcilié avec Charlemagne, épouse la fille du roi d’Angleterre, qu’il a délivrée des infidèles. Il reçoit de l’Empereur le comté de Hainaut, et c’est là qu’il finit ses jours en odeur de sainteté. Son corps est à Meaux. » (Ibid., 12970-13042.) ═ Toute cette légende d’Ogier s’est formée en même temps que celle de Roland, et elle était presque achevée quand fut écrite notre Chanson. Mais ce sont là, notons-le bien, deux Cycles différents, et qui n’ont eu entre eux aucune communication notable. Les deux légendes se sont formées chacune de leur côté, très-indépendantes l’une de l’autre. On en peut dire autant, dans une certaine mesure, de Renaus de Montauban et de Girars de Viane. C’est ainsi, d’ailleurs, qu’il faut comprendre le mot « cycle ». ═ 4° Jean de Lanson. « Jean de Lanson est un neveu de Ganelon, un petit-fils de Grifon d’Hautefeuille : il est de la race des traîtres. Il possède la Pouille, la Calabre, le Maroc, qu’il a reçus de Charlemagne. Tant de bonté n’a pas désarmé la haine qu’il porte à l’Empereur, et il ne cesse de conspirer contre lui. Il offre à sa cour un asile au traître Alori, qui a assassiné Humbaut de Liége. Cette dernière insulte met à bout la patience de Charles, et il envoie à Jean de Lanson les douze Pairs pour le défier. (Jehan de Lanson, poëme du commencement du xiiie siècle, qui n’a d’ailleurs aucune racine dans la tradition, Ms. de l’Arsenal, B. L. F. 186, f° 108 et ss.) Les douze Pairs traversent toute l’Italie, et se voient menacés par les traîtres à la tête desquels est Alori. (Ibid., f° 121.) Par bonheur les messagers de Charles ont avec eux l’enchanteur Bazin de Gênes, qui, autre Maugis, emploie mille ruses pour déjouer les projets d’Alori. (Ms. de la B. N. 2,495, f° 1-13, v°.) C’est en vain que Jehan de Lanson oppose Malaquin à Bazin, magicien à magicien : Bazin parvient à restituer aux douze Pairs leurs épées qui leur avaient été habilement volées (Ibid., f° 14, v°), et trouve, à travers mille aventures, le secret de pénétrer en France, à Paris, où il avertit l’Empereur de la détresse de ses messagers. (Ibid., f° 15-29.) Charles réunit son armée : il marche sur la Calabre et, vainqueur dans une première bataille, met le siége devant Lanson. (Ibid., f° 29-55.) Encore ici, Bazin lui vient en aide. Il endort tous les habitants du palais de Lanson et le duc Jean lui-même. Charles pénètre dans ce château enchanté et délivre les douze Pairs depuis trop longtemps prisonniers... » (Ibid., f° 55-64 v°.) Ainsi se termine ce poëme curieux, œuvre purement littéraire et où la légende ne tient aucune place.

IV. Avant la grande expédition d’Espagne : 1° Charlemagne en Orient. « L’Empereur est à Saint-Denis. Il se met la couronne en tête et ceint son épée : « Connaissez-vous, dit-il à l’Impératrice, un chevalier, un roi auquel la couronne aille mieux ? — Oui, répond-elle imprudemment, j’en connais un : c’est l’empereur Hugon de Constantinople. » (Vers 1-52 ; 58 et suiv. du Voyage à Jérusalem et à Constantinople, première partie du xiie siècle.) Charles, brûlé de jalousie, veut aller voir ce roi si bien coiffé. Il part avec les douze Pairs, et va d’abord à Jérusalem pour adorer le Saint-Sépulcre. Suivi de quatre-vingt mille hommes, il arrive dans la Ville sainte. (Ibid., v. 67-108.) Reconnu par le Patriarche, Charles reçoit de lui la sainte couronne, un des clous, le calice eucharistique et du lait de la Vierge. L’attouchement de ces reliques guérit un paralytique : leur authenticité est, par là, mise en lumière. (Ibid., 113-198.) L’Empereur quitte enfin Jérusalem et se dirige vers Constantinople, après avoir fait vœu de chasser les païens de l’Espagne. (Ibid., 221-332.) Charles traverse l’Asie et arrive enfin à Constantinople, où il est gracieusement accueilli par l’empereur Hugon. (Ibid., 262-403.) Par malheur, les barons français ne se montrent pas assez reconnaissants de cette hospitalité, et se livrent, pendant toute une nuit, à des plaisanteries, à des gabs, où l’empereur et l’empire d’Orient sont fort insolemment traités. Ces forfanteries sont rapportées à Hugon, qui s’irrite contre les Français et les met en demeure de réaliser leurs gabs. (Ibid., 446-685.) C’est alors que Dieu envoie un ange au secours de Charles fort embarrassé ; c’est alors aussi que les plaisanteries des douze Pairs reçoivent, malgré leur immoralité, un commencement d’exécution. Hugon se déclare satisfait et tombe aux bras de Charles. (Ibid., 686-802.) Bref, la paix est faite, et Charles peut enfin partir en Occident. Il rapporte en France les reliques de la Passion. » (Ibid., 803-859.) ═ Cependant Olivier, pendant la fameuse nuit des gabs, avait déshonoré la fille de l’empereur Hugon, et en avait eu un fils. C’est ce fils, du nom de Galien, qui se met plus tard à la recherche de son père et qui le retrouve enfin sur le champ de bataille de Roncevaux, au moment où l’ami de Roland rend le dernier soupir. (V. le roman en prose de Galien, Bibl. de l’Arsenal, 226, analysé dans le t. II des Épopées françaises, pp. 282-287. Cf. les éditions de Galien le rhétoré, 1500, Verard, etc.) ═ La légende du voyage de Charlemagne à Jérusalem et à Constantinople n’apparaît pas avant le Benedicti Chronicon, œuvre d’un moine du mont Soracte, Benoît (mort vers 968), qui s’est contenté de falsifier un passage d’Eginhard, en substituant le mot Rex aux mots : Legati regis. Nous avons été le premier à le démontrer. (Épopées, II, 265, 266.) ═ D’après une légende latine anonyme, composée vers 1060-1080 (Descriptio qualiter Carolus Magnus clavum et coronam Domini a Constantinopoli Aquisgrani attulerit qualiterque Carolus Calvus hæc ad Sanctum Dionysium retulerit), le Patriarche de Jérusalem est chassé de sa ville par les Sarrazins, et vient réclamer l’aide de l’empereur d’Orient. Mais c’est à Charles qu’est réservée la gloire de venger la cause de Dieu. Un songe en avertit l’empereur de Constantinople, et celui-ci en prévient tout aussitôt le roi des Franks. Sans hésiter, il part, il arrive en Terre-Sainte, y est miraculeusement protégé, bat les païens et délivre Jérusalem. Pour prix d’un tel service, il demande les saintes reliques. On les lui délivre, et vingt miracles attestent l’authenticité du saint suaire, des langes et surtout de la sainte couronne : les aveugles voient, les sourds entendent, les malades sont guéris. Chargé de ce trésor, Charles revient en France. ═ La « Chronique de Turpin » ne fait à ce fameux voyage qu’une allusion en passant. (Cap. xx.) ═ La légende, dès lors, se répand partout avec une autorité de plus en plus considérable. Pierre Comestor fait honneur à Charlemagne de la translation à Charroux d’une relique célèbre. Gui de Bazoches (fin du xiie siècle) dit que Charlemagne est réellement l’auteur de la première croisade, et cette idée est répétée par Hélinand, Vincent de Beauvais et Marino Sanuto. ═ La Karlamagnus Saga du xiiie siècle, résumée au xve dans le livre danois : Keiser Karl Magnus’s Kronike, raconte très-gravement un voyage de Charlemagne en Orient où il n’est pas question des gabs... Charles fait vœu de visiter le Saint Tombeau : il revient, en effet, par Constantinople, mais c’est pour la délivrer des Sarrazins. Il en rapporte le saint suaire et surtout la pointe de la lance dont fut percé le côté de Jésus-Christ. Il est certain que la Saga reproduit ici un vieux poëme. ═ Mais dans une autre branche (la septième), elle reproduit en outre le poëme que nous avons précédemment analysé. ═ Philippe Mouskes ajoute (vers 10022 et suiv.) quelques nouvelles reliques à celles qu’ont énumérées les précédents auteurs. ═ Girart d’Amiens, dans un passage malheureusement mutilé de son Charlemagne, raconte une véritable Croisade du grand empereur. ═ Le Ms. 226 de l’Arsenal reproduit, à peu de chose près, notre Voyage du xiie siècle. Seulement, — alors que Charles quitte Jérusalem pour aller à Constantinople avec de nombreuses reliques, — les pèlerins sont attaqués par deux mille Sarrazins que commande Braimant. Naimes est d’avis de ne pas tenter une résistance impossible ; mais les jeunes Pairs se précipitent sur les païens. Charles, lui, se contente de s’agenouiller : sa prière est tout aussitôt exaucée, et tous les Sarrazins sont changés en statues de pierre. ═ David Aubert, dans ses Conquestes de Charlemagne, reproduit à peu près, et en la délayant, la version de la Légende anonyme de 1080... ═ « Charlemagne, qui était allé en personne visiter l’Orient, y envoya une autre fois ses grands barons (douze comtes). Le chef de cette ambassade est Simon de Pouille. (Simon de Pouille, poëme de la fin du xiiie s. Ms. 368 de la B. N., f° 144, v°, col. 3.) Les Douze arrivent à Jérusalem, adorent le Saint Sépulcre ; mais, au sortir de la Ville sainte, ils sont faits prisonniers par l’émir Jonas et les Sarrazins. Par bonheur, le sénéchal de Jonas, Sinados, se convertit fort à propos pour les douze Compagnons, qui peuvent s’enfermer et se défendre dans le château d’Abilent. (Ibid., f° 144-149.) Les Français, grâce à une ruse de Simon de Pouille, parviennent à rejoindre leur allié Sinados. (Ibid., f° 149-154.) Cependant, et malgré, toutes leurs victoires, les chrétiens vont mourir de faim (Ibid., f° 155) et demandent en vain du secours au roi de Jérusalem. (Ibid., f° 156-159.) Mais ils peuvent enfin faire parvenir un message à Charles. (Ibid., f° 159.) Une dernière bataille rend les Français maîtres de la situation. Ils sont aidés par deux mille chevaliers que Charles leur envoie de France : Sinados est baptisé et devient, après la mort de Simon, le suzerain de la Calabre et de la Pouille. » (Ibid, f° 159-160, et Ms. de Londres, analysé par Fr. Michel, en son Charlemagne, pp. civ-cviii.) ═ 2° Charlemagne en Bretagne. « Acquin, empereur des Sarrazins, » s’est rendu maître de la Petite-Bretagne. Il habite le palais de Guidalet ; mais Charlemagne, lassé de la paix, s’apprête à marcher contre les envahisseurs norois. (Acquin, poëme de la fin du xiie siècle, conservé dans un Ms. détestable du xve, B. I. 2233, f° 1, r°.) Charles arrive à Avranches et s’installe à Dol. « Commençons la guerre, » dit l’Archevêque. (Ibid., f° 1, v° — 3, r°.) La situation des chrétiens est difficile. Une ambassade est, par le conseil de l’archevêque de Dol, envoyée à Acquin par Charlemagne. Les messagers de l’Empereur, insolents comme toujours, sont sur le point d’être tués par les Sarrazins ; mais la femme du roi païen intercède en leur faveur. (Ibid., f° 37° — 7, v°.) Naimes est d’avis de commencer immédiatement la guerre et de mettre le siége devant Guidalet. Dans me première bataille, les chrétiens sont vainqueurs. (Ibid., f° 7, v° — 16, r°.) Leurs pertes sont d’ailleurs considérables, et le père de Roland, Tiori, meurt sur le lieu du combat. Malgré tout, les Français s’emparent de Dinart et investissent Guidalet. Le siége est long et rude. Même un jour, l’armée de Charles est surprise et vaincue. (Ibid., f° 16, 7° — 30, r°.) Naimes n’échappe à la mort que grâce à un miracle. (Ibid., f° 31-33.) Mais Guidalet tombe enfin au pouvoir des Bretons et des Français, et Gardainne est miraculeusement anéantie par un orage envoyé de Dieu. (Ibid., f° 33 — 50, v°.) Un duel de Naimes et d’Acquin paraît terminer la Chanson : Acquin meurt, et sa femme est baptisée. » (Ibid., f° 50-55.) Dans ce poëme, dont nous ne possédons pas de version complète, l’élément littéraire est plus considérable que l’élément traditionnel. On y rencontre cependant des légendes visiblement antiques ; mais tout a été écrit en dehors de la Chanson de Roland. ═ 3° Fierabras et Otinel. « Charles est, une fois de plus, en guerre avec les païens : même il vient de leur livrer une bataille longuement disputée. (Fierabras, poëme du xiiie siècle, éd. Krœber et Servois, v. 24-45.) Un géant sarrazin, haut de quinze pieds, défie tous les chevaliers de Charlemagne : c’est lui qui a massacré les habitants de Rome et qui, maître du Saint Sépulcre et de Jérusalem, possède toutes les reliques de la Passion : le baume avec lequel Notre-Seigneur fut enseveli, l’enseigne de la croix, la couronne et les clous. (Ibid., v. 50 — 66.) Au défi du païen, c’est Olivier qui répond. Le duel terrible va commencer : il s’engage. (Ibid., 93-368.) Le géant a trois épées, et le baume divin, dont il emporte avec lui plusieurs barils, guérit en un instant toutes les blessures qu’il peut recevoir. Cependant Olivier ne recule point devant un tel adversaire, cherche à le convertir, s’empare des barils miraculeux qu’il jette dans la mer, et porte au Sarrazin un coup vainqueur. Fierabras s’avoue vaincu et demande à grands cris le baptême. (Ibid., 369-449 et ss.) Mais, pendant qu’Olivier emporte le géant blessé, il est cerné par les païens et tombe en leur pouvoir. (Ibid., 1631-1862.) Fierabras, baptisé, devient soudain un tout autre homme : il se fait l’allié des Français et s’apprête à combattre son propre père, l’émir Balant. (Ibid., 1803-1994.) Quant à Floripas, sa sœur, elle ne rêve que de se marier avec Gui de Bourgogne. (Ibid., 2255.) Mais les événements ne tournent pas à l’avantage des chrétiens, et Balant se rend maître de Gui, de Roland, de Naimes et des premiers barons français. (Ibid., 2256-2712.) Floripas entreprend de les délivrer, et y réussit. (Ibid., 2713-5861.) Balant lui-même est fait prisonnier, et, plutôt que de recevoir le baptême, va au-devant de la mort. C’est Floripas elle-même qui, fille dénaturée, se montre la plus impitoyable pour son père : Balant meurt. (Ibid., 5862-5991.) Floripas épouse enfin Gui de Bourgogne et apporte à Charlemagne les reliques de la Passion, qui sont la cause de toute cette lutte. Dieu atteste leur authenticité par de beaux miracles. C’est trois ans après que Ganelon trahit la France et vend Roland. » (Ibid., 5992-6219.) ═ Le Fierabras que nous venons de résumer n’est pas la version la plus ancienne. Suivant l’opinion de M. G. Paris, à laquelle nous rattachons la nôtre, il a existé un roman antérieur, qui pouvait bien avoir pour titre : Balant. Ce poëme, disparu, commençait par le récit d’une prise de Rome que les Sarrazins enlevaient aux chrétiens. Charles arrivait au secours des vaincus, et là se plaçait le combat d’Olivier et de Fierabras. C’était tout. ═ Il est à peine utile d’ajouter que les versions en prose de notre Fierabras n’ont fait que délayer la version en vers. Nous avons ailleurs discuté la question de la priorité du poëme français sur le Fierabras provençal. ═ « Au commencement d’Otinel (xiiie siècle), l’Empereur tient cour plénière à Paris. (Vers 23 et ss.) Survient un messager païen du roi Garsile : « Abandonne ta foi, dit-il à Charles, et mon maître daignera te laisser l’Angleterre et la Normandie. » (Ibid., 137 et ss.) Or ce Garsile avait pris Rome, et son messager lui-même, Otinel, l’y avait singulièrement aidé. (Ibid., 91 et ss.) Roland s’irrite d’un message aussi insolent, et défie Otinel. (Ibid., 211-216.) Entre de tels champions, c’est un duel terrible. Le Ciel y intervient, et, au milieu du combat, Otinel s’écrie : « Je crois en Dieu. » On le baptise, et Charles va jusqu’à lui donner sa fille Bélissende en mariage (Ibid., 262-659) ; Otinel devient alors l’appui de la Chrétienté et l’ennemi de Garsile. (Ibid., 660-1915.) Au milieu de cette guerre, Ogier est fait prisonnier, mais parvient à s’échapper. (Ibid., 1916-1945.) La grande et décisive bataille est à la fin livrée : Otinel tue Garsile, et l’on célèbre joyeusement ses noces avec Bélissende. » (Ibid., 1948-2132.) On voit assez, par cette rapide analyse, qu’Otinel ne contient rien de légendaire, et que c’est une œuvre d’imagination pure. ═ Dans le Karl Meinet, compilation allemande du commencement du xive siècle, « Ospinel », roi de Babylone, défie les douze Pairs et lutte, non pas avec Roland, mais avec Olivier. Il se convertit au milieu du combat, et meurt après s’être fait baptiser. Sa fiancée, Magdalie, fille du trop célèbre Marsile, veut le venger, mais devient la captive de Roland, pour lequel elle se prend trop vite d’un amour ardent. Olivier est forcé d’intervenir et d’arracher Roland à cette affection indigne de celui qui devait épouser la belle Aude. (V. l’édit. Keller et G. Paris, Hist. poét. de Charlemagne, 489-491.) ═ Jacques d’Acqui (fin du xiiie siècle) raconte qu’un géant païen nommé Ottonnel, de la ville d’Attilie, fut, en effet, battu par les chrétiens et converti par Roland. Le Chroniqueur ajoute que Roland lui donna sa sœur Bélissent en mariage, et que cet Ottonnel devint l’un des douze Pairs. Par malheur, Roland frappa d’un coup mortel, au milieu de je ne sais quelle bataille, son beau-frère qu’il ne reconnaissait pas. La sœur de Roland, femme d’Ottonnel, en mourut de douleur. (Hist. poét. de Charlemagne, 505, 506.) On peut, sans témérité, considérer toutes ces fables comme postérieures à la rédaction de notre Roland.

V. L’Espagne. « Charles se repose de tant de guerres et, au milieu de sa gloire, oublie le vœu qu’il a fait jadis d’aller délivrer l’Espagne et le « chemin des Pèlerins ». Saint Jacques lui apparaît et lui annonce que le temps est venu d’accomplir son vœu. (L’Entrée en Espagne, poëme du comm. du xive siècle, renfermant des morceaux du xiiie. Mss. fr. de Venise, xxi, f° 1, 2.) L’Empereur n’hésite pas à obéir à cette voix du ciel ; mais il n’en est pas de même de ses barons, qui prennent trop de plaisir à la paix et s’y endorment : Roland les réveille. (Ibid., f° 2-7.) Marsile est saisi d’épouvante en apprenant l’arrivée des Français. Par bonheur, il a pour neveu le géant Ferragus, qui va défier les douze Pairs, lutte avec onze d’entre eux et, onze fois vainqueur, les fait tous prisonniers. (Ibid., 7-31.) Mais il reste Roland, et celui-ci, après un combat de plusieurs jours, finit par trancher la tête du géant qu’il eût voulu épargner et convertir. (Ibid., 31-79.) L’action se transporte alors sous les murs de Pampelune, et elle y demeurera longtemps. Une première bataille se livre sur ce théâtre de tant de combats. Isoré, fils de Malceris, roi de Pampelune, s’illustre par d’admirables mais inutiles exploits. Il est fait prisonnier, et, sans l’intervention de Roland, Charles eût ordonné sa mort. (Ibid., 79-121.) La guerre continue, terrible. Une des plus grandes batailles d’Espagne va commencer : Roland est relégué à l’arrière-garde, et s’en indigne. (Ibid., 122-162.) Voici la mêlée : on y admire à la fois le courage de l’Empereur et celui de Ganelon. (Ibid., 162.) Quant à Roland, il commet la faute très-grave de déserter le champ de bataille avec tout son corps d’armée. Il est vrai qu’il s’empare de la ville de Nobles ; mais il n’en a pas moins compromis la victoire des Français. L’Empereur le lui reproche cruellement et va jusqu’à le frapper. Roland s’éloigne, et quand Charlemagne, apaisé, envoie à sa poursuite, il n’est plus possible de le trouver. (Ibid., 162-220.) Roland est en Orient, où il se met au service du « roi de Persie », délivre la belle Diones, organise l’Orient à la française et fait le pèlerinage des Saints Lieux. (Ibid., 220-275.) Mais il se hâte de revenir en Espagne et tombe, tout en larmes, aux pieds de l’Empereur. (Ibid., 275-303.) La réconciliation est faite, mais la grande guerre est loin d’être finie : Pampelune, en effet, est toujours défendue par Malceris et Isoré, son fils. Leur courage ne parvient pas à sauver la ville, et Charlemagne y entre. (Prise de Pampelune, prem. quart du xive siècle, éd. Mussafia, vers 1-170.) Par malheur, les Français ne restent pas unis dans leur victoire, et une épouvantable lutte éclate entre les Allemands et les Lombards. C’est Roland qui a la gloire de les séparer et de faire la paix. (Ibid., 170-425.) Il reste à régler le sort du roi Malceris, et Charles, si cruel tout à l’heure contre les Sarrazins, devient tout à coup d’une générosité ridicule. Il veut faire de Malceris un des douze Pairs ; mais aucun d’entre eux ne veut céder sa place au nouveau venu : tous préfèrent la mort. (465-561.) Malceris, furieux de ce refus, parvient à s’échapper de Pampelune. (Ibid., 561-759.) Mais le fils du fugitif, Isoré, est demeuré fidèle à Charles et aux chrétiens. Il en vient, pour ses nouveaux amis, à méconnaître jusqu’à la voix du sang et à lutter contre son père, qui, par aventure, échappe une seconde fois aux mains des Français. (Ibid., 760-1199.) Charles cependant ne perd pas l’espoir de conquérir l’Espagne, et c’est ici que commence une nouvelle série de batailles sanglantes, où il joue véritablement le premier rôle. À la tête de ses ennemis est encore Malceris, type du païen farouche et intraitable ; près de Malceris est Altumajor. Ce ne sont pas de petits adversaires. Dans la mêlée, le roi de France se voit tout à coup cerné par les troupes païennes, et serait mort sans l’aide providentielle de Didier et de ses Lombards. (1199-1953.) Enfin, les païens sont vaincus. Altumajor, forcé de devenir chrétien, remet à l’Empereur Logroño et Estella. (Ibid., 1830-2474.) Devant les Français victorieux, il ne reste plus guère que Marsile, et ce sera désormais le grand adversaire de Charles et de Roland. On agit d’abord avec lui par la diplomatie, et, sur la proposition de Ganelon, on lui envoie deux ambassadeurs, Basin de Langres et son compagnon Basile. Ils sont pendus sur l’ordre de Marsile, et cette violation du droit des gens sera plus tard rappelée avec horreur dans la Chanson de Roland. (Ibid., 2597-2704.) Un tel crime ne déconcerte d’ailleurs ni Ganelon ni Charlemagne, et l’on décide d’envoyer une seconde ambassade à Marsile. Guron est choisi : il est surpris par les païens, et n’a que le temps, après une résistance sublime, de venir expirer aux pieds de Charles, qui le vengera. (Ibid., 3140-5830.) La rage s’allume au cœur de l’Empereur, et la guerre recommence. Les Français, après une éclatante victoire sur Malceris, entrent tour à tour dans Tolède, Cordoue, Charion, Saint-Fagon, Masele et Lion. (Ibid., 3851-5773.) Le poëme se termine en nous montrant l’armée chrétienne maîtresse d’Astorga. Charles possède l’Espagne, toute l’Espagne..., à l’exception de Saragosse. » ═ « Suivant une légende, ou plutôt suivant une imagination différente de tous nos autres récits, Charles ne serait pas resté sept années, mais vingt-sept ans en Espagne. Cette version n’est consacrée que par le poëme de Gui de Bourgogne (seconde moitié du xiie siècle). L’auteur suppose que l’Empereur et ses barons ont vieilli de l’autre côté des Pyrénées, et tellement vieilli, que leurs fils, laissés par eux au berceau, sont devenus, en France, de beaux jeunes hommes pleins d’ardeur. Or ce sont ces jeunes gens qui s’avisent un jour d’aller rejoindre leurs pères en Espagne, comme la jeune Garde venant à l’aide de la vieille. Ils avaient voulu tout d’abord se donner un roi, et Gui, fils de Samson de Bourgogne, avait été élu d’une voix unanime. C’est Gui qui a eu l’idée de l’expédition d’Espagne, et qui exécute de main de maître un projet si hardi. (Gui de Bourgogne, vers 1-391.) Gui s’empare successivement de Carsaude (Ibid., 392-709), de Montorgueil et de Montesclair (Ibid., 1621-3091), de la tour d’Augorie (Ibid., 3184-3413) et de Maudrane. (Ibid., 3414-3717.) Le seul adversaire redoutable que rencontre le vainqueur, c’est Huidelon ; encore il se convertit fort rapidement et devient le meilleur allié des Français. Il ne reste plus maintenant à la jeune armée qu’à rejoindre celle des vieillards, celle de Charles. C’est ce que Gui parvient à faire, après avoir donné les preuves d’une sagesse au-dessus de son âge. Un jour enfin, les jeunes chevaliers peuvent tomber aux bras de leurs pères (Ibid., 3925-4024), et c’est une joie inexprimable. Puis les deux armées combinées s’emparent de Luiserne, que Dieu engloutit miraculeusement. (Ibid., 4137-4299.) Le signal du départ est alors donné à tous les Français. Et où vont-ils ainsi ? À Roncevaux. » (Ibid., 1300-4301.) ═ Ici commence la Chanson de Roland, dont la scène, à vrai dire, devrait se placer immédiatement après la Prise de Pampelune. Mais nous n’avons pas besoin de résumer ici le poëme dont nous venons de publier le texte et la traduction. Le rôle de Charlemagne n’y est pas, comme on le sait, effacé par celui de Roland, et l’Empereur garde réellement le premier rang. C’est lui qui, dans la première partie de la Chanson, réunit son conseil pour délibérer avec lui de la paix proposée par Marsile ; c’est lui qui fait choix de Ganelon comme ambassadeur ; c’est lui qui, sur l’avis de ce traître, confie l’arrière-garde à Roland. Puis, dans la seconde partie de la Chanson, il cède ou paraît céder toute la place à son neveu, afin de nous faire assister uniquement aux derniers exploits, à l’agonie et à la mort de Roland. Mais encore voyons-nous Charles prendre de loin sa part à ce martyre et accourir, terrible, pour le venger. Il est d’ailleurs, et il est tout seul, le héros de la troisième partie. Il s’y fait le vengeur de Roland sur les Sarrazins d’abord, et ensuite sur Ganelon. À la défaite de Marsile et de Baligant succède le châtiment du Traître, et le grand empereur, promenant autour de lui ses regards apaisés par tant de représailles, s’apprête enfin à se reposer, quand tout à coup la voix d’un Ange se fait entendre et lui ordonne de recommencer une nouvelle guerre contre les païens... » ═ Telle est la légende de l’expédition d’Espagne d’après nos chansons de geste. Mais cette très-populaire légende, qui est vraiment le centre de l’histoire poétique de Charlemagne, a été l’objet de variantes et de modifications très-considérables. Nous allons les faire connaître dans l’ordre de leur antiquité : 1° La « Chronique de Turpin » doit tout d’abord fixer notre attention. M. G. Paris a établi que les chapitres i-v sont l’œuvre d’un moine de Compostelle, écrivant vers le milieu du xie siècle, et que les chapitres vi et suivants, dus sans doute à un moine de Saint-André de Vienne, n’ont été écrits qu’entre les années 1109-1119... D’après le Faux Turpin, Charlemagne aperçoit un jour dans le ciel une « voie d’étoile » qui s’étend de la mer de Frise jusqu’au tombeau de saint Jacques, en Galice. L’apôtre lui-même se fait voir à l’Empereur, et le somme de délivrer son Pèlerinage, dont la route est profanée par les infidèles. Charles obéit ; il part. (Cap. ii.) Devant les Français victorieux tombent miraculeusement les murs de Pampelune ; puis l’Empereur fait sa visite au tombeau de l’apôtre, et va jusqu’à Padron. (Cap. iii.) Plein de foi, il détruit toutes les idoles de l’Espagne, et particulièrement, à Cadix, cette image de Mahomet que l’on appelle « Islam ». (Cap. iv.) L’Empereur, triomphant, élève une église magnifique en l’honneur de saint Jacques, et construit d’autres basiliques à Toulouse, Aix et Paris. » (Cap. v.) Ici s’arrête le récit primitif, qui forme un tout bien complet et caractéristique. Le commentateur du xiie siècle prend alors la parole, et, soudant tant bien que mal sa narration à la précédente, raconte tout au long (cap. vi-xiv) la grande guerre de Charles contre Agolant que nous avons déjà résumée plus haut. Le récit d’une nouvelle guerre commence au chap. xiv : Bellum Pampilonense.... « Il arrive qu’Altumajor surprend un jour une troupe de chrétiens trop avides de butin. (Cap. xv.) Une croix rouge apparaît sur l’épaule des soldats de Charles qui doivent mourir dans la guerre contre le roi Fouré : c’est l’Empereur qui a fort indiscrètement demandé ce prodige à Dieu. Ces prédestinés meurent, mais Fouré est vaincu. (Cap. xvi.) Nouvelle guerre d’Espagne. Cette fois, c’est la plus célèbre, c’est celle de nos Chansons : Roland lutte à Nadres contre le géant Ferragus et en triomphe. (Cap. xvii. Altumajor et Hébraïm, roi de Séville, continuent la lutte. Cachés sous des masques hideux, les païens attaquent les Français avec des cris épouvantables. Les Français reculent une première fois, mais le lendemain sont vainqueurs : Charles, maître de l’Espagne, la partage entre ses peuples. (Cap. xviii.) Il érige alors Compostelle en métropole, et fait massacrer en Galice tous les païens qui refusent le baptême. (Cap. xix.) C’est alors, mais alors seulement, qu’on voit entrer en scène Marsile et Baligant, tous deux rois de Saragosse, et envoyés tous deux par l’émir de Babylone. Ils feignent de se soumettre et envoient à Charles trente sommiers chargés d’or et quarante de vin, avec mille captives sarrasines. Ganelon, par pur avarice et sans nul esprit de vengeance, trahit son pays et s’engage à livrer aux païens les meilleurs chevaliers de l’armée chrétienne. Les Français, d’ailleurs, semblent attirer sur eux la colère du Ciel, en se livrant à de honteuses débauches avec les captives païennes. Ganelon les trompe, les endort, et l’arrière-garde de Charles est soudain attaquée par les Sarrazins que Marsile et Baligant conduisent à ce carnage. Sauf Roland, Turpin, Baudouin et Thierry, tous les Français meurent. (Cap. xxi.) Avant de mourir, Roland a la joie de tuer le roi Marsile ; mais il expire lui-même, après avoir en vain essayé de briser sa Durendal (cap. xxii) et s’être rompu les veines du cou en sonnant de son cor d’ivoire. Charles l’entend du Val-Charlon, pendant que Thierry assiste à l’agonie et à la mort de Roland. (Cap. xxiii et xxiv.) Or c’était le 17 mai. Turpin chantait la messe, lorsqu’il vit soudain passer dans les airs les Démons qui menaient en enfer l’âme de Marsile, et les Anges qui conduisaient au Paradis l’âme de Roland. Presque en même temps, Baudouin apporte à l’Empereur la nouvelle de la mort de son neveu. Désespoir de Charles, pleurs de tous les Français. (Cap. xxv.) C’est alors que les chrétiens vont relever leurs morts sur le champ de bataille de Roncevaux, dans le Val-Sizer. Comme dans notre Chanson, Dieu arrête le soleil pour permettre à Charles de se venger des Sarrazins, et le traître Ganelon, après un combat entre Pinabel et Thierry, est jugé, condamné, exécuté. (Cap. xxvi. — Voir au t. II des Épopées françaises, pp. 340-342 et 408-411, un résumé complet de la Chronique de Turpin. Ajoutons ici que le texte du Faux Turpin est reproduit dans le IIIe livre de la Chronique anonyme, dédiée en 1165 à Frédéric Barberousse, sous ce titre : De la Sainteté et des miracles du bienheureux Charlemagne.) ═ 2° Le Ruolandes Liet, œuvre allemande du curé Conrad (vers 1150), est calqué sur le texte d’Oxford. L’esprit en est clérical et non plus militaire : c’est l’unique différence, les faits sont les mêmes. ═ 3° Le Stricker, dans son Karl, n’a guère fait que versifier plus élégamment le Ruolandes Liet (vers 1230). ═ 4° La Kaisercronik (xiie siècle) nous fournit un récit de la guerre d’Espagne qui ne ressemble en rien à tous les autres.... « Tous les chrétiens ayant été massacrés par les Sarrazins, Charles rassemble 53,066 jeunes filles dans le Val-Charlon, près des défilés de Sizer. Les païens tremblent et se soumettent. » (G. Paris, l. I, 271.) ═ 5° La « Chronique du manuscrit de Tournai » (commencement du xiiie siècle) suit, en général, le récit du Faux Turpin. Elle est la première à nous donner la légende de Ganelon, qui, au moment de lutter en combat singulier avec le fils de Gondrebuef de Frise, pique des éperons, s’enfuit et est à grand-peine atteint et ramené devant le Roi. (V. le texte de la Chronique de Tournai, dans le Philippe Mouskes de Reiffenberg, I, pp. 469-473.) Ce même récit se retrouve dans les refazimenti de la Chanson de Roland. (V. le texte de Paris, vers 12527 et ss. de l’éd. Fr. Michel ; Venise vii, etc.) ═ 6° « La Chronique Saintongeoise » (commencement du xiiie siècle) interpole le Faux Turpin. Elle y ajoute le récit de Bordeaux délivré par les Français, et d’une lutte de Roland contre le roi de Libye. (Histoire poétique de Charlemagne, p. 271.) ═ 7° Les Remaniements de la Chanson de Roland (seconde partie du mss. iv de Venise ; — ms. vii de Venise ; — textes mss. de Paris, de Versailles, de Lyon, fragment lorrain, etc.) suivent en général l’affabulation du texte d’Oxford pour toute la première partie de notre vieux poëme. Ils se contentent de le délayer extraordinairement. ═ « C’est à son retour de la grande expédition d’Espagne que Charles, dans le ms. iv de Venise (f° 88, r°, 2e colonne), aperçoit Narbonne, et éprouve soudain le très-vif désir de l’avoir en sa possession. Et c’est alors que le fils d’Hernaut de Beaulande, Aimeri, s’en empare. » (V. Épopées françaises, III, 218-220.) ═ Quant aux mss. de Paris, Versailles, Venise vii et Lyon, ils racontent un peu différemment toute la fin de notre roman : nous allons les résumer.... « Lorsque Charles est de retour en France, après le désastre de Roncevaux, il envoie cinq chevaliers en message à sa sœur Gille, mère de Roland, qui est à Mâcon, et à Girart, qui est à Vienne : « Qu’il m’amène la belle Aude. » (Ms. de Paris, éd. Fr. Michel, 10022-11107.) Ganelon s’enfuit alors une première fois, et pense échapper à la colère de l’Empereur. Mais Othes le poursuit et, après vingt aventures, lui livre un combat acharné, parvient à s’en emparer et le rend à Charles. (Ibid., 11108-11560.) Cependant les messagers de Charles sont arrivés à Vienne et ont fait à Girart le message du roi de France. Ils ne lui apprennent pas la mort de Roland ; mais Aude a des pressentiments, des songes terribles. Malgré tout, elle part avec son oncle Girart. Ils arrivent ainsi au camp français, et l’Empereur veut faire croire à la fiancée de Roland que son fiancé a épousé une autre femme. Mais Aude ne peut ajouter foi à de tels récits et soupçonne l’affreuse vérité. Sur ces entrefaites arrive la sœur de Charles, la mère de Roland, Gille. C’est elle, c’est cette mère qui, malgré sa profonde douleur, apprend à Aude la terrible nouvelle. Aude meurt ; mais elle meurt, hélas ! bien longuement, après l’apparition d’un ange, après des réflexions, après des prières sans fin. » (Ibid., 11561-12384.) Le reste de nos refazimenti est semblable à la Chanson de Roland. ═ 8° La Karlamagnus Saga (xiiie siècle), et le résumé danois de cette Saga, Keiser Karl Magnus’s Kronike (xve siècle), nous fournissent de très-précieuses variantes.... « C’est saint Gabriel, et non saint Jacques, qui pousse Charles en Espagne. Un cerf blanc le conduit à travers un gué de la Gironde. (Karlamagnus Saga, 1re branche, 50.) Roland et Olivier prennent Nobles sans le consentement de l’Empereur, et vont jusqu’à tuer le roi Fouré, que Charles leur avait ordonné d’épargner. Les deux coupables cherchent en vain à cacher les traces de ce sang criminellement répandu, et le Roi, plein de colère, frappe son neveu au visage. » (Ibid., I, 51-52.) Dans une autre branche de la Saga, ce célèbre coup de gant est donné par l’Empereur en des circonstances toutes différentes : Charles veut abandonner, de désespoir, le siége de Nobles ; Roland s’y refuse (5me branche). Quoi qu’il en soit, après la prise de Nobles, le roi de France s’empare tour à tour de Monjardin et de Cordres. Alors a lieu le « miracle des lances » que les soldats de Charlemagne fichent en terre, et qui se couvrent d’une verdure surnaturelle (1re branche, 53). Dans sa « huitième branche », la Saga suit de près notre vieux poëme, mais en omettant le récit de la lutte contre Baligant et de la bataille de Saragosse. (Bibl. de l’École des Chartes, XXV, 102-103 ; Histoire poétique de Charlemagne, 152-277.) ═ 9° Philippe Mouskes (milieu du xiiie s.) s’accommode du Faux Turpin, en y mêlant la légende de notre Chanson et de ses Remaniements. Il remonte aussi à d’autres sources, et raconte notamment le miracle des aubépines qui sortent du corps de tous les Français morts à Roncevaux. (Éd. Reiffenberg, vers 8618-8621.) ═ 10° La Cronica general d’Alfonse X (seconde moitié du xiiie s.), précédée par la Chronica Hispaniæ de Rodrigue de Tolède (✝1247), présentent sous un aspect tout différent la guerre de Roncevaux... « Alfonse le Chaste régnait depuis trente ans. Menacé par les Sarrazins, il appelle Charlemagne à son aide. Mais les Espagnols, ses sujets, se révoltent à la seule pensée qu’ils vont être secourus par des Français, et Alfonse est forcé de faire savoir à Charles... qu’il se passera de lui. Le roi de France, indigné, déclare tout aussitôt la guerre aux Espagnols. Plutôt que de céder aux Français abhorrés, ceux-ci sollicitent l’alliance de Marsile et des païens, et c’est Bernard del Carpio qui conclut cette alliance. Accablés par deux armées, ou plutôt par deux races, les Français sont vaincus, et Roland meurt. Il est vrai que Charles se vengea plus tard sur Marsile. Mais Bernard del Carpio fut le plus heureux. Réconcilié avec le grand Empereur, il fut fait par lui roi d’Italie. » (Chronica Hispaniæ, IV, cap. x et xi ; Cronica general, édition de 1604, f° 30-32. — Cf. Histoire poétique de Charlemagne, 282-285.) ═ 11° Gaydon est une Chanson de la première partie du xiiie siècle, une œuvre littéraire, et dont l’auteur n’a pas puisé dans la légende. Le principal personnage n’est autre que Thierry, ce même Thierry qui a été le champion de Roland contre Pinabel. Il est baptisé dans ce poëme du nom de Gaydon, à cause d’un geai qui vient se poser sur son heaume, au moment même de son combat avec le défenseur de Ganelon. C’est d’ailleurs l’unique variante que nous offre cette œuvre de second ordre et qui n’a rien de traditionnel. ═ 12° Les « Chroniques de Saint-Denis » soudent entre elles (singulier mélange) les Annales d’Eginhard et la Chronique de Turpin. On n’y trouve qu’un épisode réellement original.... « Roland assiége Grenoble, lorsque tout à coup il apprend que Charles est attaqué en Dalmatie par les Saisnes, les Vendres et les Frisons. Comment lui porter secours ? Abandonner le siége de Grenoble ? Roland ne saurait s’y résoudre. Il s’agenouille, demande un miracle à Dieu, et voici soudain que les murs de Grenoble s’écroulent. Roland peut alors partir à la délivrance de son oncle. » ═ 13° Le Roland anglais du xiiie siècle (v. la première édition de la Chanson de Roland, par F. Michel, pp. 279-284) suit tour à tour le Faux Turpin et nos Chansons de geste. ═ 14° Parmi les quatre fragments néerlandais publiés par M. Bormans (xiiie et xive siècles), deux suivent la Chronique de Turpin, deux autres la version d’Oxford. (V. les Épopées françaises, II, p. 415.) ═ 15° Girart d’Amiens (commencement du xive s.) ne fait guère, dans son Charlemagne, que traduire dévotement le prétendu Turpin. ═ 16° L’auteur allemand du Karl Meinet, contemporain de Girart d’Amiens et compilateur de la même famille, n’a également consulté que les sources latines pour les commencements de l’expédition d’Espagne. Mais, pour le Roncevaux, il a simplement rajeuni le Ruolandes Liet, qui lui-même est um rajeunissement du Roland d’Oxford. ═ 17° « L’office de Charlemagne à Girone » (vers 1345) est plus original. Au moment de franchir les Pyrénées, Charles a une belle vision : Notre-Dame, saint Jacques et saint André lui promettent la victoire, mais à la condition qu’il bâtira dans Girone une belle église à la Vierge. Le grand Empereur se met en devoir d’obéir. Il bat les païens à Sent-Madir, et met le siége devant Girone. Une croix rouge reste durant quatre heures au-dessus de la mosquée ; il pleut du sang ; les miracles abondent... » (V. l’Histoire poétique de Charlemagne.) Ce même Office place la prise de Narbonne par saint Charlemagne avant, et non après l’expédition d’Espagne. ═ 19° Les Reali (vers 1350), en leur huitième livre, intitulé la Spagna, suivent d’abord pas à pas notre Entrée en Espagne et la Prise de Pampelune ; il arrive même que les Reali comblent ici certaines lacunes de ces poëmes. (Défaite de Malqidant ; Olivier, revêtu des armes de Roland, met les païens en fuite...) Pour la fin de l’expédition d’Espagne, le compilateur des Reali aurait suivi, d’après M. G. Paris, un Roncevaux en vers français, qui n’est point parvenu jusqu’à nous, et qui était sans doute du même auteur que l’Entrée en Espagne. (Nicolas de Padoue.) Mais la Spagna des Reali n’est pas encore publiée, et tout donne à penser qu’elle doit se rapprocher notablement de la Chronique de Turpin et de l’œuvre de Philippe Mouskes. ═ 20° La Spagna istoriata de Sostegno di Zanobi (xive s.) n’est qu’une imitation poétique, un « délayage » des Reali. ═ 21° Les Romances espagnoles sont les unes françaises, les autres espagnoles d’inspiration. Dans la Romance : C’était le Dimanche des Rameaux, on voit fuir le roi Marcim devant Roland, avec des pleurs et des imprécations lamentables. Dans la romance de Dona Alda, on assiste à un songe de la belle Aude, et cet épisode est à peu près semblable à la donnée de nos refazimenti. (Cf. de Puymaigre, les Vieux Auteurs castillans, II, 325.) Dans une autre romance, Roland meurt de douleur sur le champ de bataille, à la vue de la tristesse et de l’isolement de Charlemagne. (Études religieuses des Pères jésuites, VIII, 41.) D’autres enfin célèbrent à l’envi leur Bernard del Carpio, au préjudice de notre Roland. (Primavera, I, 26-47.) ═ 22° Le Charlemagne et Anséis en prose (ms. 214 de la Bibliothèque de l’Arsenal, xve s.) reproduit servilement la Chronique de Turpin, qu’il agrémente d’une façon insupportable. Le compilateur ne manque pas, d’ailleurs, de donner un rôle très-important à Anséis de Carthage, dès la première partie de son Roman. C’est la seule originalité de cette œuvre extraordinairement plate. ═ 13° Le Galien (ms. 226 de la Bibl. de l’Arsenal, xve s.), et tous les incunables qui depuis le xve siècle sont calqués sur ce texte trop peu connu, nous montrent le fils d’Olivier et de Jacqueline, Galien, arrivant sur le champ de bataille de Roncevaux au moment même où Olivier va rendre le dernier soupir. Or Galien est, depuis de longues années, à la recherche de son père, et il a la joie suprême de pouvoir s’en faire reconnaître. ═ 24° La Conqueste du grant Charlemaine des Espaignes, qui n’est qu’une version en prose de notre Fierabras (la 1re édition est de 1478), se borne à traduire la Chronique du Faux Turpin. ═ 25° Les Guerin de Montglaive incunables contiennent également un résumé de la bataille de Roncevaux, d’après les seuls textes latins. ═ 26° La « Chronique du ms. 5003 », signalée par M. G. Paris (le ms. est du xvie siècle ; l’original peut-être du xive), est un autre calque de la Chronique de Turpin. Elle mêle à ce récit la mort de Renaud à Cologne et la prise de Narbonne. ═ 27° « La Chronique de Weihenstephan » (le ms. est du xve siècle, et l’original du xive) n’apporte aucun fait nouveau et ne renferme aucune tradition qui ne se rencontre dans le Ruolandes Liet et le Stricker. ═ 28° Il en est autrement des Conquestes de Charlemaine de David Aubert (1458). La première partie est empruntée, moitié à des poëmes que nous avons perdus, moitié au Faux Turpin. C’est avant de traverser les ports des Pyrénées que Charlemagne s’empare de Bordeaux. La prise de Nobles par Olivier et Roland et la mort du roi Fouré suivent de près la prise de Bordeaux. Puis viennent le siége et l’assaut de Pampelune et de Montjardin. Ici nous retombons en pleine Chronique de Turpin, avec le trop fameux combat de Roland et de Ferragus. Le reste des Conquestes est servilement copié sur les Remaniements de la Chanson de Roland, sur quelque texte analogue à ceux de Versailles, Paris, Venise VII et Lyon. C’est une vérité que nous n’avons pas vue dans nos Épopées françaises (II, 419). Nous nous empressons de rectifier cette erreur, et terminons ici notre résumé de la « Légende de Charlemagne », que nous avons essayé de rendre complet, mais que nous aurions voulu moins long.

D’après les textes qui précèdent, ou peut dresser le Tableau par ancienneté des sources de l’histoire poétique de Charlemagne. I. Le plus ancien groupe est représenté par la Chanson de Roland, qui repose non-seulement sur des légendes remontant au ixe et même au viiie siècle, mais encore sur des Textes historiques d’une importance considérable. (Éginhard, Annales, ann. 778, reproduit par le Poëte saxon. — Vita Karoli, IX. — L’Astronome Limousin, Vita Hludovici, Pertz, II, 608.) ═ II. En même temps que la légende de Roncevaux, mais d’une façon tout à fait indépendante et dans un autre cycle, se formait la légende d’Ogier, qui est également appuyée sur des textes historiques. (Lettre du pape saint Paul à Pépin en 760, Hist. de France, V, 122 ; Chronique de Moissac, de 752 à 814, Hist. de France, V, 69, 70 ; un Extrait du Moine de Saint-Gall, II, 26 ; plusieurs passages d’Anastase le Bibliothécaire, ann. 753, 772, 774 ; Annales Lobienses, Pertz, II, 195 ; Chronicon sancti Martini Coloniensis, ann. 778, Pertz, II, 214 ; Chronique de Sigebert de Gembloux au xie siècle, Hist. de France, V, 376 ; la Conversio Othgerii militis, œuvre du xe ou du xie siècle, B. N. S. G. L. 1607 ; le tombeau d’Ogier à Saint-Faron, Acta SS. ord. S. Benedicti, sæc. iv, pars I, pp. 664, 665.) À ce groupe se rapportent la Chevalerie Ogier de Danemarche, de Raimbert ; les Enfances Ogier, d’Adenès ; la 3e branche de la Karlamagnus Saga et la 4e du Charlemagne de Venise. ═ III. Vers la fin du xe siècle, une falsification du texte d’Éginhard donne lieu à la légende du Voyage à Jérusalem. (Benedicti Chronicon, Pertz, III, 710, 711.) De là la première partie de notre Voyage à Jérusalem et à Constantinople ; de là deux récits de la Karlamagnus Saga. ═ IV. Au milieu du xie siècle, un moine de Compostelle écrit les cinq premiers chapitres de la prétendue « Chronique de Turpin », renfermant l’histoire de toute une croisade de Charles en Espagne. Ce récit n’a aucune influence sur le développement de notre poésie romane. ═ V. Antérieurement à la rédaction de la Chanson de Roland que nous venons de publier et de traduire, circulaient déjà des légendes nombreuses, et très-probablement des poëmes qui avaient pour objet plusieurs autres épisodes de la vie de Charles ou de Roland. Le texte d’Oxford fait des allusions très-claires à la prise de Nobles, telle qu’elle nous est racontée dans la première branche de la Karlamagnus Saga ; à l’ambassade de Basin et Basile, qui, bien plus tard, sera racontée à nouveau par l’auteur de la Prise de Pampelune ; à la famille d’Olivier telle qu’elle nous est présentée dans Girars de Viane. Ce n’étaient certes pas ces poëmes eux-mêmes, tels que nous les possédons, qui existaient avant notre Chanson de Roland ; mais c’étaient des Chansons analogues, assonancées et en décasyllabes, etc. ═ VI. Pour les traditions et légendes qui précèdent, nous avons une certitude. Nous n’avons qu’une probabilité pour les suivantes, auxquelles il n’est fait aucune allusion dans la Chanson de Roland. Les faits qui sont délayés dans les versions du Renaus de Montauban parvenues jusqu’à nous ; ceux qui nous sont offerts, relativement à la guerre d’Espagne, dans la Kaisercronik du xiie siècle, dans les branches I et V de la Karlamagnus Saga, dans le second tiers de l’Entrée en Espagne, dans la Prise de Pampelune et dans la dernière partie de notre Girars de Viane, devaient circuler parmi nous, depuis un temps plus ou moins long, avant le commencement du xiie siècle. ═ VII. Notre Chanson de Roland a été remaniée, rajeunie plusieurs fois. On y ajouta certains épisodes. Les uns (comme la prise de Narbonne) ont un fondement dans la tradition ; les autres (comme les deux fuites de Ganelon, son combat avec Othe, l’entrevue d’Aude et de Gillain, etc.) sont une œuvre de pure imagination. ═ VIII. Entre les années 1109 et 1119 sont rédigés les chapitres vi et ss. de la Chronique de Turpin, d’après des sources romanes que l’on corrompt, que l’on dénature, que l’on cléricalise. Cette œuvre apocryphe a exercé une influence considérable, et c’est d’après elle que sont écrits les documents dont nous allons donner la liste : La Chronique du manuscrit de Tournai (xiiie siècle) ; la Chronique saintongeaise (commencement du xiiie siècle) ; la première partie de l’Entrée en Espagne (xiiie-xive siècles) ; Philippe Mouskes (vers 1240) en grande partie ; les « Chroniques de Saint-Denis, » et, en partie également, le Roland anglais du xiiie siècle ; le Charlemagne de Girart d’Amiens, en tout ce qui touche la guerre d’Espagne (commencement du xive siècle) ; pour tout ce qui se rapporte aux commencements de cette expédition, le Karl Meinet, qui appartient à la même époque ; les Reali (vers 1350) et la Spagna istoriata ; la Conqueste du grant Charlemaine des Espaignes (édition imprimée du Fierabras, depuis 1478, etc.) ; les Guerin de Montglane incunables ; la Chronique du ms. 5003 de la B. N. (original du xive siècle) ; le Charlemagne et Anseïs, du xve siècle, etc. etc. ═ IX. Sur des traditions vagues ont été écrits, au xiie siècle et postérieurement, toute une série de poëmes qui sont moitié légendaires, moitié fictifs. Sur la donnée de la prise de Rome par les Sarrazins reposent : l’ancien poëme de Balant, que M. G. Paris a reconstitué ; notre Fierabras et même notre Aspremont, auquel se mêlent quelques autres traditions. ═ X. Avec quelques Contes universels, et qui se retrouvent, en effet, dans tous les pays (le Traître, l’Épouse innocente et réhabilitée, etc.), on a composé la légende de l’Enfance de Charles, et cela depuis la fin du xiie siècle ou le commencement du xiiie. Cette légende se retrouve dans les Enfances Charlemagne de Venise (fin du xiie siècle) ; dans la Chronique saintongeaise (commencement du xiiie siècle) ; dans Berte aux grans piés (vers 1275) ; dans le Stricker de 1230 ; dans la Chronique de Weihenstephan (original du xive siècle, ms. du xve) ; dans la Chronica Bremensis de Wolter (xve siècle) ; dans le Charlemagne de Girart d’Amiens (commencement du xive siècle) ; dans la Karlamagnus Saga (second tiers du xiiie siècle) ; dans le Karl Meinet (commencement du xive siècle) ; dans les Reali (vers 1350), etc. ═ XI. Cependant, pour combattre les prétentions des légendaires français, on inventait en Espagne certaines légendes destinées à ruiner la gloire de Roland. Telle est la signification de la Chronica Hispaniæ, de Rodrigue de Tolède (✝1247), de la Cronica general d’Alfonse X (seconde moitié du xiiie siècle) et de quelques Romances que nous avons citées plus haut. ═ XII. Enfin, il faut considérer les poëmes suivants comme des œuvres uniquement littéraires et de pure imagination : Jean de Lanson. — Simon de Pouille. — Otinel. — La dernière partie de l’Entrée en Espagne (Roland en Orient). — Gui de Bourgogne. — Gaydon. — Anseïs de Carthage. — Galien. — La fin du Voyage à Jérusalem et quelques parties de Girars de Viane. ═ C’est ainsi que s’étagent toutes nos Chansons de geste, depuis celles qui sont le plus historiques jusqu’à celles qui ne sont même plus légendaires et qui sont des « romans » dans l’acception la plus moderne de ce mot.

═ La laisse VIII, comme la troisième, est en ier ; la neuvième est en er. Dans tout notre texte, les couplets en er sont nettement distincts des laisses en ier. Nous avons à tort exposé une autre doctrine dans notre Introduction (p. lii). Nous reconnaissons volontiers une erreur sur laquelle M. Gaston Paris a appelé notre attention, et nous prions notre lecteur de rectifier dans ce sens le passage de notre Introduction, qu’on supprimera en le remplaçant par les lignes précédentes. ═ La thèse de M. G. Paris nous paraît juste. De même cependant qu’il y a dans notre vieux poëme des couplets uniquement en un, et des laisses mixtes en un, ur et u ; de même on pourrait dire qu’il y a dans notre poëme des couplets en er, et des laisses mixtes en er et en ier. Cette doctrine nous paraît soutenable ; mais nous n’hésitons pas à lui préférer celle que nous venons de préciser. ═ Lire, dans le couplet III, à la fin des vers : chevaliers, aidier, amistiez, chiens, cargiez, repairier, Michiel, bien, afiancier, mien, chiefs, deintiet. ═ Lire, dans le couplet VIII, en assonances, les mots : chevalier, chiers, vergier, Oliviers, gunfanuniers, bien, chevalier, viell, legier, eglentier, mier, chief, enseignier, bien.

Vers 98.Abatied. O. Cf. respundiet (v. 2411) ; survesquiet (2615). Ces formes de la 3e personne du parfait simple n’ont pas été (comme nous l’avions cru nous-même, Épopées françaises, t. I, p. 214) imaginées pour le besoin de l’assonance. On les trouve dans le corps des vers (2615) et en prose.

Vers 99. — Eschech. O. Cf. la forme eschec aux v. 1167, 2478.

Vers 102. — Pour le cas sujet il faut l’s finale.

Vers 103.Empereres. O. V. la note du v. 1.

Vers 104.Olivert. O. Erreur évidente. Cf. la note du v. 176. — V. la monographie de Roland à la note du v. 194, et celle d’Olivier à la note du v. 255. Pour placer ces notes historiques, nous choisissons toujours le lieu du poëme où chacun de nos héros commence véritablement à jouer un rôle.

Vers 105. — Sansun. Pour le cas sujet il faudrait Sanses, qui ne se trouve pas une fois dans le texte d’Oxford. Il est encore question du duc Samson aux vers 1275, 1531, 1537, 2187 et 2408. ═ Ce personnage est compté au nombre des douze Pairs : 1° par la Chanson de Roland ; 2° par la Karlamagnus Saga ; 3° et 4° par les Remaniements de Paris et de Venise VII ; 5° par Gui de Bourgogne ; 6° par la Chronique de Weihenstephan, et enfin, 7° par l’Entrée en Espagne. ═ Samson est représenté partout comme duc de Bourgogne ; il est le père de « Gui de Bourgogne ». ═ Dans le Roman de ce nom, il tient une certaine place. Son fils, à la fin du poëme, trouve en Espagne ce père qu’il n’a jamais vu et tombe enfin dans ses bras : « L’enfes Guis de Borgoigne est alés à Samson, — Plus de c. fois li baise la bouche et le menton. » (V. 3983, 3984.) ═ L’Entrée en Espagne n’avait pas craint de faire déjà mourir le vieux duc Samson ; ce qui avait donné à l’auteur de ce poëme, Nicolas de Padoue, l’occasion de placer au nombre des douze Pairs le jeune Samson, fils du roi de Persie... Roland, apprenant la mort du duc de Bourgogne, propose son ami Samsonnet pour le remplacer dans la pairie, et s’écrie en plaisantant : « Se Samson est perdu, Samson est reverti. » (Ms. XXI de Venise, f° 303.) ═ Et l’auteur anonyme de la Prise de Pampelune s’empresse d’adopter cette invention. (Vers 4521-4524 et 4974-4977.) ═ Cette prétendue substitution n’avait d’ailleurs aucun fondement dans la légende, et l’auteur de notre Roland nous fait assister à la véritable mort de Samson, que le païen Valbabrun abat sur le champ de bataille de Roncevaux. (V. 1537.)

═ Anseïs est encore nommé aux v. 105, 796, 1281, 1556, 2188, 2408. Il est connu sous le nom « d’Anseïs le Vieux » (796). La Chanson de Roland, les Remaniements de Paris et de Venise VII, la Chronique de Weihenstephan, l’Entrée en Espagne, Otinel, le mettent au nombre des douze Pairs. Mais son nom ne se trouve point sur la liste de la Karlamagnus Saga, de Gui de Bourgogne, du Voyage à Jérusalem et de Fierabras. Il meurt à Roncevaux de la main de Malquiant (1556). Il ne le faut pas confondre avec Anseïs le Jeune ou Anseïs de Carthage, héros purement imaginaire et qui n’a rien de traditionnel. Ce dernier est nommé roi d’Espagne par Charlemagne lui-même au moment où l’Empereur retourne en France, etc.

Gefreid d’Anjou. O. Lire Gefreiz li reis gunfanuniers à cause du cas sujet. ═ Geoffroi l’Angevin joue un grand rôle dans tous nos vieux poëmes. Il fait partie de l’expédition d’Aspremont. (Aspremont, éd. Guessard, p. 19, v. 64.) Dans la guerre des Saisnes, il tue le roi Caloré. (C. 107 et ss.) Il est compté au nombre des Pairs par Renaus de Montauban, la Chronique de Weihenstephan et Fierabras. ═ Dans Aye d’Avignon, c’est Garnier de Nanteuil qui est fait gonfalonier du roi. Or l’enseigne de l’Empereur n’était autre que la bannière de Saint-Pierre ou des Papes : de là son beau nom de Romaine : « Seint Piere fut, si aveit nom Romaine. » Mais depuis le grand combat de Saragosse, elle s’appela « Montjoie. » (V. 3094.) ═ Thierry, qui doit vaincre Pinabel à la fin de notre Chanson, est ici représenté comme le frère du duc Geoffroi (3819). Dans Gaydon, au contraire, Thierry est son fils et, sous le nom de Gaydon, devient lui-même duc d’Angers. ═ Avons-nous besoin d’ajouter que Geoffroi d’Anjou, dans la Chanson de Saisnes (couplets xix-xliv), est un des chefs des barons Hurepois soulevés contre l’Empereur. (V. notre note sur Richard de Normandie au v. 3050.) ═ Quant au rôle qu’il joue dans les Remaniements de la Chanson de Roland, v. la note du v. 3080.

Vers 107. Gerin. O. Pour le cas sujet il faut Gerins. ═ Gerin et Gerer sont comptés au nombre des douze Pairs par la Chanson de Roland, les remaniements de Paris et la Karlamagnus Saga. Gerin seul est conservé par Otinel et le Voyage à Jérusalem. Son gab n’y est pas l’un des moins divertissants : « Placez deux deniers sur cette tour de marbre. D’une lieue, je les atteindrai avec mon épieu, et je ferai tomber le premier sans toucher au second. » (V. 604 et ss.) Les deux noms de Gerer et de Gerin ne paraissent pas dans Gui de Bourgogne, l’Entrée en Espagne, la Chronique de Weihenstephan et Fierabras. (V. plus loin, au v. 262, notre note sur les douze Pairs.)

Vers 108. — Lire Bien. O. V. la note du v. 31 et celle du v. 96, p. 51.

Vers 109.Milliers. O. V. la note du v. 1685.

Vers 110. — Cevalers. O. V. la note du v. 1379. Pour le cas sujet il faut chevaler.

Palies. V. la note du v. 1651. ═ Le ciclatun est une forte étoffe de soie qui « parait avoir eu au xiie et au xiiie siècle autant de faveur que le samit et le cendal ». V. sur cette étoffe, F. Michel, Recherches sur le commerce, la fabrication et l’usage des étoffes de soie, I, pp. 220-225.

Vers 116.Qui. O. V. la note du v. 18.

═ « La siet li Reis que dulce France tient. Plusieurs érudits ont prétendu que, dans nos premières Chansons de geste, et notamment dans le Roland, le mot France n’a pas le sens actuel et représente seulement une province du grand pays français, l’Île-de-France. Il est certain que le mot Francia, antérieurement à nos premiers poëmes, a signifié tour à tour tous les pays successivement occupés par les Francs. Dans la Table de Peutinger, il est appliqué aux différents peuples de la Confédération Franke, établis alors sur la rive droite du Rhin. Sous la première race, on appelle Francia tantôt les terres occupées par les Saliens, tantôt le pays habité par les Ripuaires : il y a néanmoins tendance à donner plutôt le nom de France à la Neustrie. ═ Sous la seconde race, il est arrivé que ce même nom fut surtout attribué au duché de France. ═ Nous avons longuement étudié la même question dans la Chanson de Roland, et nous croyons pouvoir scientifiquement établir les propositions suivantes : 1° Les mots France et Franceis, dans la plus ancienne de nos épopées, sont employés cent soixante-dix fois pour désigner tout l’empire de Charlemagne, lequel, en dehors de la France proprement dite, renferme la Bavière, l’Allemagne, la Normandie, la Bretagne, le Poitou, l’Auvergne, la Flandre, la Frise, la Lorraine et la Bourgogne ; 2° dans le même poëme, le mot France est également employé en un sens beaucoup plus restreint pour désigner les pays qui correspondent à l’ancienne Neustrie (moins la Normandie) et à presque toute l’Austrasie. ═ Dans l’énumération des différents corps de l’armée chrétienne, les Français proprement dits forment les 1re, 2e et 10e échelles ; la 3e est composée de Bavarois, la 4e d’Allemands, la 5e de Normands, la 6e de Bretons, la 7e de Poitevins et d’Auvergnats, la 8e de Flamands et de Frisons, la 9e de Lorrains et de Bourguignons. La même division se retrouve dans la liste des barons qui sont appelés à juger Ganelon. D’où je conclurais volontiers que la Bavière, la Normandie, l’Allemagne, la Bretagne, le Poitou, l’Auvergne, la Flandre, la Frise, la Lorraine et la Bourgogne peuvent être ici considérés comme des pays feudataires ou conquis. Roland se vante, en effet, d’en avoir soumis un grand nombre : il y joint l’Aquitaine. — En résumé, le pays tant aimé par le neveu de Charlemagne, c’est notre France du Nord avec ses frontières naturelles du côté de l’Est et ayant pour tributaire toute la France du Midi. C’est donc à peu près pour le même pays qu’a battu le cœur de Roland et que battent les nôtres. » (L’Idée politique dans les Chansons de geste, par L. G., p. 84.)

Vers 118.La cuntenance fier. O. Erreur évidente.

Vers 121.Bien. O. V. la note du v. 34.

Vers 122.Parled. O. Dans notre manuscrit, le d prend parfois la place du t ; mais il faut observer tout d’abord que ce changement n’a pas lieu une fois sur cinquante, et, en second lieu, que le d n’est pas strictement étymologique. C’est pourquoi nous avons imprimé parlet.

Vers 123.Salvet. O. À cause de la règle de l’s, nous avons écrit salvez.

Vers 124.Ds aüres. O. Devez aürer. Mu. La correction introduite dans notre texte est empruntée au texte de Venise, où le passage est ainsi conçu : « Droit emperer, salva sia da der, — Dal Criator che dovi adorer. » Mu., note de la p. 8. ═ Cf. le vers 429 : Li glorius qui devum aürer.

Vers 126.Salvetez. Au cas régime il faut salvetet. ═ Le ms. de Venise VII, et le texte de Versailles portent les mots suivants qui expliquent le sens du texte d’Oxford : Enquis avons la loi por nos salver.

Vers 127. — Vos. O.

Vers 131.Care. O. Cf. le v. 33, où l’on trouve carres, qui est à la fois plus régulier et plus étymologique. ═ Carier. O. Carier n’est pas dans la mesure du vers. Quant à carger, voyez les v. 32, 185, 652.

Vers 132.Avrat. Mu. V. la note du v. 38.

Vers 133.Bien. O. Nous avons supprimé l’i parasite. V. la note du v. 34. ═ Vuz. Mu. Faute évidente, pour voz, qui se lit très-visiblement dans le ms.

Vers 135.Bien. O. V. la note du v. 34.

Vers 136.Vos. O. Suirat. Mi. G. On pourrait ajouter ici les vers suivants (justifiés par les vers 36-39, 151-155 et 187-190).

Vostre hom serat par amur et par ben :
Trestute Espaigne tendrat de vus en feu.

Vers 137.Empereres. O. V. la note du v. 1, à laquelle désormais nous ne renverrons plus notre lecteur. ═ Pour la mesure du vers nous avons rétabli en, visiblement oublié par le scribe. Cf. le vers 139 : Li Empereres en tint sun chef enclin.

Vers 142. — [Q]uant. Mu. On lit très-bien tout le mot dans le ms. ═ lu vis. O. On ne trouve lu que trois fois dans tout notre texte. (V. 142, 283, 320.)

Vers 145.Vos. O.

Vers 147.Voet. O. V. la note du v. 40. ═ O. porte : hostages. Or, dans le ms., on trouve à peu près le même nombre de fois les deux formes hostages (147, 572, 646, 3852), et ostages (40, 57, 87, 3950). Nous avons choisi la forme la plus étymologique. C’est en même temps celle qui, après avoir été la plus commune dans notre ancien langage, a persisté dans le nouveau.

Vers 148.Avrez. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 149.Par num d’ocire. Mu. Nous restituons de ocire qui se trouve dans le ms., et qui s’élidait dans la prononciation, mais non pas toujours dans l’écriture. ═ Mien. O. On trouve mien dans le ms. d’Oxford (149, 339, 743, 1936, 2183, 2718) ; mais bien plus souvent men (43, 249, 524, 539, 756, 767, 1709, 1798, 2073, 2286, 3591). Voir la note sur bien, au v. 34, et la combiner avec celle sur les couplets en ier, v. 96, page 51. ═ Filz. O., etc. Lisez dans notre texte fil à cause du cas régime.

Vers 150.Avrez. O. V. la note du v. 38. ═ E si ’n averez, ço quid, de plus gentilz. Il nous semble que tous les traducteurs, sauf M. Fr. Michel (éd. de 1869) ont fait un contre-sens sur ce vers. Tous ont traduit à peu près comme Génin : « Vous n’en aurez pas, je crois, de plus noble. » Il est évident qu’il faut, avec MM. Michel et Müller, écrire : Si ’n averez pour en averez, et non pas si n’averez.

Vers 152.A la grant feste seint Michel de l’Peril. V. la note du v. 37.

Vers 153.Vos. O. ═ Suirat. Mi. G.

Vers 154.Vos. O.

Vers 156.Charles. O. V. la note du vers 94.

Vers 157.Cler. O. Il faut clers à cause du cas sujet.

Vers 158.Charles. O. V. la note du v. 94. Le ms. porte Chares.

Vers 159. — Lire el’. ═ Nous n’osons pas ajouter ici au texte primitif les vers suivants que nous offre le remaniement de Versailles (v. 190-195) et qui, selon nous, ont dû se trouver dans la ou dans une version originale. Mais il n’y a que probabilité. Il faudrait les ramener au dialecte de notre texte d’Oxford, et c’est ce que nous avons essayé de faire : El’ grant verger fait li Reis tendre un tref — E l’aigle d’or sus el pumel fermer. — Vers Saraguce en fait turner le chef. — Ço senefiet ne s’en vuldrat aler, — E tresqu’à l’jurn s’ i vuldrat hosteler. Voici le texte même du remaniement : El’ grant vergier a fait son tref lever — Et l’aigle d’or sus el’ pomel fermer, — Vers Saragoze en fet le chief torner. — Ce senefie ne s’en vuldra aller : — Iloc au jor se voudra osteler.

Vers 161.Serjanz. À cause du cas sujet pluriel, il faut serjant. V. la note du vers 20.

Vers 163.Empereres. O. ═ Levet. O. Il faut levez à cause du cas sujet.

Vers 168.Empereres. O.

Vers 171.Li. O. À cause du régime il faut le. ═ Velz. O. Pour la même raison, il faut veill. (Pour la forme veill, cf. les vers 112, 218, 3470.) ═ Au cas sujet on trouve dans notre texte velz, qui est évidemment la meilleure forme (905, 929, 970, 3050 ; veilz, 1771, 2409, 2807, et vielz, 523, 538). Au cas régime, à côté de veill on trouve viell une seule fois, 2048 ; et une autre fois, mais par erreur, viel, 2615.

Vers 172.Gascuigne. O. V. la forme Guascuigne aux v. 819 et 1494, et Guascuinz, v. 1289. ═ Li quens. O. À cause du cas régime il faut le cunte.

Vers 174.Gerin. O. À cause du cas sujet, il faut Gerins : le latin serait Warinus ou Guarinus.

Vers 175.Rollant. Mu. Rollanz, au cas sujet.

Vers 176.Oliver. O. À cause du cas sujet, il faut Olivers. Il est vrai que, pas une seule fois, notre manuscrit ne nous offre cette dernière forme. (V. 104, 176, 546, 576, 936, 2207, 2403, 3186, etc.) Mais nous avons étudié tous les mots de même famille dans le texte d’Oxford, tous ceux qui dérivent de vocables latins en arius, arium, erius. Or tous ces mots prennent un s au cas sujet du singulier : Ogers, 3546. — Engelers, 1261, 1289. — Gerers, 174, 794, 1269, 1380. — Berengers, 395, 2405. — Gaifiers, 798. — Gualters, 800. — Acers, 1362. — Destrers, 1651. — Premers, 1211, 1842. — Chevalers, 1311. — Legers, 1312, etc. Donc nous avons dû mettre une s au cas sujet d’Oliver.

Vers 177. — L’énumération qui précède est différente dans le texte de Venise VII et de Versailles : « Ogers i vint le proz et le hardiz. — Et l’Arcisvesche qui mout fu i noriz, — Sanses li dus et ses freres Teriz, — Gieifrei d’Anjou et li quens Anmeriz, — Achars li mors et ses freres Almiz, — Gui de Gascogne et Miles li joïz.... » (Ms. de Venise.)

Vers 179.Or. Mu. Le ms. porte visiblement ore, que nous avons scrupuleusement conservé, pour ne rien donner de douteux sur la théorie de l’élision. ═ Lire dans notre texte le au lieu de li conseill. ═ Le, que donne le ms., est un sujet singulier neutre, venant d’illud. (Falt li le coer, 2019. Des or cumencet le plait, 3747.) Que, dans le même vers, donne lieu à la même remarque. Illud et quod servent à la fois pour le sujet et le régime latins ; le et que pour le sujet et le régime du neutre français. Voy., pour la théorie des neutres, la note du v. 9.

Vers 180.Barons. O. Pour se conformer à une règle générale de notre texte (v. la note des v. 17 et 30), il faut ici baruns, qui, d’ailleurs, est la forme la plus fréquemment usitée.

Vers 181.Marsilie. O. À cause du cas sujet, il faut Marsilies.

Vers 185. — « Or d’Arabe ou or arabiant. Or de provenance orientale, recommandé par le moine Théophile et souvent cité par les poëtes. L’or espagnol, que le même orfévre mentionne également avec un accompagnement étrange des plus sottes recettes, paraît bien n’avoir pas existé, et être le même que l’or arabe. Le texte de Théophile sur l’or arabe mérite d’être cité : Cap. xlvi. De auro arabico. Est et aurum arabicum pretiosissimum et eximii coloris, etc. » (Glossaire des émaux, par M. L. de Laborde.)

Vers 186.Care. O. V. la note du v. 131.

Vers 189.Recevrat. Mu. V. la note du v. 38.

Vers 191.Sis curages. V. la note du V. 56.

Vers 193.Empereres. O.

Vers 194.Li quens Rollanz ki ne l’otriet mie. Nous diviserons la « Légende de Roland » en trois parties : I. Sa naissance et ses enfances. II. Sa vie et ses exploits jusqu’à la trahison de Ganelon. III. Sa mort à Roncevaux.

I. Naissance et enfances de Roland. Roland, dans notre légende épique (et rien ne la justifie dans l’histoire), est partout représenté comme le neveu de Charlemagne. Sa mère reçoit, dans la plupart de nos poëmes, le nom de Gille ou Gillain. Si c’est un souvenir historique de Gisèle, sœur de Charles, ce souvenir est faux : car Gisèle fut toute sa vie religieuse à Chelles. La mère de Roland s’appelle Berte dans le Charlemagne de Venise et Bacquehert dans Acquin. Ce dernier poëme est le seul où son père soit nommé « Tiori » : partout ailleurs on le nomme Mile ou Milon d’Angers, ou d’Anglant, ou d’Aiglante. ═ Une légende fort répandue, et tout à fait antichrétienne, prétend que Roland naquit de l’inceste de Charlemagne avec sa sœur Gille. C’est ce que racontent : 1° La Karlamagnus Saga (xiiie s., 1re branche, 36) ; 2° le roman de Tristan de Nanteuil (xive s.) ; 3° la version en prose de Berte aus grans piés (xve s.) ; 4° la « Chronique de Weihenstephan » (l’original est du xive s., le ms. du xve). ═ D’autres documents ne parlent plus vaguement que d’un « péché très-grave commis par l’Empereur, et qu’il aurait omis à dessein dans sa confession à saint Gilles ». Un parchemin miraculeux descendit du ciel, et Gilles y vit écrit le péché de Charles. Celui-ci fut forcé d’avouer sa faute, et... maria sa sœur avec Milon d’Angers. Roland naquit sept ans après. Ainsi s’expriment : 1° la « Légende latine de saint Gilles ». (Acta sanctorum Septembris, I, 302-303 ; mais elle ne peut, en réalité, s’appliquer qu’à Charles Martel.) 2° Adam de Saint-Victor (xiie s., Prose : Promat pia vox cantoris) ; et les deux proses : Quantum decet et Sicut passer. (Mone, Hymni latini medii œvi, III, 265-167.) 3° L’office de Charlemagne composé en 1165. 4° La Kaisercronik (xiie s.). 5° Le Ruolandes Liet du curé Conrad (milieu du xiie s.). 6° Le roman de Huon de Bordeaux (fin du xiie s., aux vers 10,217 et ss.). 7° Le Carolinus de Gilles de Paris, poëme composé pour l’éducation du jeune Louis, fils de Philippe-Auguste. 8° La Chronique de Philippe Mouskes. 9° La Légende dorée. ═ Par bonheur, d’autres textes font naître Roland d’une mère moins illégitime. Ce sont : 1° La Chanson de Roland (qui ne contient du moins aucune allusion à la naissance adultérine de notre héros). 2° Le Charlemagne de Venise (xiie s. ; analysé par M. Guessard, Bibl. de l’École des Chartes, XVIII, 402), qui en fait seulement un bâtard.... La sœur de Charles (Berte) s’éprend ici d’un sénéchal nommé Milon, et, persécutée par son frère, accouche de Roland au milieu d’un bois, près d’Imola. (V. aussi l’Innamoramento di Milone d’Anglante e di Berta. Milan, 1529.) 3° Le roman des quatre fils Aymon (xiiie s.) et 4° le Charlemagne de Girart d’Amiens (commencement du xive s.) croient à la naissance très-légitime et très-pure de Roland. ═ Telles sont les trois grandes traditions, les trois grands courants de l’opinion ou plutôt de la légende que nous avons pu constater dans les documents du moyen âge. (V. nos Épopées françaises, II, 57-60.) ═ Sur les premières années de Roland, nous n’avons d’autre témoignage légendaire que le Charlemagne de Venise.... Le bâtard de Berte et du sénéchal Milon grandit dans la misère et l’abandon. Un jour, l’enfant rencontre la grande armée de Charlemagne qui revient de délivrer Rome. Roland se précipite dans le palais de Sutri qu’habite l’Empereur ; il y est accueilli, et réjouit bientôt toute la cour par son appétit et son esprit. Naimes, le sage conseiller, soupçonne que le petit bachelier doit être de bonne race ; on suit l’enfant et l’on découvre la pauvre Berte avec Milon. Charles veut les frapper ; mais Roland ne craint pas de les défendre, et fait jaillir le sang des ongles de l’Empereur. « Ce sera le faucon de la chrétienté, » s’écrie Charles, qui est déjà très-fier de son neveu. C’est alors que Berte et Milon se marient ; c’est alors aussi que commencent les véritables « Enfances » de notre Héros. ═ Ces Enfances ont donné lieu à plusieurs récits, non-seulement différents, mais contradictoires. Il nous faut encore ici montrer les divers courants de la Légende. 1° Enfances de Roland, d’après le roman d’Aspremont (premières années du xiiie siècle)... Charles, défié par Balant, ambassadeur d’Agolant, réunit toutes les forces de son empire et se dirige vers les Alpes. La grande armée passe à Laon. Or c’est là qu’on a enfermé le petit Roland (« Rollandin ») avec d’autres enfants de noble race, Gui, Hatton, Berenger et Estoult. Mais ces enfants ont déjà le courage des hommes, et ne peuvent supporter l’idée de se voir ainsi éloignés du théâtre de la guerre. Sur la proposition de Roland, ils essaient de corrompre leur « portier ». Celui-ci demeurant incorruptible, ils l’assomment et s’éloignent. Trop fiers pour aller à pied, ils volent des chevaux aux bons Bretons du roi Salomon, et n’ont point trop de peine à se faire pardonner tant d’escapades. Bref, ils sont admis dans les rangs de l’armée : ils iront, eux aussi, à Aspremont. (V. ce poëme, édition Guessard, pp. 13-16.) Le récit de cette guerre est interminable : nous l’abrégerons. Il nous importe uniquement de savoir que Roland en devient bientôt le héros, avec le jeune Yaumont, fils d’Agolant. Celui-ci, auquel le trouvère prête d’ailleurs les qualités les plus françaises et les plus chrétiennes, est sur le point de triompher de Charlemagne et de le tuer en un combat singulier qui va décider de toute la guerre, lorsque Roland accourt comme un lion et frappe Yaumont d’un coup mortel. Or Yaumont avait une épée admirable nommée Durendal : elle appartiendra désormais à Roland, ainsi que le bon cheval Veillantif. (B. N. ms. Lavall., p. 123, f° 41 v°-55 v°.) Et nous les retrouverons l’un et l’autre dans le vieux poëme dont nous donnons ici une nouvelle édition. ═ 2° La Chanson de Roland ne donne aucun détail sur les enfances du héros. Mais elle nous fournit sur Durendal une légende qui ne ressemble en rien à celle d’Aspremont. Suivant la plus ancienne de nos Chansons, c’est aux vallons de Maurienne qu’un ange apparut à l’empereur Charles et lui commanda de donner cette épée surnaturelle à un vaillant capitaine... (Vers 2318-2321.) ═ 3° Et la Karlamagnus Saga (xiiie s.) ajoute que Durendal était l’œuvre du fameux Galant et qu’elle avait été donnée à Charles, par Malakin d’Ivin, comme rançon de son frère Abraham. Elle fixe d’ailleurs une date à ce passage des vallées de la Maurienne par Charles et par l’armée française. « Ce fut, dit-elle, quand l’Empereur alla en Italie rétablir la paix entre les Romains et les Lombards. » (V. la Bibl. de l’Éc. des Chartes, XXV, 101.) ═ 4° Les débuts de Roland, dans Girars de Viane, sont tout charmants. Il accompagne son oncle au fameux siége de Vienne. Or c’est sous les murs de cette ville qu’un jour il aperçoit pour la première fois la sœur d’Olivier, la belle Aude, et se prend pour elle d’un violent amour. C’est là qu’il s’illustre par ses premiers exploits ; c’est là qu’il veut brutalement enlever Aude, et en est empêché par Olivier (Girars de Viane, éd. P. Tarbé, pp. 90-92.) ; c’est là enfin que les deux partis désarment, pour confier leur querelle à Olivier d’une part, et à Roland de l’autre. (Ibid., pp. 92-186.) On connaît les vicissitudes de ce combat, dont Aude est la spectatrice et dont elle doit être le prix. Roland et Olivier, ne pouvant se vaincre, tombent aux bras l’un de l’autre et se jurent une éternelle amitié. (Ibid., pp. 133-156.) ═ 5° Tout autre est le récit de Renaus de Montauban... (xiiie s.) Les quatre fils Aymon se sont enfermés dans le château de Montauban ; Charles les y assiége en vain, et, comme toujours, le vieux duc Naimes conseille au Roi de faire la paix, lorsque arrive un valet suivi de trente damoiseaux. Il éclate de jeunesse et de beauté : « Je m’appelle Roland, dit-il, et suis fils de votre sœur. — Tue-moi Renaud, » lui répond l’Empereur. Roland, sans plus attendre, se jette sur les Saisnes, qui viennent de se révolter, et en triomphe aisément. C’est alors qu’il revient près de son oncle, et que, dans cette grande lutte contre les fils d’Aymon, il apporte au Roi le précieux secours de sa jeunesse et de son courage. Son duel avec Renaud est des plus touchants. Renaud, qui n’a jamais eu le cœur d’un rebelle, le supplie de le réconcilier avec Charles, et va jusqu’à se mettre aux genoux de Roland qui pleure. (Édition Michelant, p. 230, v. 2 et ss.) Aussi notre héros se refuse-t-il plus tard à tuer de sa main le frère de Renaud, Richard, qui est devenu le prisonnier de Charles : « Suis-je donc l’Antechrist, pour manquer ainsi à ma parole ? Malheur à qui pendra Richard ! » (Ibid., pp. 261-267.) Et il dit encore : « Je ne veux plus m’appeler Roland, mais Richard, et je serai l’ami des fils d’Aymon. » Comme on le voit, rien n’est ici plus beau que le rôle du neveu de Charles : il efface celui de l’Empereur. ═ 6° C’est à Vannes que Girart d’Amiens, dans son Charlemagne (commencement du xive siècle), place les débuts de Roland. L’enfant se jette en furie sur les veneurs de son oncle, qui ne le connaît pas encore. On l’amène devant l’Empereur : nouvelles brutalités. Charles le reconnaît à ce signe, et tout finit bien... (B. N. 778, f° 110-112.) ═ 7° Les Reali di Francia (vers 1350) ne font, dans leur Aspromonte, que reproduire notre poëme en le défigurant et en lui donnant une suite où Girart de Fraite tient la première place. ═ 8° La Karlamagnus Saga, déjà citée, soude entre elles la Chronique de Turpin et Aspremont. ═ 9° Une Chronique manuscrite (B. N. anc. 103075), citée par F. Michel, et qui est sans doute la « Chronique saintongeaise », dont M. G. Paris a souvent tiré parti, donne une version qu’on ne retrouve nulle part ailleurs. C’est à « Rolant de Loubara », comte ou duc de Bretagne, que Pépin, avant de mourir, confie son fils Magniez ; c’est à lui qu’il recommande de le faire couronner, etc. ═ On ne rencontre ailleurs rien de particulier sur l’enfance de Roland, et nous avons épuisé tout ce que nous avions à en dire.

II. Vie et exploits de Roland jusqu’à la trahison de Ganelon. Le père de Roland était mort durant l’expédition de Charles dans la Petite-Bretagne. (Acquin, poëme de la fin du xiie s., B. N. 2233, f° 18, r° et v°.) Roland fut tout naturellement un de ceux qui accompagnèrent le grand Empereur dans son ridicule voyage à Constantinople. Tout au moins s’y conduisit-il plus noblement que son ami Olivier. Lorsque les douze Pairs se livrent à leurs vantardises, son gab est le moins odieux : « Je soufflerai sur la ville et produirai une tempête. » (Voyage de Charlemagne, poëme du xiie s., vers 472-485.) ═ Dans Jean de Lanson, Roland prend part à cette singulière ambassade en Calabre, qui est égayée par les enchantements et les plaisanteries de Basin de Gênes. Son épée, sa Durendal, est, comme celles de tous les Pairs, volée par le traître Alori. (Bibl. de l’Arsenal, 186, f° 121.) Pour se venger, Roland consent à une assez misérable comédie : il contrefait le mort, on l’enferme dans une bière, et il pénètre ainsi dans le château de Lanson, dont les Français parviennent à s’emparer. (B. N. 2495, f° 4-5.) Les aventures de Roland, dans le reste de ce pauvre poëme, se confondent avec celles des douze Pairs. ═ Dans Otinel, son rôle est plus beau. Il lutte avec le géant païen. (Otinel, poëme du xiiie s., v. 211-659.) Une colombe sépare les deux combattants, et, désarmé par ce miracle, Otinel se convertit. ═ Dans le Karl Meinet (xive s.), « Ospinel » meurt, terrassé et converti par Olivier ; mais sa fiancée Magdalie, qui est la propre fille du roi Marsile, se prend ensuite à aimer Roland, qui lui rend trop aisément son amour. Olivier sépare les deux amoureux, et rappelle Roland au souvenir de sa sœur Aude. (Ad. Keller, et G. Paris, Histoire poétique de Charlemagne, 489-491.) ═ Dans la Chronique de Jacques d’Acqui, Roland a pour sœur Bélissende, et il la donne en mariage à « Ottonnel », qu’il a vaincu et converti. Mais, dans je ne sais quel combat, le neveu de Charlemagne, ne reconnaissant pas Ottonnel, le frappe d’un coup mortel. (G. Paris, l. L, 505-506.) ═ C’est dans l’Entrée en Espagne (xiiie-xive siècle) que la place de Roland devient tout à fait la première : Roland suit son oncle dans cette expédition, qui doit pour lui se terminer à Roncevaux. C’est lui qui, après les onze autres Pairs, lutte contre le géant Ferragus. (Ms. français de Venise, xxi, f° 17-32.) Ce combat est plus long que tous les autres, et les adversaires y luttent autant de la langue que de l’épée, théologiens autant que soldats. Ferragus s’entêtant dans son paganisme, Roland le tue. (Ibid., f° 32-79.) Une grande bataille s’engage sous les murs de Pampelune, et Roland y prend part. Dans la mêlée brille le courage du jeune Isoré, fils du roi Malceris : Isoré est fait prisonnier, mais ne consent à se rendre qu’à Roland. (Ibid., f° 10-105.) Charles, cependant, veut faire mourir son prisonnier, contrairement à la parole donnée : Roland le défend énergiquement, et, de colère, se retire sous sa tente. Isoré est sauvé. (Ibid., f° 106-125.) Une nouvelle bataille commence, plus terrible que toutes les autres ; Roland est placé à l’arrière-garde ; (Ibid., f° 123-162.) C’est durant cette bataille que le neveu de Charles, au lieu de secourir l’Empereur en détresse, abandonne le champ de bataille et va s’emparer de la ville de Nobles, que les païens ont laissée sans défense. (Ibid., f° 162-213.) Lorsque Roland revient au camp, il est fort mal accueilli par son oncle, qui même le condamne à mort ; mais aucun des Pairs ne veut exécuter la sentence. L’Empereur alors frappe son neveu au visage, et Roland, indigné de cet affront, quitte le camp français pour n’y plus revenir de longtemps. C’est en vain que les Pairs adressent à l’Empereur les plus rudes remontrances et les pires injures. Lorsque Charles se repent de sa violence et envoie chercher son neveu, on ne peut plus le retrouver. Il est déjà trop loin. (Ibid., f° 213-221.) Où est Roland ? Il se dirige du côté de la mer, et s’embarque sans savoir où il va. Bref, il arrive... à la Mecque, près du roi de Perse. (Ibid., f° 221-232.) Or ce roi est en ce moment menacé par un voisin redoutable, le vieux Malquidant, qui lui a demandé sa fille en mariage. Mais la jeune Diones se refuse obstinément à épouser ce vieillard. Roland, qui d’ailleurs ne se fait pas connaître, s’écrie que rien ne révolte plus la loi de Dieu qu’un mariage forcé, et qu’il saura bien empêcher celui-là. Il lutte avec le messager de Malquidant, Pelias, et ne tarde pas à être vainqueur. C’est seulement au moment de le tuer qu’il lui crie : « Je suis Roland. » Mais il demeure encore inconnu à tous les autres. (Ibid., f° 232-254.) Cette victoire le met en lumière. Il devient l’ami du jeune Samson, fils du roi, et, s’il n’eût pas tant aimé la belle Aude, eût volontiers répondu à l’amour de Diones. Mais, d’ailleurs, il a de quoi s’occuper. Il s’est mis en tête de réformer tout ce pays et de lui donner une « administration à la française ». C’est à quoi il s’occupe longuement. Il fait mieux : il convertit toute la maison du soudan, et le roi lui-même. (Ibid., f° 254-271.) Mais il ne pense qu’à revoir Charles, Olivier et les barons français. On lui offre en vain le commandement d’une armée destinée à conquérir tout l’Orient. Il s’empresse de faire son pèlerinage au Saint Sépulcre, et s’embarque pour l’Espagne avec Samson et deux autres compagnons. (Ibid., fo 271-275.) Ils débarquent. Après vingt aventures, — et notamment après qu’un ermite lui a prédit sa mort au bout de sept années, — le neveu de Charlemagne arrive enfin au camp français et tombe dans les bras de Charles et d’Olivier. (Ibid., fo 275-302.) ═ Le siége de Pampelune continue. Celui qui défend la ville contre les Français, c’est encore cet ancien adversaire de Roland, c’est Isoré avec son père Malceris. Dans le poëme consacré à cette résistance, dans la Prise de Pampelune (premier quart du xive siècle), Roland ne joue réellement qu’un rôle secondaire. Cependant, lorsqu’une lutte sanglante éclate dans le camp français entre les Allemands et les Lombards, c’est Roland qui sépare les combattants, c’est Roland qui les réconcilie. (Vers 1-425.) Il est encore un de ceux qui refusent d’admettre Malceris dans le corps des douze Pairs. (405-561.) Puis il s’efface, et Isoré prend le premier rang, que son père Malceris lui dispute. (561-1199.) Charles, sur le point de périr, est sauvé par les Lombards. (1199-1963.) Altumajor est vaincu ; Logroño et Estella tombent au pouvoir des Français. (1830-2474.) À Marsile, dernier adversaire de Charlemagne, on envoie tour à tour deux ambassades, et Marsile fait tour à tour massacrer les ambassadeurs : d’abord Basan et Basile ; puis le bon chevalier Guron. (2597-3850.) Cette fois la paix devient tout à fait impossible et la guerre implacable. Les Français triomphent décidément de Malceris, et emportent Tolède, Cordoue, Charion, Saint-Fagon, Masele et Lion. (3851-5773.) Roland prend part à ces triomphes, comme au siége d’Astorga, et il ne reste plus devant ce vainqueur que Saragosse à prendre. (5773-6113.) C’est ce que constatent les premiers vers de la Chanson de Roland. ═ Il est à peine utile de signaler la place qu’occupe notre héros dans le roman de Gui de Bourgogne, œuvre toute littéraire et qui ne renferme aucun élément traditionnel. (xiiie siècle.) Nos lecteurs savent déjà comment les jeunes chevaliers de France vinrent rejoindre en Espagne leurs pères absents depuis vingt-sept années. (Vers 1-391.) Gui de Bourgogne était à leur tête, et nous avons ailleurs raconté ses victoires à Carsaude (392-709), à Montorgueil et à Montesclair (1621-3091), à la Tour d’Augorie (3184-3413) et à Maudrane. (3414-3717.) Le jeune vainqueur brise la résistance des païens, triomphe surtout d’Huidelon et, tout couvert de gloire, rejoint enfin l’armée de Charlemagne. (3925-4024.) Ce Gui, ce nouveau venu, est, comme on le voit, un véritable rival pour Roland, dont il fait pâlir la vieille gloire. Aussi tous deux se disputent-ils l’honneur d’avoir conquis Luiserne : Dieu met fin à cette lutte en engloutissant la ville. On part pour Roncevaux. (4137-4301) ═ Nous n’avons pas à revenir sur le rôle que joue le neveu de Charles dans notre Chanson de Roland. Il en est le centre, l’âme, la vie. La Trilogie dont se compose le vieux poëme lui est presque uniquement consacrée : dans la première partie, il est trahi ; dans la seconde, il meurt ; dans la troisième, il est vengé. Son importance survit à sa mort, et jusqu’au dernier vers de la Chanson il en est le héros. Nous avons énuméré ailleurs les variantes et les modifications principales de la légende en ce qui touche l’expédition d’Espagne et la mort de Roland... D’après la « Chronique de Turpin » (1109-1119), Roland, avant de mourir, tue de sa main le roi Marsile. D’après ce même document, Roland était âgé de quarante-deux ans au moment de sa mort. Une vision miraculeuse apprend à Turpin cette mort du neveu de Charlemagne, dont Baudouin et Thierry ont d’ailleurs été les heureux témoins. (Cap. xxi-xxv.) ═ La « Chronique saintongeaise » (commencement du xiiie siècle), est le seul texte où il soit parlé d’un combat entre Roland et le roi de Libye, qui aurait précédé l’entrée en Espagne. (G. Paris, Histoire poétique de Charlemagne, p. 262.) ═ La Karlamagnus Saga (xiiie siècle), dans une de ses branches (la première, 51, 52), raconte la prise de Nobles et la mort du roi Fouré, que Roland tue malgré la défense de Charles. Le héros cherche en vain à effacer toute trace de ce sang injustement versé : Charles découvre le crime, et frappe son neveu au visage. ═ Un autre récit plus simple de la prise de Nobles se trouve dans la cinquième branche de la Saga... Roland se refuse à désespérer de la victoire, et ne veut pas abandonner le siége de Nobles. Son oncle combat cette résolution et va jusqu’à le frapper... ═ La Chronica Hispaniæ de Rodrigue de Tolède (✝ 1247), et la Cronica general d’Alfonse X (seconde moitié du xiiie siècle), nous montrent Roland succombant à Roncevaux sous le double effort des Sarrazins commandés par Marsile et des Espagnols conduits par Bernard del Carpio. ═ D’après les Chroniques de Saint-Denis, Roland assiége Grenoble (!), lorsqu’il apprend que son oncle est cerné en Dalmatie par les Vandres, les Saisnes et les Frisons. Pour lui permettre de voler au secours de l’Empereur, Dieu fait miraculeusement tomber les murs de la ville assiégée. ═ Une romance espagnole (Études religieuses des PP. jésuites, viii, p. 401) nous fait assister aux derniers moments de Roland, qui meurt de douleur à la seule vue de Charlemagne abandonné et triste. ═ D’autres Romances essaient d’étouffer la gloire chrétienne de Roland sous la gloire souillée de Bernard del Carpio. (Primavera, i, 26-47.) ═ Il ne nous reste plus qu’à renvoyer le lecteur à notre Notice sur Charlemagne : nous y sommes entré dans les plus minutieux détails sur les dernières pages de la légende de Roland. Ajoutons seulement que les monuments figurés ont célébré, tout autant que nos vieux poëmes, la gloire du neveu de Charlemagne. Nous plaçons ici, sous les yeux de nos lecteurs, les deux statues d’Olivier et de Roland qui décorent le portail de la cathédrale de Vérone (ces deux dessins sont dus à M. Jules Quicherat), et un médaillon du « Vitrail de Charlemagne » à la cathédrale de Chartres (derniers moments de Roland qui fend le rocher avec sa Durendal)...

Vers 197.Set anz pleins. O. La correction set anz ad pleins est de G. et Mu. d’après le texte de Versailles : Bien a set ans.

Vers 198.Vos. O. V. la note du vers 17. ═ Nobles. O. V. la note du v. 1775. ═ On lit dans Venise VII : « Pris avons Nobles et Morinde saisie, — Tote Valterne et Prince la garnie. » Et, dans Versailles : « Pris avons Nobles et Merinde saisie ; — Tote Vauterne est prise, la garnie. »

Vers 199.Valterne, c’est Valtierra. ═ « La terre de Pine, dit Gaston Paris, doit se laisser trouver dans les environs de Tudela et de Valtierra. » Je le pense comme lui ; mais telle n’est pas l’hypothèse de M. P. Raimond : « Je proposerais, dit-il, le Château-Pignon ou Pinon, dans la commune de Saint-Michel, canton de Saint-Jean-Pied-de-Port, tout près de Roncevaux. On disait en 1521 (Établissements du Béarn, c. 680, f° 154) : Lo castet do Pinhoo. » (Mémoire manuscrit de M. P. Raimond.)

Vers 200.Balagued. O. C’est Balaguer en Catalogne. V. la note du v. 63. ═ Tuele. C’est Tudela, en Navarre, sur les confins de l’Aragon, de la Navarre et de la Castille. Ce fut longtemps un véritable repaire de brigands. ═ Sezilie. Nous avons traduit Sebilie, d’après la Karlamagnus Saga, qui donne Sibilia. M. G. Paris (l. I, p. 174) fait remarquer avec raison qu’il ne peut guère être ici question de Séville.

Vers 201.Marsilie ; traïtre. O. À cause du cas sujet, nous avons imprimé Marsilies, traïtres. Ces vers prouvent l’existence de Chansons antérieures à la nôtre. (Cf. la Prise de Pampelune.)

Vers 202.De ses paien veiat quinze. O. De ses paien veiat quinze (milies). Mi. De ses paien(s) (en)veiat quinze (milies). G. Nous avons adopté la correction de Müller.

Vers 203.Chascuns. O. On trouve dans le ms. d’Oxford les deux formes cascuns, cascun (51, 2502, 2559, 3631) et chascuns, chascun (390, 203, 1,013). Nous avons adopté la plus étymologique. ═ Portout. O. La diphtongaison ou se trouve dans certains textes romans à l’imparfait de l’indicatif, mais non dans le dialecte que parlait l’auteur ou le scribe de notre Chanson. Nous avons rétabli la diphtongaison ei, qui est particulière à notre scribe et à son dialecte.

Vers 204.Vos. O. V. la note du v. 17. ═ Meïsme. O. À cause du cas régime pluriel, il faut meïsmes.

Vers 207.Dous de voz cuntes à l’ paien tramesistes... Le récit de l’ambassade de Basan et Basile se trouve dans la Prise de Pampelune, poëme du commencement du xive siècle, vers 2597-2704. (V. l’édition de Mussafia, Altfranzösische Gedichte aus




venezianischen Handschriften, Wien, 1864, pp. 72-75. — Cf. l’analyse détaillée de ce poëme et les modifications de la légende dans nos Épopées françaises, II, 366-376.)

Vers 208.Basan. O. À cause du cas sujet, nous pensons (?) qu’il faut Basanz. ═ Altres. O. Pour les noms latins tels qu’imperator et alter, v. la note du v. 1.

Vers 209.Chef. O. Erreur évidente. ═ Haltilie. O. Cf. le v. 491.

Vers 210.Guer. O. ═ Vos. O.

Vers 212.Sege. O. On ne trouve qu’une seule fois ce mot sans l’i parasite, et c’est ici. Partout ailleurs il reçoit cet i (71, 435, 1135, siége ; 478, siet ; 3706, sied).

Vers 222.Vos. O.

Vers 223. — Lisez juintes, qui est plus conforme à l’étymologie comme au dialecte, et se trouve aux vers 2015, 2240... ═ Tis hom. O. Nous avons suppléé vostre. Dans notre vieux texte, en effet, on ne voit pas les héros, comme dans la plupart de nos Romans, s’adresser à leurs interlocuteurs tantôt au singulier et tantôt au pluriel. Or Ganelon dit partout vous à l’Empereur. On ne saurait d’ailleurs alléguer que l’h, dans hom, soit aspirée ; car on lit au vers 1758 : Ço dit li Reis : « Bataille funt nostre hume ; » au vers 3714 : Soer chere amie, de hume mort me demandes ; et, au vers 2949 : En un carnel cumandez que hum les port, etc. ═ Nous avons écrit hum au lieu de hom, pour la plus stricte régularité de l’assonance. (V. le vers 2559 et la note du v. 20.)

Vers 225.Receverat. O. L’abréviation est ici plus claire que partout ailleurs. V. la note du vers 48.

Vers 226.Degetuns. O. Pour les premières personnes du pluriel, v. la note du vers 42.

Vers 227. — Lire calt, plus étymologique, et qui se trouve aux vers 1405, 1806. ═ Muriuns. O. V. la note du vers 420. De plus, le futur est ici fort nettement indiqué par le sens de la phrase.

Vers 229.Tenuns. O. V. la note du v. 42.

Vers 230.Venud. O. Pour le cas sujet il faut venuz. On peut ajouter ici le vers suivant du remaniement de Versailles, ramené à notre dialecte :

Blanche out la barbe et tut le peil canut.

Naimes... C’est Girart d’Amiens qui nous a conservé, sur la généalogie et la naissance de Naimes, les plus précieux détails, qui nous paraissent d’ailleurs n’avoir rien de traditionnel. D’après ce compilateur (Ms. 778 de la B. N., f° 112, v° B), Naimes est le fils de la reine Seneheult de Bavière. Son père est Gasselin, ce fameux Gasselin qui joue un si beau rôle dans la Chanson d’Aubri le Bourgoing : Aubri lui-même est son oncle. Naimes connaît le malheur dès le berceau. Un traître, un usurpateur, Cassile, s’empare de la terre de Gasselin. Naimes échappe par miracle à ce furieux, et se réfugie en « Romanie » ; Seneheult meurt de douleur. C’est Charlemagne qui sera un jour le vengeur du bon droit, et rétablira Naimes en Bavière. De là l’affection du Bavarois pour l’Empereur. ═ Les deux Chansons où Naimes joue le rôle le plus considérable, c’est Aspremont et Acquin. Dans Aspremont, il est chargé, par le roi de France, d’une ambassade auprès d’Agolant. La reine sarrasine s’éprend de lui. Franceis, dist-elle, dites-moi vérité. — Avez moillier en ce vostre regné ? — E sunt si bel tuit li chrestienné ? Naimes répond très-dignement : Dame, dist Naymes, ne l’ai esprementé, — Mais de millor en i a grant plenté. — Se j’ai moillier, vos m’avez demandé. — Naie, ma dame, onques n’en fu pensé. — A mon signor ai tot mon cuer torné. (Ms. 2295, f° 100.) ═ Dans Acquin, Naimes est sur le point de périr dans l’île de Cesembre, et n’est sauvé que grâce au dévouement du comte Fagon. (B. N., 2223, f° 26-33.) Et cette guerre se termine par un combat singulier entre Naimes et Acquin. (Ibid., f° 51-53.) Le Bavarois est vainqueur. ═ Dans toutes nos Chansons, Naimes est représenté sous les traits d’un vieillard prudent et sage : c’est Nestor. Gui de Bourgogne dit de lui : Sa barbe se baloie jusc’au neu del’ baudré. — Par deseur les oreilles ot les guernons tornez. — Mult resamble bien prince qui terre ait à garder. (Vers 2888-2890.) Dans Aspremont, il ne cesse de donner à l’Empereur les plus généreux, les meilleurs conseils : Bien devez Deu amer et tenir chier. — Amez les povres... etc. (Éd. Guessard, p. 1, vers 51 et suiv.) Et le Prologue de ce poëme fait de lui un éloge magnifique : Tel conseiller n’orent onques li Franc, etc. (Vers 4 et ss.) ═ La mort de Naimes est racontée à la fin d’Anséis de Carthage. (B. N., 793, f° 72.) ═ Notre ms. nous offre les deux orthographes Naimes et Neimes : adopter partout la première.

═ Le couplet précédent était en un, et la présente laisse est en u. Ces deux systèmes de consonnances sont distincts et donnent lieu à deux familles de couplets. Or c’est la première fois que nous les rencontrons dans notre texte : c’est donc ici l’occasion de rectifier et de compléter ce que nous avons dit en notre Introduction au sujet de ces laisses en u, un, etc. Nous prions le lecteur de remplacer, dans notre tome I, les lignes 12 et suivantes de notre page li par les propositions suivantes, qui sont le résultat d’une étude plus approfondie. ═ Il y a ici à distinguer trois familles de couplets masculins : 1° Laisses en u (quand cette voyelle ne se diphthongue pas en ou dans la prononciation). Telles sont les laisses 64, 84, 121, 149, 155, 158, 178, 204, 268, 294, 296, où nous notons les assonances suivantes : u, ud, ui, uist, uit, ul, uls, um (Hum et Loüm), un et uns (aün et brun), ur, us, ust, ut, ux, uz. (Une seule fois l’on trouve un mot tel que herbus.) 2° Laisses en un. Tels sont les couplets 15, 17, 50, 63, 72, 115, 145, 169, 226, 242 et 284, où nous ne trouvons que les assonances suivantes : um, (om, oem), umpt, ums ; un, (on), uign, oign, uins, uinst, uinz ; unc ; und ; uns, (ons), unt, unz. On y trouve aussi, mais une fois chacune et en quatre couplets différents, uld, ur, (or), urt. 3° Couplets mixtes en un, ur et u, ce dernier se diphthonguant en ou dans la prononciation. (C’est sur ce dernier fait que nous n’avions pas assez fixé notre attention et nous avions confondu entre elles les deux notations u.) À ce troisième groupe appartiennent les couplets 34, 70, 82, 96, 100, 108, 114, 140, 165, 181, 189, 197, 211, 235, 274, 280, où nous notons les assonances suivantes : ub, (od), uls, uilz, (olz), old, um, (om), umpt, un, (on), uign, (oign), uinz, (oinz), uns, (ons), unt, (ont), (unz), ur, (or), urs, (ors), urt, (ort), urz, us, (os), (ous), uz, (oz), oiz (?). Remarquons, pour être complet, que les laisses 16 et 68 sont plus particulièrement en ur, u (sans un). ═ Il en est à peu près de même pour les couplets féminins, et il faut les partager en deux ou trois groupes : 1° Laisses en u (quand cette voyelle ne se diphthongue pas dans la prononciation). Il n’y en a que trois dans le Roland, et non pas cinq : ce sont les 106, 174 et 272, où nous notons les assonances uble, ude, ue, uet, ues, uie, uiet, uigne, uisent, une (cumune), ure (cheveleüre, etc.), uret (duret, asoüret) ; urent, ustes. ═ 2° Laisses beaucoup plus nombreuses, où les sons un et u sont suivis d’autres consonnes et d’un e muet ; mais il s’agit ici de l’u qui se diphthongue. Tels sont les couplets 2, 52, 76, 101, 117, 136, 153, 190, 194, 241, 266, 271, où se trouvent les assonances : ubles, uce, uche, uchet, ucle, ucles, ode (?), ue, uissent, uisent, uisset, oisset, oiset, uindre, oigne (onie, onies), ulce, ulces, ulcet, ulchet, ultre, umbe, umbre, umbrent, umbret, ume, (ome), umes, umpet, umpre, umtes, une, (one), (ones), unces, unches, unchet, uncle, uncles, unde, (onde), undet, undre, unent, unes, unge, unget, ungres, unkes, unne, unte, untes, untre, ure (amure, desure) ; urne, urnet, urnent, usche, usches, use, (ose), uset, ustet, ustret, ute, utes, utent, utet. 3° Enfin, l’on peut signaler deux couplets féminins en un pur (31 et 263) ; mais il ne serait pas impossible de les faire rentrer dans la famille précédente. (Cf. au vers 96, p. 51, ce que nous avons dit des couplets en er et en ier.) On peut également ne distinguer que deux groupes de couplets féminins en e, suivant que l’e est ouvert ou fermé. (V. p. l de notre Introduction.)

Vers 231.Meillor. O. À cause de la phonétique du manuscrit, il faut meillur, comme nous l’avons montré dans la note des vers 17, 45 et surtout 51.

Vers 232.Entendud. O. V. la note des vers 2 et 122.

Vers 233.Respondud. O. Pour l’o changé en u, voy. la note des vers 17, 45, 51. ═ Pour le d final changé en t, voy. la note des vers 2 et 122.

Vers 234.Entendud. O. V. la note des vers 2 et 122.

Vers 235.Marsilie. O. Pour le cas sujet, il faut Marsilies. ═ C’est pour la même cause que nous avons substitué vencuz à vencud. O.

Vers 236.Vos. O.

Vers 239.Vos. O.

Vers 241.Vos. O. ═ Soürs. O. Naimes ne parlant qu’à Charlemagne, il faut au régime singulier : soür.

Vers 242. Grant. O. À cause du cas sujet, il faut granz. Sur les adjectifs à une seule terminaison pour le m. et le f., voy. la note du v. 19.

Vers 244.Qui. O. V. la note du v. 18. ═ Enveieruns. O. V. la note du v. 42, sur les premières personnes du pluriel.

Vers 245.Marsiliuns. O. Erreur évidente.

Vers 247.Livrez. Mu. V. la note du v. 38, à laquelle désormais nous ne renverrons plus notre lecteur.

Vers 248.Vos. O.

Vers 250.Vos. O.

Vers 251.Vos. O.

Vers 252. — D’après la théorie exposée dans la note du vers 96, lire, à la fin des vers de cette laisse : Bien, Oliviers, meslisiez, bien, taisiez, jugiet, aquisiez.Qui. O. V. la note du v. 18. ═ Purruns. O. V. la note du v. 42, à laquelle désormais nous ne ferons plus de renvoi.

Vers 255.Nu. O. Nous avons suppléé nel, qui se trouve aux vers 716, 768, 893, 2029 (ne illud), et aux vers 1638, 1596 (ne illum). ═ Nu, d’après F. Michel, est pour nun (?).

Dist li quens Olivers. Olivier est le fils de Renier de Gennes, qui lui-même est frère de Girart de Vienne et fils de Garin de Monglane. La Chanson de Roland, d’ailleurs, ne fait allusion qu’à son père « Renier », et Roland, s’adressant à son ami qui vient de mourir, lui dit : Vus fustes filz à l’bon cunte Renier ki tint la marche de [Gennes desur mer]. (Vers 2208-2209.) Nous avons résumé ailleurs la légende de Renier ; étudions ici celle d’Olivier... ═ Le premier poëme où il figure avec un rôle important, c’est Girars de Viane. Lorsque Charles a mis le siége devant Vienne, c’est après de nombreux assauts et de sanglantes batailles que notre Olivier lui-même est un jour chargé de soutenir la cause des enfants de Garin contre l’Empereur. Il aura pour adversaire Roland, et du résultat de ce duel gigantesque dépendra la conclusion de la paix. Olivier s’était déjà rencontré avec Roland sous les murs de la ville assiégée. Sa sœur, la belle Aude, avait été un jour enlevée par le neveu de Charles, et Olivier l’avait délivrée. (Pp. 90-92 de l’édition P. Tarbé.) Mais ce nouveau combat est bien autrement important, et le récit en est très-long dans le vieux poëme. (P. 106-155.) Les deux adversaires ne sauraient se mépriser, et même, au milieu de leur lutte terrible, ils en viennent rapidement à s’aimer. Aude assiste à ce combat entre son frère et son amant. Enfin les deux héros cessent de vouloir se vaincre et de se consumer en efforts inutiles. Ils jettent leurs épées, et tombent dans les bras l’un de l’autre. C’est alors qu’Olivier fut réconcilié avec Charles, et Roland fiancé avec la belle Aude. (P. 155-156.) Et c’est ainsi que commença l’amitié de Roland et d’Olivier. ═ Nous ne retrouvons plus Olivier que dans le Voyage à Jérusalem (xiie s.), où il joue, hélas ! un très-misérable rôle. Il accompagne l’Empereur à Constantinople (v. 486-494), et y séduit la fille du roi Hugon. (V. 705-734.) De cette union naît un fils, Galien, qui cherchera son père sur toute la surface de la terre, et le retrouvera, expirant, sur le champ de bataille de Roncevaux. (Galien, xve s., chap. lxiii et dernier.) ═ Mais le poëme où la gloire d’Olivier brille du plus vif éclat, c’est Fierabras. Il en est le héros. C’est lui qui, dans un duel interminable, lutte contre le géant sarrazin, et le convertit. (Fierabras, poëme du xiiie s., v. 369-1691.) Cette victoire ne l’empêche pas de tomber aux mains du roi sarrazin Balant. (Ibid., v. 1692-1862.) Mais avec les autres barons chrétiens, il est délivré par Floripas, fille de Balant (Ibid., v. 2713-5861), et accompagne à Rome son inséparable ami Roland. ═ Dans Otinel, Olivier est un de ceux qui s’enfuient devant les païens, au siége d’Attilie. (Vers 1060-1062 de ce poëme du xiiie s.) ═ Il joue un plus beau rôle dans le Karl Meinet : Ospinel, roi de Babylone, se mesure avec lui, et a le poing coupé. Ce Sarrazin se convertit et meurt baptisé. Sa fiancée, Magdalie, fille de Marsile, veut venger Ospinel, mais tombe au pouvoir de Roland, qui se prend pour elle d’un amour trop vite partagé. Cependant Olivier n’est pas en vain le frère de la belle Aude, et parvient à arracher Roland à ces indignes amours. (A. Keller, résumé par G. Paris, Histoire poétique de Charlemagne, 489-491.) ═ Au commencement de l’Entrée en Espagne, Olivier nous apparaît luttant avec le géant Ferragus, mais cette fois vaincu. (Ms. fr. de Venise, xxi, f° 27.) La victoire de Roland le délivrera. (Ibid., f° 80-81.) Sous les murs de Pampelune, il est l’un des plus vaillants ; mais, trop fidèle à Roland, il le suit trop facilement dans son escapade de Nobles, et s’empare de cette ville avec lui. (Ibid., 177-202.) C’est à lui que Roland la donne ; mais Olivier la cède à Filidès le « Convers », et, dans une nouvelle bataille, tue le Sarrazin Folqenor. (Ibid., f° 202-211). Lorsque Roland est insulté par l’Empereur à cause de sa désobéissance, Olivier est un de ceux qui plaident le plus tendrement sa cause. (F° 219.) C’est à lui surtout que pense Roland en Orient (F° 229, etc.), et c’est lui qui s’élance le premier à la rencontre de son ami, lorsqu’il revient en Espagne. (F° 298.) ═ On sait la place qu’occupe Olivier dans la Chanson de Roland ; on connaît son amitié, que rien ne peut décourager, pour le neveu de Charlemagne ; sa modération quand il conseille à son ami de sonner du cor pour appeler l’Empereur à leur secours (v. 1049-1096) ; son admirable courage ; sa mort. (Vers 1932-2065.) ═ C’est là le cas de rappeler en deux mots le dénoûment du Galien. Pantelant, moribond, sur le point de rendre le dernier soupir, Olivier retrouve son fils Galien sur le champ de bataille de Roncevaux, et il expire en le montrant à Roland...

Vers 257.Vos vos. O.

Vers 260.Vos. O.

Vers 261.Blarcher. O. M. Blancheer. G. Blancheier. Mu.

Vers 262.Jugez. O. Pour le cas sujet du pluriel, il faut juget.

Li duze Per... Quelle est l’origine des douze Pairs ? Il y a à distinguer. L’idée de Compagnonnage (et les douze Pairs ne sont que les membres d’un compagnonnage militaire ; on les appelle même les douze Compagnons) est essentiellement une idée germanique qui s’est modifiée dans le droit féodal. Quant au chiffre douze, bien qu’il soit consacré chez les tribus germaines, il nous semble ici d’origine chrétienne. On a donné à Charles douze Pairs, parce que le Christ avait eu douze apôtres. C’est ce que l’on trouve exprimé dans la Karlamagnus Saga. (I, 59.) D’après Girart d’Amiens, c’est Naimes qui donna à Charles l’idée de cette institution. (Ms. 778, f° 113, v°.) Mais la Saga est mieux inspirée en en faisant honneur à l’Empereur lui-même. (I, 59.) M. G. Paris a dit quelque part (Hist. poét. de Charlemagne, 417) que la conception des douze Pairs « n’apparaît pas dans la poésie primitive ». Cette opinion nous semble hasardée, puisque nous trouvons les « Douze » dans la Chanson de Roland, dans le Voyage, dans la Karlamagnus Saga, et même dans Ogier, quoique avec moins de précision. Il est également inexact de dire qu’ils « doivent uniquement figurer dans la guerre d’Espagne », quand nous les trouvons dans Renaus, dans le Voyage, dans Fierabras, Simon de Pouille, etc. etc. Nous donnons ici une quinzaine de listes des « douze Pairs », d’après les sources les plus variées : I. Chanson de Roland : 1. Roland. 2. Olivier. 3. Gerin. 4. Gerer. 5. Berenger. 6. Otton. 7. Samson. 8. Engelier. 9. Yvon. 10. Yvoire. 11. Anseïs. 12. Girart ═ II. Roncevaux. (Textes de Paris, de Venise VII, etc.) 1. Roland. 2. Olivier. 3. Turpin. 4. Estoult. 5. Haton. 6. Gerin. 7. Gelier. 8. Samson. 9. Girart. 10. Anseïs. 11. Berenger. 12. Hue. ═ III. L’Entrée en Espagne. 1. Roland. 2. Olivier. 3. Hestous. 4. Hostes. 5. Ogier. 6. Berenger. 7. Anseïs. 8. Turpin. 9. Girart. 10. Samson de Bourgogne (remplacé à la fin de la Chanson par le jeune Samsonnet, fils du roi de Persie). 11. Naimes. 12. Salomon de Bretagne (ou Richard de Normandie ? ). ═ IV. Renaus de Montauban. 1. Roland. 2. Olivier. 3. Richard de Normandie. 4. Naimes. 5. Ullage l’Anglois. 6. Berenger le Gallois 7. Ydelon de Bavière. 8. Ogier. 9. Turpin. 10. Salomon de Bretagne. 11. Geoffroi d’Angers. 12. Estoult. ═ V. Gui de Bourgogne. 1. Roland. 2. Olivier. 3. Naimes. 4. Ogier. 5. Richard de Normandie. 6. Renier. 7. Yvon. 8. Yvoire. 9. Haton. 10. Tierri. 11. Oede. 12. Samson. ═ VI. Voyage à Jérusalem et à Constantinople. 1. Roland. 2. Olivier. 3. Guillaume d’Orange. 4. Naimes. 5. Ogier. 6. Gerin. 7. Beranger. 8. Hernaut. 9. Aïmer. 10. Turpin. 11. Bernard de Brebant. 12. Bertrand. (V. nos Épopées françaises, II, 272.) On voit que cette énumération et le poëme lui-même sont dus à un cyclique de la geste de Guillaume ; car il met au nombre des douze Pairs cinq membres de cette Geste : Guillaume, Hernaut, Aïmer, Bernard de Brebant et Bertrand. ═ VII. Karlamagnus Saga. (Les mêmes que dans la Chanson de Roland, « sauf que Turpin et Gautier remplacent Anseïs et Girard. » G. Paris, l. I, 507.) ═ VIII. Otinel. 1. Roland. 2. Olivier. 3. Turpin. 4. Gerin. 5. Naime. 6. Otton. 7. Ogier. 8. Engelier. 9. Estoult. 10. Bertoloi. 11. Anseïs. 12. Girart. — IX. Fierabras. 1. Roland. 2. Olivier. 3. Thierry. 4. Geoffroi. 5. Naimes. 6. Ogier. 7. Richard. 8. Berard. 9. Gillimer. 10. Aubri. 11. Basin. 12. Gui de Bourgogne. ═ X. « La Chronique de Weihenstephan (Hist. poét. de Charlemagne, p. 501) supprime de la liste de la Chanson de Roland Gerin et Gerer, Otton, Ivoire et Girart, qu’elle remplace par Turpin, Thierri, Guillaume, Geoffroi et Hatton. » ═ XI. Dans Simon de Pouille, les douze « Compagnons » (mais sont-ce bien les douze Pairs ?) sont : 1. Bernard de Brebant, fils d’Aimeri de Narbonne. 2. Thierry d’Ardenne. 3. Geoffroi de Danemark. 4. Bernard de Clermont. 5. Hue de Maante. 6. Geoffroi Marteau, d’Angers. 7. Drues de Poitiers. 8. Raimbaut le Frison. 9. Simon de Pouille. 10. Richard de Normandie. 11. Gautier de Lombardie. 12. Hugues de Dijon. ═ XII. Ogier nous offre : 1. Naimes. 2. Gilimer. 3. Salomon. 4. Le roi Othon. 5. Thierry d’Ardane. 6. Geoffroi. 7. Doon de Nanteuil. 8. Aimes de Dordone. 9. Girart de Roussillon... (?) ═ XIII-XVI. Dans Galien (Ms. 226 de l’ArsenaI), Garin de Montglane figure au nombre des douze Pairs. Dans Huon de Bordeaux, le héros du poëme entre dans ce corps sacré. Jacques d’Acqui y place le géant païen Ottonnel, après sa conversion. Malceris n’y est pas admis. (Prise de Pampelune, v. 465-561.) ═ Nous donnons ici, à titre de curiosité, la liste des douze Pairs, telle qu’elle se trouve dans les Conquestes du grant Charlemagne, de la Bibliothèque bleue. C’est cette liste qui circule aujourd’hui dans nos campagnes : « Chacun des principaux de l’empereur Charles, appelés communément les douze ou treize Pairs de France, qui étaient capitaines de l’Exercice, étaient forts et vaillants. Il y en avait plus de treize, selon ce que je trouve. Premièrement étoient Roland, comte de Cenonta, fils de Milan (sic) et de dame Berthe, sœur du roi Charlemagne ; Olivier, fils de Regnier, comte de Gênes, qui étoit au lit à l’exercice de Charlemagne (sic) ; Richard, duc de Normandie ; Guérin, duc de Lorraine ; Geoffroy, seigneur bourdelois ; Hoël, comte de Nantes ; Oger le Danois, d’Asie ; Lambert, prince de Bruxelles ; Thierry d’Ardenne ; Basin le Gènevois ; Gui de Bourgogne ; Geoffroi de Frise ; le traître Ganelon, qui fit la trahison de Roncevaux ; Solomon, duc de Bourgogne ; Riol du Mans ; Alory et Guillaume d’Estoc (sic) ; Naimes de Bavière, et plusieurs autres qui étaient sujets à Charlemagne. » (V., sur les douze Pairs, les Épopées françaises, II, 123-176.)

Vers 264.Turpins de Reins en est levet del renc. O. Pour le cas sujet, il faut levez. ═ Quant à Turpin, nous n’avons pas ici à parler du véritable archevêque de ce nom, qui vécut sur le siége de Reims depuis l’an 756 ou 753 (suivant le Gallia), jusqu’en l’année 811, ou 788, ou (suivant le Gallia) 794. Si, dans notre légende, Turpin joue un si grand rôle, c’est à cause de l’importance historique de son siége. Le vrai Turpin a d’ailleurs vécu longtemps sous Charlemagne, et survécu de plusieurs années au désastre de Roncevaux. (V. Flodoard, Hist. de l’Égl. de Reims, II, cap. xvii) ═ Nous n’avons pas davantage à traiter ici la question tant de fois controversée de la Chronique du Faux Turpin. Dans sa thèse De Pseudo Turpino (1865), M. G. Paris est arrivé, comme nous l’avons dit, à cette conclusion scientifique que « les cinq premiers chapitres ont été écrits, vers le milieu du xie siècle, par un moine de Compostelle », et que « les chapitres vi et ss. l’ont été, entre les années 1109-1119, par un moine de Saint-André de Vienne ». La même année, l’auteur des Épopées françaises (I, 70 et ss.) plaçait, avec moins de précision, cette célèbre Chronique à la fin du xie siècle ou au commencement du xiie. (Ceux qui voudraient lire la Chronique de Turpin en trouveront le texte au tome II du Philippe Mouskes de M. de Reiffenberg. M. A. de Saint-Albin vient de la traduire en français, à la suite de la Chanson de Roland ; Lacroix, 1865.) ═ Pour nous borner à étudier Turpin dans nos Chansons de geste, nous trouvons deux légendes fort différentes sur son origine et sa naissance. Suivant la Karlamagnus Saga (I, 26), il est de Rome, et c’est le Pape qui le laissa à Charles ; suivant Aspremont (Lavall., 123, f° 64), il est Français, et sorti de l’abbaye de Jumiéges pour monter sur le siége de Reims. Dist l’Apostoles : « Amis, dont estes né ? — D’outre les mons de France, lou regné. — Moines prisiés ai-jo lonc tancs esté, — En Normendie, soz Rouen la citéDedens Umièges... etc. » Il joue d’ailleurs un rôle important dans tout ce poëme d’Aspremont, où se révèle sa nature plus militaire que sacerdotale. Il est jeune encore : Gentix hons fu et jones chevaler (éd. Guessard, p. 2, v. 47), et n’aime que les belles armes et les beaux chevaux. C’est lui que l’Empereur envoie à ce terrible « Girart do Fraite » pour lui demander son aide contre Agolant, et l’on sait avec quelle fierté sublime notre archevêque remplit ce message. Girart le veut assassiner : il le maudit fort courageusement, et l’abandonne à sa destinée. (P. 13, v. 76 et ss.) ═ Et lorsque la grande guerre contre les Sarrazins est dans toute sa force, au milieu de la plus terrible bataille, il n’y a encore que Turpin qui ait le courage de porter, au front de l’armée, le bois de la vraie croix qui devient entre ses mains étincelant comme un soleil. (Lavall., 123, f° 64.) ═ C’est Turpin qui, dans Ogier, surprend le Danois endormi et le livre à Charlemagne ; mais c’est lui surtout qui, au lieu de le laisser mourir de faim, comme l’Empereur l’a ordonné, sauve le héros, le nourrit, le traite de son mieux et le réserve ainsi à la chrétienté, qui en aura bientôt le plus grand besoin. (Ogier, 9607-9660.) ═ Dans Renaus de Montauban, il refuse également de tuer Richard, et déclare très-fièrement qu’il n’a jamais versé une seule goutte de sang chrétien. (Éd. Michelant, p. 263.) ═ Il prend part à la grande expédition qui doit se terminer à Roncevaux. L’Entrée en Espagne le met, comme les autres Pairs, aux prises avec le géant Ferragus : il est vaincu. (Mss. fr. de Venise, xxi, f° 23-26.) Dans la bataille sous Pampelune, son courage éclate, ses exploits sont magnifiques. (Ibid., f° 149, v°.) ═ Mêmes coups de lance et d’épée dans Gui de Bourgogne, où le terrible archevêque coupe en deux la tête du païen Emaudras, aux grands applaudissements d’Huidelon et de Dragolan. (Vers 3666 et ss.) ═ Turpin est compté au nombre des douze Pairs par Roncevaux (Textes de Paris, de Venise VII, etc.), l’Entrée en Espagne, le Voyage (son gab consiste à jongler à cheval avec quatre pommes, v. 395-507), la Karlamagnus Saga, Otinel, la Chronique de Weihenstephan, etc. ═ On sait comment meurt à Roncevaux l’Archevêque soldat, le « Guerrier de Charles ». ═ Mais la Chronique de Turpin, comme on doit s’y attendre, a le soin de faire survivre Turpin au désastre qu’il raconte... Lors de la mort de Roland, l’Archevêque était près de Charles. Or, le 17 mai, il célébrait la Messe des morts, quand il vit passer dans le ciel les Diables qui emportaient l’âme de Marsile, les Anges qui conduisaient l’âme de Roland. Il raconte cette vision à Charlemagne, et, sur ces entrefaites, Baudouin arrive, qui a assisté à la mort des Pairs et confirme de tout point les affirmations de Turpin. ═ Tous les auteurs qui se sont guidés sur le faux Turpin ont reproduit à peu près la même fable, et se sont également gardés de faire mourir Turpin à Roncevaux. Nous avons énuméré ces auteurs dans notre Notice sur Charlemagne. (V. la note du v. 94. — Cf. les Acta Sanctorum septembris, 1er sept., p. 338.)

Vers 265. — Lisez laissez. Les deux s sont conformes à la prononciation étymologique et se rencontrent beaucoup plus souvent dans notre manuscrit. (Vers 229, 279, 824, 839, 859, 1000, 1127, 1252, 1659, 1931, 2069, 2154, 2162, 2435, 2583, 2717, 2741, 3030, 3902. Ces exemples appartiennent à toute la conjugaison de laisser.)

Vers 267.Oüd. O. Voy., sur le changement du d en t, la note des vers 2 et 122.

Vers 269.Al Sarazin en Espaigne. O. La correction est due à Génin ; Müller l’a justifiée d’après le manuscrit IV de Venise.

Vers 270.Si en. Mu. Le manuscrit porte si n.

Vers 272.Palie. V. la note du v. 2652.

Vers 273.Vos. O.

Vers 274.Francs chevalers. O. Voy., sur notre théorie des vocatifs, la note du v. 15.

═ L’ordre des couplets suivants n’est pas le même dans le manuscrit d’Oxford que dans ceux de Venise (IV et VII) et de Versailles. Nous ne voyons pas bien pourquoi M. Müller (note du v. 280, page 17) a préféré ces dernières versions. Quant à nous, après avoir étudié avec soin les deux textes, nous sommes et demeurons convaincu que celui d’Oxford se suit avec tout autant de logique que les deux autres. Même il nous semble que la laisse : Li Empereres li tint sun guant le destre, est beaucoup mieux placée après celle-ci : Ço dist li Reis : Guenes, venez avant, — Si recevez le bastun et le guant. ═ Pour se conformer aux manuscrits de Venise et de Versailles, M. Müller (dont le procédé est d’ailleurs justifié par les remaniements) a dû couper en deux couplets la laisse : Francs chevalers, dist li emperere Carles... ═ Voici, d’ailleurs, le tableau comparatif des couplets d’après l’ordre du manuscrit d’Oxford, et d’après celui de M. Muller :

Ms d’Oxford
Édit. Muller
1. Francs chevalers, dist li emperere Carles...
E li quens Guenes en fut mult anguisables.
1. Francs chevalers, dist li emperere Carles.
2. Guenes respunt : Pur mei n’iras tu mie. 2. Ço dist li Reis : Guenes, venez avant.
3. Quant ço veit Guenes que ore s’en rit Rollanz. 3. En Sarraguce sai ben qu’aler m’estoed.
4. En Sarraguce sai ben qu’aler m’estoet. 4. E li quens Guenes en fut mult anguisables.
5. Ço dist li reis : Guenes, venez avant. 5. Guenes respunt : Pur mei n’iras tu mie.
6. Li Empereres li tent sun guant le destre. 6. Quant ço veit Guenes que ore s’en rit Rollanz.
Sire, dist Guenes dunez mei le cungied. 7. Li Empereres li tent sun guant le destre.
8. Sire, dist Guenes, dunez mei le cungied.

Vers 275. — Lisez Kar. Cette forme se rencontre bien plus souvent dans notre manuscrit que la forme Car. (Vers 390, 682, 742, 1051, 1131, 1175, 1366, 1676, 1724, 3589, etc.) Kar ou quar (470) offre ici, comme dans presque tous les autres passages de notre texte, un sens spécial d’affirmation explétive, que nous n’avons pas conservé dans notre langue. V. le Glossaire.

Vers 277.Ço ert Guenes mis parastres. Notre Notice sur Ganelon se divisera en deux parties : I. Famille de Ganelon ; II. Vie et mort de Ganelon.

I. Famille de Ganelon. — Dans la Chanson de Roland, Ganelon (la plus ancienne forme de son nom est Guenle : Revue critique, 1870, p. 102) n’a qu’une importance individuelle, et il n’est question de sa famille qu’à la fin du poëme. Encore n’y apparaît-elle que comme caution juridique, et Pinabel est-il le seul à y jouer un rôle actif. (Pinabel, « du château de Sorence, » qui est considéré seulement comme un des trente parents du traître.) Mais les trouvères postérieurs furent, comme on le sait, travaillés par la « monomanie cyclique ». Ils voulurent faire rentrer tous les personnages de notre Épopée dans un cycle, dans une geste déterminée. De là cette division bien connue de nos Chansons en trois gestes : celle du Roi, celle de Garin de Montglan, celle de Doon de Mayence. (Girars de Viane, éd. Tarbé, pp. 1, 2 ; Doon de Mayence, vers 3 et suivants ; Garin de Montglane, B. N. Lav. 78, f° 1 et 2 ; Chronique saintongeaise, citée par G. Paris, l. I, 76.) Or c’est à la geste de Doon qu’appartient Ganelon, ou, pour mieux parler, c’est dans cette geste qu’on l’a casé. Il est le fils de Grife ou Grifon d’Hautefeuille et petit-fils de ce Doon de Mayence qui eut douze enfants, dont l’auteur de Gaufrey nous donne ainsi les noms (vers 80-120) : 1° Gaufrey, père d’Ogier ; 2° Doon de Nanteuil, père de Garnier de Nanteuil ; 3° Grifon, père de Ganelon ; 4° Aymon de Dordone, père de Renaut, Alart, Richart et Guichart ; 5° Beuves d’Aigremont, père de Vivien l’Esclavon, grand-père de Maugis le larron ; 6° Othon, père d’Yvon et d’Yvoire ; 7° Ripeus, père d’Anseïs ; 8° Sevin de Bordeaux, père de Huon, qui fut l’ami d’Oberon ; 9° Peron, père d’Oriant, grand-père du chevalier au Cygne ; 10° Morant de Rivier, père de Raimond de Saint-Gilles ; 11° Hernaud de Giron ; 12° Girart de Roussillon. Telle est cette généalogie factice et qui n’a rien de traditionnel. ═ Néanmoins on est encore allé plus loin dans cette voie, et Jourdains de Blaives va jusqu’à créer décidément une quatrième geste, celle des traîtres. Mais il faut encore spécifier davantage. On donne à Ganelon un fils, Bérenger (Aye d’Avignon, vers 22), et un autre encore que Gui de Bourgogne appelle « Maucion ». Dans le même poëme on fait de Pinabel son frère. (Vers 152.) Il a des neveux : dans Gui de Nanteuil, c’est Hervieu : Fix fu de la seror au cuvert Guenelon ; dans Aye d’Avignon, c’est Aubouin et Milon (vers 151, 152) ; dans Jehan de Lanson, c’est le personnage de ce nom et son frère Nivard. Sa famille est nombreuse. De Grifon, dit l’auteur de Gaufrey (vers 3999 et suiv.), sont sortis Ganelon, Hardré, Milon, Aubouin, Herpin, Gondré, Pinabel de Sorenche, Thibaut, Fourré, Hervieu de Lyon, Thibaut d’Aspremont. ═ Suivant Parise la Duchesse (vers 15-20), il y a douze traîtres de la race de Ganelon : Hardré, Alori, Thibaut d’Aspremont, Pineau, Roger, Hervieu de Lyon, Pinabel, Roger, Samses d’Orion, Berenger, Miles (et probablement Aubouin). ═ Dans Aye d’Avignon, ce dernier s’écrie au moment de mourir : Si je vois en enfer selon m’entencion, — Je trouverai laiens mon oncle Ganelon, — Pinabel de Sorente et mon parent Guion. — Nous serons moult grant geste en cele region. (B. N. 7989, f° 104.) ═ Et Philippe Mouskes (vers 8454 et suiv.) place dans la famille des Traîtres « Guenes et ses parents, Fromont, Alori, Hardré, Samson et Amaugri ». ═ Avec les textes précédents, on pourrait croire que l’énumération des traîtres est complète : il y manque cependant ce fameux Macaire de Lausanne, de la famille de Mayence, qui, dans le poëme publié sous ce nom, attaque si injustement l’innocence de la reine Blanchefleur. C’est sans doute ce même Macaire que les Reali (Spagna, chap. 131-132) nous ont montré sous des traits si odieux... « Charles, pendant la guerre d’Espagne, le laisse en France comme son lieutenant. Il abuse de ce pouvoir, veut enlever à Charles son royaume et sa femme, le fait passer pour mort, etc. » (G. Paris, l. I, 397, 398.) ═ Dans Aiol, un traître du même nom essaie plusieurs fois de tuer le héros de ce beau poëme ; il est enfin pendu. ═ À la même famille appartient, dans Renaus de Montauban, cet Hervis de Lausanne qui propose à l’Empereur, moyennant bonne récompense, de lui livrer les fils Aymon. Et, en effet, il pense ouvrir à Charles les portes du château de Montessor, où Renaut est enfermé avec ses frères ; mais son projet est déjoué, et le misérable écartelé. (Renaus de Montauban, éd. Michelant, p. 68, vers 24 — p. 73, vers 17.) ═ La famille de Ganelon joue partout le même rôle, qui est odieux. Pas de roman sans traître ; pas de traître en dehors de cette race maudite. Dans Amis et Amiles, c’est Hardré ; dans Gui de Nanteuil, c’est Hervieu, etc. etc. C’est une malédiction qui pèse sur cette race, et l’auteur de Girars de Viane ne nous laisse pas ignorer que la cause de cette malédiction fut l’orgueil : « Les Mayençais eurent l’ambition, mais ils eurent aussi le châtiment de Satan et des anges déchus. »

II. Vie et mort de Ganelon. — Lorsque Charles, très-épris de Galienne, quitta l’Espagne, où ses enfances s’étaient écoulées près du roi Galafre, il voulut tout d’abord délivrer l’Italie des Sarrazins. Sur le siége de Rome il trouva par malheur un pape de la famille de Ganelon qui lui fit obstacle, et il ne put en triompher que grâce à l’appui du roi de Hongrie et d’un cardinal qu’il éleva plus tard sur le siége apostolique. (Enfances Charlemagne, 2e branche du Charlemagne de Venise, manusc. fr., xiii.) Mais ce n’est pas encore à Ganelon lui-même que nous avons affaire. Albéric de Trois-Fontaines (?) le fait naître à Ramerupt (?). Il apparaît pour la première fois, au début d’Aspremont, avec son père « Grifon d’Autefeuille », et fait partie de la grande armée d’Italie : Ensemble o lui fu ses fils Guenelon — Qui de Rollant fist pus la traïson. (Éd. Guessard, p. 19, vers 79, 80.) Rien d’ailleurs ne fait encore pressentir son crime futur. Nous voyons bien dans Renaus de Montauban les fils du héros de ce poëme avoir maille à partir avec Ganelon, Hardré et Grifon d’Hautefeuille (éd. Michelant, p. 421, vers 26 — p. 442, vers 8) ; mais c’est là un anachronisme commis par l’auteur d’un roman qui appartient d’ailleurs à un tout autre cycle que celui du Roi. Quand Ganelon épousa-t-il Gille, la sœur de Charles, c’est ce qu’il est difficile d’établir. Son rôle ne commence à s’accentuer que dans l’Entrée en Espagne. Fidèle à la tradition primitive, l’auteur, ou plutôt le compilateur de ce poëme trop peu connu, représente à deux reprises Ganelon comme un brave chevalier et un loyal baron : Iloc fu Gaynes corageus e loial. (Manusc. fr. de Venise, n° xxi, f° 170, r°.) Dès la Prise de Pampelune, il devient odieux. C’est lui qui propose à Charles d’envoyer à Marsile les deux ambassadeurs Basan et Basile, et, quand ceux-ci ont été mis à mort par le païen (2597-2704), c’est lui, c’est encore lui qui propose d’envoyer un autre messager au Sarrazin ; c’est lui qui, pour se venger de Guron, contre lequel il a une rancune, une haine particulière (vers 2841), le fait choisir pour cette mission plus que dangereuse. C’est Ganelon enfin qui fait infâmement prévenir Malceris de l’arrivée du malheureux Guron, et qui est ainsi le véritable auteur de cette mort. (Vers 2740-3850.) Comme on le voit, l’auteur de la Prise de Pampelune dépasse ici toute mesure ; mais il sera un jour dépassé par l’auteur de Mabrian, qui nous montrera Ganelon étouffant, dans une caverne, Mangis et les quatre fils Aymon. (Édit. de J. Niverd, en 1530.) Au commencement de Fierabras (vers 245-365), Ganelon approuve hypocritement le duel d’Olivier avec le géant païen, et désire très-vivement assister à la mort de cet ami de Roland. Dans Renier de Gennes, c’est Grifon d’Hautefeuille et son fils qui sont les irréconciliables ennemis des fils de Garin de Monglane. (Ars. B. 4. F. 226, 34, r°.) Ganelon, partout et toujours, est nécessairement traître. Bien plus délicat et plus connaisseur du cœur humain est le poëte de la Chanson de Roland. Il nous fait assister, minute par minute, à la décadence de Ganelon. Au commencement de notre poëme, c’est encore un bon chevalier, un cœur loyal : la jalousie et la haine le font insensiblement descendre jusqu’au crime. Mais jusque dans sa trahison, jusque dans son châtiment, il conserve je ne sais quel air de grandeur. La « Chronique de Turpin » n’y met pas tant de délicatesses. (Cap. xxi : De Proditione Ganelonis.) Ganelon ne cède pas ici à un mouvement de colère, à une passion violente, mais seulement à la cupidité, à la soif de l’or. Nous avons déjà vu comment les Remaniements de la Chanson de Roland (textes de Paris et Venise, VII et IV) ont consacré plus de place à Ganelon que la Chanson primitive. Il s’enfuit deux fois avant son procès, et n’est remis entre les mains de Charles que grâce à la vigueur et au courage d’Othes. (Texte de Paris, édit. F. Michel, vers 10622-11560.) ═ Enfin, nous croirons avoir tout dit sur la personne de Ganelon, quand nous aurons indiqué une variante assez importante qui nous est fournie au sujet de son châtiment par un poëme du xiiie siècle, Gaydon. Suivant l’auteur de cette Chanson peu traditionnelle, Ganelon aurait été brûlé, et non pas écartelé. Mais l’écartèlement est beaucoup plus fondé dans la légende : il nous apparaît partout comme le châtiment spécial réservé aux traîtres. ═ Nous n’avons pas à discuter ici l’assimilation que M. Génin a prétendu établir entre notre Ganelon et un personnage historique, Wenilo, archevêque de Sens, lequel, en 859, trahit pour Louis le Germanique la cause de Charles le Chauve, qui l’avait comblé de bienfaits. Cette assimilation ne nous parait pas un instant soutenable, non plus que l’idée défendue par Hertz et d’Avril, d’après laquelle Ganelon serait le Hagen des Nibelungen. Nous pensons que Ganelon est, dans notre poëme, un personnage idéal, le « type du Traître ». En général, il ne faut pas chercher à expliquer historiquement chaque détail de nos Chansons de geste. Elles ont été souvent inspirées soit par des légendes qu’on retrouve partout, comme celle de Berte aux grans piés ; soit par des types généraux, comme celui du Traître. Nous ne nions pas l’influence des faits historiques : nous la restreignons.

Vers 278. — Lisez kar, et, au v. 279, laissez. ═ Franceis. Au v. 274. franc chevaler doit plutôt se traduire par : « Francs chevaliers. »

Vers 282. Palie. V. la note du vers 2652.

Vers 283. Vairs out e mult fier lu visage. O. Mi. et G. avaient suppléé : Vairs out les iex. Mais M. Müller, trouvant partout dans notre texte la forme oilz, a eu raison d’écrire : Vairs ont les oilz. ═ Lu visage. O. V. la note du v. 142.

Vers 285. — Lire esguardent, O.

Vers 287. Parastres. O. Quelques vers plus haut (277), on lisait, au sujet singulier, parastre, qui est la forme correcte.

Vers 290. Muvera. O. Muvra[i]. Mu. V. la note du v. 38.

Vers 292.Orgoill. O. Nous avions à choisir entre les deux formes orgoill et orguill. Elles se trouvent l’une et l’autre dans le texte de la Bodléienne : (Orgoill, 389, 934, 1773, 1941, 2279. Orguill, 228, 578, 1549. ═ Orgoillus, 3175, 3199, 3965. Orgoillusement, 3199. ═ Orguillus, 28, 474, 2135, 2550, 2978, 3132.) La notation oi étant rare dans notre Ms. et antipathique à son dialecte, nous avons choisi orguill.

Vers 295.Por. O.

Vers 297. — Il vaut p.-e. mieux lire ies. O. V. la note du v. 648. ═ Mes. O. V. la note du v. 39.

Vers 300.Frai un poi degerie. O. F(e)rai un poi de (le)gerie. Mi. Mu. — Ferai un poi delegerie. G.

Vers 301. Que jo n’esclair. Mi. Mu.

Vers 303. Qu’ore. Mu. Le Ms. porte nettement que.

Vers 308. Dreiz. O. — Voir, pour la Théorie des vocatifs, la note du v. 15.

Vers 309.Comandement. O. Nous avions à choisir entre les deux formes com... et cum... La première se rencontre dix fois, la seconde quinze fois dans notre texte. Mais surtout, la première est conforme à toutes les lois de notre dialecte, et notre scribe écrit toujours : cum... les mots dérivant de la préposition latine. Il est vrai qu’en ce cas spécial il pouvait hésiter, les Latins eux-mêmes ayant écrit commendo.

Vers 310. — Avant ce couplet, les remaniements de Versailles et Venise VII nous en offrent un autre : Li emperere à la barbe florie, etc. qui est une addition évidente du rajeunisseur.

Vers 314.Baldewin. O. Pour le cas sujet, il faut Baldewins (le type latin étant Baldewinus). ═ Lire p.-e. iert et aussi : prozdoem (O.), à cause de ce couplet qui est assonancé en oe.

Vers 316. — L’r de guardez n’apparaît pas dans le manuscrit.

Vers 318.Comant. O. V. la note du v. 309.

Vers 319. Guenes. O. Quel que soit le type latin dont on fasse dériver le mot Guenes (Wenilo, Wenilus, etc. etc.), le vocatif ne peut avoir un s. Voy., à la note du v. 15, notre Théorie sur les vocatifs. ═ M. Müller fait observer qu’il manque ici, comme dans le texte de Venise (IV), une strophe dans laquelle Charles spécifierait le message qu’il confie à Ganelon. (Éd. T. Müller, p. 20.) Or le texte de Versailles et celui de Venise (VII) comblent cette lacune, et nous trouvons dans notre Chanson elle-même (428 et ss., 469 et ss.) les éléments d’une reconstitution facile. Nous n’avons pas osé insérer, dans notre texte lui-même, aucune addition notable ; mais nous nous sommes réservé de proposer au public, dans le cours de ces notes, les interpolations véritablement nécessaires. Voici donc comment nous proposerions de restituer le couplet absent, et, dans cette restitution, nous avons soin de suivre toutes les lois de notre dialecte :

Bel sire Guene, dist Carles, entendez :
De meie part Marsiliun direz

Que il receivet seinte chrestientet.
Demi Espaigne li voeill en fieu duner.
L’altre meitiet averat Rollanz li ber.
Se ceste acorde il ne voelt otrier,
Suz Saraguce le siége irai fermer :
Pris e liez serat par poestet,
Ad Ais le siet serat tut dreit menez :
Par jugement serat illoec finez ;
Là murrat-il à doel e à viltet.
Tenez cest brief ki est enseellez,
Enz el’ puign destre à l’ paien le metez.

Les Remaniements (Versailles et Venise VII) nous offrent deux autres Couplets, à la suite de celui que nous venons de restituer. Dans le premier, Guenes reçoit l’arc des mains du Roi (xxviii de Versailles) et le brise en voulant le tendre ; dans le second (xxix), il reçoit le bâton. Cette dernière circonstance étant très-clairement marquée dans notre texte d’Oxford (v. 341), nous ne pensons pas que le second de ces couplets appartienne à la Version originale. Quant à l’autre épisode, il se trouve ailleurs dans notre texte. (Vers 766 et ss.) Chez notre rajeunisseur, il est plein de répétitions inutiles et de certains traits relativement modernes. Voici, d’ailleurs, ces deux laisses : Li Emperere ot sa gent assemblé — Et uns et autres à Cordes la cité. — Or, est Guenes mot mal atalenté, — Rollant esgarde, si l’a araisoné : — « Cuvert, dit-il, tu as le sen desvé ; — A grant martire as mon cors délivré, — Quant sor moi as le message torné. — Or irai là, ja n’en ert trestorné. » — Nostre empereres l’a un poi regardé : — « Guene, dit-il, trop en avez parlé. » — Un arc li tent, et Guenes l’a cobré, — D’un chief en autre l’a froissié et cassé : — « Hé ! Dex, dist Challes, par ta sainte bonté, — Por cest felon somes toz tormenté. — Par cel Seignor qui primes me fist né, — Je ne lairoie chier ne soit comparé : — Car Guenelons est mot de mal pensé ; — De felonie le voi mot escaufé ; — Vers traïson a tot son cors torné. — Li rois Marsilles, se il le sert à gré, — Toz nos vendra por sa grant cruauté. — Terre de France hui chiet en grant vilté. »Guenes s’acline devant les piés Challon, — Tendi ses mains, si reçut le baston. — Il prist les briés o tot le qairelon, — En une boiste le mist por garison ; — Puis, pria Deu qu’il doinst maleïçon — A toz icels qui l’jugièrent par non : — « Par cel Seignor qui forma Lazaron, — Se Dex ce done qui sofri passion — Que j’en repaire à ma sauvation, — Jà ne ferai onques de mesprison — Que de Rollant n’en prenge vengeson. » (Versailles, vers 426-458.)

Vers 320.Lu guant. O. V. la note du vers 142. ═ Le gant et le bâton, comme le fait observer un éditeur de Roland, indiquent l’investiture d’une charge ou d’une mission : Karles tient son gant destre, Olivier l’a baillié. — Et li quens l’en rechut, si l’en a merchié. (Fierabras, p. 11 de l’édition Krœber et Servois. Cf. Gaufrey, édition F. Guessard et P. Chabaille, p. 47.) Le bâton est également indiqué dans ce vers de Huon de Bordeaux : Charles, y est-il dit, en sa main tient d’olivier un baston. (Vers 9499.)

Vers 321.Vos. O. V. la note du v. 17.

Vers 324. — Lire pur. ═ Si cumpainz. O. Si pour sis. Forme incorrecte, reproduisant sans doute une prononciation où l’s était éteinte.

Vers 325.Por. O. V. la note du v. 17.

Vers 328.Vos. O.

Vers 329.Avrai. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 330. — Lisez frere. (V. la note du v. 1.) ═ Basant. O. À cause du cas sujet, il faut Bazanz (?). ═ La Prise de Pampelune appelle ces deux messagers, l’un Basin ou Baxin de Langles (v. 2547, 2600, 2657) ; et l’autre, tantôt Basel (V. 2548), et tantôt Basent (2657).

Vers 333. — Dans le Keiser Karl Magnus’s Kronike, ce n’est pas le gant, c’est le bref qui tombe des mains de Ganelon : « Des lettres furent écrites, et le Secrétaire les remit à Gevelon pour qu’il les portât à Marsile. Mais Gevelon détourna les mains, et les lettres tombèrent par terre. Les douze Pairs sourient et Roland dit : « Si l’Empereur m’avait confié les lettres, la peur ne me les aurait pas fait lâcher, et elles ne seraient pas tombées à terre... »

Vers 335.Grant. O. Pour le cas sujet, il faut granz. Sur les adjectifs à une seule terminaison pour le m. et le f., voyez la note du v. 19. ═ Au v. 336, lire nuveles.

Vers 339. — Lire Mien. O. V. la note du v. 149 et celle du V. 545.

Vers 340.Asols. Pour le cas régime (absolutum), il faut asolt.

Vers 341.Livrat. Mu.

Vers 342. — Ce couplet est en er, le précédent était en ier. Le remaniement de Venise VII présente ici deux laisses (l’une en iez, l’autre en er) coupées de la même manière, etc. ═ Lire, en assonances, targier, mien, O. seigniet, brief.

Vers 344.Meillors. O. V. la note du v. 51. ═ Recuvrer. Mu. Le Ms. porte recuverer, avec cette abréviation que nous avons discutée dans la note du v. 38.

Vers 346.Ceint. O. Erreur évidente.

Vers 347.Munted. O. À cause du cas sujet, il faut muntez.

Vers 348.Sun. O. Le cas sujet de sun est sis, que nous avons restitué. ═ Uncle. O. À cause du sujet singulier, il faut uncles. ═ De même pour Guinemer. O. La leçon correcte est Guinemers.

Vers 349. — Lire veïssez. ═ Tant chevaler. O. La leçon du Ms. et cette autre : Tanz chevalers, sont aussi régulières et aussi admissibles l’une que l’autre d’après le texte de la Bodléienne. ═ Lire p.-e., ici comme partout, chevalier au lieu de chevaler, sauf toutefois pour les assonances des couplets en er. Car ce mot sert à la fois d’assonance dans ces laisses et dans celles en ier...

Vers 351.Cort. O. Aux vers 231, 446, 775, on trouve curt, qui est conforme à l’étymologie et à la phonétique. Cort ne se trouve qu’une seule fois dans tout le manuscrit. ═ Lire en curt à l’ rei. Cf. le vers 448. ═ Ested. O. V. la note des vers 2 et 122.

Vers 352.Vos. O. V. la note du v. 17. ═ Solt. O. Lire soelt, qui est justifié par plus d’exemples dans notre texte, mais qui surtout s’accorde mieux avec sa phonétique spéciale.

Vers 353.Doüsez. O. L’étymologie debuissetis exige deux s. Doüssez, d’ailleurs, se trouve au V. 455.

Vers 354.Charlemagne. O. V. la note du v. 94. ═ Ercs. O. Erreur évidente. — Lire plutôt iert.

Vers 356.Estrait. O. Le cas s. s. m. veut estraiz. ═ Parented. O.

Vers 357.Car nos. O. Lire, dans notre texte : Kar nus. Pour Kar, voyez la note du v. 275 ; et, pour nus, la note du v. 17.

Vers 359. — Lire mielz. O. ═ Lire mielz est suls moerge.

Vers 360.Vos. O.

Vers 363.Filz. O. Pour le cas régime, il faut fil.

Vers 365.Achiminez. O. Acheminet : l’e s’explique par chemin, 405, 1250, 2426, et le t final, par le verbe réfléchi. Se est un véritable régime s. m., avec lequel doit ici s’accorder le participe.

Vers 368.Lu. O.

Vers 373.Ad oes seint Pere en conquist le chevage. C’est une allusion évidente au Denier de saint Pierre : « Beaucoup d’écrivains ont considéré, comme le premier auteur du Denier de saint Pierre, Ina, roi de Wessex, qui fonda à Rome la Scola Saxonum pour de pauvres pèlerins anglais et de jeunes Anglo-Saxons, et qui mourut dans cette ville en 728. Mais le silence de Bède et de tous les écrivains des siècles suivants rend cette opinion plus que douteuse. Il y a beaucoup de raisons d’attribuer cette institution aux rois Offa et Ethelwulf. Offa, roi de Mercie (✝ 796), qui attribuait ses victoires à saint Pierre, lui promit, en son nom et en celui de ses successeurs, un tribut annuel de 300 marcs... Ethelwulf, père de l’illustre roi Alfred, renouvela, durant son séjour à Rome en 855, la promesse d’Offa... Alfred, dès qu’il eut soumis les Danois, envoya le tribut annuel rétabli par son père, et, sous le règne d’Édouard (901-924), on parlait du Denier de saint Pierre comme d’une institution permanente. » (Schrödl, dans le Dict. encycl. de la théol. catholique de Welte et Wetzer, VI, pp. 183-184.) Notre Chanson attribue faussement à Charles l’institution du Denier de saint Pierre. Mais, touchant sa date originelle, elle ne se trompe pas : Offa fut, en effet, contemporain de Charlemagne.

Vers 376. — Lire plutôt iert. ═ Hume. O. V. la note du v. 20, sur la déclinaison d’hom. ═ Lire vaillet, avec le t étymologique que le scribe n’oublie presque jamais. (Cf. 1666.)

Vers 377.Francs. O. À cause du cas s. p., il faut Franc. ═ Gentilz. O. Même observation. (V. la note du v. 20, sur le pluriel des substantifs dérivés des noms latins en es.) ═ Home. O. Pour l’assonance, il faut régulièrement hume, qui se trouve quatre vers plus bas. (V. la note du v. 20.)

Vers 378.E duc e cil cunte. O. Cil a été restitué par G. et Mu.

Vers 381. — Lisez veirs. O. Veirs vaut autant et mieux que veir. L’s peut s’expliquer comme l’s final de sempres, unkes et primes. Il est difficile de supposer ici veirs au s. s. m., comme volentiers, etc.

Vers 382.Mès. O. Mais est la forme qui, à beaucoup près, est la plus généralement employée dans le texte d’Oxford. C’est pourquoi nous l’avons partout adoptée. ═ Avrat. Mu. V. la note du v. 38.

Vers 383.Er matin, 383. Pour rétablir la mesure, nous avons adopté main. ═ Lire her. (2745.)

Vers 384.Ses. O. Lisez sis. V. la note du v. 39.

Vers 385.E out preiet dejuste Carcasunie. Génin ayant lu ens el preet, traduit par : « En un pré devant Carcassonne ; » M. de Saint-Albin fait de même, et écrit : « Dans une prairie devant Carcassonne ; » M. d’Avril : « En la prairie auprès de Carcassonne. » Enfin M. Fr. Michel lit : Et out preet, et traduit : « Et eut prié près de Carcassonne. » Aucune de ces traductions ne nous semble exacte. M. Müller a restitué pre[i]et. Il s’agit, en effet, du verbe preier, proier, preer, qui vient de prædari, et signifie « piller, butiner ». Les exemples de ce verbe sont nombreux. On lit dans la Chronique de Rains (c. xxv) : Après feroit tout le pays praer ; dans les Chroniques de Saint-Denis (Ms. de Sainte-Geneviève, f° 17, r°, col. 1) : Danois praerent et gasterent la terre le roi Theodoric ; et enfin dans Ogier le Danois, v. 10752 : Dusqu’à Estampes out tot ars et préé... Et ce même verbe est employé au neutre dans Otinel : Kar Sarazin repairent de preer (v. 889) ; et dans la Desputoison de Challot et du Barbier, par Rutebœuf : Chascuns devient oisel de proie ; — Nus ne vit mès se il ne proie. Nous pourrions ici fournir beaucoup d’autres textes, que nous devons, comme les précédents, à l’obligeance de M. Frédéric Godefroy. Nous avons donc traduit : Il out preiet, par : « il eut butiné ». ═ Carcasonie. O. À cause de l’assonance et de la phonétique, Carcasunie.

Vers 389.Orgoilz. O. V. la note du v. 292. ═ Devreit. Mu. V. la note du v. 38.

Vers 390.Chascun. O. V. la note du v. 203. ═ De mort s’abandunet. O. Pour la mesure du vers et la logique grammaticale, nous avons dû mettre : A mort il s’abandunet. On ne rencontre point le verbe s’abandonner avec la proposition de.

Vers 391.Avriumes. O. Forme féminine des premières personnes du pluriel. V. la note du v. 42.

Vers 392.Rollant. Mu. Pour le cas sujet, il faut Rollanz.

Vers 397.Ament. O. Partout le prés. de l’ind. du verbe amer prend l’ai : aimet, etc. Nous en avons donné la raison dans le Glossaire.

Vers 399. — Lire destriers, ici comme partout. Ce mot ne se trouve en assonance que dans les laisses en ier.

Vers 400.Li Emperere meïsmes. O. Pour la mesure du vers, il était facile de restituer : Li Reis meïsmes.

Vers 401. — Ce vers est de douze syllabes, et l’on en trouve un certain nombre dans le texte d’Oxford.

Vers 402. — Les remaniements de Venise VII et Versailles offrent ici une laisse de plus ; mais ce couplet ne nous semble pas avoir été dans l’original. On y voit Ganelon séduit en secret par les richesses des païens. Ce trait n’a rien de primitif : Li Sarazins esgarde Guenelon : — Cors ot bien fait et clere la façon ; — Le neis ot bel et chière de baron, — Proece ot grant et regart de felon. — Li cors li tremble aval jusqu’à l’talon. — Isnelement li a trait un sermon : — « Sire, dist-il, entendez ma raison. — Quidez vos prendre de Rollant vengeson ? — Par Mahomet, s’en faites traïson, — Mot est cortois li rois Marsilion, — Tote sa terre vos mettra à bandon ; — De son avoir aurez grant partison, — Or et argent, pailes et siglaton, — Muls et chevaux, chamels, ors et lion, » — Guenes l’entent, si baissa le menton. — D’une grant pièce ne dist ne o ne non. (Versailles, vers 568-574.)

Vers 403.L’un. O. Pour le cas sujet, il faut l’uns.

Vers 407.Faldestoet. O. Sur six fois, le d se trouve cinq fois à la fin de ce mot (faldestoed, 115, 452, 609, 2553, et faldestod, 2804).

Vers 408.Envolupet. O. Faldestoed vient du neutre faldistorium. Je laisse donc envolupet au neutre. ═ Palie alexandrin. V. la note du vers 2652.

Vers 410.Sarrazins. O. — Pour le cas sujet du pluriel, il faut Sarrazin. Notre scribe se trompe souvent sur cette règle essentielle, surtout quand le verbe est sous-entendu, ou lorsque le sujet est après le verbe. Nous n’en trouverons que trop d’exemples.

Vers 411.Celoi. O. Quelques vers plus bas (407) on trouve celui, et c’est la forme que nous avons adoptée : 1° par une raison de phonétique générale, la notation oi étant fort rare dans notre texte ; 2° comme étant plus en rapport avec la forme analogue lui et avec altrui. Il est vrai que l’on rencontre plus souvent celoi que celui. Mais ici, comme partout, nous faisons passer les règles générales avant les particularités.

Vers 413.As Guenes et Blancandrins. Après as ou ais (voici), on trouve tantôt le cas sujet (vers 889, 2009, 3818), tantôt le cas régime (vers 263, 1187, 3495). C’est ainsi qu’ecce gouvernait soit le nominatif, soit l’accusatif. Nous n’avons ici rien changé à notre texte, laissant au scribe la liberté de choisir entre deux systèmes également corrects.

Vers 415.Puig. O. La forme étymologique est puign, qui se retrouve dans puignant, puignent, etc.

Vers 417.Qui. O. Le sens exige dunt.

Vers 418.Fesime. O. Les premières personnes du pluriel prennent partout une s.

Vers 421.Un sun noble barun. O. Soen est, dans la plupart des cas, employé ici au lieu de sun. Nous l’avons restitué. (V. le Glossaire.)

Vers 422.Hom. O., Pour l’assonance, nous imprimons hum, qui se trouve ailleurs dans notre texte (vers 2559.)

Vers 423.Avrez. Mu.

Vers 424.Marsilie. O. Pour le cas sujet, il faut Marsilies.

Vers 426.Saver. O. Partout le substantif saveir prend la notation ei : Vostre saveir est grant. (Vers 3509.) V. aussi les vers 3279, 3774. Il en est de même de l’infinitif saveir. (V. 1538.)

Vers 429.Le glorius qui. O. Nous avons restitué que (aürer voulant après lui un régime direct).

Vers 430.Li ber. O. On trouve au sujet sing. les deux formes ber et bers. La première est la plus fréquente. C’est aussi la meilleure, si l’étymologie du mot est baro, baronis. Pour expliquer bers, il faut barus, qui se rencontre, en effet, dans quelques documents (même on trouve au pluriel, les bers). Lire partout, dans notre texte : ber.

Vers 432.Vos. O. « On remarque, dit M. Müller, qu’il manque ici deux points essentiels au message de Charles exposé par Ganelon. Or ces deux points sont indiqués dans la strophe xxxvi, où le message est encore une fois répété. » Après le vers 432, nous insérerons les vers suivants :

L’altre meitiet averat Rollanz li ber :
Mult orguillus parçunier i averez.

Et, après le vers 433, le vers qui suit :

Suz Saraguce vait le siège fermer.

Vers 434.Poested. O. V. la note des vers 2 et 122. Cf. poestet au vers 471, qui est exactement le même.

Vers 435.Amenet. O. Pour le cas sujet il faut amenez.

Vers 436.Finet. O. Id.

Vers 438.Esfréed. O. Id.

Vers 439.Algier. O. V. le vers 442. ═ Enpenet. O. Pour le cas sujet il faut enpenez.

Vers 440.Volt. O. V. la note du vers 40. ═ Desturnet. Pour le cas sujet il faut desturnez.

Vers 444.Deie. O. Erreur évidente.

Vers 446.Avrai. Mu. Voir la note du vers 38.

Vers 449.Avrunt. Mu. Id. ═ Meillor. O. V. la note du v. 51. ═ Cunperée. Mu. On trouve, dans le texte d’Oxford, autant d’exemples de cunparer que de cunperer.

Vers 450. — Quand le roi eut lu la lettre, il vit que l’Empereur prenait le titre de roi d’Espagne : c’est pourquoi il entra en colère et frappa Gevelon avec un bâton. Gevelon tira son épée et dit : « L’Empereur demandera que ma mort soit vengée. » Le Conseil du roi intervint et dit que le roi avait tort... (Kaiser Karl Magnus’s Kronike.)

Vers 451.Tuit. O. Erreur évidente, corrigée par les manuscrits de Versailles et de Venise VII : Tant fut blasmé de ses meillors amis. ═ Prièrent. Mu. Le manuscrit porte visiblement preierent, qui est très-conforme à la phonétique de notre Chanson. ═ Meillor. O. V. la note du vers 51.

Vers 453.Nos. O. V. la note du vers 17. ═ Le Ms. porte : Mal nos avez baillit, et l’on peut conserver cette forme. La règle des participes, dans notre texte, n’a rien de rigoureux : « Que le régime direct précède le participe ou le suive, le participe prend tantôt l’accord et tantôt ne le prend pas. » On trouve, par exemple : La flur de France as perdut (vers 2455) ; et ailleurs : Sa culur ad perdue (v. 2299). On lit, dans certains passages de notre texte : Li Emperere ad prise sa herberge (v. 2488) ; et plus loin : Tuz lur amis qu’il i unt morz truvet (v. 2934). De ma maisnie ad faite traïsun (v. 1820) ; et plus haut : De sun osberc li a les pans rumput (v. 1558), etc. etc. Bref, les deux systèmes paraissent, à notre scribe et à notre poëte, tout aussi réguliers l’un que l’autre. (Il est inutile d’ajouter que le non-accord, comme : Mal nos avez baillit, s’explique par l’emploi du neutre : Tu nous as aimé, habes amatum nos. Habes amatum ne fait plus alors qu’un seul mot, comme amasti.) Nous avons respecté les différentes formes qu’offre notre manuscrit. Lire baillit.

Vers 455.Vos. O.

Vers 456.Mei l’avent. O. La correction est de M. Müller.

Vers 458.Por. O. Lire pur. (V. la note du v. 17.) ═ Le Ms. donne ne por tut l’aveir. Nous avons supprimé, pour la mesure, le ne, qui est inutile.

Vers 460.Charlemagnes. O. V. la note du v. 94.

Vers 463. — Nous laissons cuvert à cause de mantel, qui peut venir de mantellum et que nous pouvons présumer neutre. Mais, d’un autre côté, l’on trouve souvent la forme mantellus. (V. Primat, Bibliothèque de l’École des Chartes, XXXI, 310.) Dans ces Vers latins de la première moitié du xiie siècle, on lit mantellus, mantelle, etc. Si l’on admet cette dernière étymologie, il faut lire cuverz au lieu de cuvert. ═ Palie alexandrin. V. la note du v. 2652.

Vers 464.Blancandrin. O. Pour le cas sujet il faut Blancandrins.

Vers 465.Volt. O. V. la note du v. 40.

Vers 466.Orie. O. La vraie forme de cet adjectif, dérivé d’auratus, est orez, orée, que nous donnent les vers 1811, 1283, 1605.

Vers 467.Baron. O. V. la note des vers 17 et surtout 30.

Vers 468. — Lisez aproismiet. O. Et, en assonances, à la fin des autres vers de cette laisse : Meitiet, mult i averez orguillus parçunier, asegier, destrier, chevalcier, sumier, chief, brief et el’ destre puign l’ ad liveret á l’ païen.

Vers 470.Quar. O. V. la note du v. 275.

Vers 472.Durat. O. Cf. durrez, v. 30.

Vers 473.Durat. O. Id. ═ Le Ms. porte : L’altre meitet durat Rollant sis niés. Or, sis niés est un cas sujet. Nous avons donc été obligé de restituer un vers où la forme régulière sun nevuld pût trouver place. Nous ne nous sommes donné cette liberté qu’une ou deux fois, en cas de nécessité absolue. Lire meitiet.

Vers 474.Orguillos. O. Lire orguillus. (Note du v. 30.)

Vers 475.Si. O. La conj. latine si a donné se, et non si. V. la note du v. 605. ═ Volez. O. La forme vulez se trouve au v. 433, qui est exactement le même. C’est la plus correcte au point de vue de notre phonétique.

Vers 478.Menet. O. Pour le cas sujet il faut menez. ═ Lire Ad Ais.

Vers 479.Avrez. Mu. V. la note du v. 38.

Vers 481.Getet. O. Pour le cas sujet il faut getez.

Vers 484.Poing. O. Lire puign. (V. la note du v. 45.)

Vers 488.Carle. O. Pour le cas sujet il faut Carles.

Vers 489.Dolur. O. On ne trouve dolur ou dolor que trois fois dans notre manuscrit. (Vers 489, 2946, 2695.) Mais la première syllabe du s’y rencontre tout au moins dix-huit fois, tantôt avec dulor (v. 1437, 1622, 1679, 1787, 1977, 2101, 2335, 2428, 3711), tantôt avec dulur. (Vers 716, 2030, 2234, 2547, 2901, 2907, 2914, 3741, 3772.) Nous n’avions donc pas à hésiter sur la forme que nous devions adopter, d’autant plus que l’u est conforme à la phonétique de notre manuscrit. ═ Il en est de même pour le second u de dulur. (V. la note des vers 27 et 30.)

Vers 492.Voeil. O. La forme presque uniquement employée dans notre manuscrit est voeill (avec ce redoublement de la lettre l que l’on trouve si fréquemment dans le texte de la Bodléienne : cunseill, seignurill, etc. Voel ne se rencontre qu’une fois (v. 3836), ainsi que voeil (v. 492). Mais on ne trouve pas voeill moins de onze fois (Vers 309, 522, 651, 1027, 1091, 1701, 3283, 3593, 2180, 3907, 3909.) Tout nous portait à adopter cette forme.

Vers 493.Envei. O. Erreur évidente. Le présent du subjonctif prend toujours l’e à sa première personne du singulier.

Vers 494. — Nous avons ajouté kar pour la mesure.

Vers 495.Ses. O. V. la note du v. 39.

Vers 497. — Lire dreiz. O. V. notre théorie sur les neutres, à la note du v. 9.

Vers 498.Livrez. Mu. V. la note du v. 38.

Vers 501. — Il est évident qu’il y a ici une lacune dans le texte d’Oxford. Nous allons la combler avec le texte de Versailles modifié, abrégé et ramené à notre dialecte :

A Sarraguce meinent mult grant irur.
Iloec i out un nobile puinneür,
Ki riches fust, filz à un almaçur ;
Mult saivement parlat pur sun seignur :
« Bel sire rei, jà n’en seis en poür.
« Vei de l’ felun cume il muet culur. »

Vers 502.Meillors. O. V. la note du v. 51.

Vers 503.Canud. O. V. la note du v. 2.

Vers 504.Jurfalet. O. On trouve au cas régime : Jurfaleu (V. 1904, 2702). Nous avons adopté Jurfalez pour le cas sujet. ═ Ses filz e ses. O. V. la note du v. 39.

Vers 505.Sun uncle. O. Pour le cas sujet il faut sis uncles.

Vers 509.Guenes l’ad. O. Erreur évidente. Il faudrait peut-être, comme dans le manuscrit de Versailles : Guenelun prist.

Vers 510.Josqu’al. O. Plus conforme à la phonétique et à l’étymologie, jusque se rencontre aux vers 972, 3927...

Vers 512.Guenes. O. V. la note du v. 319 et notre théorie des vocatifs à la note du v. 15. ═ Marsilie. O. pour le sujet, Marsilies.

Vers 513.Vos. O.

Vers 514.Por. O.

Vers 515.Guaz au lieu de faz. O. Erreur évidente, corrigée par M. Müller. ═ Vos. O. Lire vus. ═ Au vers 516, lire plutôt mielz.

Vers 517. — Lire plutôt Iert. O. La forme ert est vingt fois employée dans notre texte. (Vers 51, 190, 314, 354, 376, 543, 742, 761, 906, 915, 922, 938, 968, 969, 1710, 2088, 2530, 2801, etc.) Mais iert se trouve employé, comme assonance, dans les couplets en ier, et jamais dans ceux en er. Donc, il est préférable, même dans le corps du vers, d’écrire ier.

Vers 519. — Lire Bien. O.V. la note du v. 34. ═ Vos. O. ═ Lire merciet.

Vers 520.Guene. V. la note du v. 319.

Vers 521.Talant. O. Nous avons adopté la forme la plus fréquemment employée dans notre manuscrit. ═ Vos. O.

Vers 522.Vos. O.

Vers 523. — Lire Vielz. O.

Vers 524. — Lire Ad passet. O. V. la note sur « l’accord des participes ». (V. 153.) Ad passez est d’ailleurs fort régulier.

Vers 526.Cols. O. Erreur évidente.

Vers 527.Mendisted. O. V. le v. 542 et notre note du v. 2.

Vers 531.Ber. O. V. notre note du v. 430. Lire est ber.

Vers 532.Vos. O.

Vers 533.Onur. O. V. la note du v. 45.

Vers 534.Valor. O. V. la note du vers 30.

Vers 536. — Lire Miels. O. V. la note du v. 545. ═ Voelt. O. Erreur évidente.

Vers 537. — Le couplet précédent était en er ; celui-ci est en ier. (V. la note du vers 96, p. 51.) Lire, en assonances, à la fin des vers suivants : Merveillier, vielz, O. miels, O. traveilliet, mendistiet, O. ciel, O. Oliviers, chiers, chevaliers.

Vers 538.Vielz. O.

Vers 539.Mielz. O.

Vers 541.Cols. O. Erreur évidente.

Vers 542.Mendistiet. O. V. mendisted, v. 527.

Vers 544. — Lire iert. O., de même qu’au vers précédent. ═ Ses. O.

Vers 545.At. O. V. la note du v. 2. ═ Tes. O. Au cas régime il faut tel. ═ Ciel. O. À ciel (v. 545, 2532) nous avions d’abord préféré cel (v. 646, 1432, 1553, 1674, 2397, 3031) ; mais ciel est employé, comme assonance, dans les couplets en ier, et jamais dans les laisses en er. Donc il est préférable, même dans le corps du vers, de lire ciel, comme aussi mien, bien, iert, mielz, Michiel, Ogier, Olivier, Gualtier, Berengier, Gerier, etc. ═ Relire et modifier dans ce sens les notes des vers 34, 58, 136, etc.

Vers 546.Oliver. O. Lire Oliviers.

Vers 547.Les XII pers. O. À cause du cas sujet, il faut : Li XII per, comme le scribe l’a écrit au vers 560.

Vers 549.Home. O. Lisez plutôt hume. (V. la note du vers 20.)

Vers 552. — Lire Mien. O. V. la note du vers 149 et celle du vers 545.

Vers 553.Alet. O. Pour le cas sujet, il faut alez. ═ Cunquerant. O. Au cas sujet, il faut cunqueranz.

Vers 555.Champ. O. Lisez camp. On trouve, en effet, dans notre poëme les deux formes champ et camp, et l’une se rencontre presque aussi fréquemment que l’autre. (V. le Glossaire.) Mais camp nous a paru préférable parce qu’il est plus étymologique, et aussi parce qu’on le retrouve dans les composés campel et campiun. (Vers 2244.)

Vers 556. — Lire plutôt Iert. O. V. la note du vers 517. ═ Recreant. O. V. les vers 528 et 543, où se trouve la vraie forme, recreanz, exigée par le cas sujet.

Vers 557. — Lire plutôt Iert. O. V. la note du vers 517. ═ Rollant. Mu. Pour le cas sujet, Rollanz.

Vers 559.Oliver. O. Lire Oliviers.

Vers 562.Carlles. O. V. la note du vers 94.

Vers 563.Guenes. O. V. la note du vers 319.

Vers 566.Carlle. O. V. la note du vers 94.

Vers 568.Avres. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 569.Lessez. O. Lire laissez, qui est la forme la plus employée (26 fois contre 10). ═ Vos. O. V. la note du vers 17.

Vers 571.Tot. O. C’est un adverbe. Partout ailleurs, il s’écrit tut, qui est très-conforme à la phonétique de notre texte.

Vers 572.Hostages. O. V. la note du vers 147. ═ « Envoie à Charles deux hommes en otage. » (Keiser Karl Magnus’s Kronike.)

Vers 573.Repairrat. Mu. Le Ms. porte distinctement repairerat.

Vers 575. — Lire plutôt Iert. O. V. la note du vers 517.

Vers 576.Oliver. O. Lire Oliviers.

Vers 578.Carlles. O. V. la note du vers 94.

Vers 579.Avrat. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 580.Guenes. O. V. la note du vers 319. ═ Le Ms. d’Oxford ne donne que le premier hémistiche. Müller a suppléé le second d’après le Ms. IV de Venise.

Vers 582.Vos. O.

Vers 583.Meillors. O. V. la note du vers 51. ═ Sizer. Il faut prononcer Sizre ou Size. C’est (comme M. P. Raimond l’a clairement démontré), la région qui touche à Roncevaux et qui s’appelle aujourd’hui encore du nom de Cize. Or ces défilés font partie de la Navarre française, et c’est la Navarre, en effet, qui a été le théâtre de la mort de Roland. M. P. Raimond a appuyé sa démonstration de textes nombreux, où il montre les différentes formes qu’a reçues ce vocable géographique depuis le xe siècle. (Vallis Cirsia, en 980 ; Cycereo, Sizara, Cizia, Cisera, Cisara, au xiie siècle ; Ciza, Cizie, au xiiie ; Cisia, au xive ; Sizie, au xve.) ═ Dans la Chronique de Turpin, on appelle ces ports : Ciserei portus, et Portœ Cesaris dans la Kaisercronik. L’historien arabe Edrisi se sert, en 1154, du mot Cezer, et le manuscrit de Venise nous donne la vraie forme, Cisre, qui devait se trouver dans nos plus anciens textes. (V. notre note sur « la Géographie de la Chanson de Roland », au vers 706.)

Vers 584.Avrat. Mu.

Vers 585.Iert. O. V. la note du vers 517.

Vers 586.Oliver. O. Lire Oliviers. ═ Qui. O. La forme ki est employée 19 fois sur 20. Nous l’avons partout adoptée.

Vers 588. — « Marche sur Roland avec toutes tes troupes, et divise ton monde en quatre corps. » (Kaiser Karl Magnus’s Kronike.)

Vers 589.Primes. Cet adverbe reçoit l’s par analogie, comme les adverbes sempres, alques, unkes, etc.

Vers 590. — Lire genz. V. la note du vers 611. ═ Lire plutôt Iert. O. V. la note du vers 517.

Vers 591.Por. O. V. la note du vers 17. ═ Lire plutôt Iert. O. V. la note du vers 517.

Vers 592.Livrez. Mu.

Vers 593.N’estoerat. O. Excellente correction de M. Müller.

Vers 594.Avrat. Mu.

Vers 595.Avrez. Mu.

Vers 596.Chi. O. V. la note du vers 586.

Vers 596.Mort. O. Pour le cas sujet, il faut morz.

Vers 597.Charles. O. V. la note du vers 94.

Vers 600.Major. O. V. la note du vers 30.

Vers 601.Marsilie. O. Pour le cas sujet, il faut Marsilies.

Vers 602.Venir. O. Uvrir est une excellente correction de M. Müller d’après le Ms. de Venise (IV) : E poi comença ad avrir son tresor, et aussi, d’après Venise (VII) : Reiz comanda à ovrir son tressors.

Vers 603, 604. — Ces deux vers ne sont pas assonancés comme le reste du couplet. On pourrait peut-être les changer ainsi qu’il suit, d’après les indications de M. Müller :

Ço dist Marsilies, — qu’en direient-ils mais ?
« Cunseill n’est proz dunt hume n’est certains.
« La traïsun de Rollant me jurreiz... »

Le Ms. de Venise (VII) nous offre ici la version suivante : Çe dist Marsile : De cest or me tairai ; — Ne pris conseil se je à chief n’en trai...

Vers 605.Si il i est. O. La conjonction latine si a donné en français se. Si vient de sic. (Voyez des exemples de se aux vers 74, 221, 273, 63, 987, etc. etc.) Cf. 475.

Vers 606.Vos. O.

Vers 608.La traïsun jurat e si s’en est forsfait. O. C’est un vers de 12 syllabes : nous l’avons ramené à un décasyllabe. Ainsi avons-nous dû procéder toutes les fois que le changement est légitime.

Vers 611.La lei. O. Les noms latins de la 3e déclinaison qui ont un s à leur nominatif singulier, ont donné naissance à des noms français qui ont un s (ou un x, ou un z) à leur cas sujet singulier. Nous avons dû partout appliquer cette règle, même lorsque notre scribe a oublié de l’observer, comme ici. Vingt exemples viennent d’ailleurs à l’appui du principe que nous venons de poser : Sancs, 1762, 3165, 3925 ; olifans, 2295 ; reis, 319, 327, etc. etc. ; sorz, 3665 ; dux, 3937, etc. Le mot leis lui-même est écrit correctement au vers 3338. En revanche, notre scribe n’a jamais su écrire régulièrement les mots gent (590, 3247), mort (2197), noit (737, 3658, 3675, 3991), et il nous a fallu les ramener à leur vraie forme. Il en est de même des participes présents qui, en latin, avaient tous un s à leur nominatif singulier. Trois ou quatre fois seulement, le scribe du Roland a observé la règle essentielle du Roman dans son application spéciale à nos participes présents ou adjectifs verbaux : recreanz (528, 543, 906), vaillanz (3186), luisanz (3345). Partout ailleurs, il a violé ce principe que nous avons dû rétablir. Entre cette erreur d’une part, et, de l’autre, une règle générale, un principe vital de la formation de notre langue, nous ne pouvions pas hésiter un instant. Nous avons fait fléchir le particulier sous le général. Les exemples qui précèdent sont d’ailleurs assez nombreux pour nous persuader que le scribe de notre Chanson connaissait la règle, et qu’elle était admise en son dialecte. Il n’a péché que par négligence, et peu de scribes, en effet, ont été aussi négligents. Nous aurons lieu de le montrer plus d’une fois.

Vers 613. — Lire troevet. O. Cf. 2856, 3025.

Vers 616.Comant. O. Au cas sujet, il faut comanz. Pour le changement de l’o en u, voyez la note du vers 309.

Vers 618.Icil en vait à l’Rei. O. La correction est de Génin, et a été adoptée par Müller.

Vers 620.At. O. Ad est la forme employée dans le manuscrit 19 fois sur 20.

Vers 621. — Pour les helz, qui sont sans doute la garde et la poignée (le helz étant la garde, et le punz la poignée), voyez notre note sur les armures (au v. 994). ═ Le texte de Versailles est précieux : Entre le heut et le pont qui est en son. — De l’or d’Espaigne vaut dis mille mangons. ═ Il est connu que les mangons sont une sorte de monnaie. (V. Ducange, au mot Mancusa.) Mais le sens est d’ailleurs assez difficile à établir. S’agit-il d’une épée dans le pommeau de laquelle on a mis des pièces d’or ? C’est ce que semblerait dire le vers 1528 : Il li dunat s’espée e mil manguns ; et ce vers, en effet, se rapporte au même fait que le vers 621. Ne s’agirait-il pas de pièces d’or, de marcs d’or que l’on aurait soudés ou fondus entre le pommeau et la garde de l’épée ? ou seulement à la garde ? N’est-il question que de la valeur métallique de cette partie de l’épée ? La difficulté subsiste.

Vers 622.Amistiez. O. À cause du cas régime, et parce que ce mot se trouve, comme assonance, dans les couplets en ier, lire plutôt amistiet. ═ Vos. O.

Vers 623.Nos. O.

Vers 624.Trover. O. D’après la phonétique de notre Ms., la vraie forme est truver, qui se trouve aux vers 2735 et 2859. ═ Poüsum. O. La forme correcte nous est donnée sept vers plus loin : c’est poüssum.

Vers 627.Après (i). Mi. G. Mu. On peut lire i dans le manuscrit ═ Un paien. O. Pour le cas sujet, il faut : uns paiens.

Vers 629.Unches. On trouve ce mot sous quatre formes dans notre texte : Unkes, unches, unques, unc. Nous avons déjà expliqué l’s finale qui se retrouve dans sempres, alques, primes : il nous reste à étudier ces différentes formes dérivées d’unquam. Unkes est celle qui se rencontre le plus souvent. (Vers 1108, 1208, 1857, 1865, 2046, 2134, 2223, 2384, 2495, 2639, 3261, 3322, 3531, 3587, 3638.) Unches vient ensuite. (Vers 629, 640, 920, 1044, 1461, 1563, 1638, 1647, 2501, 3212, 3231.) On ne trouve unc que trois fois (vers 1040, 1769, 3516) et, unques qu’en un seul endroit. (Vers 2888.) Nous avons donné ces indications avec soin, parce que de ces différentes formes d’un même vocable, on a prétendu conclure à la composition de notre poëme par deux auteurs ou à sa rédaction par deux scribes. C’est une question que nous avons traitée ailleurs. (Introduction, p. lxix.) Qu’il nous suffise de dire ici qu’entre ces quatre formes nous avons choisi la plus usitée, et, en même temps, la plus étymologique.

Vers 630.Nos. O.

Vers 632. — (Li.) G. Mu.

Vers 634. — Dans le manuscrit on a corrigé le mot Bramimunde, et la seconde partie de ce mot a été ajoutée après coup. Le fait est assez important à constater, puisque Bramimunde est ailleurs appelée Bramidonie, et que c’est encore un de ces signes auxquels on croyait reconnaître la composition du Roland par deux auteurs. Braminunde se rencontre aux vers 631, 2576, 2714, 2734, et Bramidonie aux vers 2822, 3636, 3680, 3990.

Vers 636. — Lire kar. ═ Mi sire. O. Mi est une abréviation de mis, due sans doute à la prononciation. ═ Pour mis, voyez la note du vers 39.

Vers 639.Eles valent. O. Pour la mesure, nous avons écrit : E valent. ═ Lire Mielz. O., et, au vers précédent : bien. O.

Vers 640.Unches. O. V. la note du vers 629.

Vers 641.En sa hoese les butet. V. la note sur le vêtement militaire et l’armure. (Vers 994.) Dans Aspremont, Naimes, après avoir coupé la patte du gripon : Met l’en sa hoese, montrera la Karlon.

Vers 642.Malduiz. O. Pour le cas régime, il faut Malduit. ═ Lire, en assonances, à la fin des vers de cette laisse : Tresorier, apareilliet, bien, cargiet, ciel.

Vers 643.Appareilliez. O. Une autre forme est donnée par le vers 1144. ═ Aveir est supposé neutre ; c’est pourquoi nous avons mis : apareillet au s. s. neutre.

Vers 644. — Lire Bien. O. V. la note du vers 545.

Vers 645.Cameilz. O. Pour le cas sujet du pluriel, il faut cameil. ═ Cargiez. O. Pour le cas sujet du pluriel, il faut cargiet.

Vers 646.Hostages. O. Pour l’h initiale, v. la note du v. 147. ═ Pour le cas sujet du pluriel, il faut ostage. ═ Suz. Mu.

Vers 648. — On peut ici lire ies comme aux autres vers ci-dessous énumérés. O. Les mêmes raisons qui nous avaient fait préférer ert à iert (note du v. 517), nous avaient décidé à écrire es au lieu de ies. Il convient cependant d’ajouter qu’on ne trouve dans notre texte que la forme ies. (Vers 297, 648, 2045, 2286, 2598, 3899, 3900, 3955.) C’est donc encore ici une règle générale que nous avions placée au-dessus d’un accident particulier. Mais le cas peut être controversé, d’autant que ert ou iert (forme équivalente) est uniquement admis, comme assonance, dans les laisses en ier.

Vers 649.Vos. O.

Vers 650.Nos. O.

Vers 651.Vos. O.

Vers 653. — Lire Iert. O. V. la note du v. 517. ═ An. O. Pour le cas sujet du singulier, il faut anz.

Vers 655.Al rei Carles. O. Après G. et Mu., nous avons, pour la mesure, écrit : à Carle. ═ Carle, étant au cas oblique, ne doit pas prendre d’s.

Vers 656.Pois. O. La vraie forme d’après la phonétique de notre texte, est : puis, que nous rencontrons aux v. 225, 371, 391, 626, 896 et huit vers plus bas (664).

Vers 657.Trover. O. V. la note du v. 624. ═ A port ne à passage. Il ne faut pas oublier (nous écrit avec raison M. P. Raymond), que le mot ports ne signifie pas seulement « les passages des montagnes », mais les « montagnes » elles-mêmes. Dans la vallée d’Ossau, peu éloignée des lieux qui nous occupent, ce mot a toujours eu ce sens au moyen âge : Les portz generaus de la terre d’Ossau, c’est-à-dire les montagnes appartenant en commun à la ville d’Ossau. (Cartulaire d’Ossau, dit Livre rouge, f° 38, acte de l’année 1355.)

Vers 660.Pois. O. V. la note du v. 656. ═ Munted. O. Pour le d final, voyez la note du v. 2. Le cas sujet exige muntez.

Vers 661.Empereres. O. V. la note du v. 1.

Vers 662.Galne. On n’a pu retrouver le nom de cette localité que nous supposons, d’après l’itinéraire de Charles, située à une quinzaine de lieues S.-E. des Pyrénées. (V. notre note géographique, au vers 706.) Comme l’observe M. G. Paris (Revue critique, 1869, n° 37), il faudrait pour l’assonance Gelne ou plutôt Gailne. Je ne pense pas d’ailleurs qu’on puisse ici suppléer Valterne (Valtierra). Il ne s’agit évidemment ni de Gan, près de Pau, ni d’Eaulne (pour Elne).

Vers 664.Puis icel jur en fut cent anz deserte. De cette destruction de Galne, il ne reste aucune trace dans aucune Chanson de geste. Cela prouve, une fois de plus, que nous avons perdu un certain nombre de nos vieux poëmes.

Vers 666.Treüd. O. Pour le t substitué au d, voyez la note du v. 2.

Vers 669.Empereres. O. ═ Levet. O. Pour le cas sujet, il faut levez.

Vers 672.Oliver. O. Lire Oliviers, comme aux vers 176, 546, et partout ailleurs. V. la note du v. 545. ═ Bers. V. la note du v. 430.

Vers 674. — Si fel vient d’un type tel que felo, felonis, il faut lire partout, au s. s., fel sans s.

Vers 677 et 678. — Vos. O.

Vers 679.Hostages. O. V. la note du v. 147. Lire bien.

Vers 680.Ber. O. V. la note du v. 430.

Vers 681.Algalifes. O. Erreur évidente.

Vers 683.Halbers. O. On trouve halbercs, au v. 711. La vraie forme est osbercs, qui se trouve cent fois dans tout le poëme. (994, 1022, 1032, 1277, 1284, 1199, etc. etc.) ═ Healmes. O. La forme la plus correcte, la plus usitée, est helmes. V. le Glossaire.

Vers 685.Tresqu’en. O. La correction est de G. et Mu.

Vers 686.Por. O.

Vers 689.Ored. O. Pour le cas sujet, il faut orez. Ce mot vient sans doute d’auratus, auratûs (4e décl.).

Vers 690. — Lire neiet à cause du cas sujet du pluriel.

Vers 691.Vif. O. Pour le cas sujet il faut vifs.

Vers 694.Vos. O.

Vers 695.Recevrat. Mu. V. la note du v. 38.

Vers 696. — Lire juintes, comme aux vers 2015. Cf. 923 et 2240. ═ Lire iert. O. V. la note du v. 517. ═ Comandet. O. Pour le changement de l’o en u, voyez la note du v. 309. — À cause du cas sujet, cumandez.

Vers 697.Vos. O.

Vers 698.Graciet. O. Pour le cas sujet, il faut graciez.

Vers 699. — Lire bien. ═ Avrez. Mu. V. la note du v. 38.

Vers 700. — Lire cele. ═ Et graisles. Cf. les vers 1453, 1832, 2150, 2116, 3136, 3158, 3194.═ Au vers suivant, lire plutôt sumiers. Ce mot se trouve uniquement, comme assonance, dans les couplets en ier.

Vers 702.Achiminez. O. Pour le cas sujet du pluriel, il faut achiminet. V. aussi la note du v. 365.

Vers 703.Guastede. O. Il y a dans notre poëme trois familles, nous allions dire trois couches de Participes passés. Les premiers sont les plus anciens, où le t de la terminaison latine en atus, ata s’est conservé, où du moins il est représenté par un d. Tels sont guastede, cruisiedes (2250). Ces vieux participes sont très-rares. Les plus nombreux sont ceux en et au masculin, en ée au féminin. Et déjà il y a des participes en é, comme les nôtres : tel est encrismé. (V. 1216.) Nous avons dû réduire à une seule forme tous ces participes, et nous avons adopté celle qui est de beaucoup la plus commune. Or, mille fois au moins contre une, on trouve la terminaison et, ée.

Vers 706.Vers dulce France chevalchet l’Emperere. Nous plaçons ici notre « note générale sur la géographie de la Chanson de Roland ». C’est ici, en effet, que commence réellement l’Itinéraire de Charles et celui de Roland.

I. Positions occupées par les deux armées au début de la Chanson de Roland : Saragosse et Cordres. Lorsque commence l’action de notre poëme, Marsile et l’armée païenne occupent Saragosse. (V. 10 et suivants.) D’un autre côté, Charlemagne et l’armée française sont devant Cordres (v. 71), qui est emportée d’assaut. (V. 96 et suivants.) ═ Où est Cordres ? Faut-il, comme tous les traducteurs du Roland, traduire ce mot par « Cordoue » ? On a déjà montré, avec raison, qu’une telle assimilation est rigoureusement impossible. En effet, quand les messagers de Marsile vont en ambassade de Saragosse à Cordres (v. 96), et quand Ganelon se rend avec eux de Cordres à Saragosse (v. 366), ils ne paraissent pas mettre un long temps à faire le chemin.═ M. G. Paris (Revue critique, 1869, n° 37, p. 173) prétend que ce voyage ne dure qu’un jour. Le texte ne confirme pas très-nettement cette allégation (St. viii) ; mais il est évident que la chose se fait assez rapidement, sans fatigue, et que les ambassadeurs de Marsile et Ganelon n’ont pas, comme s’il s’agissait vraiment de Cordoue, à traverser toute l’Espagne. ═ Je suis donc fort disposé à admettre que Cordres, dans l’idée de notre poëte, est près des Pyrénées. Mais j’ajouterai que, dans son esprit, il s’agissait d’une très-grande ville ; — qu’il avait vaguement entendu parler de Cordoue, boulevard important de la puissance musulmane ; — et que, par une ignorance dont on trouve bien des preuves dans nos vieux poëmes, il place bravement cette grande ville non loin de Saragosse. ═ Tout au contraire, dans le roman du Cycle de Guillaume que nous avons découvert et intitulé la Prise de Cordres, c’est bien de Cordoue qu’il s’agit. ═ Quoi qu’il en soit, nous avons, dans cette traduction, traduit ce mot par « Cordres » pour mieux respecter notre texte. ═ Formulons en deux mots notre conclusion : « Au début de la Chanson de Roland, deux points topographiques sont mis en lumière : Saragosse, dernier refuge du roi Marsile ; Cordres, dernière conquête de Charlemagne, que je placerais à quinze ou vingt lieues de Saragosse au N.-O., ville imaginaire sans doute et née du souvenir de la véritable Cordoue. »

II. Itinéraire de Charles depuis Cordres jusqu’aux Pyrénées : Galne. Charlemagne n’attend pas à Cordres le retour de Ganelon, son messager près de Marsile. Il se met en route vers la France, il aproismet son repaire. (V. 661.) Il arrive sur les ruines de Galne, que Roland a jadis détruite et qui, depuis cet exploit, fut cent ans déserte. (V. 662-664.) C’est là que Charles attend Ganelon et le tribut promis par Marsile (V. 665-666.) Il nous paraît impossible de déterminer la situation de Galne, et nous y avons épuisé nos efforts. ═ Charles cependant ne tarde pas, après avoir vu Ganelon, à quitter Galne. (V. 701 : Franc desherbergent.) Il reprend la route de France (v. 702 : Vers dulce France tuit sunt achiminez), et fait une journée de marche. Puis, les Français se reposent, ils campent dans un lieu innommé (v. 709 : Franc se herbergent par tute la cuntrée), et c’est là que l’Empereur a ses rêves lugubres (v. 718-736) qui lui donnent le pressentiment de Roncevaux. Le lendemain matin, en s’éveillant, Charles montre à ses barons les défilés qu’ils ont à traverser. (Veez la porz et les destreiz passages, 741.) Donc, ils sont au pied des Pyrénées ; donc, il ne leur a fallu qu’un jour de marche pour aller de Galne aux Pyrénées ; donc, Galne serait, tout au plus, à une quinzaine de lieues S.-E. du pied des Pyrénées. ═ Or, nous avons déjà placé Cordres à quinze ou vingt lieues N.-O. de Saragosse. Il ne reste plus à préciser que la distance entre Galne et Cordres. Elle doit être peu considérable : car de Saragosse à Roncevaux il n’y a guère, en totalité, que trente ou trente-cinq lieues.

III. Le désastre de Roncevaux a eu lieu dans la Navarre et non dans la Cerdagne. La question a été soulevée par M. d’Avril dans une note de sa Chanson de Roland. (P. 277 de l’éd. in-12.) Frappé de ce double fait que les Français passent par Narbonne à leur retour en France (v. 3683), et que les Sarrazins, au moment de fondre sur l’arrière-garde chrétienne, chevauchent par tere Certeine e les vals e les munz (v. 856), M. d’Avril n’a pas craint de formuler ses conclusions en ces termes : « Le détail de ce voyage de Charles et la mention de la Cerdagne indiquent que le lieu du désastre, d’après notre poëme, serait la Cerdagne. C’est sur cette route que l’on trouve une localité appelée la Tour de Karl. On se serait donc trompé en cherchant le Roncevaux de Roland dans le Roncivals qui existe sur la frontière de la Navarre. » ═ Un tel système devait trouver de nombreux contradicteurs : MM. P. Raymond, G. Paris et François Saint-Maur répondirent à M. d’Avril. M. P. Raymond le réfuta dans un article de la Revue de Gascogne (septembre 1869, t. X, p. 365) ; M. G. Paris, dans la Revue critique (11 septembre 1869, n° 37) ; M. François Saint-Maur, dans une brochure intitulée : Roncevaux et la Chanson de Roland, simple réponse à une question de géographie historique. La question nous paraît aujourd’hui suffisamment éclairée, et il est très-nettement démontré que le Roncevaux de notre épopée est celui de la Navarre. ═ Premier argument. — Charlemagne, d’après notre Chanson, traverse plusieurs fois les ports ou défilés de Sizer (vers 583, 719, 2939), et il est aisé de voir que Sizer, d’après les assonances, doit se prononcer « Sizre ». Ces mêmes défilés sont appelés Cisre dans le manuscrit de Venise ; Portus Ciserei dans la « Chronique de Turpin » ; Portæ Cæsaris dans la Kaisercronik. Or il ne peut être douteux pour personne, après le travail de M. P. Raymond, que ces ports de Cizer ou de Cizre, ces portus Ciserei, ces portæ Cæsaris ne soient identiques avec cette partie de la Navarre française qui touche à Roncevaux et qui s’appelle encore aujourd’hui du nom de Cize. C’est ce même pays qui, dans une charte de 980, s’appelle Vallis Cirsia, qui, au xiie siècle, reçoit les noms de Cycereo, Sizara, Cizia, Cisera, Cisara, et que l’historien arabe Edrisi appelle en 1154 « la porte de Cizer », qui, au commencement du xiiie siècle, se nomme Ciza ; Cizie, en 1253 ; Cisia, en 1302 ; Sisie, en 1472. Et M. P. Raymond ajoute : « La voie romaine d’Astorga à Bordeaux traversait la vallée de Cize, qui correspond au val de Roncevaux en Espagne. » Le doute n’est plus possible, et, notre vieux poëme ne séparant pas Roncevaux des défilés de Sizer, il faut conclure que, ces derniers étant en Navarre, l’action de notre Chanson s’est passée en Navarre. ═ Deuxième argument. — La partie de la Navarre espagnole qui longe le pays de Cize s’appelle encore aujourd’hui le Val Carlos. Cette appellation est ancienne, et M. Raymond cite des textes de 1273 et 1333 (Archives des Basses-Pyrénées, G., 204, pp. 4 et 11), où il est question de l’église et de l’hôpital sancti Salvatoris [de] Summiportus in Valle Caroli. C’était l’ancienne localité nommée Summum Pyrenæum : on y voit aujourd’hui la petite chapelle nommée Ibagneta (le lieu de Jean ?), dont nous donnons ici le dessin, et près de laquelle M. J. Quicherat placerait volontiers le théâtre de la grande bataille. Quoi qu’il en soit,
dans la Chronique du Faux Turpin, il est question de la Vallis Caroli, près de Roncevaux, et c’est dans le Val Charlon, près des défilés de Sizer, que Charles, d’après la Kaisercronik, réunit une armée de 53,000 jeunes filles. « Le Val Carlos, dit M. G. Paris, est indiqué sur la carte de l’Espagne arabe qui fait partie de l’atlas historique de Sprunner, et qui est dressée surtout d’après les documents arabes. » Concluons que Roncevaux étant inséparable du Val Carlos, et le Val Carlos, d’après tous les documents, faisant partie de la Navarre, Roncevaux est en Navarre. ═ Troisième argument. — M. d’Avril cite en Cerdagne « la tour de Karl ou de Carol » ; mais on lui fait observer avec raison que Charlemagne a laissé des souvenirs dans toute la région des Pyrénées. Or ces souvenirs sont autrement profonds et vivants dans la Navarre. Outre le Val Carlos, dit M. P. Raymond, il existe d’autres vestiges de la tradition : sur l’ancien chemin d’Orthez à Sauveterre, qui s’appelait lo cami Romiu ou « de Saint-Jacques », et qui conduisait à Roncevaux, il y a un carrefour nommé « la Croix-de-Roland ». (Ce carrefour est sur la commune d’Orion ; il était ainsi désigné, au moins dès le xviie siècle.) D’ailleurs, on retrouve le nom de Roland sur tous les chemins de ce pays. Dans la commune d’Itzassou, il y a le Pas-de-Roland, etc. etc. Toutes ces localités, qui sont voisines de Roncevaux en Navarre, ayant gardé de tels souvenirs de Roland, on a tout au moins une présomption en faveur de la situation de Roncevaux en Navarre. ═ À ces arguments, l’école de M. d’Avril fait deux objections. Au v. 856 de la Chanson de Roland il est dit que les païens, pour surprendre l’arrière-garde française, traversèrent Tere Certeine e les vals e les munz. « Vous voyez bien, dit M. d’Avril, qu’il s’agit de la Cerdagne. » On a répondu que « la Cerdagne était alors beaucoup plus étendue, ou qu’il s’agit ici d’une autre Cerdagne. » Mais d’ailleurs, et encore une fois, il ne faudrait pas demander trop d’exactitude géographique aux auteurs de nos Chansons. Notre poëte savait vaguement qu’il y avait, non loin des Pyrénées, un pays nommé Cerdagne. Et il y fait bravement passer une armée païenne avant d’arriver aux défilés de Sizer. ═ Il en est de même de Narbonne. Quand Charlemagne rentre en France par la Gascogne et Bordeaux, il est dit que les Français passent Nerbone par force et par vigur. (V. 3683.) Or Narbonne n’est pas sur le chemin des Pyrénées à Bordeaux. Qu’en conclure ? Tout simplement que notre trouvère ignorait la géographie. Il savait, par une tradition poétique très-ancienne, que Charlemagne, en revenant de Roncevaux, s’était rendu maître de Narbonne. Et même ce récit est intercalé dans le Roland de Venise. Sans penser à mal, le poëte a donc écrit le nom de Narbonne, et peut-être les mots par force e par vigur indiquent-ils que l’auteur de notre Roland pensait vaguement à la légende d’un siége et d’une conquête par Charlemagne. Malgré tout, l’on peut admettre hypothétiquement avec M. G. Paris, qu’au lieu du mot Nerbone il y avait dans le texte original un nom de fleuve, et le mot passent s’expliquerait mieux d’après cette supposition. Enfin M. P. Raymond nous soumet une autre hypothèse : « Dans une bulle de Célestin III (vers 1187, 1171), l’église de Narbone, aujourd’hui Arbone, est citée près de l’église de Saint-Jean-de-Luz. » (Archives des Basses-Pyrénées, Cart. de Bayonne, dit le Livre d’Or, f° 52.) Et l’on trouve encore en 1303 le nom de Narbonne attaché à la même localité. (Testament de Dominique de Mants, évêque de Bayonne. Études historiques sur Bayonne, par Balasque, II, 573 et suiv.) En résumé, nous osons préférer notre propre système pour expliquer ce vers, et nous mettons volontiers cette erreur sur le compte de l’ignorance de notre poëte.

IV. Le retour de Charlemagne en France. M. Gaston Paris a très-clairement exposé la marche et énuméré les étapes de Charlemagne, depuis la mort de Roland jusqu’au procès de Ganelon : « Appelé par le cor de Roland mourant, l’Empereur revient à Roncevaux le soir de cette journée si remplie. (Vers 2398.) À deux lieues en avant, du côté de l’Espagne, on voit encore la poussière des Sarrazins qui se retirent (vers 2425, 2426) ; les Français se mettent à leur poursuite ; mais ils n’auraient pas le temps de les atteindre, car la nuit tombe, si Dieu ne renouvelait pour Charles le miracle de Josué. La journée dure encore assez longtemps pour que les chrétiens, qui ont barré aux païens le chemin de Saragosse (vers 2464), les bloquent contre l’Èbre et les forcent de s’y jeter et de s’y noyer tous. Les païens morts, Charlemagne trouve qu’il est bien tard pour retourner à Roncevaux (vers 2483), et les Français, accablés de fatigue, campent sur la terre déserte. (Vers 2489.) C’est pendant cette même nuit que la flotte immense amenée à Marsile par Baligant, l’émir de Babylone, remonte l’Èbre à la lueur de mille fanaux (vers 2643), et aborde non loin de Saragosse. Au matin, dès l’aube, Charles se lève, et les Français retournent, par cez veies lunges e cez chemins mult larges, voir à Roncevaux le « merveilleux dommage ». (Vers 2852, 2853.) C’est là que les messagers de Baligant viennent défier Charles, et, le soir de la même journée, l’Empereur victorieux arrive à Saragosse et s’en empare. Quand il y entre, clere est la lune, les estoiles flambient. (Vers 3659.) Il retourne en France le lendemain, sans doute par le même chemin, puisqu’il traverse de nouveau la Gascogne et arrive à Bordeaux (vers 3684) et à Blaye (vers 3689), d’où il va directement à sa chapelle d’Aix. » (Revue critique, 1869, n° 37, pp. 174, 178.) Nous avons essayé de résoudre à leur lieu les autres difficultés de la Chanson. (V. la Carte qui sert de frontispice à ce second volume.)

Vers 711.Halbercs. O. V. la note du vers 683. L’étymologie de ce mot est l’allemand halsberc. (V. le Glossaire.) Nous avons préféré la forme osbercs, qui est plus usitée, et où se trouve l’s étymologique. ═ Le manuscrit porte, par une erreur évidente : Halbercs vestuz e très-bien fermées. Ce dernier mot a même été ajouté postérieurement. Nous avons pris le mot endossées dans le texte de Versailles. Mu. a imprimé : E lur brunies dublées, qu’il a emprunté au manuscrit de Venise IV.

Vers 712.Healmes. O. V. la note du vers 683.

Vers 717.Le jur. O. Pour le cas sujet il faut li jurz. ═ Noit. O. V. la note du vers 611.

Vers 718.Empereres. O. V. la note du vers 1.

Vers 719.Eret. O. C’est peut-être la forme la plus ancienne dérivée de erat. Partout ailleurs nous trouvons ert. (Vers 726, 880, 1214, 1650, 2550, etc.) Lire plutôt iert. ═ Sizer. V. la note du vers 583.

Vers 720.Poinz. O. V. la note du vers 415.

Vers 721.L’ad sur. O. Correction de M. Müller. ═ La Keiser Karl Magnus’s Kronike nous fournit ici une variante assez importante : « J’ai rêvé, cette nuit, que l’Ange de Dieu venait vers moi et qu’il brisait mon épée entre ses mains... »

Vers 722.At. O. V. la note du vers 2. ═ Trussée. Mu.

Vers 723. — Lire ciel. V. la note du vers 545. ═ Au vers 726, lire iert.

Vers 727.Vers. O. La correction est de M. Müller, d’après les textes de Venise et d’Oxford.

Vers 728.Uns leuparz. O. Pour le cas régime il faut un leupart.

Vers 729.Demeine, ou Demenie. Mi. G. Mu.

Vers 730.De sale. O. Erreur évidente.

Vers 731. — Lire les galops. O. Les plus anciens exemples de ce mot nous l’offrent toujours au pluriel : Les grans galos, etc. (V. les articles de MM. Gachet et Littré.)

Vers 732.Ver. O. V. la note du vers 727.

Vers 733.Lepart. O. Au vers 728, on a leupart, qui est plus étymologique.

Vers 735.E n’est pas dans O. Müller a supposé mais.

Vers 737.Noit. O. V. la note du vers 611.

Vers 738.Empereres. O.

Vers 739.Host. O. Quatre fois nous trouvons, dans notre texte, host écrit sous cette forme. (Vers 739, 785, 883, 2760.) Mais le mot, dans l’usage, avait déjà perdu son h initiale, comme le prouvent cent autres exemples. ═ Lire cele (ost étant du féminin).

Vers 740.Barons. O. V. la note du vers 30.

Vers 742. — Lire K’iert. O. (?) V. les notes des vers 545 et 517.

Vers 743. — Lire Miens. O. V. la note du vers 545.

Vers 744.Baron. O. V. la note du vers 30.

Vers 746.Vos. O.

Vers 748.Ansguarde. O. Ce mot est composé avec ante. Or ante, dans notre texte, a donné einz, que nous avons restitué. (Vers 83, 449, 688, 759, 1037, 1065, 1690, 1804, 2939, 3043, 3394, etc.)

Vers 749.Oger. O. On trouve, pour le cas sujet, Ogers, au vers 3546. Lire Ogiers, ici comme partout. ═ Pour la légende d’Ogier (lequel d’ailleurs n’est dans la Chanson de Roland qu’un personnage secondaire et presque épisodique), nous renvoyons le lecteur à notre note du vers 94, où nous avons esquissé toute son histoire poétique et signalé les sources de sa véritable histoire. Deux remarques seulement. 1° Ogier n’est pas mis au nombre des douze Pairs par notre vieux poëme ; mais il reçoit cet honneur dans l’Entrée en Espagne, Renaus de Montauban, Gui de Bourgogne, le Voyage, Otinel, Fierabras, etc. 2° M. Barrois a essayé fort longuement de prouver qu’Ogier était un Ardennois et non Danois. Devant ce vers : De par Ogier le Danois d’outre mer, il a voulu alléguer que « outre mer » signifiait « outre Meuse » (??). Mais il nous semble que le passage suivant est absolument concluant en faveur du vrai Danemark : « Mult es quvers et plains de grant outrage. — Ben le dois estre ; tu es de danemarche, — De mals quvers qui se vestent de sarge ; — En lor poins portent cascun danoise hache...Ainc n’apartins de France a nul bernage. » (Vers 4300 et suivants.) Ces vers peuvent-ils s’appliquer au pays et aux gens des Ardennes ?

Vers 750. — Lire Mielz. O. V. la note du vers 545.

Vers 751.Parled. O. V. la note du vers 2.

Vers 753. — Lire vus au lieu de vos. O.

Vers 754. — Lire, en assonances, à la fin des vers de ce couplet : Jugier, chevalier, chier, jugiet, O. tient, O. destrier, chevalcier, sumier, eslegiet, O. bien O. ═ Au vers 756, lire mien, et au vers 761, iert.

Vers 764.Le guant. O. À cause du cas sujet il faut li guanz.

Vers 765.Cum. Mu. Nous avons laissé cume pour ne pas toucher à la question des rapports entre la prononciation et l’écriture. — Le. O. Même remarque que pour le guant, au vers 764.

Vers 766.Dreiz. O. Le vocatif latin serait directe. V. notre Théorie des vocatifs au vers 15. ═ Le. O. À cause du cas sujet il faut li.

Vers 767.Vos. O. ═ Poign. O. V. la note du vers 415. ═ Au vers suivant, lire mien.

Vers 769.Cheded. O. Pour le changement du d final en t, v. la note du vers 2.

Vers 770.Le bastun. Ces mots ont été ajoutés postérieurement.

Vers 771.Empereres. O. V. la note du vers 1. ═ Lire Enbrunc. O.

Vers 773.Deolz ne plurt. O. Erreur évidente.

Vers 774. — M. Müller fait remarquer avec raison que ce couplet est distinct du précédent, et que M. Michel a eu tort de fondre ces deux strophes ensemble, sous prétexte qu’il n’y avait pas de lettre majuscule au commencement de la laisse lxii. Le couplet lxi est assonancé en un, ur ; celui-ci, en u. ═ Venud. O. Pour le d final, voir la note du vers 2. À cause du cas sujet, il faut venuz.

Vers 775.Meillor. O. ═ Au vers suivant, lire bien.

Vers 777.Irascut. O. Pour le cas sujet il faut irascuz.

Vers 779.Baron. O. V. la note du vers 30. ═ Les différents traducteurs ne me paraissent pas avoir compris le sens du mot remut. Génin, d’Avril et Al. de Saint-Albin, écrivent la remut (au lieu de ), et traduisent par : Vous n’avez pas de baron pour la diriger mieux. M. Michel traduit remut par bouge, et s’approche davantage de la vérité. ═ Remut nous paraît le parfait simple de remuveir, qui a le sens de changer de place, aller quelque part. Nous avons traduit d’après ce sens.

Vers 781. — Lire Bien. O. V. la note du vers 545. Au vers suivant, lire ad !

Vers 783.Li Empereres apelet sis niés Rolant. O. Vers faux, et qui contient un solécisme, sis niés pour sun nevuld. Nous l’avons aisément réduit à un décasyllabe. Pour empereres, voir la note du vers 1.

Vers 785.Host. O. V. la note du vers 739. ═ Vos. O.

Vers 789. — Lire plutôt bien.

Vers 792. — Lire, en assonances, à la fin des vers de cette laisse : Destrier, Olivier, Geriers, Berengiers, vielz, fiers, O. Engeliers, chief, Gualtiers, chevaliers. « Le texte original, dit M. Müller, a été fort abrégé dans ce passage. Dans le manuscrit de Venise et dans celui de Versailles, une laisse précède le couplet lxv. Dans cette laisse on raconte comment Roland se revêt de son armure, et comment il engage les Français à le suivre. » (Page 48.) Nous allons essayer de combler cette lacune, comme deux fois déjà nous avons essayé de le faire. La chose est difficile ; car il s’agit de traduire les manuscrits de Venise et de Versailles en un dialecte tout différent. Nous proposerions donc d’insérer, entre les Couplets lxiv et lxv, la laisse suivante :

Li quens Rollanz est muntez sur un munt.
Vest sa brunie, jà meillur ne vist hum,
Lacet sun helme ki fut faiz pur barun,
Ceint Durendal dunt ad or est li punz,
A l’ col se mist un escut peint à flurs.
Ne voelt munter se sur Veillantif nun.
Tient sun espiet ; blancs est li gunfanun ;
Les renges d’or li batent jusqu’ à l’ punt.
Or verrat hum ki l’amerat u nun.
Dient Franceis : « E nus vus i siurum ».

Vers 793.Est muntet. O. Il faut muntez pour le cas sujet. V. la note du vers 176.

Vers 794.Gerins e Geriers. V. la note du vers 107.

Vers 795.Otes. Otes est compté au nombre des douze Pairs par la Chanson de Roland, l’Entrée en Espagne, Gui de Bourgogne (Oede), la Karlamagnus Saga, Otinel. Un autre Otes figure dans les remaniements de la Chanson de Roland. (V. notre note du vers 3680.) ═ Berengers. — La Chanson de Roland, les Remaniements de Paris, Venise VII, etc., la Chronique de Weihenstephan, le Voyage, mettent Berenger au nombre des douze Pairs. Renaus de Montauban place dans ce corps sacré un Berenger le Gallois.

Vers 796.Jastors. O. Au lieu de Sansun, que donne le manuscrit IV de Venise. ═ Dans Venise VII, qui ordinairement est calqué sur Versailles, il y a quelques traits particuliers : Vint i Geris et si vint Guiliers (sic), — Otes li quens et li dux Berengiers, — Ive et Ivore che li rois ot mult chiers ; — Si est venuz le Gascon Engeliers, — Estolz de Lengres est jà venuz premiers... ═ Pour Samson comme pour Anseïs, voir la note du vers 105.

Vers 797.Gerart. O. Pour le cas sujet il faut Gerarz. ═ Girars de Rossillon. C’est un des personnages les plus célèbres de notre Épopée nationale ; mais il n’est guère ici qu’épisodique. Il est compté au nombre des douze Pairs par la Chanson de Roland et ses Remaniements, Otinel, etc. ═ Le Giratz de Rossilho provençal nous fait assister à la lutte de son héros contre Charles-Martel : Girart tombe un jour dans la plus profonde misère, est réduit à se faire charbonnier tandis que sa femme Berthe devient couturière, et enfin se réconcilie avec le Roi. La Chanson de Roland le représente fort vieux (vers 2409) ; ce qui concorde assez bien avec la donnée de la Chanson provençale. ═ La légende de « Girart du Fraite » s’est probablement fondue avec la précédente : ce Girart du Fraite est un vieux rebelle qui, au commencement d’Aspremont, refuse de venir au secours de Charlemagne et qui, dans un passage des Reali calqué sur quelque vieux poëme français, va jusqu’à se faire renégat et à briser le crucifix. Mais Girart n’a aucun de ces traits dans la Chanson de Roland. Il y vit, il y meurt en vrai chrétien. (V. l’Histoire poétique de Charlemagne, 297, 299.)

Vers 798. — « Le scribe a lu par erreur Gaifier au lieu d’Engelier, et a gratuitement ajouté : Li riches dux, qui est une épithète ordinaire de Gaifier. » (Note de M. Müller.) Les manuscrits de Versailles et de Venise fournissent : Li Gascons Engelers. Vs. et Vn. VII, Li vescont Enciler. (Vn. IV.)

Vers 799.L’arcevesque. O. Pour le cas sujet il faut l’arcevesques.

Vers 800.Vos. O. ═ Au vers suivant, faillir n’est pas conforme à l’assonance.

Vers 802.S’eslisen. O.

Vers 803.Gualter del Hum. (Lire Gualtier.) Ce personnage est appelé Galter Leon et Galter da Mon Leon par le Ms. IV de Venise ; Gautier de Luz, dans le texte de Versailles ; Gautier de Hui, dans celui de Paris.

Vers 805.Destreiz. Mu. Le manuscrit porte deserz, qui ne nous semble pas méprisable. M. Müller a voulu se modeler sur le vers 805. ═ Au vers 806, lire bien.

Vers 807.Gualter. O. Pour le cas sujet il faut Gualtiers. On trouve Gualters sept vers plus haut (vers 800). ═ Vos. O.

Vers 809.Gualter. O. Au cas sujet Gualtiers. V. la note précédente, et, pour l’i, la note du vers 545.

Vers 813.Livrat. Mu. Voir la note du vers 38. ═ Le manuscrit VII de Venise ajoute quelques traits à celui de Versailles que M. Müller a cité in extenso. Il est question du comte Gautier : Ne descendra, por home qi soit viz, — Si aura trez troiz .c. branz coloriz : — Uns rois païens qui ot nom Aumabriz, — (De Bisterne est sires apoëstiz ; — En sa cumpaigne ot .xx. mille Arabiz,) — Le jor les a malement desconfiz, — Fors seul Gauter qi s’en est departiz — Qui à garent fut Rollant le marqiz.

Vers 814. — Un couplet manque ici à la version d’Oxford. Nous proposons de le restituer ainsi qu’il suit, d’après les couplets correspondants de Versailles et des deux manuscrits de Venise. C’est Venise IV que nous suivrons de préférence.

En Rencesvals si est Carles entrez.
L’einz-garde fist li dux Ogiers, li ber :
De celle part il n’unt mie à duter.
Rollanz remeint pur les altres guarder.
E Oliviers e tuit li duze Per,
Des Francs de France xx. milie chevaler ;
Bataille averunt, or pitiet en ait Deus.
Guenes le sout, li fel, li parjurez,
N’ad tant de coer que ja s’en puist celer.

Halt sunt li pui, li val tenebrus. O. E a été ajouté dans les éditions de G. et Mu.

Vers 815.Les. O. Il faut li pour le cas sujet du pluriel. ═ Destreiz. O. Pour la même raison il faut destreit.

Vers 816.Le jur passerent Franceis à grant dulur. — « À l’endroit où est passée l’armée de Charlemagne, était une voie romaine, celle d’Astorga à Bordeaux. Sur l’Itinéraire d’Antonin sont indiquées deux localités qui ont de l’importance pour l’étude de la Chanson de Roland. La première est Summum Pyrenæum, qu’il faut identifier avec l’église et l’hôpital Sancti Salvatoris de Summiportus in Valle Caroli, mentionnés en 1273 et 1333. Ce Saint-Sauveur doit correspondre à peu près aux ruines d’une chapelle qu’on appelle Ibagneta, et qui domine l’abbaye actuelle de Roncevaux. La seconde localité que signale l’Itinéraire d’Antonin est Imum Pyrenæum, qui correspond à Saint-Jean-Pied-de-Port ou à Saint-Jean-le-Vieux. Voici les textes justificatifs pour le Val-Carlos et Irasqueta : ... 1° Archives des Basses-Pyrénées (G., 204, p. 4), acte du 20 mars 1273. Vente de l’hôpital de « Summiportus », de celui d’Irasqueta et de celui de Goroscaray, par l’abbé de Leyre (diocèse de Pampelune), à celui de Roncevaux, pour 3000 pièces d’or : Ecclesiam seu hospitale situm et positum in loco qui dicitur « Summiportus » cum omnibus juribus et pertinentiis suis ; il est quamdam aliam domum nostram seu hospitale, sitam et positam in loco qui dicitur « Irasqueta » cum omnibus juribus et pertinentiis suis, it est quamdam aliam domum nostram seu hospitale, sitam et positam in loco qua dicitur « Goroscaray ». On retrouve sur la carte de Cassini la benta (auberge) de Goroscaray, dans les gorges qui précèdent Roncevaux. Tous ces hôpitaux nous indiquent une des routes du Pèlerinage de Saint-Jacques. 2° Il existe au même dépôt (G., 204, p. 10) une enquête du 17 août 1333 (Déposition d’Ochoas de Villanova, de Aezcoa, trésorier-cellerier de l’abbaye de Roncevaux, 70 ans, mémoire de 50 ans) : Ecclesia sancti Johannis de Iraotzqueta, sita in valle Caroli, est parochialis... Et dicta villa (pour vallis) Caroli, ab ecclesia Sancti Salvatoris (de Summi portus, près Roncevaux), usque ad domum de Bon-Conseil (près Saint-Jean-Pied-de-Port), est parochia sancti Joannis (d’Irasqueta)... Vallis Caroli, quæ basconcialiter (dans le langage basque), dicitur Luzaïde. Les deux noms existent encore aujourd’hui. » (Mémoire manuscrit de M. P. Raymond.)

Vers 817.Rumur. Mu. Le Ms. porte rimur. Au v. suiv., p.-e. vienent.

Vers 820.Le remembret. O. Erreur évidente. ═ Fius. O. V. la note du vers 76.

Vers 821.Pulcele. O. Erreur évidente.

Vers 824.Nevold. O. Pour l’assonance, nevuld.

Vers 825.Pitet. O. Pour le cas sujet il faut pitiez.

Vers 827.La n’est pas dans O. Il a été ajouté par Mu.

Vers 837.Puinz. O. V. la note du vers 415.

Vers 838.Chi ad juget mis niés à rere garde. O. Ce vers est détestable, au point de vue de la langue ; nous l’avons changé en celui-ci : Ki mun nevuld jugat à rere guarde. ═ Pour chi changé en ki, v. la note du vers 586.

Vers 842.Francs. O. Pour le cas sujet du pluriel, il faut Franc.

Vers 844.Guens. O. Lire p.-e. fel.

Vers 845.Oüd. O. V. la note du vers 2.

Vers 850.Mahumet levent en la plus halte tur... « Il fit placer ses dieux sur le rempart, et leur fit des sacrifices. » (Keiser Karl Magnus’s Kronike.)

Vers 854.Aort. O. Pour l’assonance, aürt. Le verbe est aürer.

Vers 858.Tere Certeine. C’est sur ces deux mots que M. d’Avril a appuyé toute sa théorie sur le théâtre des derniers exploits et de la mort de Roland. Il le place en Cerdagne, et non en Navarre. Dans notre « Note sur la Géographie de la Chanson de Roland », nous réfutons longuement cette opinion, après MM. P. Raymond, Gaston Paris et François Saint-Maur. (V. cette note au vers 703.)

Vers 859. — Lire duinst, qui se trouve au vers 1898. Le subjonctif présent a beaucoup embarrassé nos pères, qui tenaient à le bien distinguer du présent de l’indicatif. Ainsi, pour la seule 3e p. du subjonctif de duner, nous avons, dans notre Chanson, cinq ou six formes différentes : dunne (18) ; dunget (2016) ; duinset (2938) ; dunt (859) ; duinst (1898) ; doinst, etc. ═ Lire plutôt laisserat.

Vers 860.Tuchant. O. V. la note du vers 611.

Vers 865.Champ. O. Lisez camp. V. la note du vers 555.

Vers 866.Feu. O. V. la note du vers 76. ═ Le colp. O. Pour le cas sujet, il faut li colps.

Vers 868.Guarant. O. V. la note du vers 611.

Vers 872.Avrez. Mu. Nous avons supprimé mais, qui rompt très-inutilement la mesure du vers.

Vers 873.Marsilie. O. Pour le cas sujet, il faut Marsilies.

Vers 874.Marsilies. O. Pour le cas régime, il faut Marsilie. ═ Poign. O. V. la note du vers 415.

Vers 877.Eslisez mei XI de voz baruns... « Puis, il choisit douze de ses hommes, les meilleurs qu’il eut, pour les opposer aux douze Pairs. Le premier était Adelrot, le fils de sa sœur ; le second, Falsaron, son frère ; le troisième, Corsablin ; le quatrième, le comte Turgis ; le cinquième, Eskravit ; le sixième, Estorgant ; le septième, Estormatus ; le huitième, le comte Margaris ; le neuvième, Germiblas ; le dixième, Blankandin ; le onzième, Timodes ; le douzième, Langelif, qui était l’oncle du roi Marsile. » (Keiser Karl Magnus’s Kronike. Ces noms sont un peu différents dans la Karlamagnus Saga).

Vers 879.Premerein. O. Premereins, à cause du cas sujet. ═ Falsaron. O. V. la note du vers 30. ═ Au v. 880, lire plutôt iert.

Vers 881.Vos.

Vers 883.Host. O. V. la note du vers 739.

Vers 885.Corsalis. O. Ce roi est nommé Corsablix : au v. 1235 — M. Müller rapproche de Corsablis, le Corsabrins de Venise (IV et VII), le Corsablis et le Corsabrins de Paris, le Cursabile du Ruolandes Liet, le Kursabiles et le Kursabels du Stricker. — Cette laisse lxxi de notre poëme est omise dans Versailles ; mais Venise (VII) comble cette lacune : « Rois Corsabrins juint de l’autre part ; — Ba[r]barins est e de mout male part. — Por nulle rien n’en pout amer cohart. — E dit au Roi : « Porquoi avez regart ? — Je sui le tierz ; or esli[s]ez le quart. » — Après parla Malpin de Mont-Brigart : — Plus cort à pié que lion ne lipart. — Cil a parlé à loi de fel musart : — « En Rencesvals metrai mon estendart. — Se truis Rollant qi a la cors jalant (sic pour gaillart), — Je l’ocirai à mon tranchant fausart. — Des XII pers ferai grant essart. »

Vers 889.Poignant. O. Lire puignant. V. la note du vers 415. ═ Brigant. O. La forme Brigal se trouve au vers 1261. M. Müller énumère les variantes de ce nom dans toutes les versions.

Vers 890.Un cheval. O. Pour le cas sujet, il faut uns chevals. = Lire pied.

Vers 892.Rencesvals. « Je suis allé à Roncevaux il y a environ huit ans. J’ai parcouru tranquillement et attentivement le chemin qui sépare cette abbaye de Saint-Jean-Pied-de-Port. J’ai suivi le chemin du Val-Carlos. Partout la gorge est extrêmement resserrée. Il est impossible que toute l’armée ait passé par ce col ; elle a dû se diviser, et, selon moi, a pu passer par Irun, par le Val-Carlos, par la route qui domine le château Pignon, et aussi par la voie antique de la vallée d’Aspe à Somport (commune d’Urdos). Les passages difficiles du Val-Carlos ont une longueur de dix kilomètres. Dans beaucoup d’endroits, deux hommes ne peuvent passer de front. Sur l’autre route, que je n’ai pas suivie, il y avait au moyen âge deux hôpitaux : Orisson et Reculus. Ces deux chemins partent également de Saint-Jean-Pied-de-Port, et viennent se rejoindre avant Roncevaux, près de l’ancienne chapelle d’Ibagneta. L’Abbaye est bien déchue. Si mes souvenirs sont exacts, elle n’offre pas de vestiges d’architecture remontant au delà du xive siècle. En 1862, elle était encore occupée par douze chanoines. La bibliothèque m’en a paru fort délaissée. On y montre une paire de souliers de velours violet, comme ayant appartenu à Turpin : ces souliers ont la forme de ceux de François Ier. On y conserve aussi une prétendue masse d’armes de Roland : c’est un boulet de bronze rattaché par une chaîne à un solide manche de bois. Et voilà où est aujourd’hui tombé le souvenir de Roland ! » (Mémoire manuscrit de M. P. Raymond.)

Vers 894.Balaguet. O. V. la note du vers 63. ═ Au v. 898, lire bien.

Vers 896.Muntet. O. Pour le cas sujet, il faut muntez.

Vers 900.Il en est. O.

Vers 901.Juer. O. Erreur évidente. Correction de M. Müller.

Vers 902.Finet. O. Pour le cas sujet, il faut finez.

Vers 903.Oliver e tuz les XII pers. O. Le cas sujet exige Olivers e tuit li XII per. ═ Comme partout, lire Oliviers.

Vers 904.Viltiet. O. La forme correcte paraît être viltet (437). ═ Au v. 905, lire vielz, et au v. 906, iert.

Vers 908.Marsilie. O. Pour le cas sujet, Marsilies.

Vers 913.Humes n’est pas dans le manuscrit.

Vers 914.Trois. O. Pour se conformer à la phonétique de notre manuscrit, il faut truis, que l’on trouve aux vers 893 et 902.

Vers 915.Jor. O. Pour le cas sujet, il faut jurz. Quant au changement d’o en u, v. la note 17, sur vus, pur, etc., et la note 30. ═ Lire iert.

Vers 916.Turteluse. C’est Tortose, qui joue un rôle si considérable dans tout le cycle de Guillaume. Historiquement parlant, cette importance est justifiée. Louis, fils de Charlemagne, fit en 809-810 le siége de Tortose, et s’en empara en 811. (Eginhard, Annales, ann. 809. — L’Astronome Limousin, §§ 14-16. Pertz, Scriptores, ii, 613-615.)

Vers 917.Citet. O. Pour le cas sujet, il faut citez.

Vers 918.Male vode. Mot difficile : on a voulu le rapporter à vuide, venant de viduus. Mais c’est une hypothèse très-contestable. ═ Venise IV donne : male hore ; Venise VII et Versailles : tel devore.

Vers 919.S’ajust... O.

Vers 920. — Lire vus. ═ Unches. O. V. la note du vers 629.

Vers 921. — Lire seinz Peres, à cause du sujet. ═ Lire iert, au v. 922.

Vers 924.Avrat. Mu.

Vers 926.Durendal. ═ Nous essaierons de résumer ici, en quelques propositions claires, toute l’histoire de Durendal (Durindart, Venise VII ; Durandart, Versailles. ; Dirindarde dans le Charlemagne de Venise ; Durlindana dans les Reali, etc.)... a. Suivant Fierabras (vers 651), cette fameuse épée aurait été (comme Musaguine et Courtain) l’œuvre du forgeron Munificans : Et Munificans fist Durendal au puign cler. Mais beaucoup d’autres autorités l’attribuent à Galant ou Veland, ce forgeron sur lequel les Sagas islandaises racontent tant de merveilles et dont l’histoire a été calquée sur celle de Dédale, qui, surpris et fait prisonnier par le roi Niduth, assassina les deux fils et déshonora la fille de ce roi, puis se fabriqua des ailes et s’envola... (V. Vœlemdarquida et Vilkina Saga, analysées dans l’opuscule de MM. Depping et F. Michel : Veland le Forgeron, Dissertation sur une tradition du moyen âge.) — b. Huon de Bordeaux : (xiie s. Sorb. 450, f° 230, r°), le Doolin de Mayence en prose (xve s., éd. de 1501, f° 28), Garin de Montglane (xiiie s. Lav., 178, f° 36), s’accordent à faire sortir Durendal de la forge de Galant. — c. D’après l’auteur de Doolin de Mayence, qui reproduit un Roman antérieur : « Quant elle fut faicte, elle fut essayée et couppa quatre pièces d’acier moult grosses à ung coup. » — d. La Karlamagnus Saga (xiiie s.) ne manque pas d’attribuer notre épée au même ouvrier : « Durendal fut forgée, dit-elle, par le célèbre Galant d’Angleterre, et donnée à l’Empereur par Malakin d’Ivin, comme rançon de son frère Abraham. » (Bibl. de l’Éc. des Chartes, xxv, 101.) — e. D’après la Chanson de Roland, c’est dans la vallée de Maurienne que Dieu manda à Charlemagne par un Ange de donner cette épée au meilleur de ses capitaines. La Karlamagnus Saga complète ce récit : « Charles était alors sur le point de mettre la paix entre les Romains et les Lombards, » et l’Ange qui lui apparut ainsi est saint Gabriel. — f. Mais cette légende est loin d’être uniformément adoptée. D’après les Enfances Charlemagne de Venise (comm. du xiiie s.) Charles aurait enlevé à l’émir Braibant, vaincu par lui, sa célèbre épée Durendart (Direndarde). Même version dans la Cronica general de España (xiiie s.) : mais l’adversaire du jeune Charles, qui veut lui ravir Galienne, s’appelle ici Braimant. C’est aussi le nom qu’il porte dans les Reali di Francia. (V. 1350.) Seulement Durendal (Durlindana) est l’épée d’un autre chef sarrazin, de Polinaro, qui est tué par Mainet. (27-32.) Et Doolin de Mayence répète encore au xve siècle : « Durandal fut conquise par Charlemaigne sur Braymont l’amiral, » et Garin de Montglane avait dit, au xiiie s. : Durendal qu’il [Karles] conquist à Brubant. — g. À côté de ce groupe imposant, Aspremont nous offre une autre version. La conquête de Durendart est l’objet même de ce poëme : Or vous dirai... si cum li rois i adouba Rolant — Et il li ceint à son côté le brant ; — Ce dist la geste, Durendart la trenchant. — C’est la premiere dunt il onques fist sanc, — Dont il ocist le fil roi Agoulant... (Éd. Guessard, p. 1, vers 12-18.) Roland, qui n’est pas encore chevalier, lutte avec le jeune Eaumont, fils d’Agolant, s’empare de Durendal et tue le prince sarrazin d’un coup de cette épée qui deviendra si célèbre entre ses mains. Aussi, lorsqu’il s’agit d’adouber le neveu de Charles, choisit-on Durendal entre trois cents épées pour la ceindre au jeune héros. — h. Nous n’avons pas à raconter ici tous les exploits que Roland accomplit avec cette arme glorieuse. Mais nous devons dire comment, d’après la légende, il manqua trois fois de la perdre : 1° Maugis la lui vola (Renaus de Montauban, éd. Michelant, p. 306) ; 2° Alori s’en empara une autre fois par ruse : Il saisist Durendart au costiaus d’acer bis. — Le branc geta del fuer, moult fu maltalentis (Jean de Lanson, B. N., 2495, f° 2, v°) ; 3° dans le Karl Meinet, du comm. du xive s., il existe un épisode que l’on peut intituler Ospinel. On y voit Roland disputer à Olivier l’honneur de combattre Ospinel ; Olivier lutte contre le roi païen avec l’épée Durendal, que son ami lui prête. Ospinel est vaincu, se convertit et meurt, et Roland se prend d’amour pour sa fiancée Magdalie. Mais en l’enlevant, il perd, ou plutôt il oublie sa bonne épée. Il s’agit de la retrouver. On livre bataille au roi sarrazin Sibelin, qui avait enlevé Magdalie. La jeune fille est reconquise, et Durendal retrouvée. (Hist. poét. de Charlemagne, p. 490.) — i. Les qualités de Durendal sont merveilleuses... Charles l’avait fait essayer sur le fameux perron qui se trouvait au seuil de son palais : elle avait résisté, ainsi qu’Almace, l’épée de Turpin. Courtain, l’épée d’Ogier, moins heureuse, fut écourtée d’un demi-pied. (V. Renaus de Montauban, éd. Michelant, p. 210, et la Karlamagnus Saga, i, 20, citée par G. Paris, l. I., 370.) D’après Ospinel (l. I.), Durendal assurait à son possesseur le royaume d’Espagne... Son acier, d’ailleurs, est célébré par tous nos poëtes... — j. Au portail de la cathédrale de Venise, Roland est représenté tenant une forte épée, sur laquelle il est écrit : Durindarda. (V. la reproduction de cette statue, p. 67.)

Vers 927. — Lire la quel. ═ Vers 928. Si. O. V. la note du vers 605.

Vers 929. — Lire plutôt vielz. ═ Avrat. Mu. V. la note du vers 38. ═ Deol. O. Erreur évidente ; transposition de voyelles.

Vers 930.Curone. O. Cf. les vers 388 et 2585, où le mot curune est conforme à la phonétique de notre texte. L’assonance demande également curune. ═ Au vers 932, lire Sarrazins.

Vers 934.Orgoill. O.

Vers 935.Trois. O. V. la note du vers 914.

Vers 936.Oliver. O. Lire Oliviers.

Vers 937.Jugez. O. Pour le cas sujet du pluriel, il faut juget.

Vers 938. — Lire plutôt iert.

Vers 939.Avrat. Mu.

Vers 941.Un. O. Il faut, au sujet, uns.

Vers 943.Marsilie. O. Pour le sujet, Marsilies.

Vers 946.Comant. O. V. la note du vers 309.

Vers 947. — Lire Olivier.

Vers 948.Avrunt. Mu.

Vers 949. — Lire Kar, qui a été ajouté par MM. Génin et Muller, d’après Venise IV. (V. la note du vers 275.)

Vers 950.Feruns. O. V. la note du vers 42, sur les premières personnes du pluriel.

Vers 951. — Lire plutôt iert. ═ Dolent. O. Pour le cas sujet, dolenz.

Vers 952.Vos. O.

Vers 954.L’Empereor vos. O.

Vers 955.Curant. O. V. la note du vers 611.

Vers 956.Entre quascaz marine. O. Entre qu’Ascaz marine. Mi. Entresqu’a Scazmarine. G. Entresqu’à Scaz marine. Mu. Le Ms. de Versailles donne : D’ici en Samarie. Celui de Venise (VII) : La terre d’Afrique et d’Aumarie, etc. D’après M. Müller, nous traduisons par Cadix. Mais ce n’est absolument qu’une hypothèse.

Vers 962.Vos. O.

Vers 964.Oliver. O. Pour le sujet, il faut Olivers. Lire Oliviers.

Vers 965.Le XII pers. O. Il faut, au sujet, li XII per.

Vers 971.Jurn. O. Le cas sujet exige jurs.

Vers 972.Avrum. Mu.

Vers 975. — Lire Muneigre. ═ Josqu’à. O. Jusque est à la fois plus conforme à la phonétique et à l’étymologie.

Vers 976.Chevoel. O. Faute évidente. On trouve partout ailleurs chevel. (Vers 2347, 2596, 2931, 3605, 3821.) ═ Lire baleient.

Vers 977.Greignor. O. V. les notes des vers 51, 17, 30.

Vers 978.Muls. O. Pour le cas sujet, il faut mul.

Vers 979.Dun. O. Partout ailleurs, on lit dunt, qui, venant de deunde, est plus étymologique. ═ Ce vers n’est pas assonancé comme il convient. Nous proposons, d’après M. Müller, de le remplacer par le suivant : Icele tere ù vit, Deus l’ad maleite.

Vers 980.Soleill. O. Pour le sujet, il faut soleilz. Je laisse blet, qui peut venir d’un neutre, bladum. ═ Au v. suivant, lire plutôt chiet.

Vers 983.Alquanz. O. Il faut, au cas sujet, alquant. ═ Lisez diable, également à cause du sujet pluriel.

Vers 986.Trois. O. V. la note du vers 914. ═ Li. O. Il faut le pour le cas régime.

Vers 989. — Lire plutôt iert. ═ Deserte n’est pas justifié par l’assonance. Nous proposons : chaeite.

Vers 990.Per n’est pas dans le manuscrit. ═ Saleient. Lire s’aleient, qui est justifié par l’accent tonique, et traduire par s’assemblent. Le manuscrit porte salient, que Mi. reproduit servilement.

Vers 993.Sapide. Dans le manuscrit, les quatre dernières lettres ont été ajoutées postérieurement. — Sapeie est une excellente correction de Mu.

Vers 994.Des osbercs. O. Faute évidente, et qui rompt la mesure. ═ Une étude spéciale sur les armures décrites dans la Chanson de Roland peut offrir un double intérêt. Elle mettra le lecteur à même de saisir plus aisément mille passages de notre poëme, où il est question de helmes, d’osbercs, d’espiez, de gunfanuns, etc. Sans doute, nous avons essayé de rendre notre traduction claire et limpide pour tout le monde, pour les femmes mêmes et pour les enfants. Mais ils comprendront encore mieux la vieille Chanson, quand nous en aurons expliqué tous les termes difficiles. Une seconde utilité de ce travail frappera davantage les savants : la description de ces armures se rapporte évidemment au temps où fut écrit le poëme, et par conséquent peut servir à fixer cette époque d’une manière plus ou moins précise. — Commençons par décrire l’armure offensive.

1° La pièce principale est l’épée. L’épée est l’arme noble, l’arme chevaleresque par excellence. On est fait chevalier per spatam (comme aussi per balteum, par le baudrier, et per alapam, par le soufflet ou le coup de paume donné au moment de l’adoubement). Mais c’est l’épée qui demeure le signe distinctif du chevalier. ═ L’épée est, en quelque manière, une personne, un individu. On lui donne un nom : Joyeuse est celle de Charlemagne (vers 2989) ; Almace, celle de Turpin (2089) ; Durendal, de Roland (988) ; Halteclere, d’Olivier (1363) ; Précieuse, de l’Émir (3146), etc. ═ Chaque héros garde, en général, la même épée toute sa vie, et l’on peut se rappeler ici la très-longue énumération de toutes les victoires que Roland a gagnées avec la seule Durendal : Si l’en cunquis e Peitou e le Maine. — Jo l’en cunquis Normandie la franche, etc. (2315 et ss.) ═ L’épée est tellement importante aux yeux du chevalier, que Dieu l’envoie parfois à nos héros par un messager céleste. C’est ainsi qu’un Ange remit à Charlemagne la fameuse Durendal pour le meilleur capitaine de son armée. (2319 et suiv.) ═ Aussi ne faut-il pas s’étonner si nos héros aiment leur épée et parlent avec elle comme avec une compagne intelligente, avec un être vivant et raisonnable… Mais il faut ici passer aux détails matériels. ═ Il semble que l’épée des chevaliers de notre poëme ait été longue. Le Sarrazin Turgis dit quelque part : Veez m’espée ki est e bone e lunge. (925.) C’est d’ailleurs le seul texte qu’on puisse citer sur ce point. ═ L’épée se ceignait au côté gauche : Puis ceint s’espée à l’senestre costet. (3143.) Elle était enfoncée dans un fourreau (V. la fig. 5) qui est nommé une seule fois dans toute la Chanson. Au moment où Ganelon est insulté par Marsile : Mist la main à s’espée ; — Cuntre dous deiz l’ad del’ furrer getée. (444-445.) Et Olivier se plaint, dans le feu de la mêlée, de n’avoir pas le temps de tirer son épée : Ne la poi traire. (1365.) ═ Nulle part il n’est ici question du baudrier. ═ L’épée est en acier. Pour louer une épée, on dit qu’elle est bien fourbie. (1925.) Joyeuse, l’épée de Charlemagne, a une clarté splendide : Ki cascun jur muet XXX. clartez (2502) ; Ki pur soleill sa clartet ne muet. (2990.) Une des qualités de Durendal, c’est d’être « claire et blanche ». (1316.) L’acier de Vienne paraît avoir été particulièrement célèbre (997), à moins que ce mot (ce qui est fort possible) n’ait été placé là pour les besoins de l’assonance. Il est dit ailleurs que les bonnes épées sont de France et d’Espagne. (3889.) ═ La pointe de l’épée ou du brant a le même nom que la pointe de la lance : c’est l’amure : De l’brant d’acer l’amure li presentet. (3918.) ═ L’épée se termine par un helz et un punt. Précisons la valeur de ces mots : D’or est li helz e de cristal li punz. (1364.) Le helz, c’est la garde ; le punz, c’est le pommeau. Ce pommeau est de cristal, c’est-à-dire, orné de pierres précieuses (1364, 3435), ou plus souvent doré : En l’oret punt l’ad faite manuverer. (2506 et aussi 2344.) Ce pommeau est assez considérable. Il est creux, et c’est la coutume des chevaliers d’y placer des reliques : En l’oret punt asez i ad reliques. (2344, et aussi 2503 et ss.) Charlemagne a fait mettre dans le pommeau de son épée l’amure de la lance avec laquelle Notre-Seigneur a été percé sur la croix. (2503 et ss.) L’auteur, comme on le voit, ne connaissait pas la légende de la Table Ronde : Asez savum de la lance parler — Dunt nostre Sire fut en la cruiz naffret. — Carles en ad l’amure, mercit Deu. — En l’oret punt l’ad faite manuverer. — Pur ceste honur e pur ceste bontet. Li nums Joiuse l’espée fut dunet. Quant au pommeau de Durendal, il contient quatre reliques précieuses : du vêtement de la Vierge, une dent de saint Pierre, du sang de saint Basile et des
cheveux de saint Denis. (2343 et ss.) Bref, le pommeau est ou peut devenir un Reliquaire. ═ Le helz, avons nous dit, est la garde de l’épée. Elle est généralement dorée ; d’où l’expression : d’espées enheldées d’or mier. (3866.) Il paraît plus difficile, au premier abord, de comprendre les mots suivants : Entre les helz ad plus de mil manguns. (621.) Mais le texte de Versailles nous en donne une explication acceptable : Entre le heut et le pont qui est en son ; — De l’or d’Espaigne vaut dis mile mangon. (V. 891.) ═ Entre les helz, entre le helz et le punt, se trouve la « poignée ». Elle est généralement très-étroite, très-grêle, comme on pourra s’en convaincre d’après les figures ci-contre, qui donneront d’ailleurs une idée très-suffisante de l’épée de notre Chanson... 2° La lance et l’espiet. — D’une étude fort attentive de notre texte, il résulte que les deux mots lance et espiet y désignent tantôt le même objet (vers 1033, 3818, etc.), et tantôt deux objets distincts. (Vers 541, 3080.) Mais, neuf fois sur dix, la synonymie est complète, et le mot lance, qui est d’ailleurs bien plus rare dans notre poëme que le mot espiet, a presque partout exactement le même sens. ═ La lance se compose de deux parties : le bois, qui s’appelle la hanste et le fer, dont l’extrémité s’appelle amure. ═ La hanste est en bois de frêne : Entre ses poinz tenait sa hanste fraisnine (vers 720), ou en pommier : Ardant cez hanstes de fraisne e de pumer. (Vers 2537. Cf. la Chronique de Turpin, cap. ix.) Est-ce pour l’assonance ? — La hanste se tenait droite quand on ne se battait pas ; d’où l’expression si fréquente : Dreites cez hanstes. (Vers 1143 et passim.) Mais, dans le combat, on la boutait pour renverser ses adversaires : d’où le mot plus fréquent encore : pleine sa hanste de l’ cheval l’abat mort. (Vers 1204, 1229, etc.) On la tenait au poing droit : En lur puinz destres unt lur trenchanz espiez. (Vers 3868.) On la faisait rouler dans la paume de sa main : Sun espiet vait li ber palmeaint. (Vers 1155.) ═ Nous n’avons aucun renseignement dans notre poëme sur la hauteur de la lance : cette hauteur d’après tous les documents figurés, était considérable. L’auteur de la Chanson indique, comme par exception, que les Lorrains et les Bourguignons espiez unt forz e les hanstes sunt curtes. (Vers 3080.) Telle serait la dimension et la forme de l’épieu, qui est l’arme de chasse. C’est également par exception que le poëte signale la hanste de l’épieu de Baligant. La hanste fut grosse comme un tinel ; — De sul le fer fust uns mules trusset. (Vers 3153, 3154.) La hanste, d’ordinaire, n’était pas si pesante ni si énorme. Elle se brisait même trop aisément : Fiert de l’espiet tant cum hanste li duret (vers 1322) ; et l’on se rappelle Olivier n’ayant plus au poing qu’un tronçon de bois ensanglanté, ou plutôt, comme le lui dit Roland, un vrai bâton. (Vers 1351 et suivants.) L’amure est en acier, en acier bruni : luisent cil espiet brun, etc. (vers 1043) ; en acier bien fourbi (vers 3482) et bien tranchant. (Vers 1301, 3351.) Mais, par malheur, rien dans notre texte ne nous fait connaître la forme et la dimension de l’amure. Les monuments figurés sont plus complets. (V. les figures 2, 3, 4.) ═ Les meilleures épées se seraient faites à Valence, suivant notre poëme ; mais Valentineis ne joue-t-il pas au vers 998 le même rôle que l’acier vianeis au vers 997 ? Affaire d’assonance. Il convient néanmoins d’observer ici que Rabelais dit, dans son Gargantua (I, 8) : Son espée ne fut valentianne ny son poignart sarragossoys. ═ 2° Bien moins précieuse que l’épée, la lance cependant peut recevoir un nom spécial : du moins l’espiet de l’émir s’appelle Maltet. (Vers 3152.) ═ Au haut de la lance est attaché, est « fermé » le gonfanon ou l’enseigne. (V. les fig. 2, 3, 4.) Le mode d’attache n’est pas spécifié, si ce n’est peut-être
dans un passage des manuscrits de Venise IV et Paris (V. les fig. 2, 3, 4), qui comble une lacune évidente du texte d’Oxford. Il y est question « de clous d’or qui retiennent l’enseigne ». (Müller, p. 95, 96.) Ce gonfanon est de différentes couleurs. Ceux des Français, comme ceux des Sarrazins, sont blancs e vermeilz e blois. (Vers 999 et 1800.) Le gonfanon de Roland est tout blanc (laciet en sum, un gunfanun tut blanc) ; celui de Naimes est jaune (vers 3427), etc. ═ Les enseignes sont quelquefois dorées : Cil oret gonfanun (vers 1811), c’est-à-dire sans doute brodées ou frangées d’or. Quelques-unes (celles des Pairs et des hauts barons) ont, en effet, des franges d’or qui descendent jusqu’aux mains du cavalier : Les renges d’or li batent jusqu’as mains. (Vers 1057.)
Telle est l’enseigne blanche de Roland. Du reste, les gonfanons tombent jusqu’aux heaumes : Cil gonfanun sur les helmes lur pendent. (Vers 3006.) ═ Le gonfanon est presque toujours à pans, c’est-à-dire à langues. (V. les fig. 2, 3, 4. cf. le vers 1228, etc. etc.) Quand on enfonce la lance dans le corps d’un ennemi, on y enfonce en même temps les pans du gonfanon (vers 1228) : El cors li met tute l’enseigne (vers 3427) ; Tute l’enseigne li ad enz el cors mise. (Vers 3363.) ═ Ces petits gonfanons ne doivent pas être confondus avec la grande Enseigne, avec le Drapeau de l’armée. Geoffroi d’Anjou est le gonfalonier du Roi. (Vers 106.) C’est lui qui porte l’orie flambe : Gefreid d’Anjou, portet l’orie flambe. — Seint Pere fut, si aveit nun Romaine ; — Mais de Munjoie iloec out pris eschange. (Vers 3093, 3095.) Ce texte est confirmé par plusieurs de nos autres romans, qui représentent Roland comme l’Avoué de l’Église romaine. (V. l’Entrée en Espagne.) Quant aux Sarrazins, ils font porter en tête de leur armée le Dragon de leur émir, l’étendard de Tervagant et de Mahomet, avec une image d’Apollin. (Vers 3268, 3550, etc.) En outre, Amboires d’Oluferne porte « l’enseigne de l’armée païenne » : Preciuse l’apelent. (Vers 3297, 3298.) ═ Enseigne et gunfanun paraissent, d’ailleurs, absolument synonymes. 3° La lance et l’épée sont en réalité les seules armes offensives dont il soit question dans notre poëme. Quand l’Empereur confie à Roland la conduite de l’arrière-garde, il lui donne, comme symbole d’investiture, un arc qu’il a tendu : Dunez mei l’arc que vus tenez el’ poign. (Vers 767.) Dunez li l’arc que vus avez tendut... Li Reis li dunet. (Vers 780, 781.) ═ Lorsque Marsile s’irrite contre les violences de Ganelon, il lui jette un algeir ki d’or fut enpenet. (Vers 439, 442.) Il s’agit évidemment d’une sorte de javelot. ═ Enfin, pour achever Roland sur le champ de bataille, les hordes sauvages qui l’attaquent lui jettent des darz, des wigres, des muzeraz, des agiez, des giesers...
(Vers 2074, 2075, 2155.) Il s’agit ici de flèches de différentes espèces. Ce ne sont pas là, entendons-le bien, les armes régulières, même des païens, et, encore un coup, il n’y en a point d’autres que la lance et l’épée. — Mais arrivons aux armes défensives. ═ Les trois pièces principales de l’armure défensive sont le heaume, le haubert et l’écu. (V. la fig. 5.) 1° Le heaume est l’armure qui, concurremment avec le capuchon du haubert, est destiné à protéger la tête du chevalier. D’après les monuments figurés,
le heaume (V. la fig. 6) se compose essentiellement de trois parties : la calotte de fer, le cercle, le nasal ou nasel. Cette dernière partie est la seule qui, dans notre poëme, soit nommée par son nom ; mais il est implicitement question des autres. ═ La calotte est pointue : Sur l’elme à or agut. (Vers 1954.) Comme tout le heaume, elle est en acier : Helmes d’acer. (Vers 3888.) Cet acier est bruni (vers 3603), et l’épithète que l’on donne le plus souvent au heaume est celle de cler (vers 3274, 3586, 3805) ou flambius. (1022.) Il faut croire que cet acier était souvent doré : c’est du moins la manière d’expliquer les mots de helmes à or (vers 3911 et 1954), à moins qu’il ne s’agisse uniquement ici que des richesses du cercle. ═ Le cercle ? On ne trouve pas ce mot dans notre poëme ; mais c’est du cercle sans doute qu’il est question dans ces vers où l’on montre le heaume semé de pierres fines, de pierres gemmées d’or, de perles gemmées d’or (de perles, c’est-à-dire de verroteries) : L’elme li freint o li gemmes reflambent (vers 3616), L’elme li freint ù li carbuncle luisent (vers 1326) ; Luisent cil elme as pierres d’or gemmées (vers 1452 et 3306), etc. ═ Enfin le nasel est clairement et nominativement indiqué par ces vers : Tut li detrenchet d’ici que à l’ nasel (vers 1996), Tresque à l’ nasel li ad freint e fendut (vers 3927), etc. Le « nasel » était une pièce de fer quadrangulaire, ou d’autres formes (V. la fig. 5), destinée à protéger le nez. L’effet en était disgracieux autant que l’emploi en était utile. ═ Une particularité qui est indiquée très-nettement, qui est vingt et cent fois attestée dans notre Chanson, c’est la manière dont le heaume était fermé, attaché sur la tête, ou plutôt sur le capeler, sur le capuchon de mailles. Ces deux mots vont souvent ensemble : Heaumes lacés (vers 712, 1042, 3086), etc. Et quand Roland va porter secours à l’archevêque Turpin : Sun elme à or li deslaçat de l’ chef. (Vers 2170.) Tout au contraire, quand les héros s’arment pour la bataille, lacent lur helmes (vers 2989), etc. ═ Où étaient ces lacs, qui sans doute étaient des liens de cuir passant d’une part dans une maille du haubert, et de l’autre dans quelques trous pratiqués au cercle ? La question est assez difficile à résoudre, même d’après les monuments figurés. Ce qu’il y a de certain, c’est qu’il y en avait un certain nombre. Naimes reçoit de Canabeu un coup terrible qui lui tranche cinq lacs de son heaume. Tout le passage est digne d’attention : Si fiert Naimun en l’elme principal, — A l’ brant d’acer l’en trenchet cinq des laz. — Li capelers un dener ne li valt ; — Trenchet la coife entresque à la char. (Vers 3432 et suivants.) Le capelers et la coife, c’est le capuchon du haubert, c’est le capuchon de mailles que l’on portait sous le heaume. On comprend aisément que pour ajuster un casque de fer sur un bonnet de mailles, il était absolument nécessaire de l’attacher. ═ Les heaumes de Saragosse sont renommés. (Vers 996.) Est-ce pour la qualité de leur acier ? Au xvie siècle, Rabelais, comme nous l’avons dit, parle encore d’un poignart sarragossoys. (Gargantua, I, 8.) ═ 2° Le haubert, c’est le vêtement de mailles, la tunique de mailles, la chemise de mailles. Sous le haubert on porte le blialt. Quand Roland porte secours à l’archevêque Turpin : Si li tolit le blanc osberc leger. — Puis, sun blialt li ad tut detrenchet, — En ses granz plaies les pans li ad butet (vers 2172), etc.
Et c’est ce qui est encore mieux expliqué par ces vers de Huon de Bordeaux : Li autre l’ont maintenant desarmé — De l’dos li ostent le bon osberc saffré ; — Ens el bliaut est Hues demorés. (Barstch, Chrestomathie française, 56, 31.) ═ Pour le haubert, il s’appelle dans notre poëme brunie ou osberc. Quelquefois, il est vrai, brunie paraît avoir un sens distinct : Osbercs vestuz et lur brunies dubleines. (Vers 3088.) Mais la synonymie est presque partout évidente. ═ À l’origine, la brunie paraît avoir été une sorte de « cuirasse de cuir » sur laquelle on avait cousu un certain nombre de plaques métalliques. Mais au lieu de plaques, ce furent quelquefois des anneaux cousus sur l’étoffe (voy. p.-e. la fig 7), et de plus en plus rapprochés les uns des autres. De là au vêtement de mailles il n’y a pas loin. ═ Suivant un autre système, les Sarrazins auraient possédé avant nous de ces vêtements, et les auraient fabriqués avec une certaine perfection que les chrétiens purent imiter. De là peut-être, dans notre poëme, la célébrité des osbercs sarazineis. Quoi qu’il en soit, et quelque soit ailleurs le sens de ce mot, la brunie de la Chanson de Roland est absolument et uniquement un haubert, un vêtement de mailles parfait. Il se termine en haut par le capeler, ou capuchon de mailles qui se lace au haubert. (Vers 3432 et suivants.) Il s’attache sur le menton, qu’il préserve, et cette partie de la brunie s’appelle la « ventaille » : De sun osberc li rumpit la ventaille. (Vers 1298, 3449.) Quant à la chemise en elle-même, il ne nous reste malheureusement aucune indication dans notre poëme qui nous apprenne jusqu’à quelle partie du corps elle descendait. C’est un précieux élément de critique qui nous fait ici défaut. ═ Les épithètes que notre poëte donne le plus volontiers au haubert sont celles-ci : blancs (vers 1022, 1329, 1946, 3484), forz (3864), legers. (2171, 3864.) Les mailles sont très-distinctement indiquées. Elles sont de différentes qualités. Quelquefois fines : Le blanc osberc dunt la maile est menue. (Vers 1329.) D’autres fois (ce qui peut d’ailleurs se concilier avec la finesse), elles sont doubles : De sun osberc li derumpit les dubles. (Vers 1284.) Païen s’adubent d’osbercs sarazineis. — Tuit li plusur en sunt dublez en treis. (Vers 994, 995.) Brunies dublées (vers 711, d’après le texte de Venise), ou dubleines. (Vers 3088.) Enfin, il importe de signaler l’épithète de jazezanc, donnée à ce même haubert. Or jazezanc signifie : « qui est fait de mailles. » (Voir notre Glossaire.) Du reste, quand notre poëte veut exprimer que le haubert est mis en pièces, il se sert du mot desmailer. (Vers 3387.) ═ Dans la Chanson de Roland, le haubert est fendu. Deux fentes le partagent en deux pans, dont il est souvent question dans le poëme. Ces fentes étaient pratiquées non pas sur les côtés, mais sur le devant et le derrière du vêtement. Et c’est ainsi qu’il faut comprendre ce vers : De son osberc li derumpit les pans. (Vers 1300, 1553, 3571, 3465, etc.) ═ Les pans du haubert étaient parfois ornés, à leur partie inférieure, d’une broderie grossière en or, ils étaient saffrés : Vest une bronie dunt li pans sunt saffret. (Vers 3141.) De sun osberc les dous pans li desaffret. (V. 3426. V. aussi 3307, 1453, 1032, 2949, etc.) Cet ornement (consistant peut-être en fils d’or entrelacés dans les mailles, sur une surface peu étendue et formant une bande) ne se trouvait, semble-t-il, que sur les hauberts des grands personnages, des pairs et des comtes... 3° L’écu (voir les fig. 8 et 9) était alors voutis, c’est-à-dire « cambré ». Il était énorme, de façon à couvrir presque tout le cavalier, quand il était monté. Sa forme nous est clairement indiquée par les monuments figurés. ═ L’écu était fait avec du bois qu’on avait cambré et dont on mettait parfois double épaisseur. Sur ce bois on clouait du cuir : Tranchent les quirs e ces fuz qui sunt dubles. — Cheent li clou... (Vers 3583, 3584.) Le cuir de l’écu semble avoir porté le nom de pene : De sun escut li freint la pene halte. (V. 3425 et aussi 1298.) Le champ de l’écu était « peint à fleurs » (vers 1810, etc.), c’est-à-dire qu’on y peignait des dessins d’enroulement romans. D’autres fois, il était revêtu seulement de couleurs vives : L’escut vermeil li freint. (Vers 1576.) Tut li trenchat le vermeill e l’azur (vers 1557) ;
le vermeil e le blanc. (Vers 1299.) On va jusqu’à le dorer, du moins en partie : L’escut li freint ki est ad or e à flurs. (Vers 1354.) Enfin, l’écu merveilleux du païen Abisme est charge de pierres, d’améthystes, de topazes, etc. (Vers 1660 et suivants.) ═ Au centre de l’écu est la boucle (V. les fig. 8 et 9), et c’est à cause de la boucle que l’on dit : escut bucler (vers 1283), et que plus tard on dira un « bouclier » tout court. La boucle (umbo) est une proéminence au centre de l’écu. Cette proéminence est assez large : Cez bucles lées. (Vers 3570.) La boucle est dorée (vers 1283) ou d’or : D’or est la bucle e de cristal listet. (Vers 3149.) La bucle d’or mer. (Vers 1314.) D’autres fois elle est en pierres précieuses : Tute li freint la bucle de cristal. (Vers 1263.) ═ La Chanson de Roland ne parle pas d’armoiries sur l’écu ; mais il est un vers très-précieux qui prouve que déjà l’on se servait de certains signes de ralliement peints sur le bouclier : Escuz unt genz de multes cunoisances. (Vers 3090.) Il ne faudrait pas, d’ailleurs, tirer d’autres conclusions de ce vers. S’il est question quelque part d’escuz de quarters (vers 3867), il ne s’agit que des divisions naturelles de l’écu, de ces divisions que produisaient les bandes de fer destinées à soutenir le cuir sur le fût. ═ Le chevalier passait son bras dans les anses de l’écu, et, pendant le combat, il le tenait serré contre son cœur. Mais, durant la marche, les chevaliers, embarrassés de cet énorme écu, de ce grant escut let (vers 3148), le pendaient à leur cou : Pent à sun col un escut de Biterne. (Vers 2991. V. aussi 713, 1292, etc.) En lur cols pendent lur escuz de quarters. (Vers 3867.) La bande d’étoffe ou de cuir qui servait à suspendre le bouclier (V. la fig. 5) s’appelait la guige : Pent à sun col un soen grant escut let. — La guige est d’un bon palie roet. (Vers 3148, 3150.) ═ Targes, employé une fois dans notre chanson (Targes roées, vers 3569), nous paraît ici le synonyme d’escuz. ═ Quelques mots sur les éperons. Ils se placent sur la chaussure ordinaire : Esperuns d’or ad en ses piez fermez. (Vers 343 et 3863.) Ils sont toujours « d’or pur », c’est-à-dire, en bon français, dorés » : Sun cheval brochet des esperuns d’or mer (vers 1606) ; d’or fin. (Vers 3353.) — Les éperons sont pointus (V. les fig. 2, 3, 4, 7) et non pas à molettes : Brochent le bien des aguz esperuns. (Vers 1530.)

═ Après le chevalier, il est très-juste de parler ici du cheval. — Le cheval est l’ami du chevalier ; mais cette affection ne se fait pas jour dans la Chanson de Roland. En revanche, dans Ogier le Danois, poëme un peu postérieur et dont la légende est à peu près aussi ancienne, cette amitié trouve son expression. Quand le héros, après de longues années de captivité, demande à revoir son bon cheval Broiefort, on parvient à le lui retrouver, mais épuisé, pelé, la queue coupée : « Ogier le voit, de joie a soupiré. Il le caresse sur les deux flancs : « Ah ! Broiefort, dit Ogier, quand j’étais sur vous, j’étais, Dieu me pardonne, aussi tranquille que si j’eusse été enfermé dans une tour. » Le bon cheval l’entend ; il avise tout de suite son bon seigneur qu’il n’a pas vu depuis sept ans passés, hennit, gratte le sol du pied, puis se couche et s’étend par terre devant Ogier, par grande humilité. Le duc le voit, il en a grand’pitié. S’il n’eût pleuré, le cœur lui eût crevé. » (Vers 10688 et suivants). Et dans Aliscans, Guillaume ne parle pas moins tendrement à son cheval Baucent : « Cheval, vous êtes bien las. Je vous remercie, mon cheval, et vous rends grâces de vos services. Si je pouvais arriver dans Orange, je voudrais qu’on ne vous démontât point ; vous ne mangeriez que de l’orge vanné, vous ne boiriez qu’en des vases dorés. On vous parerait quatre fois par jour, et quatre fois on vous envelopperait de riches couvertes. » (B. N., 753, f° 212.) Et Renaus de Montauban s’écrie dans les Quatre fils Aymon : « Si je te tue, Bayard, puissé-je n’avoir jamais santé ! Non, non : au nom de Dieu qui a formé le monde, je mangerais plutôt le plus jeune de mes frères. » (B. N. 7183, f° 76.) Le héros qui a donné son nom à Aubri le Bourgoing regrette son cheval avec les mêmes larmes : Ah ! Blanchart, tant vous aveie chier. — Por ceste dame ai perdu mon destrier. (B. N., 7227, f° 173.) D’ailleurs, le cheval rend bien cette affection au chevalier. Bayard, dans Renaus de Montauban : S’a veü son seigneur Renaut, le fil Aimon. — Il le conust plus tost que feme son baron, etc. etc. Lav., 39, f° 22.) Étant donnée cette affection réciproque, il est à peine utile d’ajouter, d’après les textes précédents, que le cheval a un nom. C’est Veillantif (Chanson de Roland, vers 2160), Tencendur (vers 2993), Tachebrun. (Vers 347.) C’est Saut-perdu, Marmorie, Passe-Cerf, Sorel, etc. Du reste, si l’on veut avoir le « portrait en pied » d’un cheval, si l’on veut connaître l’idéal que s’en faisaient nos pères, il faut lire les vers 1651 et suivants : « Pieds copiez, jambes plates, courte cuisse, large croupe, flancs allongés, haute échine, queue blanche, crinière jaune, petite oreille, tête fauve. » Dans Gui de Bourgogne existe un portrait analogue : Il ot le costé blanc comme cisne de mer, — Les jambes fors et roides, les piés plas et coupés, — La teste corte et megre et les eus alumés — Et petite oreillette, et mult large le nés. (Vers 2326, 2329.) ═ Les chevaux célébrés dans nos poëmes étaient des chevaux entiers. ═ Le chevalier se rappelait volontiers où et comment il avait conquis son bon cheval : Il le conquist es guez de suz Marsune, etc. (Vers 2994.) ═ Malgré son amour pour la bête, le chevalier ne lui ménage pas les coups d’éperon : Mult suvent l’esperonet. (Vers 2996.) Le cheval brochet. (Vers 3165, etc.) Ces mots reviennent mille fois dans notre poëme : ce sont peut-être les plus souvent employés. Et il l’éperonne jusqu’au sang : Li sancs en ist luz clers. (Vers 3165.) Avant la bataille, il lui laschet les resnes et fait son eslais (vers 2997, 3166), c’est-à-dire qu’il se livre à un « temps de galop ». Quelquefois, dans cet exercice, il fait sauter à son cheval un large fossé. C’est un petit carrousel. (Vers 3166.) ═ Le cheval de guerre s’appelle « destrier ». Le cheval de somme s’appelle sumier, palefreid (paraveredus), et l’on emploie aussi les mulets à cet usage : Laissent les muls et tuz les palefreiz. — Es destrers muntent. (Vers 1000, 1001. V. aussi les vers 755, 756.) ═ Notre vieux poëme nous parle plus d’une fois des étriers, mais sans nous en préciser la forme, et c’est ici que les monuments figurés viennent à notre aide. (V. les fig. 2, 3, 4, 7.) ═ Pour faire honneur à quelqu’un, et particulièrement au roi, on lui tient l’étrier : L’estreu li tindrent Naimes et Jocerans. (Vers 3113.) ═ Les selles étaient richement ornées gemmées à or (vers 1373), orées (vers 1605). La Chanson nous parle souvent des arçons, qui sont primitivement les deux arcs formant la charpente principale de la selle. (Vers 1229, etc.) Quant aux aubes de la selle, elles sont d’argent, quand elle est d’or. (Vers 1605) ═ Les détails nous manquent sur les freins, qui sont également dorés (vers 2491), et sur les sangles. (Vers 3573.) Les sceaux du xiie siècle nous sont ici d’un précieux secours.

═ Et maintenant, de tous ces passages de notre Chanson que nous avons soigneusement recueillis, pouvons-nous véritablement tirer quelques éléments de critique sur la date de cette œuvre célèbre ? Le défaut de tous les vers que nous avons cités plus haut, c’est leur vague, c’est leur manque de précision, et rien n’est d’ailleurs plus facile à comprendre dans un poëme. Ainsi, nous n’avons rien d’exact dans toute notre Chanson sur la longueur du haubert, et cette longueur est peut-être le principal criterium pour déterminer une date précise. Il est seulement certain que notre Roland est antérieur à l’époque du « grand haubert », au règne de Philippe-Auguste. Voilà qui n’avance guère le problème. J’ajouterai que, dans notre épopée, il n’est jamais question de chausses de mailles, et que l’usage de ces chausses a, suivant M. Quicherat, commencé sous le règne de Philippe Ier. (1060-1108.) Cet élément de critique est plus précis, et reporterait notre poëme à la dernière partie du xie siècle, qui est la date généralement admise. Mais, pour tout le reste, rien de scientifique. ═ D’autre part, nous avons vu les sceaux des xie et xiie siècles, conservés aux Archives de France. Or on peut dire, d’après ces documents figurés, que depuis la fin du xie siècle jusqu’à la seconde moitié du xiie, il n’y a pas eu dans nos armures un seul changement véritablement radical, et qui soit signalé dans le Roland. Les modes ne changeaient pas alors comme aujourd’hui, et les artistes qui gravaient les sceaux se contentaient trop souvent de copier des types antérieurs. ═ Quoi qu’il en soit, si nous avions, d’après de si vagues documents, une conclusion à tirer, nous placerions notre poëme entre les années 1060 et 1090. Mais nous avouons que cette attribution n’a rien de rigoureux. Notre poëme lui-même ne nous permet pas d’aller plus loin. (V. la Collection des empreintes de sceaux aux Archives de France, et notamment les sceaux du xiie siècle, nos 3928, 2929, 16187, etc. etc.) C’est d’après ces sceaux que M. Demay a dessiné, M. Fichot reporté sur bois, et M. Hurel gravé les neuf figures qui précèdent, et qui faciliteront à notre lecteur l’intelligence de cette partie de notre travail.

Vers 995.Dublez. O. Le cas sujet exige au pluriel dublet.

Vers 996.Lor. O. Lisez lur. ═ Elmes. O. Entre elmes et helmes, qui se rencontrent l’un et l’autre dans notre Ms., nous avons choisi la forme la plus étymologique. ═ Au vers 1001, lire plutôt destriers.

Vers 1004. — Lisez graisles pur. V. la note du v. 700 et celle du v. 17.

Vers 1006.Oliver. O. V. la note du v. 176, et lire Oliviers.

Vers 1007.Purum. O. C’est le seul cas où notre scribe écrive ce mot avec une seule r. Partout ailleurs il en met deux : purrai, 146, 581 ; purrat, 34, 156, 334, 1744 ; purrum, 1698, et purruns, 252 ; purrez, 133, 2735 ; purreit, 534, 596.

Vers 1009. — Lire bien. ═ Devuns. O. V. notre note sur les premières personnes du pluriel au v. 42.

Vers 1010.Seignor. O. V. la note des v. 17 et 51.

Vers 1013.Chascuns. O. V. la note du v. 203. ═ Le Ms. porte l’empleit ; erreur évidente. La correction est de Mu.

Vers 1014. — Le Ms. porte : Que malvaise cançun, ce qui forme un vers de douze syllabes et ne s’accorde pas avec chantet. ═ Lire : Que malvais chanz de nus chantez ne seit.

Vers 1015.Chrestiens. O. Pour le cas sujet pluriel, il faut : chrestien.

Vers 1017.Oliver. O. V. la note du v. 176. ═ Lisez : Oliviers muntet de sur un pui haltur. Nous avions d’abord supprimé le mot haltur, pour la mesure. Mais pui n’est pas admissible comme assonance dans un couplet en ur. ═ M. et G. ont lu un pin, ce qui constitue une erreur des plus grossières.

Vers 1022.Elmes. O. V. la note du vers 996.

Vers 1024. — Lire fel.

Vers 1028. — Lire Oliviers. ═ Muntet. O. Pour le cas sujet, muntez.

Vers 1029. — Lire bien.

Vers 1030.Asemblez. O. Pour le cas sujet du pluriel, il faut asemblet.

Vers 1031.Elme. O. V. la note du v. 996. ═ Gemmez. O. Pour le sujet pluriel, il faut gemmet.

Vers 1032.Escuz. O. Au s. p. il faut escut. ═ Osbercs. O. Le cas sujet exige au p. osberc. ═ Safrez. O. Pour la même raison, il faut safret.

Vers 1033.Espiez. O. Au s. p. espiet. ═ Fermez. O. Il faut au s. p. fermet.

Vers 1034.Sul. O. Pour le cas sujet du singulier, il faut suls.

Vers 1036.Esguaret. O. Pour la même raison, il faut esguarez.

Vers 1037.Avalet. O. Même remarque.

Vers 1039. — « Le Ms. de Versailles nous offre deux rédactions des couplets lxxxiii-xcii. La première se rapporte au texte d’Oxford, à l’ancien texte que Versailles a fidèlement suivi jusqu’ici ; la seconde se rapporte au texte de Paris. — Cest également ici que commence ce dernier manuscrit, dont les premiers feuillets sont perdus. Nous devrons désormais tenir compte de cette version pour le rétablissement de notre propre texte, parce que plusieurs choses y sont puisées directement dans l’ancienne source. » (Note de M. T. Müller.) ═ Le texte de Paris nous paraît ici offrir des longueurs qui ne se trouvaient point dans l’ancien texte. C’est Roland, et non pas Olivier, qui aperçoit l’armée païenne du haut d’une colline ; il exhorte ses soldats au combat, et l’auteur du Remaniement se met alors à décrire très-longuement l’armement des douze Pairs. Onze couplets lui sont nécessaires pour ce récit inutile. Après ces développements qui n’ont rien de primitif, Olivier conseille à Roland de sonner son cor, et nous retombons enfin dans notre couplet lxxxiv. Nous sommes très-convaincu qu’il y a là un délayage dont il faut rendre uniquement responsable l’auteur de ce refazimento. Le Ms. IV de Venise, qui suit le texte d’Oxford, n’offre rien de pareil : c’est que rien de pareil ne se trouvait dans la version originale. ═ Le texte de Paris n’en sera pas moins précieux pour toute la suite du récit, et nous n’en approuvons pas moins l’observation de M. Müller que nous avons citée plus haut. ═ Lire Olivers.

Vers 1042.Laciez. O. On trouve healmes lacez, au v. 712. (V. ce mot dans notre Glossaire.)

Vers 1044.Avrez. Mu. ═ Unches. O. V. la note du v. 629. ═ Lisez tels à cause du s. s.

Vers 1046.Vencuz. O. À cause du s. p., il faut vencut.

Vers 1048. — On pourrai lire (au lieu de uns) nus, pour nuls, de nullus.

Vers 1049.Oliver. O. V. la note du v. 176 et celle du v. 1500.

Vers 1051.Cumpaign. O. Ce mot exige quelques réflexions. Au cas sujet du singulier nous n’avons jamais dans notre texte que cumpainz (324, 546, 793, 941, 1368, 2404), lequel dérive, non pas de cumpanio, mais de cumpanis. Et même, au régime pluriel, nous avons une fois cumpaignz (3194) qui vient de cumpanes, de même que bers, au pluriel, ne vient pas de barones, mais de baros. ═ En revanche, nous avons pour le vocatif deux formes différentes : cumpaign, 1051, 1672, 1973, 2000, 2027, et cumpainz, 1059, 1503, 1983. La première dérive, pensons-nous, de cumpanio, mais la seconde de cumpanis. Toutes deux sont régulières, et nous avons choisi cumpainz. ═ Lire Rollant et non pas Rollanz. Partout ailleurs, au vocatif, nous avons imprimé Rollant.

Vers 1052.Ost. O. Pour le s. s., il faut oz.

Vers 1056.Sanglant. O. Pour la même raison, sanglanz. En nous conformant à notre note du v. 1079, lire sanglenz en iert.

Vers 1058.Vos. O. ═ Tuz sunt jugez. O. Pour le s. s., il faut tuit sunt juget.

Vers 1059. — Lire olifant, qui est la forme régulière, venant d’elephantem. ═ Car. O. V. la note du v. 275.

Vers 1061.Nos. O. V. la note du v. 17. — Le Ms. porte : od tut sun barnet.

Vers 1062.Respont. O. Respunt (v. 156, 216) est plus conforme à notre phonétique. D’ailleurs l’u se trouve dans respundet, 22 ; respundent, 1946 ; respundit, 632 ; respuns, 420...

Vers 1068.Asemblez. O. Pour le cas sujet, il faut asemblet.

Vers 1069.Vos. O. V. la note du v. 17. ═ Tuz sunt à mort liverez. O. Il faut au cas sujet tuit et liveret. Pour ce dernier mot, voyez la note du v. 38.

Vers 1070. — Lire olifant. V. la note du v. 1059.

Vers 1071.Passant. O. V. la note du v. 611.

Vers 1072. — Lire jo. ═ Vos. O.

Vers 1075.Cornant. O. V. la note du v. 611.

Vers 1076.Avrunt. Mu.

Vers 1079. — Lire sanglent. O. On trouve les deux formes sanglanz (1056 et 1711), et sanglent (1079, 1507, 1623). Mais l’étymologie est sanguilentus, et l’on ne trouve au féminin que sanglente (1399, 1586, 1785, 3921). Cf. ensanglentet, 1067.

Vers 1081.Avrunt. Mu.

Vers 1082.Olivers. O. V. la note du v. 176 et celle du v. 1500.

Vers 1084.Cuverz. O. Pour le cas sujet du pluriel, cuvert.

Vers 1086. — Lire grant au lieu de granz. O., à cause du sujet pluriel. V. la note du v. 20.

Vers 1088.Graigne. O. Mu. propose avec raison la correction graindre, qui est le véritable comparatif de granz.

Vers 1089. — Écrire angeles. Ne placet Damme Deu ne ses angles. O. Mu. a emprunté ce vers au Ms. IV de Venise : Ne plaça Deo ne ses santisme angle.

Vers 1092.Nos.

Vers 1093 et 1099. — Olivers. O.V. la note du v. 176 et celle du v. 1500.

Vers 1100. — Lire olifant. V. la note du v. 1059. ═ Vos. O.

Vers 1104.Dolente est la. O. La correction est de Mu.

Vers 1109.Nos. O.

Vers 1110. — On peut effacer la.

Vers 1111.Fiers. O. C’est ici le cas régime, et il faut fier. ═ Leon. O. V. la note du v. 30. ═ On pourrait écrire également leuparz.

Vers 1113.Amis. O. V. notre note sur les vocatifs (au v. 15).

Vers 1114.Nos. O. ═ Lire laissat. (Note du v. 265.)

Vers 1117.Susfrir. O. Erreur du scribe.

Vers 1119.Char. Lire carn. V. la note du v. 3436.

Vers 1120.Ta n’est pas dans O. Mu. a suppléé la, et je pense qu’il a raison ; car Roland ne tutoie pas Olivier.

Vers 1122.Avrat. Mu.

Vers 1123.E purrunt dire que ele fut à noble vassal. O. La correction est de Mu.

Vers 1124.Turpin. O. Pour le cas sujet, Turpins.

Vers 1130.Avrez. Mu. ═ Tuz. O. Pour le cas sujet, il faut tuit. ═ Pour la même raison, lire fid ou fit, au lieu de fiz.

Vers 1134.Seinz martirs. O. Il faut ici le cas sujet : seint martir. Pour ce dernier mot, se reporter à la note du v. 20.

Vers 1135.Avrez. Mu.

Vers 1136.Decendent. O.

Vers 1137.Arcevesque. O. Pour le cas sujet, il faut arcevesques. ═ Tout ce passage a été imité dans Aspremont. (B. N. 2495, fos 123, 124.) Le Pape, dans ce dernier roman, tient la place de Turpin.

Vers 1138.Les cumandet. O. La correction est de Müller, d’après Venise IV.

Vers 1139. — Lire en assonances, à la fin des vers de ce couplet les mots : pecchiez, seigniez, destriers, chevaliers, apareilliet, Olivier, saviez, deniers, vengier, marchiet, eslegier.

Vers 1140.Asols et quites. O. Le cas sujet exige asolt (absoluti) et quite (quiti).

Vers 1141.Arcevesque. O. Pour le cas sujet, il faut un s.

Vers 1142.Muntez. O. Pour le s. p., il faut muntet.

Vers 1143.Adobez. O. Id. La vraie forme est adubet. (V. les v. 713, 993, 994, 1793, 1797, 2470, 2777, 2987, 3134, 3139.)

Vers 1144.Apareillez. O. Pour le s. p., il faut apareilliet.

Vers 1146.Vus n’est pas dans O.

Vers 1147.Nos. O.

Vers 1149.Nos. Id.

Vers 1150.Marsilie. O. Pour le s. s., il faut Marsilies.

Vers 1151.Estuvrat. Mu. V. la note du v. 38.

Vers 1152. — Il y a ici, dans le texte de Paris, trois couplets de plus que dans celui d’Oxford : ce sont les laisses cv, cvi, cvii de ce Remaniement. Je ne pense pas qu’elles aient été dans le texte original. On y voit Estoult de Langres, Engelier le Gascon et Turpin de Reims prononcer des discours et faire des prières. Ce sont là, suivant nous, des additions évidentes.

Vers 1154.Avenanz. O. Il faut avenant pour le sujet pluriel.

Vers 1155. — Au lieu de e, le Ms. porte mais. ═ Lire ber. ═ Palmeiant. O. Le cas sujet exige palmeianz. (V. la note du v. 611.)

Vers 1156.Turnant. O. Il faut turnanz. (V. la note du v. 611.)

Vers 1157.Laciet. O. V. la note du v. 1042.

Vers 1158.D’or n’est pas dans le Ms. Mais Venise IV donne li bande à or ; Paris : les laingnes d’or, et Versailles : les langues d’or. La correction est de Mu. ═ Josqu’as. O. V. la note du vers 510.

Vers 1161.Sun cumpaignun. O. Le cas sujet exige sis cumpainz. ═ Sivant. O. Pour le s. s., il faut sivanz.

Vers 1163. — Le manuscrit porte humeles. Nous ne savons pas pour quelle raison Mu. a supprimé l’s.

Vers 1165.Barons. O.

Vers 1166.Vont. O. ═ Matirie. O. Erreur due peut-être à une prononciation rapide.

Vers 1167.Avrum. Mu.

Vers 1170.Oliver. O. V. la note du vers 176 et celle du v. 1500.

Vers 1171. — Lire olifant. V. la note du vers 1059.

Vers 1172.Vos. O. Remarquer l’expression nen aveit mie, qui se retrouve souvent dans notre texte. (Cf. le Glossaire.)

Vers 1173. — Lire ber.

Vers 1175.Vos. O.

Vers 1176.Seignors. V. la note du vers 51.

Vers 1177.Purpensez. O. Pour le cas sujet, il faut purpenset.

Vers 1178.Receivre. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 1186.Sarrazins. O. Pour le s. p., il faut Sarrazin (Sarraceni).

Vers 1187. — Il y a ici, dans les textes de Paris, Venise VII, etc., un couplet de plus que dans celui d’Oxford. Il nous paraît répéter le couplet précédent sous une forme un peu différente, et Roland y jette son cri de guerre contre les païens. Voici cette laisse : Si cum les os se durent aprochier, — Li cuens Rollans, o le coraige fier, — Onques le jor ne volt croire Olivier : — Ains qu’en issist, le compera moult chier. — Roidist la jambe, si s’affiche en l’estrier ; — Venu i sont à force et sans dangier. — Près sont paien le trait à I. archier ; — Rollans escrie : « Or à euls, chevalier ! » — La veïst on tante lance empoingnier, — Tant espié fort branler et paumoier. — Grans fu la noise as lances abaissier ; — Les maistres rans font de II. pars ploier. — Li niés Marsille laist corre le destrier ; — Devant les autres le trait à I. archier, — Vait querre jouste por son pris essaucier. (Texte de Paris, vers 1859 et ss.)

Vers 1192.Vos. O.

Vers 1193.Vos. O.

Vers 1194.Enquoi. O. Encoi se trouve aux vers 1167, 2981.

Vers 1195.Charles. O.

Vers 1201.Desevret. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 1205.Meitez. O. Cette forme se trouve aux vers 473, 1264, 1484. Mais ce mot ne se rencontre, comme assonance, que dans les couplets en ier.

Vers 1206.Leserat. O. V. la note du vers 265.

Vers 1207.Fol. O. Pour le cas sujet, il faut fols.

Vers 1208. — Notre principe étant de ne jamais toucher aux assonances qu’en cas de nécessité évidente, nous laissons volt. Mais partout ailleurs, nous avons mis voelt.

Vers 1209.Laisad. O. Pour les deux ss, voyez la note du vers 265. ═ Pour le d changé en t, se reporter à la note des vers 2 et 122.

Vers 1210.Oi. O. Oi ne se rencontre que trois fois dans notre texte. (1210, 2598, 2940.) Hoi, qui d’ailleurs est plus étymologique, se rencontre beaucoup plus souvent. (1191, 1936, 1985, 2107, 2147, 2703, 3100, 3629, 3898...)

Vers 1211.Francs. O. V. notre Théorie sur les vocatifs. (Note du vers 15.)

Vers 1212.Nos. O.

Vers 1213.Un duc. O. Pour le cas sujet, il faut uns dux. ═ Falsaron. O. V. la note du vers 30.

Vers 1215.Datliun e balbiun. O. La correction est de G. et Mu., d’après Versailles. À l’appui de cette leçon, Venise VII donne également : Cil tint la tere Dathan et d’Abiron.

Vers 1216.At. O. V. la note du vers 2. ═ Encrismé. V. O. notre note sur les participes (au vers 703).

Vers 1217. — Nous avons supprimé dous, qui rompt la mesure. ═ Front. O. V. la note du vers 30.

Vers 1218.Hum, pour l’assonance. Le Ms. porte hom.

Vers 1219.Nevuld, pour la même cause, au lieu de nevold. O.

Vers 1220.Prese. O. L’étymologie veut presse, qui se trouve au vers 933, etc.

Vers 1221.E se s’escriet. O. Erreur évidente. ═ Paienor. O. Voir la note du vers 30. ═ Le Ms. de Lyon, qui commence ici, nous fournit ces deux vers : Il escriat fortement à cler son : — « Hui perdra Karles de ses loz grant porçon. »

Vers 1223.Enquoi. O. V. la note du vers 1194. ═ Onur. O. V. la note du vers 45.

Vers 1224.Oliver. O. V. la note du v. 1500.

Vers 1225.Oriez. V. la note du vers 466.

Vers 1226.Baron. O. V. la note du vers 30.

Vers 1229.Arçuns. Les arçons, les parties relevées en avant et en arrière de la selle, dont les Orientaux ont conservé la forme et le vaste développement : Arciones vocamus ab arcu quod in modum arcus sint incurvi. (Saumaise.) Plusieurs arçons de derrière, des xiie, xiiie et xive siècles sont parvenus jusqu’à nous, les uns en métal repoussé, émaillé ou ciselé, les autres en bois sculpté : « Pierre de Blois, au xiie siècle, parle de combats de cavalerie peints sur les arçons, et le moine Théophile, au xiiie siècle, décrit cette ornementation comme étant de vogue, et dès longtemps établie. » (Glossaire des Émaux, par L. de Laborde, au mot Arçons.)

Vers 1231.Raison. O. V. la note du vers 30.

Vers 1232.Essoign. O. Id.

Vers 1233.Francs. O. V. notre note du vers 15, sur les vocatifs.

Vers 1235.Corsablix. O. V. les différentes leçons données dans notre note du vers 885.

Vers 1236.Estrage. O. L’n a été omis ou effacé.

Vers 1237.Apelad. O. V. notre note des vers 2 et 122.

Vers 1241.Charles. O. La grammaire et la mesure exigent le cas oblique. ═ Pour le c au lieu du ch., voyez le vers 94. ═ Un sul guarit. O. Au cas sujet, uns suls guariz. ═ Lyon : Que jamais Karles nes porra garantir.

Vers 1242.Le jur. O. Pour le s. s., il faut li jurz. ═ Estuvrat. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 1243.Turpin. O. Pour le cas sujet, il faut Turpins.

Vers 1244.A. O. La vraie forme est ad, que notre texte offre dix-neuf fois sur vingt. ═ Tant n’est pas dans le Ms. Il est suppléé par Mu. — Génin avait suppléé plus. ═ Venise VII nous donne cette variante : Soz ciel n’a home qi si soit à graadir.

Vers 1246.Alet. C’est un s. s. m. Il faut alez.

Vers 1247.Descumfist. O. L’m ne s’explique pas. On ne le retrouve ni dans descunfisum (1894) ni dans descunfite (3362).

Vers 1253.Vos. O.

Vers 1254.Mi sire. O. V. la note du vers 636. ═ Guarant. O. Il faut, au s. s., guaranz.

Vers 1256.Feruns. O. V. notre note du vers 42.

Vers 1257.Vos. O.

Vers 1259.Premer colp. O. Pour le cas sujet, il faut premiers colps.

Vers 1260.Por. O.

Vers 1261.Engelers fiert. O. La correction de Mu. est justifiée par le Ms. de Lyon, dont l’éditeur allemand ne s’est pas servi. E Gerins fiert Mauprime de Gerbal. Ce sera plus tard le tour d’Engelier (vers 1289 et ss.), qui ne peut pas figurer deux fois dans cette série de combats.

Vers 1264.Meitiet. O. V. la note du vers 1205.

Vers 1265. — Lisez carn, qui est plus étymologique et se trouve au vers 3606. (Cf. car, 2141, 2942 ; carnel, 2153 ; carner, 2949, etc.)

Vers 1269.Gilbers, Lyon. ═ Ce même manuscrit nous donne amaroine, au lieu d’amurafle.

Vers 1271.Ment. O. Erreur du scribe ; correction de G. et de Mu. ═ Sun gonfanon li fit el cors baignier, Lyon.

Vers 1272.Bien. O. V. la note du vers 34, et surtout celle du v. 1500.

Vers 1274.Oliver. O.V. la note du v. 1500.

Vers 1276.A flurs e ad or. O. Cf. le vers 1354.

Vers 1277.Guarant. O. V. la note du vers 1254.

Vers 1278.Firie. O. Mu., etc.

Vers 1279.Mort n’est pas dans O. ═ Mort le trabuche de l’auferant crenu, Lyon.

Vers 1280.L’arcevesque... Cist colp. O. Il y a là deux infractions à la règle du cas sujet. Il faut arcevesques et colps. ═ Baron. O. V. la note du vers 30.

Vers 1281.Laiset. O. V. la note du vers 265.

Vers 1283. — Dans notre traduction, lire au-dessous de et non pas au-dessus.

Vers 1288.Colp. O. Pour le s. s., colps. ═ Produme. O. Lire prozdume.

Vers 1292.Escantelet. O. Lyon : Desoz la bocle li fraint et escartele.

Vers 1293. — Telle est la version d’O. Génin lui a substitué celle-ci, d’après le texte de Versailles : L’osberc li fause de dessus la gonelle. Il était amené à ce changement par une fausse théorie de l’assonance. — Je veux bien que Lyon soit ici, à un mot près, tout semblable à Versailles : L’osberc li fause de desoz la gonelle. Mais, en thèse générale, de tels changements ne sont pas admissibles. L’armure du chevalier, à l’époque où fut rédigé le texte d’Oxford, n’était pas la même qu’à celle où furent composés nos premiers Refazimenti, et l’on court risque de tomber en de terribles anachronismes. (V. notre note sur l’armure, au vers 994.)

Vers 1296.Turnez. O. Engelier s’adresse ici à tous les païens. C’est donc un s. p. m., et il faut turnet.

Vers 1297.Gualter. O. V. la note du v. 1500. ═ Otes est une excellente correction de Mu., d’après Versailles et Paris. Venise VII donne également Otes. Quant à Lyon, que Mu. n’a pas consulté, il donne : Huez fu prouz, moult ot le cuer joiant.

Vers 1303.Avrez. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 1304.Berenger. O. V. les notes sur Olivier. (V. 176 et 1500.) ═ Astramariz. Lyon donne Estormariz ; Venise VII, Astramariz ; Paris, Estomaris ; Versailles, Estormiz ; Venise IV, Estramatis.

Vers 1305.Descunfist. O. V. la note du vers 1217.

Vers 1310.Ço est Corsubles et li rois Margariz, Lyon.

Vers 1311.Vaillant. O. V. notre note du vers 611. ═ Vaillanz est un des trois adjectifs verbaux et participes présents qui, dans notre manuscrit, sont soumis par le scribe à la règle commune de la déclinaison romane. (Vers 3186.) ═ Lire en assonances, à la fin des vers de cette laisse, les mots chevaliers, legiers, Olivier, mier, tuchiet, desturbier.

Vers 1315.Ell cors. O. Erreur évidente.

Vers 1317.Mie ne l’. Mu. Correction qui nous semble superflue.

Vers 1319.Gresle. O. V. la note du vers 700. Graisle est, de beaucoup, la forme la plus usitée.

Vers 1323.Cols. O. Erreur évidente.

Vers 1326.Elme. O. (V. la note du vers 996.) Le vers 1798 prouve que l’h n’était pas aspirée : D’osbercs et de helmes e d’espées à or. (V. la note du v. 45.)

Vers 1327.Trenchet le cors. O. Correction de M. Müller, justifiée par Venise IV et aussi par Lyon : Le chief li tranche qui onques ne quist jointure.

Vers 1330. — Lire e au lieu de et.

Vers 1333. — [Juint]ure. O. Les cinq premières lettres font défaut. Mi. avait proposé demure ; G. juinture. Venise VII donne : E le destrier de ci qu’en la janteure.

Vers 1334.Pred. O. V. la note du vers 2.

Vers 1336.Avrez. Mu.

Vers 1337.Oi. O. V. la note du vers 1210.

Vers 1342.Li. O. Au cas régime, il faut le.

Vers 1343. — Lire sanglent. V. la note du vers 1079. ═ La n’est point dans le manuscrit.

Vers 1345.Oliver. O. V. la note du vers 176 et celle du v. 1500.

Vers 1347. — Lyon : Fierent et chaplent.

Vers 1349.L’Arcevesque. O. Pour le cas sujet, il faut un s.

Vers 1351.Oliver. V. la note du vers 176 et celle du v. 1500. ═ Estor. O. V. la note du vers 30.

Vers 1353.Fauseron. Lyon. Le Ms. d’O. ne porte que Malun.

Vers 1354.Flur. O. Cf. le vers 1276, où flurs est avec raison au pluriel.

Vers 1355.Andous. O. Mauvaise leçon. V. le Glossaire. Nous y avons établi que la meilleure forme est ambedui, ambesdous ; puis, ambdui, ambsdous ; puis enfin : amdui, amdous. Nous avons choisi la forme la plus correcte, et celle qui peut en même temps se prêter le mieux à la mesure du vers. ═ Remarquer encore qu’amdous, ambsdous rime avec des mots en u : d’où l’on peut conclure rigoureusement que, dans un grand nombre de cas, l’u se prononçait ou. ═ Lyon : For de la teste li a les ieuz sachiez.

Vers 1356. — [Des] uz. O. Les trois premières lettres sont absentes. ═ E la cervele li abat à ses piez, Lyon.

Vers 1357.Entre VII. C. Mu. Od tut nous paraît une bonne leçon. ═ Au lieu de mort, le manuscrit d’Oxford donne e cor, et tot.

Vers 1358.Pois. V. la note du vers 656.

Vers 1359. — Au lieu d’Esturgus, Lyon donne Maucuidanz.

Vers 1359.Josqu’as. O. V. la note du v. 510. ═ Poinz. O. Voir la note du v. 415.

Vers 1360.Vos. O.

Vers 1362.Valor. O. V. la note du v. 30.

Vers 1363.Halteclere. Voici, en quelques propositions, l’histoire de l’épée d’Olivier : a. Suivant l’auteur de Fierabras (v. 655), Hauteclère est l’œuvre de Galant. b. La version provençale du même poëme l’attribue à Munificans. (Pueis fe Munificas,... Autaclara e Joyosa.) c. Elle fut, avec Courtain et Durendal, essayée sur le perron d’acier qui se trouvait à Aix, devant le Palais du roi (Renaus de Montauban, édition Michelant, p. 210), et elle résista merveilleusement à cette épreuve. — d. C’est dans Girars de Viane que son histoire est racontée le plus au long. Œuvre de Munificans, qui l’avait forgée à Rome, elle avait d’abord appartenu à l’empereur romain Closamont (et, par parenthèse, M. Victor Hugo, dans sa Légende des siècles, a pris ce nom pour un nom d’épée). Mais, un jour, Closamont la perdit dans un bois, au milieu même de la bataille où le tua Maucon de Valfondée. Des faucheurs la retrouvèrent et l’apportèrent au Pape, qui vit le mot Hauteclère écrit sur l’acier, admira beaucoup cette épée au pommeau d’or et la fit mettre dans son Trésor. Quand Pépin se fit couronner à Rome, il la prit, puis la donna au duc Beuves, qui la vendit à un juif. Or ce juif est précisément ce Joachin qui, dans ce même roman de Girars de Vianes, se charge de fournir les armes d’Olivier luttant contre Roland. Une première épée a été brisée par le neveu de Charlemagne : Joachin la remplace par Hauteclère. Et c’est depuis lors que cette épée a conquis tant de gloire. (Girars de Vianes, dans I. Bekker, v. 2671.) Cf. la note de Génin, p. 390. — Et deux fois Olivier faillit la perdre : Maugis la lui vola une première fois (Renaus de Montauban, édition Michelant, p. 306), et Alori, une seconde. (Jehan de Lanson, B. N. 2495, f° 2, v° et suiv.)

Vers 1365.Poi. O. Puis est la forme la plus étymologique. La notation ui est en harmonie avec la phonétique de notre texte. — Oliver. O. ═ Lire Oliviers.

Vers 1366. — Lire Ai jo. Mu. ═ Bosoign. O. Pour la phonétique et l’assonance, il faut bosuign, qui se trouve au v. 1619.

Vers 1367.Oliver. O. V. la note du v. 1500.

Vers 1368.Que ses compainz Rollanz li ad tant demandée. O. Le vers a douze syllabes : nous l’avons réduit à un décasyllabe, en supprimant Rollanz, qui est inutile. ═ Ses. O. V. la note du v. 39. ═ Li n’a pas été lu par Mi. G. Mu. Le manuscrit le porte très-visiblement.

Vers 1369.Chevaler. O. Ce mot se rapportant à Olivier, qui est le sujet, doit prendre l’s. V. la note du vers 1500.

Vers 1370.Justin de Val-Fondée. Lyon.

Vers 1371.Sevrée. Mu. V. la note du v. 38.

Vers 1372.La n’est pas dans le manuscrit. Mu. propose sa.

Vers 1373.A or. O. Ailleurs, il y a ad or. (1542, etc.) Ce d est uniquement euphonique. (V. le Glossaire.)

Vers 1374.Ceval. O. V. la note du v. 1379. ═ A l’eschine. O. Habet a donné : ad, at, a. Les trois formes, comme nous l’avons dit et devons une dernière fois le répéter, se trouvent dans notre Chanson. La dernière est la moins étymologique et la plus rare. La première se rencontre dix-neuf fois sur vingt ; nous l’avons partout adoptée.

Vers 1375.Loi. O. Lui, plus conforme à la phonétique de notre texte, s’y trouve d’ailleurs presque exclusivement employé.

Vers 1376.Or n’est pas dans le manuscrit.

Vers 1377.Eimet. O. Ne se rencontre qu’une fois dans le texte de la Bodléienne. Partout ailleurs c’est aimet, que nous avons rétabli.

Vers 1379.Ceval. O. La forme la plus commune est cheval, et il en est de même pour chevaler, chevalcher, etc. etc. Le ch était ici, très-visiblement, passé dans la langue ; nous l’avons conservé ou restitué partout. ═ El ceval Sorel. Mu. Nous avons fait de Sorel le nom du cheval, ce qui nous paraît justifié par le vers suivant. Lyon donne Morel.

Vers 1380.Gerins... sor le pluz bel, Lyon.

Vers 1381.Lor. O. V. la note du v. 17. ═ Ambdui. O. V. la note du v. 1355. ═ A ait. O. Presque partout on trouve euphoniquement ad ait. (Vers 1181, 1381, 1802, 1844...)

Vers 1383.L’un. O. Pour le cas sujet, il faut l’uns.

Vers 1388 et 1389. — Le manuscrit donne ici un seul vers : Espués, icil fu filz Borel, qui n’a aucun sens. D’après Venise IV, Paris, Versailles et le Ruolandes Liet, Mu. a reconstitué les deux vers, tels qu’ils étaient dans l’original. ═ Venise VII reproduit la même leçon que Versailles : Aspremereins i fu, li fiz Abel ; — Celui ocist Engelers de Bordel. ═ Dans Lyon, ces deux vers sont omis.

Vers 1390.L’arcevesque. O. Pour le cas sujet, il faut un s. ═ Lor. O. V. la note du v. 30 et aussi du v. 17.

Vers 1392. — Ce vers et les suivants ont été fort grossièrement imités par les auteurs de nos Remaniements. Lyon appelle l’enchanteur du nom de Gocel, et ajoute : L’enchanteür qui, par son grant revel, — Fu en enfer por faire son bordel. ═ Venise VII, qui diffère peu de Versailles, est plus long : Turpins de Reins i ocist Singlorel, L’enchanteor qui, par son grant revel, — Fu en enfer por faire son avel. — Par artimaix le conduit Pinabel. On ne s’attendait guère à voir Pinabel en cette affaire. Paris n’est pas meilleur : Torpins de Rains gieta mort Gloriel, — L’enchanteor qui, par son grant revel, — Fu en anfer por faire son avel. — Par droite voie l’i conduist Jupitel. ═ Il est trop connu que les divinités du paganisme étaient considérées comme des démons.

Vers 1393.Turpin. O. Pour le cas sujet, Turpins. ═ Forsfait. O. Pour la même raison, forsfaiz.

Vers 1394.Vencut est li culvert. O. À cause du cas sujet, il faut vencuz est li culverz.

Vers 1395.Itels colps. O. Pour le cas sujet, itel colp.

Vers 1397.Merveilus. O. Nous avons substitué merveillus, qui se trouve presque partout ailleurs.

Vers 1399.Tant. O. Il faut l’accord avec hanste.

Vers 1400.Rumpu. O. V. notre note sur les participes. (V. 1216.) ═ Tant enseigne. O. Même remarque qu’au v. 1399.

Vers 1401.Lor. O.

Vers 1402.Lor. O.

Vers 1404.Karles. O. Voir la note du v. 94. Il faut réunir les deux couplets cx et cxi.

Vers 1405.Avrunt. Mu. V. la note du v. 38. ═ Sucurance. O. Succurance est plus étymologique : les deux cc se trouvent dans succurez, 3378 ; succuras, 3996 ; succurrat, 1061, 3443.

Vers 1406.Servis. O.

Vers 1409.Juget. O. Pour le cas sujet, il faut jugez.

Vers 1410.Tels. O. Pour le s. p., il faut tel.

Vers 1412.Pesant. O. V. la note du v. 611. ═ Il manque ici plusieurs couplets relatifs à l’attaque de Gautier par Almaris et à la défaite de ce corps d’armée chrétien. Je ne vois pas que M. Müller se soit préoccupé de cette importante lacune. Nous avions essayé de la combler, d’après les textes de Paris et de Venise VII ; mais nous ne nous dissimulons pas qu’ici la difficulté était considérable :

Li reis Marsilies, od la sue cumpaigne,
Par un destreit merveillus e estrange,
Vait à Gualtier ki guardet la muntaigne
E les destreiz devers les porz d’Espaigne.
Reis Almaris le jur portat l’enseigne. Aoi.


Reis Almaris est sur le munt venuz,

E de païens seisante milie od lui.
Franceis assaillent par force et par vertut,
Par grant irur trestuz les unt feruz,
Tuz les unt morz, ociz e cunfunduz.
Sur tuz les altres est Gualtiers irascuz,
Trait son espée, enbracet sun escut. Aoi.


Si cum Gualtiers fut ad els ajustez,

Païen l’assaillent en virun de tuz lez.
Sis forz escuz li est fraiz e quassez,
Sis blancs osbercs rumpuz e desmailez,
E il meïsmes de .iiii. espiez nafrez.
Ne l’ pout suffrir, .iiii. feiz s’est pasmet.
U voeillet u nun s’en est de l’ camp turnet.
Si cum il pout ad le munt avalet.
Rollant appellet : « E ! ber, si m’succurez. » Aoi.

Vers 1413.Oliver e Rollant. O. Pour le s. s., il faut Oliviers e Rollanz. ═ Lire bien.

Vers 1415.Pers. O. C’est le sujet pluriel : il faut per.

Vers 1417.A millert et à cent. O. Partout au r. p. on écrit cenz et millers. (V. le Glossaire.) Quant à et, c’est peut-être la seule fois où il soit écrit avec un t.

Vers 1419.Voillet. O. La forme constante est voeillet.

Vers 1420.Lor meillors. O. V. la note du v. 17 et celle du v. 51.

Vers 1421.Lor. O.

Vers 1426.Chiedent. O. La forme la plus usuelle est chéent. (Vers 1981, 3574, 3881.)

Vers 1427.De seint Michel de Paris. O. Nous proposons De seint Michel de l’Peril. C’est la leçon de M. Michel. (Édit. de 1869, p. 44.) ═ Josqu’. O., pour josque. Voir la note du v. 510. ═ Josqu’as Seinz. O. Nous adoptons la version de Paris et de Lyon : De seint Michel jusque à Rains ausiment. L. — Reims nous paraît beaucoup plus célèbre que Sens dans notre légende épique. ═ On peut encore lire : Jusqu’as seins, jusqu’aux saints ?? et supposer une ville célèbre par ses reliques, comme Rome (??).

Vers 1429.Dès Besençun. O. ═ Porz n’est pas dans le manuscrit ; mais Paris et Versailles le donnent. ═ Guitsand. Venise VII et Versailles donnent Gricent, qui est détestable. Dans le texte de Paris, on lit Wissant.

Vers 1432. — Lire ciels.

Vers 1433.Hume nel’ veit. O. Conformément à la déclinaison de hom, il faudrait hom ne le veit. V. la note du v. 20. ═ S’espent. O. Erreur évidente. La vraie forme, espaent, exigée ici par la mesure, se trouve au v. 1599.

Vers 1434.Plusor. O. Plusur, conforme à la phonétique, se trouve aux v. 995, 2377, 2422, 2477, 2594, 2911, 3181. Plusor ne se trouve qu’ici.

Vers 1435.Fin. O. Lire finz.

Vers 1436.Il ne l’. O.

Vers 1437.Dulors. V. la note du v. 489. ═ Por. O. V. la note du v. 17. Pour avoir un décasyllabe au lieu d’un alexandrin, on pourrait écrire : Ço est le grant doel pur la mort de Rollant. — Lyon et Venise VII : Por l’amor de Rollant. ═ Dans la Keiser Karl Magnus’s Kronike, ces prodiges sont racontés autrement : « Le soleil ne donna plus aucune lumière, et il fit aussi sombre que s’il eût été nuit. Saint Gilles dit que ce miracle arriva à cause de Roland, parce qu’il devait mourir ce jour-là. »

Vers 1438. — Les Remaniements, avec lesquels la Keiser Karl Magnus’s Kronike est d’accord, nous offrent ici deux laisses qui ne sont pas dans O. On y reprend le récit de la grande bataille, et l’on y montre les païens en fuite. Le texte original devait lui-même, suivant nous, présenter ici un couplet de plus, auquel correspondent ces deux strophes. Nous proposerions d’intercaler ici la laisse suivante d’après Lyon, Venise VII et Paris que nous avons ramenés à notre dialecte et à la concision de notre poëme :

La bataille est plenière e adurée ;
Franceis sunt bon ki de l’espée i fièrent :
N’i ad celui ne l’ait ensanglentée.
Granz fut li caples, forz colps s’entredunerent :
La veïssez tantes testes tranchées,
Tanz humes morz gesir en mi la prée.
Païen s’en fuient, e Franc les enchalcerent. Aoi.

Vers 1439.Morz. O. Pour le sujet pluriel, il faut mort. = Lire milliers.

Vers 1440. — Remarquez dous comme assonance dans une laisse en ur.

Vers 1441. — Oxford nous donne Rollant au lieu de l’arcevesques que nous offrent Venise, Paris, Lyon et Versailles.

Vers 1442. — Lire ciel. O. V. la note du v. 545. ═ Meillors. O. V. la note du vers 51.

Vers 1445.Lor. O. V. la note du vers 17.

Vers 1447.Por lor. O. Même renvoi.

Vers 1448.Marsilie. O. Pour le cas sujet, il faut Marsilies. ═ Lor. O.

Vers 1449. — Ici tous les Remaniements nous offrent encore une ou deux laisses qui ne sont pas dans O., et qui devaient certainement se trouver dans le texte original. Mu. a publié in extenso ces couplets d’après Venise IV et Paris. Nous ne les reproduirons pas après lui. La version la plus courte, après celle de Venise IV, est celle de Venise VII, qui ne ressemble pas au texte de Paris et l’abrége notablement. Venise VII n’a qu’un seul couplet. Après le vers du texte de Paris : Le roi Marsilie a tous ses faiz contez, il ajoute, dans la même laisse : Mult fièrement li est cheüz as piez : — « Bons rois d’Espagne, erraument chevalchez. — Les Francs de France ens el camp troverez ; — Des cols ferir sunt mult entalentez ; — Tut li plusor troverez sanglentez : — Perdu i ont maint chevaler prisez — Et de lor gent plus de l’une meitez. — Li remana[n]z est moult afebliez. — Il n’en ont arme, de verté le sachez. » Le même manuscrit omet ensuite six couplets qui se trouvent dans Paris... ═ Lyon est beaucoup plus long : Li cuens Rollans fu chevalier menbrez — Et prouz as armes, ardiz et alosez ; — Et Oliviers fu ardiz et senez. — Li XII. per i sont de grant bontez ; — François i fièrent par moult ruste fierté ; — Sarrazin sont à martire livré : — De C. M. homes, n’en est I. eschapez, — For Margaris : fuiant s’en est alez. — Se il s’enfuit, n’en doit estre blasmez ; — De IIII. espiez est en son cors navrez ; — Devers Espaigne, ce m’est vis, est tornez. — Au roi Marsille a toz ses fez contez. ═ Li reis Marsille s’en est moult merveilliez ; — Sa lance est frainte et ses escuz perciez, — Ensor la bocle li est tot despiciez ; — Frainz est ses yaumes et ses escuz perciez, — Et ses aubers desroz et desmailliez, — E il maïsmes de IIII. espiez plaiez. — Il vient dou chan où li chaples es griez. — Astivemant li est cheüz as piez : — « Bons rois d’Espaigne, vistemant chivauchiez, — La gent de France troveroiz à meschiez. — La nostre gent i sont tuit martiriez, — Pardu i on man chevalier prisiez. — Li rem[an]anz est bien afebloiez ; — Bon sont à vaincre, se vos le commanciés ; — Car les plus forz troveroiz esmaiez. » — Marsile l’ot, toz en fu corrociez ; — Dont fut Mahoms reclamez et huchiez. — A fort chivauchent les larriz et les biez. — Et nos François furent droit sor lor piez ; — A voiz escrient : « Sire Rollans, voiez. — Li XII. per, car nos venez aidier. » — Li Arcevesques parla come afaitiez : — « Li home Dieu : or ne vos esmaiez, — Sainz Paradis vos est aparoilliez ; — Diex vos metra corones en vos chiez ! » — François en ont lor cuers antendroiez. — L’uns plore l’autre par moult grant amistiez ; — Par cherité se sont entrebaisiez ; — Torpins de Rains fu moult bien enseigniez : — De Dieu les seigne, qui fu crucifiez. — Rollans a dit : « Barons, ne nos targiez ; — Li rois Marsille chivauche, toz rangiez. » (Ff. 8 v° — 9 v°.) ═ Quoi qu’il en soit du texte de nos Refazimenti, il y a là une lacune à combler dans le texte primitif. Nous avons essayé de la combler, en prenant pour base le manuscrit IV de Venise, sans négliger le manuscrit VII, ni même le texte de Paris. Nous proposons la rédaction suivante, qui, comme toutes nos additions, ne peut être qu’une hypothèse sans rigueur absolument scientifique, mais dont les éléments sont empruntés à tout ce que les autres manuscrits renferment de plus antique et de meilleur...

Li quens Rollanz s’est forment desmentet
E Oliviers e tuit li duze per ;
E li Franceis caplent par grant fiertet.
Sarrazins unt à martirie liverez.
De cent milliers n’en est uns escapez
Fors Margariz : fuianz s’en est alez.
Se il s’en fuit, ne fut mie à blasmer,
Kar est-il ore de .iiii. espiez nafrez.
Sis branz d’acier est tut ensanglantez
E sis osbercs rumpuz e desmailez.
De vers Espaigne si s’est acheminet ;
Al rei Marsilie ad tuz les faiz cuntez. Aoi.


Reis Margariz suls s’en est repairiet :
Sa hanste est fraite e sis escuz perciez,
E de la bucle n’en ad que demi pied ;
Ensanglentez en est sis branz d’acier
Et il meïsmes nafrez de .iiii. espiez.
Deus ! quel barun se il fust chrestiens !
Al rei Marsilie ad les faiz nunciez,
Isnelement li est caüz as piez,
E si li dist : « Sire, kar chevalchiez.
« Les Francs de France verrez en grant meschief.
« Perdut i unt tanz chevaliers preisiez
« E de lur gent plus de l’une meitiet.
« Li remananz est mult afebliez,
« E nen unt armes dunt se puissent aidier.
« Bon sunt à veintre, sire, par veir saciez. »
Marsilies l’ot, si en fut curuciez,
E vers Franceis sempres ad chevalchiet.Aoi.


Marsilies vient parmi une valée, etc.

Marsilie. O. Pour le cas sujet, il faut Marsilies.

Vers 1452.Elme. O. V. la note du vers 996.

Vers 1453.Escuz. O. Pour le s. s., escut. ═ Saffrées. O. Ce mot se présente avec une seule s aux vers 1372, 1032, 2199, 3141, 3307.

Vers 1454.Graisles. O. Nous admettons l’étymologie gracilis : au cas sujet du p., il faut graisle. (V. notre note du vers 20.)

Vers 1455.Grant. O. Pour le s. s., il faut granz.

Vers 1456. — Lire Olivier. ═ Compaign. O. V. la note du vers 1051.

Vers 1457. — Lire fel.

Vers 1460.Avrum. Mu. V. la note du vers 38. ═ E n’est pas dans le manuscrit.

Vers 1461.Unches. O. V. la note du vers 629.

Vers 1463.Vos. O. V. la note du vers 17. ═ Compainz. O. J’ai rétabli l’u dans com : cette lettre est constante dans tout notre texte.

Vers 1464.Vos. O.

Vers 1466.Cantée. O. Le verbe chanter se trouve deux fois avec le ch. (Vers 1474, 1563.) Cf. chançun. (Vers 1466.) Une seule fois seulement, ici, il est écrit sans le ch.

Vers 1467. — M. Müller, d’après les manuscrits de Venise IV, de Paris et de Versailles, a interverti l’ordre des couplets suivants. Dans le manuscrit d’Oxford, après la laisse cxiv de Müller, viennent les couplets cxxvii et cxxviii, et, après la laisse cxxiv de la même édition, vient le couplet cxxvi. Cette interversion est nécessaire ; elle est évidemment scientifique. Nous l’avons d’autant plus volontiers acceptée que l’ordre de M. Müller est encore confirmé par le manuscrit de Lyon, dont l’auteur allemand ne s’est pas servi.

Vers 1467.Lor. O. V. la note du v. 17.

Vers 1469.Regretent. O. — Reclament, fourni par le manuscrit de Lyon et par celui de Paris (reclainment), nous paraît préférable et tout à fait dans le sens. ═ Lire Olivier.

Vers 1470.Quant n’est pas dans le manuscrit. Correction de G. et Mu.

Vers 1471.Arcevesque. O. Pour le cas sujet, il faut une s.

Vers 1472.Seignors barons. O. V. la note du vers 30.

Vers 1473.Vos. O. V. la note du vers 17.

Vers 1475. — Lire plutôt mielz. O. V. la note du vers 545.

Vers 1477.Jurn. O. Jurn est plus étymologique ; mais la nasale a disparu dans tous les exemples du cas sujet et dans le plus grand nombre de ceux du cas régime.

Vers 1478.Soi. O. Sui est plus conforme à la phonétique de notre texte. ═ Vos. O.

Vers 1479.Vos.

Vers 1480.Vos.

Vers 1483. — Il y a encore ici une lacune évidente, et, comme le dit Mu., « le récit du texte d’O. est véritablement confus. » D’après les Refazimenti, on voit ici Marsile confier la moitié de son armée à Grandogne, et c’est ce corps qui s’avance sur-le-champ contre les Français. Quant au reste de l’armée, il forme la réserve et reste sur une montagne. Nous allons essayer une restitution critique de ce passage, pour compléter le texte de notre Chanson :

Li reis Marsilies est mult uns malvais reis ;
Dit as païens : « Bien amer jo vus dei.
« Li quens Rollanz ad merveillus podeir :
« Ki le voelt veintre forment pener s’en deit.
« Par dous batailles n’iert-il vencuz, ço crei.
« Se l’ graantez, nus l’en liverrum treis.
« Les dis escheles justerunt as Françeis,
« Les altres dis remeindrunt ci od mei.
« Encoi perdrat Carles de sun podeir :
« En grant viltet verrum France cadeir. »
Mandet Grandonie (ço est uns de ses fedeilz) :
« Cest gunfanun en l’estur portereiz.
« Les .X. escheles contre Francs guiereiz. »Aoi.


Li reis Marsilies est remés sur un munt :

Vait s’en Grandonies, il e si cumpaignun.
A treis clous d’or fermet sun gunfanun,
A voiz escriet : « Kar, chevalchiez, barun. »
Mil graisle sunent, mult en sunt cler li sun.
Dient Français : « Deus Pere, que ferun ?

« Si mar veïsmes le cunte Guenelun :
« Venduz nus ad par male traïsun. »
« Li Arcevesques en ad dit sa raisun :
« Li Home Deu, hoi receverez grant dun,
« En Pareïs averez beneïçun ;
« Mais li cuard ja pardun n’en averunt,
« S’il ne deffendent la lei Deu e sun num. »
Franceis respundent : « Communement ferum ;
« Pur la lei Deu deffendre cumbatrum.
« Ja Deu ne placet que tel pecchiet façum
« Que jà son regne par mespreisun perdum. »
E l’Arcevesques lur fait beneïçun,
Puis, sunt muntet par fière cuntençun.
Vers païens brochent, iriet cume leun.Aoi.


Li reis Marsilies ad fait sa gent partir,

Les dis escheles voelt od sei retenir.
Quant Franceis veient les dis altres venir,
Par la Deu grace furent proz e hardit.
Les destriers brochent, unt lur espiez brandiz,
Isnelement vunt païens envaïr,
Granz colps lur dunent sur lur escuz voltiz,
Desuz les bucles les unt fraiz e malmis,
Les blancs osbercs rumpuz e dessartiz :
En unt VII .C. abatuz es lariz.
Dunc cumencerent e li hus e li cris.
Li Franc de France, del’ païs seignurill,
Bien se deffendent as branz d’acier furbiz.
Mais en cel camp lur cuvent à murir.Aoi.

C’est avec les manuscrits de Venise IV, de Paris et de Lyon que nous avons composé ce texte. (V. le texte de Venise dans Mu., p. 95, et celui de Paris dans l’éd. Fr. Michel, p. 195-197.) Nous publierons un jour in extenso le texte inédit de Lyon, auquel nous avons emprunté plus d’un trait, mais qui se rapproche beaucoup de celui de Paris.

Vers 1484.Meitet. O. Pour le cas sujet, il faut un z. Lire meitiez.

Vers 1485.Climborins. O. V. le vers 627.

Vers 1487. — Lire amistiet. O.

Vers 1489.Major. O. V. la note des vers 30 et 51. ═ Venise VII porte : Terre de France ad hunte livrera. Ce qui prouve bien, contre certain traducteur, que tere majur, c’est la France.

Vers 1490.Curone. O. V. la note du vers 930.

Vers 1491.Ceval. O. V. la note du vers 1379.

Vers 1492.Esprever. O. Pour le cas sujet, il faut esprevers et p.-e. espreviers.

Vers 1493. — Lire Bien. O. V. la note du vers 545.

Vers 1495.Sun escut. O. Pour le cas sujet, il faut sis escuz. ═ Bronie. O.

Vers 1497. — Lire bien.

Vers 1500. — À partir de ce vers nous n’indiquerons plus, une à une, les corrections nécessitées par la théorie des assonances en ier. Nous prions notre lecteur de vouloir désormais, partout et toujours, lire Olivier, Gerier, Ogier, Engelier, Michiel, au lieu d’Oliver, Gerer, Oger, Engeler, Michel, etc. Et, de même, bien, mielz, mien, ies, iert, viell, au lieu de ben, melz, men, es, ert, veill, etc. etc. Ces dernières corrections sont probables. Les premières sont certaines, et nous sommes ici guidé par une « Table complète » que nous avons dressée de ces assonances.

Vers 1501.Prodome. O. Pour l’assonance, il faut produme.

Vers 1502. — Lire en assonances, à la fin de ce couplet : Olivier, Engelier, chevalier, vergier, mier, O. aciers, chiet, O. Aversier, trenchiet, deschevalciet, iriez, preisier, chiers, chevalier.

Vers 1503.Mort Engeler. O. Pour le cas sujet, il faut Morz Engeliers.

Vers 1505.Respont. O. V. la note du vers 30. ═ Doinst. O. V. la note du vers 859.

Vers 1507. — Lire sanglenz. V. la note du vers 1079. ═ Acer. O. Pour le cas sujet, il faut aciers, qui se trouve aux vers 1362, 2302, 2313.

Vers 1510.Aversers. O. Pour le sujet, aversier.

Vers 1517.Nos. O. V. la note du vers 17. ═ Charles. O. V. la note du vers 94.

Vers 1519.Un païen. O. Pour le cas sujet, il faut Uns païens.

Vers 1520.Celoi levat. O. Icil, cil sont par excellence le cas sujet. Au s. s., on trouve cil, icil, et, d’autre part, cist ; au r. s., cel et icel ; et, d’autre part, cest ; au s. p., cil et cist ; au r. p., cels et cez. Ce dernier mot est des deux genres. ═ Lyon porte : Il adoba...

Vers 1522.Eschipre (schippula), qu’après F. Michel nous avions traduit par « embarcation », signifie, en réalité, un marinier. Dans les Livres des Rois : Servos suos, nautas, est traduit par : Ses humes ki eschipre furent bon. ═ Qui. O. V. la note du vers 18. ═ Loi. O. Loi ne se rencontre que deux fois dans notre texte. (1375, 1522.) La forme commune est lui. (Vers 413, 41, 239, 279, 364, 376, 380, 750, 842, 958, 1036, 1510, 2090, 2382, etc.)

Vers 1524.Salomon. O. V. la note du vers 30.

Vers 1526.Guenelon. O.

Vers 1528.Qu’il cleimet Grammund. O. C’on apele Aragun. L.

Vers 1530. — Lire Bien. O. V. la note du vers 545.

Vers 1535.Car. V. la note du vers 275.

Vers 1536.Baron. O. V. la note du vers 30.

Vers 1537. — Lyon fait, dans ce couplet, figurer Olivier, et non Roland : Oliviers garde, si voit Sanson morir.

Vers 1539.Ceval. O. V. la note du vers 1379.

Vers 1541.Li bers. O. Lire ber.

Vers 1542.Elme. O. V. la note du vers 996. ═ Gemmet. O. Pour le cas sujet, il faut gemmez.

Vers 1544.Gemmet. O. Erreur évidente.

Vers 1545.El dos. O. La correction est de G., d’après Venise IV. Cf. le vers 1606.

Vers 1546.Qui. O. V. la note du vers 18. ═ Blasme. O. Le t étymologique est omis.

Vers 1547. Paient. O. Erreur évidente. ═ Fort. O. Pour le s. s. m., il faut forz.

Vers 1548.Respont. O. V. la note du vers 30. ═ Pois. O. Pour la phonétique, puis. V. le Glossaire.

Vers 1551.Malquiant. O. Pour le cas sujet, il faut Malquianz. Lyon donne : Malcuidanz, fieuz le roi Macemuz. ═ Le. O. Pour la même raison, il faut li.

Vers 1552.Batud. O. V. la note du vers 2. On pourrait lire ad or.

Vers 1553. — Lire ciel. O. V. la note du vers 545.

Vers 1554.Ceval. O. V. la note du vers 1379. ═ Sauz perduz. L.

Vers 1555.Poisset. O. Pour la phonétique, puisset. V. le Glossaire.

Vers 1562.Turpin. O. Pour le cas sujet, il faut Turpins. ═ Arcevesque. O. Pour la même raison, arcevesques.

Vers 1563.Tel coronet. O. Le cas sujet exige Tels coronez. ═ Lire curunez. (V. la note du vers 2084.) ═ Unches. O. V. la note du vers 629.

Vers 1565.De tarmette. O. Il faut te tramettet. D est employé pour t. (V. la note des vers 2 et 122, qu’il faut appliquer aux d dans le corps et au commencement des mots.) Quant à tramettet, nous avons restitué le t étymologique.

Vers 1567.Ceval. O. V. la note du vers 1379.

Vers 1569.Desur le herbe verte. O. G. a substitué Desur l’herbe, et Mu. Desur cele herbe. ═ Erbe est le plus souvent employé dans notre manuscrit sans h.

Vers 1570.Un païen. O. Pour le cas sujet, il faut uns païens.

Vers 1571.De Capadoce neez. O. Neez a été ajouté par une main postérieure. Lyon ═ Fieuz Capadoce, à un roi si felon.

Vers 1573.Oisel. O. Pour le cas sujet, oisels.

Vers 1575.Garnier. L.

Vers 1576.De col. O. Erreur évidente.

Vers 1577.Aprof. O. ═ Tut n’est pas dans O. Mais Venise nous donne : Tuta la bruna li a fraita e desclose.

Vers 1580.Gerers. O. Pour le cas régime, il faut Gerier.

Vers 1583.Ki tint Valeri e envers. O. Venise IV : Il tint Valença et l’onor chi asere. Paris : Ki tint Valence et la terre environ. Versailles et Lyon : Ki tint Valence et la roche environ. Ces deux derniers Mss. ont entre eux une grande connexion. Pour honur, voyez la note du vers 45.

Vers 1586.Li quenz Rollanz. O. Cuens Oliviers. L.

Vers 1589. — Lire cunsentet. Nous avons dû ajouter à O. le t étymologique.

Vers 1590.Plorer fera mainte belle jovente. L.

Vers 1591.Ceval. O. V. la note du vers 1379. ═ Cuntence. O. Nous avons ajouté le t étymologique. — Lyon : Ki de corre atalante.

Vers 1592.Venuz. O. Pour le s. p., il faut venut. ═ L. ajoute : Qui que i perde, bataille i aura jante.

Vers 1593.Grandonie. O. Pour le cas sujet, Grandonies. ═ Vaillant. O. Pour la même raison, vaillanz.

Vers 1594.Vassal cumbatant. O. Pour le s. s., vassals cumbatanz.

Vers 1595.Trove Olivier le jant. L.

Vers 1598.Contenement. O. V. la note du vers 30.

Vers 1599. — Dans espaent, l’a a été ajouté postérieurement.

Vers 1600.Voel. O. Erreur évidente. V. la note du vers 40.

Vers 1602.Elme. O. V. la note du vers 996.

Vers 1605.Se dous. O. Erreur évidente. ═ Alves. Ce sont les auves, les côtés de la selle, bien distincts des arçons. (V. la note du vers 1229.) On lit dans Flore et Blanchefleur : Sele ot de moult riche façon... — Les aubes sont d’autre manière. Nous avons à tort traduit : « les arçons. » Corriger la même erreur au vers 3881.

Vers 1606.Ceval. O. V. la note du vers 1379.

Vers 1607.Recoevrement. O. V. la note du vers 38.

Vers 1609.Cist couz n’est pas d’enfant. L.

Vers 1610.Meilluse. O.

Vers 1612.Trent. O. Erreur évidente, comme au vers 1610.

Vers 1613.Chars. O. Lire cars. V. la note du vers 1265.

Vers 1614.Cler. O. Pour le cas sujet, il faut clers.

Vers 1615. — Ce vers n’existe pas dans O. Très-évidemment, il a été omis, et Mu. l’a rétabli d’après Venise IV : Dist le païn : Nu no l’sofriron mie.

Vers 1615. — Au lieu de Tere Major, Lyon nous donne Felon Franceis. ═ Major. O. V. la note du vers 30. ═ Mahummet. O. Ce mot est le plus souvent écrit avec une seule m. ═ Maldie. O. Nous avons rétabli le t étymologique.

Vers 1616.Chars. O. Lire cars. (V. la note du vers 3436.) Lyon ajoute : Sachez de voir, tuit i perdrez la vie.

Vers 1619.Cevalche. O. V. la note du vers 1379.

Vers 1620.Merveillose. O. L’u, qui se trouve presque partout ailleurs, est plus conforme à notre phonétique. ═ Grant. O. Pour le cas sujet, il faut granz.

Vers 1621.Ferent. O. L’i a triomphé dans ce mot, et nous l’y avons partout conservé. ═ Brunissanz... Fer bruni, c’est-à-dire, recevant par le poli une teinte brillante et brune à la fois. De là brunisseur et burnisseresse. Les cottes de mailles qui ne pouvaient se brunir se roulaient dans les étoffes. M. L. de la Borde cite d’Ét. Boileau ce passage précieux : « Quiconques est fermaillers de laton, et il œvre qui ne soit brunie que d’une part, si come de fermoirs rons, cele œvre n’est mie suffisans. » Et, dans Perceforest, on parle d’une épée « plus clere et plus loysante que s’elle venoit des mains du brunisseur ». (Notice des émaux, 1853, II, 177.)

Vers 1622.Dulor. O. V. la note du vers 489.

Vers 1624. — Lire sanglent.

Vers 1627.Encacerent. O. La forme étymologique, la vraie forme est enchalcerent, d’où le substantif verbal enchalz. (Vers 2446, 2462, 2765, 2796, 3635.)

Vers 1629. — Le Ms. d’Oxford nous paraît ici incomplet. Pour expliquer le vers : Marsilies veit de sa gent le martirie, le couplet précédent ne suffit pas. Et, en effet, les Refazimenti, avec lesquels concorde admirablement la Keiser Karl Magnus’s Kronike, nous offrent ici une ou plusieurs laisses de plus. (Voyez les Mss. de Paris et Lyon.) Venise IV, qui représente le texte le plus ancien, nous offre un couplet qui nous paraît véritablement original. Ce même couplet se retrouve d’ailleurs, avec les mêmes assonances, dans tous les Remaniements. Nous avons essayé de le réduire à notre dialecte, ainsi qu’il suit :

Rollanz i fiert cum chevaliers forz,
E li Franceis lur chevals meinent tost :
Païens enchalcent le trot e les galops.
En sanc vermeil unt Franceis tuz lur cors ;
Lur branz d’acier i unt il fraiz e tors ;
Armes n’unt mais pur deffendre lur cors.
Dunc lur remembret des graisles et des corns ;
N’en i ad un ne se facet plus fort.
Païen escrient : « Mar venimes as porz ;
« La greignur perte en est turnée as noz. »
Laissent le camp, as noz turnent les dos.
Français i fièrent de l’espée granz colps ;
Jusqu’à Marsilie vait li traïns des morz. Aoi.

═ La Keiser Karl Magnus’s Kronike intercale ici le récit d’un songe de l’Empereur : c’est le songe de la tempête, etc. (Vers 2532 et ss.) Il se termine ainsi : « Charles s’éveilla et dit : « J’ai rêvé des choses étonnantes cette nuit. J’ai peur que Roland ne soit plus en vie... »

Vers 1631.Un Sarrazin, Abisme. O. Pour le cas sujet, il faut Uns Sarrazins, Abismes. ═ Lyon : Magraine ot non, fieuz le roi principal.

Vers 1632.Cumpagnie. O. Cumpaignie est la forme la plus commune (vers 587, 1735), et celle aussi qui s’harmonise le mieux avec cumpainz, cumpaignun et cumpaigne.

Vers 1633.Tetches. O. Erreur du scribe.

Vers 1634.Filz. O. Pour le cas r., il faut fil. ═ Les éditeurs ont écrit sancte, à cause de l’abréviation sce. Mais sancte n’a aucunement la physionomie de notre dialecte, ni du roman du Nord. Les scribes, habitués à écrire le latin, se servaient parfois des mêmes abréviations en français : de là sce. Mais on trouve plus d’une fois seint dans notre Chanson : donc, ici comme ailleurs, la forme régulière est seinte.

Vers 1638.Unches. O. V. la note du vers 629.

Vers 1640.Drud. O. Pour le cas sujet, druz.

Vers 1641. — Lire genz.

Vers 1642.Arcevesque. O. Pour la même raison, il faut un s.

Vers 1645.Cel. O. V. la note du vers 1500. ═ Herite. O. Au s. s., herites.

Vers 1646.Mielz. O. V. la note du vers 1500. ═ Mielz est mult que. O. Correction de Mu., d’après Venise IV. ═ Ne n’est pas dans le manuscrit.

Vers 1647.Unches. O. V. la note du vers 629.

Vers 1650. — Lire Iert. V. la note du vers 1500.

Vers 1651. — Lire Destriers. V. la note du vers 1500.

Vers 1653.Bien. O. V. la note du vers 1500.

Vers 1656. — Pour amener cet alexandrin à un décasyllabe, on pourrait écrire : Petite oreille...

Vers 1657. — Nous avons, pour la mesure, supprimé nule, qui est inutile. ═ Alge. O. Nous avons restitué le t étymologique.

Vers 1658.Arcevesque. O. Pour le cas sujet, il faut arcevesques. ═ Par tant grant vasselage. O. Nous avons, pour la mesure, supprimé tant grant.

Vers 1660.En l’escut amiracle. O. Notre leçon est hypothétique

Vers 1662.Lire perres.

Vers 1663, 1664. Nous avons interverti l’ordre de ces deux vers. Le fait spécial qu’ils expriment est omis dans le manuscrit de Venise IV, et reproduit par les Remaniements de Paris, de Versailles et Venise VII. D’où l’on peut conclure que les Refazimenti reproduisent souvent plus d’un trait du texte original.

Vers 1664.Galafes. O. Il s’agit sans doute de cet émir Galafre, qui joue un si grand rôle dans la légende de l’oncle de Roland. Galafre est ce roi de Tolède auprès duquel dut s’enfuir le jeune Charles, persécuté par les deux bâtards, Heudri et Lanfroi ; c’est à sa cour que le fils légitime de Pepin se cacha longtemps, sous le nom de Mainet ; c’est de la fille de Galafre, c’est de Galienne que s’éprit un jour le futur empereur. (V. notre note sur la légende de Charlemagne, au vers 94.)

Vers 1666.Qu’un dener. Mu. Le manuscrit porte très-distinctement : Que un. ═ Lire denier.

Vers 1668. — P.-e. vuide.

Vers 1670.Ben. V. la note du vers 1500. ═ La croce ne signifie-il pas « la crosse », plutôt que « la croix ». C’est cependant ce dernier sens qu’ont adopté tous les traducteurs.

Vers 1671. — Lire, en assonances, à la fin des vers de ce couplet : Olivier, chevalier, ciel, aidier, recumenciet, griefs, Olivier, preisier, briefs, milliers, O. bien, grief, chevalier, chier.

Vers 1672.Cumpaign. O. V. la note du vers 1051. ═ Volez. O. Vulez est plus conforme à notre phonétique, et vu se retrouve au commencement de presque tous les temps et modes du même verbe.

Vers 1673.Arcevesque... bon chevaler. O. Pour le cas sujet, il faut un s à la fin de ces trois mots. ═ Lire chevaliers.

Vers 1674.Meillor. O. V. la note du vers 51. ═ En tere ne suz cel. O.

Vers 1675. — Lire bien. V. la note du vers 2500.

Vers 1676.Car. Mu. Le manuscrit porte très-nettement Kar. ═ Aluns. O. V. notre note sur les 1res personnes du pluriel.

Vers 1677. — « Lorsque Roland vit ses hommes tomber ainsi, il courut tout au milieu de l’armée, et frappa des deux mains. Olivier en fit autant. » (Keiser Karl Magnus’s Kronike.)

Vers 1678.Colps. O. Pour le sujet pluriel, il faut colp.

Vers 1679.Dulor. O. V. la note du vers 489.

Vers 1680. — « Dans le manuscrit d’Oxford, ce passage de l’ancien texte a été violemment abrégé. Il existe, dans toutes les autres versions, quatre strophes entières entre les vers 1679 et 1680. » (Note de M. Th. Müller.) Ce sont ces quatre laisses que nous allons essayer de restituer, conformément à notre dialecte et aux habitudes de notre scribe. Le lecteur trouvera dans Mu. (pp. 108, 109) le texte de Venise IV, sur lequel nous nous sommes scrupuleusement guidé. Mais nous avons aussi emprunté quelques traits au texte de Paris. (Éd. Müller, pp. 110-112 ; éd. F. Michel, pp. 207-209.)


Li Franc de France unt lur armes perdues.
Uncore i unt quatre cenz espées nues ;
Fièrent e caplent sur les helmes ki luisent.
Deus ! tante teste i out par mi fendue,
Tanz osbercs fraiz, tantes brunies rumpues !
Trenchent les piez, les puignz e la faiture.
Dient païen : « Franceis nus desfigurent. (?)
« Ki ne s’ deffent de sa vie n’ad cure. »
Dreit vers Marsilie unt leur veie tenue,
A voiz escrient : « Bon reis, kar nus aïue »
E dist Marsilies — s’out sa gent entendue :
« Tere majur, Mahumet te destruet !
« La tue genz la meie ad cunfundue :
« Tantes citez m’ ad fraites e tolues
« Que Carles tient, ki la barbe ad canue !
« Rome cunquist e Puillanie trestute,
« Costentinnoble et Saisonie la lunge.
« Mielz voeill murir que pur Franceis m’en fuie.
« Ferez, païen : que nuls ne s’asoüret.
« Se Rollanz vit, la vie avum perdue ;
« E se il moert, Carles perdrat la sue. » Aoi.


Felun païen i fièrent de lur lances

Sur cez escuz e cez helmes ki flambent.
Fers et aciers en rent grant consunance ;
Sanc e cervele ki dunc veïst espandre !
Li quens Rollanz en ad doel e pesance
Quant veïst mort tant bon vassal catanie.
Or, li remembret de la tere de France
Et de sun uncle le bon rei Carlemagne.
Ne poet muer que sun talent n’en canget. Aoi.


Li quens Rollanz est entrez en la presse,

Ki de ferir ne finet ne ne cesset.
Tient Durendal, son espée qu’ad traite,
Rumpt cez osbercs e desmailet cez helmes ;
Trenchet ces cors e ces puigns e cez testes ;
Tels cenz païens ad jetez morz à tere.
N’en i ad un ki vassals ne quidet estre. Aoi.


Oliviers est turnez de l’altre part ;

De bien ferir li ber mult se hastat.
Trait Halteclere, s’espée que portat ;
Fors Durendal suz ciel meillur nen ad.
Li quens la tient e forment se cumbat ;
Li sancs vermeils en volet jusqu’as braz :

« Deus, dist Rollanz, cum cist est bons vassals !
« E ! gentilz quens, tant proz e tant leials,
« Nostre amistiez en cest jur finerat,
« Par grant dulur hoi se departirat.
« E l’Emperere, quant morz nus truverat,
« En dulce France jamais tel doel n’averat.
« N’i ad Franceis pur nus ne prierat,
« Enz es mustiers oraisun en ferat.
« En Pareïs la nostre anme jerrat. »
Oliviers l’ot e sun cheval brochat ;
En la grant presse à Rollant s’aproismat.
Dist l’uns à l’altre : « Cumpainz, traiez vus ça.
« Jà l’uns seinz l’altre, se Deu plaist, n’i murrat. »Aoi.


Ki puis veïst Rollant e Olivier, etc.

Vers 1682.Arcevesque. O. Pour le cas sujet, il faut arcevesques.

Vers 1683.Mort. O. Pour le régime pluriel, morz. ═ Lire bien. V. la note du vers 1500.

Vers 1684. — Dans la Keiser Karl Magnus’s Kronike, c’est Turpin qui dit : « Il a été trouvé dans les vieux livres que nous devons mourir pour la cause de la sainte foi. »

Vers 1685. — Lire Milliers. O. La forme millers se trouve (vers 1417, 1439, 1440, 2072, 2416, 2544, 2774) beaucoup plus souvent que milliers. (Vers 109 et 2685.) — Mais on ne trouve ce mot en assonanee que dans les laisses en ier.

Vers 1686.As quatre turs. O. Erreur évidente, que Mu. a rectifiée d’après Venise IV : A questo storm, et Versailles : A quatre estors. Venise VII porte : As quatre stors. ═ Lor. O.

Vers 1687.Quint. O. Pour le cas sujet, il faut quinz. ═ Lor. O. V. la note du vers 17. ═ Pesant et gref. O. Pour le sujet singulier, pesanz e griefs.

Vers 1688.Tuz. O. Pour le s. p., il faut tuit. ═ Chevalers. O. Il faut chevalier, à cause du cas sujet.

Vers 1692.Oliver. V. la note du vers 1500.

Vers 1693.Chers. O. V. notre théorie sur les vocatifs. (Note du vers 15.) ═ Vos. O.

Vers 1695.Poüms. O. V. notre théorie sur les 1res personnes du pluriel, à la note du vers 42.

Vers 1696.Barons. O.

Vers 1697.Amis. O. V. la note du vers 15 (sur les vocatifs). ═ Vos. O.

Vers 1698.Oliver. V. la note du vers 1500.

Vers 1700.Oliver. O. V. la note du vers 1500.

Vers 1701.Mielz. O. V. la note du vers 1500.

Vers 1703.Passant. O. V. la note du vers 611.

Vers 1704.Vos. O.

Vers 1705.Oliver. O. V. la note du vers 1500. ═ Vergogne. O. Nous avons adopté verguigne, parce que neuf fois sur dix la notation ui se rencontre dans notre texte, au lieu de la notation oi. C’est une des règles les moins douteuses de la phonétique de notre texte.

Vers 1706.Reprovier vaut p.-e. mieux.

Vers 1707. — Le manuscrit porte à tort dureit.

Vers 1708.Vos. O.

Vers 1709.Men. V. la note du vers 1500.

Vers 1710.Vos. O. ═ Ert. V. la note du vers 1500.

Vers 1711.Vos. O. ═ Lire braz, qui est dans O., etc. ═ Lire sanglenz. (V. la note du vers 1079.)

Vers 1712.Respont. O. V. la note du vers 30. ═ En n’est pas dans le manuscrit.

Vers 1715.Oliver. O. V. la note du vers 1500.

Vers 1716.Vos. O.

Vers 1717.Ousum. O. Il faut étymologiquement deux s. (Oüsse, vers 691 ; oüssent, 686 ; oussum, 1102.)

Vers 1719.Oliver. O. V. la note du vers 1500.

Vers 1721.Vus n’est pas dans le manuscrit. ═ Jerreiz. O. La notation ei n’est pas employée à la 2e p. du plur., si ce n’est à la fin des vers, dans les couplets assonancés en ei.

Vers 1722.Por. O.

Vers 1723.Respont. O. ═ Vos. O.

Vers 1725.Mielz. O. V. la note du vers 1500.

Vers 1726.Morz. O. Pour le s. p., il faut mort.

Vers 1727.Jamais Karlon. O. Il était facile de rétablir la vraie forme du cas sujet, en mettant : Carles jamais. ═ Quant à Karlon, voy. la note du vers 94. ═ Avrat. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 1728.Creïsez. O. Étymologiquement, il faut deux s. ═ Mi sire. O. V. la note du vers 636.

Vers 1729.Ousum. O. V. la note du vers 1717.

Vers 1730.Mort. O. Pour le s. s., morz. ═ Marsilie. O. Au cas sujet, il faut un s.

Vers 1731.Vemes. O. La rectification est facile, d’après Venise IV.

Vers 1732.Karles. O. V. la note du vers 94. ═ Vos. O. V. la note du vers 17. ═ Avrat. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 1733.Ert, V. la note du vers 1500. ═ Tel home. O. Pour le cas sujet, il faut tels hom. (Sur la déclinaison de hom, voir la note du vers 20.)

Vers 1734.Vos. O. ═ Ert. V. la note du vers 1500.

Vers 1735.Oi. O. V. la note du vers 1210.

Vers 1736.Vespre. Mu. Le manuscrit porte très-distinctement vespere, que nous avons précieusement conservé ; nous tenons compte de l’écriture, sans aborder la question de prononciation. ═ Ert. V. la note du vers 1500. ═ Gref. O. Pour le cas sujet, griefs.

Vers 1737.Arcevesques. Les quatre dernières lettres ne sont pas dans O. ═ Lire en assonances, à la fin du vers de cette laisse, mier, Olivier, mestier, mielz, vengier, detrenchiez, sumiers, pitiet, mustiers, chien, bien, O.

Vers 1740.Rollanz. Mu. V. notre note du vers 15. ═ Vos. O.

Vers 1741.Vos. O. ═ Cuntraliez. O. La forme la plus étymologique est donnée quatre vers plus haut. (Vers 1737.)

Vers 1742.Nos. O. V. la note du vers 17. ═ Avreit. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 1745.Liez. O. Pour le cas sujet du pluriel, il faut liet.

Vers 1747.Nos. O.

Vers 1748.Nos. O.

Vers 1752.Bien. O. V. la note du vers 1500.

Vers 1753.Olifan. O. V. la note du vers 1059.

Vers 1757.Karles. O. V. la note du vers 94.

Vers 1761. — Le manuscrit porte ahans, par erreur du scribe.

Vers 1762.Dulor. O. V. la note du vers 489. ═ Olifan. O. V. la note du vers 1059.

Vers 1763.Cler. O. Pour le cas sujet, il faut clers.

Vers 1764.Rumpant. O. Pour la même raison, il faut rumpanz.

Vers 1765.Grant. G. O. Même remarque.

Vers 1766.Passant. O. ═ Quant à Karles, O., voir la note du vers 94.

Vers 1767.Naimes le duc. O. On pourrait retrancher les deux derniers mots pour ramener cet alexandrin à un décasyllabe. ═ Le duc. O. À cause du cas sujet, il faut li dux. ═ Oïd. O. V. la note du vers 2.

Vers 1769. — Les trois premières lettres de cumbatant ont été ajoutées postérieurement.

Vers 1770. — Il en est de même de il, qui se trouve après est, dans O.

Vers 1771.Vus n’est pas dans le manuscrit. ═ Veilz. O. Voir la note du vers 1500, et lire vielz.

Vers 1773.Orgoill. O. V. la note du vers 292.

Vers 1775.Ja prist-il Noples. — « Noples, dit G. Paris, n’est ni Constantinople, comme traduit Génin, ni Grenoble, comme l’a compris l’un des continuateurs du Faux Turpin. Cette ville, qui joue un rôle si considérable dans la tradition, est encore à identifier. » (Revue critique, 1869, n° 37, p. 174.) « Pour le mot Nobles, dit M. P. Raymond, il faut observer que le château d’Orthez a porté le nom de Nobile : Castrum quod dicitur Nobile. (Texte de 1286. — V. le Dictionnaire topographique du département des Basses-Pyrenées, au mot Moncade.) Non loin d’Orthez, au N.-E., il y a une colline surmontée d’un camp retranché qui nous a toujours paru remonter au ive ou ve siècle. Cette colline s’appelle la Motte de Turry, et ses défenses naturelles sont vraiment formidables. Enfin, il ne faut pas oublier qu’Orthez est sur une voie romaine, et que c’est le chemin forcé du gave de Pau. Deux piles du pont actuel sont du xie-xiie siècle, et les traces du pèlerinage de saint Jacques y remonteraient, suivant M. V. Leclerc, au ixe siècle. » (Mémoire manuscrit de M. P. Raymond.) Il nous est difficile d’admettre ici les conclusions de M. Raymond. D’après tous nos poëmes et toutes nos légendes, Nobles est placé en Espagne. ═ Quant à la prise de cette ville par Roland, elle a donné lieu à quatre ou cinq récits différents : 1° Dans l’Entrée en Espagne, Roland abandonne Charlemagne au milieu d’une épouvantable bataille contre les Sarrazins. Il s’échappe avec les onze autres pairs et vingt mille Français : c’est qu’un de ses espions vient de lui apprendre que la ville de Nobles est sans défense. Il la surprend, il s’en empare. Le vieux Gilaru est tué ; un autre chef païen, Filidès, se convertit, et Roland lui fait présent de la ville conquise, qu’il a d’abord, mais en vain, proposée à Olivier. C’est au retour de cette équipée qu’il est frappé, par son oncle indigné, d’un coup de gant au visage ; c’est alors qu’il quitte le camp français et fait son voyage en Orient. (Ms. fr. de Venise, n° xxi, f° 177, r°. — 217 v°.) — 2° La Karlamagnus Saga raconte les choses tout autrement. Olivier et Roland s’emparent de Nobles sur l’ordre de Charlemagne ; mais ils mettent à mort le roi Fouré, que l’Empereur leur avait ordonné d’épargner. Puis ils cherchent, mais en vain, à effacer les traces de ce sang. Charles s’aperçoit de la désobéissance de son neveu, et lui donne ce coup de gant, si célèbre dans notre légende épique. (Karlamagnus Saga, I, 51, 52.) Cette version paraît être la plus ancienne, et c’est la seule qui soit en parfaite corrélation avec un passage très-discuté de notre Chanson de Roland : Ja prist il Noples seinz le vostre comant... — Puis, od les ewes lavat les prez de l’ sanc : — Pur ce le fist ne fust aparissant. (V. 1775-1779.) 3° Un autre récit nous est offert par la même Saga, mais dans une autre branche. Charles et Roland assiégent Nobles depuis trois ans ; Charles se décourage, son neveu s’obstine, et l’Empereur le punit de cette obstination en le frappant d’une façon déshonorante. (5e br. Guitalin.) ═ 4° Enfin, les Chroniques de Saint-Denis, continuant le Faux Turpin, transforment Nobles en Grenoble. Elles nous montrent Roland assiégeant cette ville, quand soudain il apprend que son oncle est menacé en Dalmatie par les Saisnes, les Vandres et les Frisons. Pour lui permettre d’aller secourir Charlemagne, Dieu abat miraculeusement les murailles de la ville assiégée, comme autrefois celles de Jéricho. (Liv. V, chap. ix.) — 5° David Aubert, dans ses Conquestes de Charlemagne, paraît avoir suivi la légende que la Saga nous a conservée ; mais il l’a légèrement modifiée, comme le fait voir le titre d’un de ses chapitres : Comme le roi Fourré fut occis contre le gré de l’Empereur par Olivier de Vienne, quy vanga la mort de son frère Gerier que Fouré avait ocis, et comment la cité de Nobles fu conquise par le noble duc Roland. (F° 193-200.) ═ Tel est le rôle important que joue Nobles dans notre Épopée française. (Cf. P. Meyer, Bibliothèque de l’École des Chartes, t. XXVIII, p. 306, et G. Paris, ibid., XXV, p. 19.) ═ Quant à Commibles, que l’on voit cité près de Nobles au v. 198 comme une autre conquête de Roland, il faut observer, après M. G. Paris (l. I. p. 173), que la version islandaise et le texte de Versailles remplacent par Merinde, Morinde, ce nom de ville qui d’ailleurs n’est pas expliqué.

Vers 1776.Sarrazins. O. Pour le cas sujet du pluriel, il faut Sarrazin.

Vers 1777.Ki. Mu. Le manuscrit porte très-distinctement si. ═ L’a de cumbatirent n’est pas dans le manuscrit.

Vers 1779.Pur celli. — O. Erreur évidente. ═ Le Ms. porte ce. Lire ço. ═ [Apa]rissant. Les trois premières lettres manquent dans le manuscrit. C’est d’après la Karlamagnus Saga que Müller les a restituées. (V. notre note du vers 198.)

Vers 1780.Vat. O. Vat ne se trouve qu’une fois dans notre manuscrit : vait, conforme à la phonétique de notre texte, se rencontre souvent. (Vers 168, 500, 618, 1155, 1562, 1874, 2106...) ═ Jur est du masculin. Lire tut le jur. ═ Cornant. O. Pour le cas sujet, il faut cornanz.

Vers 1781.Gabant. O.

Vers 1782. — Lire ciel. V. la note du vers 1500. = Ki osast. O. Erreur du scribe, omission évidente. ═ Querre. Mu. Le manuscrit porte requerre. Il est vrai que re a été ajouté postérieurement. ═ Champ. O. V. la note du vers 555.

Vers 1783.Chevalz. O. Erreur évidente. Lire chevalciez. ═ Arestant. O. Pour le cas sujet, il faut arestanz.

Vers 1784.Major. O. V. la note des vers 30 et 51.

Vers 1785.A. O. V. la note du vers 1244.

Vers 1786.Rumput. O. Temples prenant l’s comme un nom masculin, rumpuz doit prendre le signe du cas sujet au masculin.

Vers 1787.Olifan. O. V. la note du vers 1059. ═ Dulor. O. V. la note du vers 489.

Vers 1788.Karles. O. V. la note du vers 94. ═ Si corn est resté neutre en français, on peut laisser cel. S’il est masculin, il faut cil.

Vers 1790.Respont... baron. O.

Vers 1791.Men. V. la note du vers 1500.

Vers 1792.At. O. La forme constante est ad. V. le Glossaire. ═ Vos. O.

Vers 1793.Vos. O.

Vers 1796.Empereres. O.

Vers 1797.Lor. O. V. la note des vers 30 et 17.

Vers 1798.Elmes. Mu. Le Ms. porte : De helmes. ═ A or. O. V. le Glossaire aux mots à et ad.

Vers 1801. — Lire destriers. V. la note du vers 1500.

Vers 1803.Celoi. O. V. la note du vers 1520.

Vers 1804.Mort. O. Pour le cas sujet, il faut morz.

Vers 1805.Durriums. O. V. notre note du vers 42 sur les premières personnes du pluriel.

Vers 1806.Calt ? car demuret. O. Pour la mesure, nous avons supprimé car, qui est inutile.

Vers 1808.Cuntre le soleill. O. Le, inutile, rompt la mesure. Correction de Mu. ═ Pour les deux ll de soleill, voy. le Glossaire.

Vers 1809. — Pour le cas sujet, il faut osberc et helme, au lieu d’osbercs et helmes. O. Venise nous donne gran flanbor, et c’est d’après quoi les éditeurs ont restitué dans notre texte grant flambur. Le Ms. ne donne que g...a...bur.

Vers 1810.Escuz... peinz. O. Pour le cas sujet, il faut escut, peint. ═ Lire plutôt bien. V. la note du vers 1500.

Vers 1811.Espiez. O. Pour la même raison, il faut espiet.

Vers 1812.Empereres. O. ═ Cevalchet. O. Nous avons partout adopté la forme la plus usitée, à beaucoup près. V. la note sur ceval, au vers 1379.

Vers 1813.Et li Franceis sont tuit en grant friçon.- De pitié plorent escuier e garçon. (Ms. de Lyon.)

Vers 1814.Celoi. O. V. la note du vers 1520.

Vers 1815.Mult n’est pas dans le Ms. Correction de Mi., G., Mu.

Vers 1818.Li. O. Pour le cas régime, il faut le.

Vers 1819. — Lire bien. V. la note du vers 1500. ═ Felon. O.

Vers 1822.Mielz. O. V. la note du vers 1500.

Vers 1823. — À la suite de ce vers, le scribe par erreur a écrit : Morz est Turpin, le guerreier Charlun, qui est en réalité le v. 2242 de notre texte.

Vers 1824.Cascun. O. Il faut un s pour le cas sujet.

Vers 1825. — Lire bien. ═ V. la note du vers 1500.

Vers 1828. — Lire sumier. ═ Deshonor. O. V. la note des vers 17, 30, 52.

Vers 1829.Charlun. O. V. la note du vers 94. — Le Ms. ne porte que guardent. ═ Lyon, Paris, etc., n’ont pas reproduit les détails brutaux qui précèdent : Li rois fait prandre le conte Ganelon, — Si le commande par tel devision : — S’il lor eschape, ja n’en aura rançon. Voilà tout ce que dit Lyon. À l’époque de ces Refazimenti, on n’eût plus supporté les violences du texte primitif. Les mœurs s’étaient sensiblement adoucies.

Vers 1833.Racatent. V. le Dictionnaire de Burguy au mot Acater.

Vers 1834.Empereres. O.

Vers 1836.Celoi. O. V. la note du vers 1520. ═ Sei. Mu. Le Ms. porte se.

Vers 1838.Josque. O. V. la note du vers 976.

Vers 1841. — Les Remaniements entrent ici en de singuliers détails sur la mort de César, qui aurait été assassiné par les ancêtres de Ganelon : En escriture le trove l’on lisant. — Li viés Cesar, qui ot puissance moult grant, — Murtrirent il à lor espiez trenchanz... (Lyon.)

Vers 1842.Charles. O. V. la note du vers 94.

Vers 1845.Ki n’est pas dans le Ms.

Vers 1846.Cataigne et catanie se trouvent également dans le Ms. La forme la plus étymologique est catanie. Lire ici catanie.

Vers 1848.Blecet. O. Pour le cas sujet, il faut blecez. ═ Quit. O. On trouve quid, qui est plus étymologique, aux vers 150, 1590, 1666. ═ Que est très-lisible dans le Ms.

Vers 1849. Le vers est faux. Il faut p.-e. lire : Quels seisante humes, etc.

Vers 1850.Unches. O. V. la note du v. 629. ═ Lire p.-e. catanies.

Vers 1853.Chevaler gentill. O. Au cas sujet, chevaliers gentils.

Vers 1854.Seignors barons. O, ═ Vos. O.

Vers 1856.Meillors. O. V. la note du vers 51.

Vers 1859.A oes. O. Nous avons ajouté le d étymologique.

Vers 1860.Li empereres. O. ═ Vos. O.

Vers 1861.Tere de France, mar futes dous païs : — Hui es sevrée de barons de haut pris. (Lyon.)

Vers 1862.Oi. O. V. la note du vers 1210. ═ Desertet. O. Pour le cas sujet, desertez (?). ═ Le manuscrit porte rubostl.

Vers 1863.Barons. O. ═ Vos. O.

Vers 1864.Vos. O. ═ Pois. O. Puis est plus conforme à la phonétique de notre texte.

Vers 1866. — Lire Olivier. ═ Vos. O.

Vers 1867.Murra. O. De doel morray. (Lyon.)

Vers 1869. — Lire camp. V. la note du vers 555. ═ Repairet. O. Au cas sujet, il faut repairiez. ═ Lire en assonances, à la fin des vers de cette laisse : repairiez, trenchiet, preisiez, vengier, chiens, O. bien, chevaliers, siet, deniers, mustiers, O. pecchiez, espargniez, recumenciet.

Vers 1870.Vassal. O. À cause du cas sujet, vassals.

Vers 1872.Melz. V. la note du vers 1500.

Vers 1873.Iert. O. V. la note du vers 517.

Vers 1874. — Lire chiens. O. V. la note du vers 1500, qui est aussi applicable à ce mot.

Vers 1875.Païens. O. Pour le cas sujet, il faut païen.

Vers 1876.Arcevesque. O. Le sujet singulier demande un s.

Vers 1877.Valor. O. V. la note du vers 30. ═ Chevaler. O. C’est le cas sujet : il faut chevaliers.

Vers 1879.Tels n’est pas dans le Ms. Correction de Mu.

Vers 1881.Monies se prononçait monjes, comme plus loin canonies : canonjes. ═ Dans monachus, l’accent est sur la première voyelle, o, et les deux autres disparaissent. Il reste donc tout au moins, dans la prononciation, monch, monj, et, avec l’e muet, monche ou monje. Pas n’est besoin d’avoir recours, comme M. Brachet, à un type tel que monius. De même pour canonicus, qui, par la disparition des deux dernières voyelles, donne canonc, canong, canonge. ═ Mustiers. O. La forme musters est plus commune dans notre texte. (Vers 1750, 2097, 3730, 3861.) Mais ce mot ne se trouve en assonance que dans les couplets en ier.

Vers 1882.Por. O. V. la note du vers 17. ═ Peccez. O. La forme qui avait passé en usage dans notre texte est pecchez. (Vers 15, 240, 1140, 2365, 3646.) Lire ici pecchiez.

Vers 1883.Rollant. Mu. Pour le cas sujet, il faut Rollanz.

Vers 1884.Francs. O. Il faut Franc pour le s. p. m.

Vers 1886.Quant li honz voit qu’il n’aura garison, Lyon. ═ Avrat. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 1887. — L’e finale du mot bataille est absente dans le Ms. ═ Defension. O.

Vers 1888.Francs. O. Pour le cas sujet, il ne faut pas d’s. ═ Fiers. O. Même remarque. ═ Leuns. O. V. la note du vers 20.

Vers 1891. — Lire bien. V. la note du vers 1500. ═ Bevon. O. Buevon, Lyon.

Vers 1892. — Lire Iert. V. la note du vers 1500.

Vers 1895. — « Yvoré et Guiun, » Lyon. ═ Ivon. O. V. la note du v. 30. ═ D’après Gaufrey (v. 98), Ivon et Ivoire sont fils du roi Othon, qui lui-même est le sixième fils de Doon de Mayence. ═ Ivon et Ivoire sont comptés au nombre des douze Pairs par la Chanson de Roland, Gui de Bourgogne, la Karlamagnus Saga, etc. Ivoire est supprimé de cette liste par la Chronique de Weihenstephan.

Vers 1897.Loign. O. Ce mot ne se rencontre qu’une seule fois sous cette forme. Partout ailleurs (1100, 1784, 1992, 2622), c’est loinz avec le z final correspondant à l’s de plusieurs adverbes, primes, unkes, sempres, alques. Ici, luinz pour l’assonance.

Vers 1900.Avras. Mu. ═ Nos. O.

Vers 1901.Enquoi. O. V. 1194. ═ Savras. Mu. Le Ms. porte très-nettement saveras, qui est plus étymologique. La question de prononciation reste entière. ═ Nom. O. Pour l’assonance, num, qui se trouve aux vers 43, 1188, 2238, 3095, 3144, 3986. Nom ne se trouve qu’une fois dans tout notre texte.

Vers 1902.Baron. O.

Vers 1903.Poign. O. V. la note du vers 415.

Vers 1905.Ert. V. la note du vers 1500.

Vers 1906 et 1907.Nos. O. ═ Lire vengiez.

Vers 1910. — Pour le cas sujet, il faut l’uns. Le Ms. porte l’un. ═ Car. O. V. la note du vers 275. ═ Nos. O. V. la note du vers 17.

Vers 1913.Fuiums. O. V. la note sur les 1res personnes du pluriel, au vers 42. ═ Avant ce couplet, les Remaniements en contiennent un autre qui développe le précédent. Voici le texte de Lyon : Va s’en Marsile, son poing destre a perdu ; — Mout ot le cuer dolant et irascu ; — Encontre terre a gité son escu, — Ganchi la règne de l’auferrant crenu, — Droit ver Espaigne a son chemin tenu. — O lui s’en vont XIII. M. mescréu : — N’i a celui ne li soit meschéu. — Nostre François, li vassal cognéu, — Segont lor mestre, chascons à lor branc nu. — Païen s’en fuient, chascons le poing perdu ; — Dist l’un à l’autre : Li niés Karles a vencu ! (F. 21, r° et v°.)

Vers 1921.Si n’est pas dans le manuscrit, non plus que le premier i de paienime.

Vers 1922.Receverums. Mu. V. la note du vers 38 et celle du vers 42. ═ Le manuscrit porte matyrie. Erreur évidente. Partout ailleurs on trouve martirie.

Vers 1923.Ben. V. la note du vers 1500 ═ Avons. V. la note du vers 42. ═ Vivre. Mu. Le manuscrit porte très-distinctement vivere, qui évidemment se prononçait vivre. Mais il faut précieusement conserver toutes les différences qui existaient entre l’écriture et la prononciation ═ Or sai je bien qu’or est curte ma vie. (Lyon.)

Vers 1924. — Lire Fel. O. Quoique l’on trouve au cas sujet fels (vers 213, 674, 3735, 3829), nous préférons fel, pour demeurer fidèle à la règle posée dans notre note du vers 1. D’après cette règle, les substantifs latins qui n’ont pas d’s au nominatif singulier, ont donné naissance à des noms romans qui offrent la même particularité. Or, suivant la meilleure hypothèse, fel, felon, viennent, comme nous l’avons dit, de felo, felonis. ═ Ki n’est pas dans le manuscrit.

Vers 1926.Vos. O. Erreur manifeste. Partout ailleurs le pronom ou adjectif possessif voz prend un z.

Vers 1928.Mi sire. O. V. la note du vers 636.

Vers 1929.Discipline. V. le Glossaire de F. Michel.

Vers 1930. — Lire Quinze.

Vers 1931.Lesserat. O. Nous avons adopté la notation ai, qui est à beaucoup près la plus fréquente et qui nous est restée. ═ Nos. O. V. la note du vers 17. ═ Beneïsse. O. Le scribe a oublié le t étymologique.

Vers 1932.Quan. O. ═ Lisez cuntredite.

Vers 1933.Neirs. O. Pour le cas sujet, il ne faut pas d’s.

Vers 1937.Recumant. O. Le manuscrit porte recumenz. Ce couplet est en en. La meilleure forme serait recument. Car l’s et le z n’apparaissent pas dans ces 1res pers. de l’ind. présent.

Vers 1938.Oliver. O. V. la note du vers 1500.

Vers 1941.Orgoil. O. V. la note du vers 292. Lire orguill.

Vers 1942.L’un. O. Pour le s. s., il faut l’uns. ═ Empereor. O. Le cas sujet est li emperere.

Vers 1943. — Le manuscrit porte Marganices au lieu de l’Algalifes. Mais tous les Remaniements nous offrent : l’algalifre (Venise IV), Laugalie (Paris), Langalie (Versailles), Lagalie (Lyon). ═ Ceval. O. V. la note du vers 1379.

Vers 1944.Ben. V. la note du vers 1500. ═ A or. O. Le d euphonique est très-souvent employé dans notre manuscrit.

Vers 1948.Col. O. Erreur du scribe.

Vers 1949.Vos. O.

Vers 1950.Ben. V. la note du vers 1500. ═ Nos. O.

Vers 1952. — Lire Oliviers. ═ Ferut. O. Pour le cas sujet, il faut feruz.

Vers 1953.Acer. O. Acers se trouve au cas sujet (vers 1362, 2302, 2313) plus souvent qu’acer. (Vers 1507, 1953.) Lire aciers.

Vers 1954.Marganices. V. la note du vers 1943. ═ Elme. O. V. la note du vers 995. ═ A or. O.

Vers 1955.E flurs e cristaus. O. Mais cristaus a été ajouté postérieurement en interligne. ═ Perres est une correction de Mu.

Vers 1959.Karles. O. V. la note du vers 94.

Vers 1960.Muiler. O. La vraie forme est muiller. (Vers 42, 361, 2576.) ═ Veüd. O. V. la note du vers 2.

Vers 1962.Vaillant à un dener que m’i aies tolut. O. Ce vers nous paraît inintelligible. Nous l’avons modifié d’après le sens évident de la phrase. ═ Lire denier, auquel s’applique la note du vers 1500.

Vers 1965.Oliver. O. V. la note du vers 1500. ═ Naffret. O. Pour le cas sujet, il faut naffrez.

Vers 1966. — Lire vengier et iert, d’après la doctrine énoncée dans la note 1500.

Vers 1967. — Lire ber. O. Remarquer cependant que ber n’est point tout à fait dans le cas de fel. À côté de baro, barus a existé, et, comme nous l’avons dit, toute une déclinaison sur barus : li ber, les bers.

Vers 1969.Poinz. O. V. la note du vers 415. ═ E selles et costez. O. La correction est de Mu., d’après le manuscrit de Versailles.

Vers 1971.A la tere n’est pas dans le manuscrit. Correction de G. et de Mu. ═ L’un mort sur l’autre trabucher e verser. (Lyon.)

Vers 1973.Volt. O. V. la note du vers 40.

Vers 1976.Cumpaign. O. V. la note du vers 1051. ═ Car. O. V. la note du vers 275.

Vers 1977.Dulor. O. V. la note du vers 489. ═ Deseverez. O. Pour le cas sujet, il faut desevret. ═ Desevrez. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 1979.Teint... desculuret e pale. O. Pour le cas sujet, il faut teinz... desculurez et pales.

Vers 1984.Iert. O. V. la note du vers 517 et celle du vers 1500.

Vers 1985.Cun. O. Partout ailleurs, cum.

Vers 1986.Chaiete. O.

Vers 1987.Avrat. Mu.

Vers 1991.Seinet ki li oil. O. Erreur évidente.

Vers 1992.Vedeir. O. Veeir, qui se trouve aux vers 1104 et 1720, est bien plus en rapport avec les formes veeit (videbat), veez (videte et videtis), etc.

Vers 1993.Recoistre. O. ═ Poisset. O. On trouve puisset (vers 2522) et puissez (vers 480), qui sont conformes à notre phonétique.

Vers 1994.At. O. V. la note du vers 2.

Vers 1995.Elme. O. V. la note du vers 996. ═ A or. O. Pour le d euphonique, voir le Glossaire. ═ Gemet. O. Partout ailleurs gemmet, avec les deux m étymologiques.

Vers 1996.Qu’al. O. Pour la mesure, on a rétabli que.

Vers 2000.Cumpain. O. V. la note du vers 1051. ═ Vos. O. ═ Gred. O. V. la note du vers 2.

Vers 2001.Vos. O.

Vers 2003.Olivier. O. V. la note du vers 1500. ═ Vos. O.

Vers 2004.Vos. O. ═ Veied. O. V. la note du vers 2. ═ Damne Deu. O. Pour le cas sujet, il faut Damnes Deus.

Vers 2005.Vos. O. ═ Car. O. V. la note du vers 275.

Vers 2006.Mal n’est pas conforme à l’assonance. Lire peut-être Jo n’en ai de mal rien (Mu., page 134) ; ou, mieux encore : Ne sui mie naffrez.

Vers 2008.L’un. O. Pour le cas sujet, il faut l’uns.

Vers 2009.Desevered. O. V. la note du vers 2. — Desevred. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 2010.Oliver. O. V. la note du vers 1500. ═ Mort. O. Pour le cas sujet, morz. ═ Angoisset. O. Pour l’assonance, anguisset, qui, d’ailleurs, se trouve au vers 3634. (Cf. anguissables.)

Vers 2011.Ansdous les oilz. O. Pour le cas sujet, il faut ambdui li oil.

Vers 2012.A l’ tere. O. Erreur évidente. ═ Sor son escu se gist vers Orient. L.

Vers 2013.Ciel. O. V. les notes des vers 545 et 1500.

Vers 2017.Karlun. O.

Vers 2018.Sur tuz. O. Lyon nous donne la vraie leçon : De sor toz homes son compaignon Rolant.

Vers 2019.Le helme. O. Pour le cas sujet, il faut li helmes.

Vers 2022. — Lire ber. O.

Vers 2023.Plus a été ajouté en marge. ═ Les Remaniements de Paris et de Lyon nous offrent dans cette laisse un incident qui n’était évidemment pas dans le texte primitif. Il s’agit de la communion symbolique d’Olivier qui lui est administrée par Roland : IIII poiz a pris de l’erbe verdoiant. — Li ange Dieu i descendent à tant ; — L’arme de lui enportent en chantant. (Lyon.) Nous avons parlé ailleurs de ce singulier sacrement, que l’on peut rapprocher de ces confessions faites à un laïque, dont nous avons aussi plus d’un exemple dans nos Chansons de geste. C’est la communion eucharistique reçue par les chevaliers sous l’espèce de l’herbe ou de la verdure. À défaut de prêtres, à défaut d’hosties consacrées, les chevaliers se communient avec des feuilles d’arbre, avec des brins d’herbe. Élie de Saint-Gilles rencontre un chevalier mourant. Plein de charité, il s’élance vers lui : Entre ses bras le prist, — Prist une fuelle d’erbe, à la bouce li mist. — Dieu le fait aconoistre et ses peciés gehir. — L’anme part. (B. N. Lav. 80, f° 77.) Dans Raoul de Cambrai, Savari communie Bernier après l’avoir confessé : Trois fuelles d’arbre maintenant li rompi : — Il les receut per corpus Domini. (Éd. Leglay, p. 327.) Et, dans le même poëme, on voit avant la bataille tous les chevaliers de l’armée se donner la communion sous la même espèce : Chascuns frans hon de la pité plora ; — Mains gentishons s’i acumenia — De III. pous d’erbe, qu’autre prestre n’i a. (Ibid. p. 95.) Dans Renaus de Montauban, Richard s’écrie : Car descendons à terre e si nos confesson, — Et des peus de cete herbe nos acomenion. (Éd. Michelant, p. 181, vers 26, 27.) Dans Aliscans, la communion de Vivien est réellement sacramentelle : Guillaume, par un étonnant privilége, a emporté avec lui une hostie consacrée, et c’est avec cette hostie qu’il console et divinise les derniers instants de son neveu. Quant à la communion par le feuillage, il faut la considérer uniquement comme symbolique, et c’est ce que prouvent jusqu’à l’évidence les vers plus haut cités de Raoul de Cambrai : Treis fuelles d’arbre receut per corpus Domini. Bref, on ne se confesse à un laïque qu’à défaut de prêtre ; on ne communie avec des feuilles qu’à défaut d’hostie. De ces deux rites il n’existe aucune trace dans le Roland, dont l’auteur nous paraît théologiquement moins ignorant et plus exact que tous nos autres épiques.

Vers 2024.Mort est sun ami. O. Pour le cas sujet, il faut Morz est sis amis. Bartsch propose, d’après le manuscrit de Venise : Li quens Rollanz, quant mort vit son ami. (Chrestomathie française, 29, 45.)

Vers 2026. — Bartsch ajoute ici un vers emprunté à la version de Venise IV : Ne poet muer non plurt et non sospir. On peut, en effet, l’ajouter au texte critique, mais sous cette forme qui se trouve au vers 2380 :

Ne poet muer n’en plurt e ne sospirt.

Vers 2027.Cumpaign. O. V. la note du vers 1051.

Vers 2030. — Lire p.-e. ies. O.

Vers 2032.Son. Mu. Le manuscrit porte très-distinctement sun. ═ Ceval. O. V. la note du vers 1379.

Vers 2033.Afermet. O. Pour le cas sujet, il faut afermez.

Vers 2034.Chaïr. V. au Glossaire les autres formes de ce mot.

Vers 2035.Ainz que. On ne trouve qu’une fois ainz dans le texte de la Bodléienne. Einz est partout ailleurs la forme employée par le scribe. (Vers 688, 1037, 1690, 1804, 1900, 2939, 3043, 3394.)

Vers 2036.Pasmeisuns. O. Erreur évidente.

Vers 2038.Morz. O. Pour le cas sujet, mort.

Vers 2039.Senz. O. Senz ne se trouve que dans deux vers de la Chanson ; partout ailleurs, c’est seinz. (Vers 511, 1607, 1775, 3579, 3718, 3914.) ═ Lire Gualtier.

Vers 2040. — D’après la théorie des assonances en ier (note du vers 1500), lire plutôt repairiez. ═ Des muntaignes. O. Pour la mesure, il faut de la muntaigne, que Venise VII et Versailles s’accordent d’ailleurs à nous donner.

Vers 2041.Cumbatuz. O. Pour le r. s., cumbatut.

Vers 2044.E n’est pas dans le manuscrit.

Vers 2045.Ies. O. V. la note du vers 648. ═ Jantiz honz, sire, que es-tu devenuz. (Lyon.)

Vers 2047.Gualter. O. Pour le cas sujet, il faut Gualtiers. ═ Marlaguz. Lyon. ═ Dans la Keiser Karl Magnus’s Kronike, Gautier est appelé Volter, et est présenté comme le fils de la sœur de l’Archevêque. « Les chrétiens étaient là tous tués, dit l’auteur danois, excepté Roland, Turpin, Volter et Irot (?). Le vieux Irot dit à Roland : « Secours-moi. Je n’ai jamais eu peur dans aucun combat avant celui-ci. » Roland se retourna, et commençait à combattre quand Volter et Irot furent tués. »

Vers 2048. — Lire viell. O. V. la note du vers 171, en la faisant concorder avec celle du vers 1500.

Vers 2049.Tun drut. O. Il faut, pour le cas sujet, tis druz.

Vers 2050.Percet mun escut. O. Pour la même raison, il faut perciez mis escuz. ═ Pour perciez, voir la note du vers 1500, qui s’applique à ce mot, lequel se trouve uniquement, comme assonance, dans les laisses en ier.

Vers 2051.Desmailet e rumput. O. Le cas sujet exige Desmailez e rumpuz.

Vers 2052. — Ce vers est horriblement mutilé dans le manuscrit. IIot une lance ferut. Encore les mots une et ferut ont-ils été ajoutés en interligne. Mu. a reconstitué la vraie leçon, d’après les textes heureusement interprétés de Venise IV (Par me le cors de lance son feru), de Paris (Par mi le cors sui en VII lieus ferus), de Versailles (Par mi le cors o lances mes cosuz). Mais Mu. n’a pas connu le texte de Lyon, qui est le plus clair : De quatre espiez feruz. ═ Ferut. O. Pour le cas sujet, il faut feruz.

Vers 2053.Chier vaut mieux que cher. V. la note du vers 1500.

Vers 2054.At. O. V. la note du vers 2.

Vers 2055.Poignant. O. Il faut, pour le cas sujet, un z au lieu du t.

Vers 2056. — « Le texte a été ici violemment abrégé. Dans les autres rédactions, Roland, comme on doit s’y attendre, prend des renseignements sur le sort des chevaliers qu’il a confiés à Gautier, et celui-ci raconte alors tout ce qui lui est arrivé. » (Note de Müller.) Nous pensons avec M. Müller que le texte primitif renfermait ici une laisse de plus, que nous allons essayer de restituer d’après le texte de Venise, et aussi d’après ceux de Versailles, de Paris et de Lyon.

« Sire Gualtier, ço dist li quens Rollanz,
« Bataille oüstes od la païene gent.
« Vus suliez estre vassals e cumbatanz :
« Mil chevaliers en menastes vaillanz ;

« Rendez les mei, que bosuign en ai grant. »
Respunt Gualtiers : « N’en verrez un vivant.
« Laissez les ai en cel dulurus camp.
« De Sarrazins nus i truvasmes tanz,
« Turs e Ermines, Canelius e Jaianz,
« Cels de Balise, des meillurs cumbatanz,
« Sur lur chevals arrabiz et curanz !
« Une bataille i feïsmes si grant
« N’i ad païen devers altre s’en vant.
« Seisante milie en i ad morz gisanz.
« Avum perdut iloec trestuz noz Francs ;
« Vengez nus sumes à nos acerins branz.
« De mun osberc en sunt rumput li pan ;
« Plaies ai tantes ès costez e ès flancs
« De tutes parz en salt fors li clers sancs ;
« Trestut le cors m’en vait afebliant :
« Sempres murrai, par le mien esciant.
« Je sui vostre hom e vus tien à guarant.
« Ne me blasmez, si je m’en vai fuianz ;
« Mais or m’aidiez à tut vostre vivant. »
D’ire e de doel en tressuet Rollanz.
De sun blialt a tranchiez les II pans.
Gualtier en bandet les costez e les flans.Aoi.

Les Remaniements de Venise VII, de Paris et de Lyon ont ici deux laisses au lieu d’une. Nous renvoyons à l’édition de M. Müller (p. 139-140) pour les textes de Venise IV et de Versailles ; à celle de M. Michel, pour le texte de Paris. Quant à M. Bartsch, il s’est autorisé (l. I. 30, 31) à intercaler dans son texte le couplet du manuscrit de Venise, sans rien changer au dialecte ; ce qui produit une bigarrure insupportable. Nous donnons ici le texte inédit de Lyon : « Sire Gautier, dist Rollans li menbrez, — Moult est vos cors e plaiez et navrez. — Sire Gautier, grardez (sic) ne me celez, — Comant vos estes de mes homes sevrez. » — E dist Gautier : « Maintenant le saurez. — Tuit sont ocis, jamais ne les verrez. — En la montaigne où je m’en sui alez, — Trovames Turs XXX. M. d’armez. — Mout granz efforz i fu par euz mostrez : — Tant i ferimes ou les branz acerez, — Encor en est li chanz ensanglantez : — Mort sont mi home, n’en est I. eschapez. — E ge meïsmes, de IIII. espiez navrez, — Se je m’en sui venuz et retornez, — Par Dieu vos pri que vos ne m’en blamez. — Je vos di bien, et si est veritez. » — A icest mot se fu Gautiers paumez. — Li cuens Rollans a de pidié plorez ; — De son bliaut a les II. pans copez. — Gautier en bande les flans et les costez. ═ « Sire Gautier, ce dit li cuens Rollans, — Bandé vos ai les costez et les flanz. — Si m’aït Diex, de vos sui mout dolanz, — Que prodonz estes et chevaliers vaillanz. — Mout as esté ardiz et combatanz. — Je vos chargai M. chevalier vaillanz. — Randez-les-moi : li besoinz i est granz. » — « Nes verrez mais, ce dit Gautiers li franz. — Les ai laissié en si doloireux chanz. — Nos i alames par le vostre comant, — De Sarrazins i trovames nos tant, — Soffres e Gaufres, (?) Aragons e Ullanz, — Turs e Hermins, Arrabiz e Persanz, — E Esclavons à toz les Agolanz. — Nos i ferimes à nos acerez branz ; — Li chival furent jusque ès costez en sanz. — Bien le vos di, e en soiez creanz, — N’i a païen qui de ce soit ventanz. — XXI. M. en i a morz gisanz. — Mort sont mi home, s’en ay le cuer dolanz : — Vendu se sont entres les mescréanz. — De mon auber m’ont desrompu les panz, — Si sui plaiez les costez et les flanz ; — Li sanc en est de totes pars coranz. — Je sui vostre honz e sui vostre serjanz. — Ne me blamez se je en sui fuianz. » — Et de duel se trassue Rollanz. (Ff. 25-26.)

Vers 2056. — Venise VII a ici un couplet de plus que le texte de Paris : Rollant a duel : je ne m’en merveil mie, etc.

Vers 2058.Get [et]. Mi. G. Mu. Le manuscrit ne contient visiblement que get. ═ Il porte : .XX.

Vers 2059.Gualter. O. À cause du cas sujet, il faut Gualtiers. ═ Arcevesque. O. Pour la même raison, il faut l’s final. ═ Dans le manuscrit, on lit : V.

Vers 2060. Felun feluns. O. Erreur évidente.

Vers 2061. — Qu’il. O. Correction de G. et de Mu.

Vers 2062. — Lire Fel. O.

Vers 2063.Recreant. O. Pour le cas sujet, il faut recreanz.

Vers 2064.Recumencent nous paraît ici employé dans le sens neutre. (Cf. le vers 3074.) Au lieu de le hu e le cri, d’O., il faut, au cas sujet, li hus e li cris (?).

Vers 2066.Mult n’est pas dans O. Pour le cas sujet, il faut nobles guerrers, au lieu de noble guerrer. O. ═ Lire en assonances, à la fin des vers de ce couplet, guerriers, chevaliers, laissier, millier, aproismier, Gualtier, perciet, chief, desmailiet, destrier, chiet, O.

Vers 2067.Gualter... bon chevaler. O. Pour le cas sujet, Gualtiers bons chevaliers. ═ Le manuscrit porte de Hums. ═ Bien. O. V. la note du vers 1500.

Vers 2068.Arcevesque... essaiet. O. Le cas sujet exige Arcevesques... essaiez.

Vers 2069.Volt. O. V. la note du vers 40.

Vers 2071.Sarrazins. O. Suivant les règles de la déclinaison romane, il ne faut point d’s final. ═ Piet. O. Pied, qu’on trouve aussi souvent (vers 120, 2138, 2400), est plus étymologique.

Vers 2072.Millers. O. Pour le cas sujet il faut millier.

Vers 2073.Men. Appliquer ici la théorie de la note du vers 1500.

Vers 2074.Lor. O.

Vers 2075. — Le manuscrit porte : E wigres e darz e museras e agiez e gieser. Pour la mesure, nous avons dû supprimer le premier mot et le dernier, également inutiles. — Pour ces différents engins, voir la note du vers 994, sur les Armures. ═ Ce sont là, avons-nous dit, différentes espèces de flèches ou javelots. D’après le père Daniel (en son Histoire de la milice française), les materas étaient de gros javelots courts, à bois très-gros, et terminés par une grosse masse ronde de fer ou de plomb (?). Mais faut-il assimiler les materas aux museras ?

Vers 2077. — Lire premiers. V. la note du vers 1500.

Vers 2082.Arcevesque. O. Pour la règle de l’s, il faut arcevesques. ═ Chet. O. Chet se rencontre bien plus souvent dans le texte de la Bodléienne (Chiet, vers 1509, 2082, 3925 ; Chet, vers 981, 1267, 1356, 2220, 2536, 2825, 3720) ; mais ce mot ne se rencontre comme assonance que dans les couplets en ier.

Vers 2085. — Lire ber. O. V. la note du vers 430.

Vers 2086.Curut. O. C’est ici le cas sujet : il faut curuz.

Vers 2087.Vencut. O. Même remarque.

Vers 2088.Bon vassal... vif recreüt. O. À ces quatre mots, pour la même raison, il faut un s. ═ Lire iert. (V. la note du vers 1500).

Vers 2089.Almace. Almace est une des trois épées que le juif Malakin d’Ivin donna pour la rançon de son père Abraham. Les deux autres étaient Durendal et Courtain. (Bibl. de l’Éc. des Chartes, XXV, 101.) ═ L’épée de Turpin est une de celles qui furent essayées sur le perron d’acier du palais de Charlemagne, à Aix. Elle résista à l’épreuve. ═ Dans Renaus de Montauban, elle est volée par Maugis. (Éd. Michelant, p. 306.) ═ Almace est appelée Almuce dans Venise IV ; Aigredure, dans le Remaniement de Paris ; Almire, dans celui de Versailles ; Autemise, dans Renaus de Montauban. ═ Lire Acier.

Vers 2092.Truvat est nécessairement indiqué par le sens, au lieu de troevet.

Vers 2093. — Le manuscrit porte à tort ferut. ═ Nafrez. O. Ce mot redouble presque toujours l’f. (Vers 1623, 1965, 1990, 2078, 2080, 2771, 3452, etc.) On trouve nasfret au vers 2504.

Vers 2094. — Lire chiefs.

Vers 2095-2098. — Le manuscrit d’O. ne porte pas le mot seinz, que nous restituons, comme MM. G. et Mu., d’après les manuscrits de Venise IV et de Paris. ═ Por qui. O. Tout ce passage est omis dans Lyon : le remanieur ne le comprenait plus. ═ Ces vers sont d’une importance réelle, que l’on a peut-être exagérée. Quelques érudits contemporains veulent trouver dans les vers de nos vieux poèmes une précision, une exactitude mathématique. Donc, on a conclu de ces quatre vers qu’un certain Gilles « pourrait bien être l’auteur de la Chanson de Roland ». — Tout d’abord, et d’après le texte d’Oxford lui-même, il ne saurait être ici question du poëte qui composa notre vieille épopée, mais seulement d’une source historique à laquelle serait remonté l’auteur, le véritable auteur de la Chanson : Ço dist la geste e cil ki el camp fut — Li ber seinz Gilie... — Et, en effet, jaloux de conquérir une autorité historique, nos épiques renvoient souvent leurs lecteurs à la « Geste », c’est-à-dire à une Histoire en règle, à une Chronique officielle faite dans quelque couvent célèbre (à Laon, si la chanson est antique ; à Saint-Denis, si elle est plus moderne). Les exemples abondent. ═ Mais pourquoi, nous objectera-t-on, le poëte a-t-il fait choix ici du ber seinz Gilie ? C’est que saint Gilles a été mêlé d’une façon intime à la légende de Charlemagne. — L’époque réelle à laquelle a vécu ce saint, très-populaire en France, a été longtemps l’objet de contestations très-vives entre les savants. Les Bollandistes (tome XLI, p. 296) ont prouvé qu’il avait vécu sous Charles Martel. (Ils placent sa naissance en 640, et sa mort entre 720 et 725.) Mais, au moyen âge, la légende le fit longtemps vivre sous Charlemagne. D’après Adam de Saint-Victor (Prose Promat pia, vox cantoris) ; d’après les Séquences Quantum decet et Sicut passer (Mone, Hymni latini medii œvi, III, 165 et 167) ; d’après la Légende dorée, etc., « l’Empereur n’osait confesser à personne le plus grand de ses crimes (son inceste avec sa sœur Gilain) ; un parchemin miraculeux descendit du ciel, et saint Gilles y vit écrit en toutes lettres le péché de Charles. » Voilà ce que savait sans doute l’auteur de notre poëme. Et c’est à ce miracle qu’il fait peut-être allusion dans ces mots : Por qui Deus fait vertuz. (Saint Gilles, d’ailleurs, d’après tous les monuments liturgiques, était célèbre par ses miracles en faveur des malades et des marins en péril, etc., et la plus ancienne des proses qui lui soient consacrées dit de lui, au xie et xiie s. : Miraculorum coruscans virtutibus, Mone, l. I. 167 ; Adam de Saint-Victor, etc.) J’ajoute qu’ayant été mêlé, dans cet épisode, à l’histoire poétique du grand empereur, il le fut sans doute plus profondément. Le Stricker nous montre à Roncevaux « l’immaculé saint Gilles, qui depuis longtemps vivait solitaire dans une grotte de France ». Un poëme français de la décadence, Hugues Capet (p. 210 de l’édition du marquis de la Grange), nous parle d’un vieillard qui fu en Raincheval où Rolans fu perdu, et qui fit vœu de se faire ermite s’il échappait à cet immense désastre. Mais le document le plus précieux sur cette légende est la Keiser Karl Magnus’s Kronike. (Éd. de 1867, p. 130.) Parlant des prodiges qui annoncèrent la mort de Roland, l’auteur danois y mêle le témoignage de saint Gilles : « Le même jour il arriva un grand miracle chez les Franks. Il se fit aussi obscur que s’il avait été nuit. Le soleil ne donna plus de lumière, et maint homme craignit pour sa vie. Saint Gilles dit que ce miracle arrivait à cause de Roland, parce qu’il devait mourir ce jour-là. » (V. notre Introduction, p. lxiv et ss.) Voilà quels sont les témoignages de la légende au sujet de saint Gilles. De là à le supposer auteur d’une geste écrite, d’un récit de ce combat dans « une charte conservée à Laon », il n’y a pas loin, pour qui connaît les coutumes littéraires du moyen âge. « Il n’est pas étonnant, avons-nous dit ailleurs, qu’on ait mis sur le compte d’un saint aussi populaire une relation apocryphe de la défaite de Roncevaux. » Et il ne faut rien chercher de plus dans les quatre vers qui sont l’objet de cette note. Telle était, telle est encore notre conclusion. ═ Le scribe italien qui a écrit le manuscrit de Venise IV n’a pas compris saint Gilie, et a substitué : Li ber san Guielmo.

Vers 2095. — Lire mustier. V. la note du vers 1500.

Vers 2097. — Lire cartre. (Cf. le vers 1084.)

Vers 2099.Gentement. L’n n’est pas dans le manuscrit.

Vers 2100.Chalt. O. Nous avons préféré chald, qui se trouve au vers 950, et est plus étymologique. Peut-être cald.

Vers 2101.Dulor. O. V. la note du vers 489.

Vers 2102. — Sur le mot temples, voy. la note sur les neutres, au vers 9. ═ Temples étant ici du masc., il faut, au cas sujet, rumpuz, au lieu de rumput. O. ═ Por. O. V. la note du vers 17.

Vers 2103.Volt. O. V. la note du vers 40. ═ P.-e. viendrat.

Vers 2104.Olifan. O. V. la note du vers 1059.

Vers 2106.Nos. O.

Vers 2108.Guares. O. Erreur du scribe. ═ Livrat. Mu.

Vers 2110.Grasles. O. Nous avons adopté la forme graisles, qui est la plus fréquemment employée et est conforme à la phonétique de notre texte. ═ Ost étant du féminin, il faut ceste.

Vers 2114. L’un. O. Pour le cas sujet, l’uns. ═ Karlun. O. Voy. la note du vers 94. ═ Avrum. Mu. ═ Lire Dit. O.

Vers 2115. — Le manuscrit de Paris a reproduit à peu près exactement le couplet de l’ancien texte, avec ses assonances grossières par la dernière voyelle sonore. Le manuscrit de Venise VII, au contraire, a refait toute cette laisse sur une assonance rigoureuse, sur une rime. Nous donnons ici ces deux textes comme exemple frappant de la diversité des procédés à l’usage de nos rajeunisseurs. Les uns refaisaient tout ; les autres faisaient entrer dans leur composition nouvelle quelques fragments de l’ancienne. Voici la version de Paris : Dient païen : « L’Empereres repaire. — De ceuls de France poez oïr les graisles. — Se Karles vient, duel i auronz et perde. — Se Rollans vit, notre guerre est nouvelle. — Perdue avons Espaigne la grant terre » — Lors se rassemblent la pute gent averse. — III.C. des mieudres qui el’champ porent iestre ; — A Rollant font. I. assaut fort e pesme. — Il se deffant com chevaliers honestes, — Et lor decope et les bras et les testes. Et maintenant, voici le texte de Venise VII : Ce dist Marsile : « Li Emperere repaire. — De chaus de France oi maint olifant braire, — Mainte buisine et soner et retraire. — Français retornent, cele gent de put aire. — Se Karle i vient, nostre ert la perte maire, — Perdu arons tote Espagne et Baudaire, — Et Saragosse que donai en doaire — A ma moillier qui tant est debonaire. — Veez là Rollant : bien voi à son viaire. — Jà n’ert vencuz ; tels hom n’ensi de maire. — Car l’alsallons ; puis aurons meins à faire, — Se plus i somes ; je l’vos di sanz contraire, — Ne fu tel perte puis le jugement Daire. » La comparaison entre ces deux textes est plus que curieuse : elle caractérise deux époques de notre histoire littéraire. Il convient d’ailleurs de remarquer que, dans le texte de Paris, le rajeunisseur avait d’abord traduit le couplet clviii de la version primitive par un couplet moderne, assonancé en an. Pourquoi a-t-il jugé bon de reproduire ensuite la laisse du texte original ? C’est ce qu’il serait difficile d’expliquer autrement que par sa négligence.

Vers 2116.Ces. O. Venise donne cil, et Paris ceuls. Cf. le v. 2132. ═ Oent. O. Mu. a restitué odum, d’après Venise IV.

Vers 2117.Avrat. Mu. Lire averat. O.

Vers 2118.Novelet. O. La forme la plus conforme à la phonétique de notre poëme est nuvelet. Nuveles, d’ailleurs, se trouve plus fréquemment employé que noveles. (Vers 55, 665, 810, 1257, 1699, 3496.)

Vers 2120.Asemble. O. Erreur évidente.

Vers 2121.Meillors. O. V. la note du vers 51.

Vers 2125.Fiers e maneviz. O. C’est ici le cas régime ; il faut fier e manevi ou manevit. V. le Glossaire, à ce dernier mot.

Vers 2126.Vif. O. Pour le cas sujet, il faut vifs.

Vers 2127.Veillantif. C’est dans la Chanson d’Aspremont (nous en possédons des manuscrits du comm. du xiiie s.) que nous assistons à la conquête par Roland, encore enfant, de l’épée Durendal et du cheval Veillantif. (B. N. Lavall. 123, f° 41, v°, — 43 r°.) Il les conquiert l’une et l’autre sur le jeune Eaumont, fils du roi païen Agolant. La scène de ces exploits est la Calabre.

Vers 2128.Bien. O. V. la note du vers 1500.

Vers 2130.Enseml’od lui arcevesques. O. Deux erreurs évidentes. ═ Turpin. O. Pour le cas sujet, il faut Turpins.

Vers 2131.L’un. O. Même remarque.

Vers 2132.Avuns. O. V. la note du vers 42, sur les premières personnes du pluriel.

Vers 2134.Orguillos. O. V. la note du vers 292.

Vers 2136.Chevaler. V. la note du vers 1500. ═ Se il. Mu. ═ Bon vassal. O. Pour le cas sujet, il faut bons vassals.

Vers 2137.Li arcevesque. O. Faute évidente, puisqu’il s’agit ici du cas régime. Nous avons suppléé dunc.

Vers 2138.Ceval. O. V. la note de vers 1379.

Vers 2140.Averuns. O. V. la note du vers 42. ═ Avruns. Mu. ═ Bien. O. V. la note du vers 1500.

Vers 2141.Car. O. Cf. le vers 3606.

Vers 2142.Encui. O. V. la note du vers 1210. ═ Rendruns. O. V. la note du vers 42.

Vers 2143.Les colps. O. Pour le cas sujet, il faut li colp. ═ Mielz. O. V. la note du vers 1500. ═ Cels. O. La déclinaison de cel exige cil au sujet pluriel. V. le Glossaire.

Vers 2144.Arcevesque. O. Pour le cas sujet, il faut un s. ═ Lire fel. O.

Vers 2145.Ben. V. la note du vers 1500.

Vers 2146.Nez. O. Pour le cas sujet, il faut net. ═ Le manuscrit porte Païen dient.

Vers 2147.Pes [mes]. Mi., G. et Mu. ont restitué les trois dernières lettres.

Vers 2149. — Lire plutôt ber.

Vers 2151.Grant. O. Pour le sujet singulier, il faut granz.

Vers 2153.Ert. V. la note du vers 1500. ═ Vencut. O. Pour la même raison, vencuz.

Vers 2154.Lançuns. O. V. la note du vers 42 sur les premières pers. du plur. ═ Laissums. O.

Vers 2155, 2156. — V. notre note du vers 994, sur les armures.

Vers 2157.Le escut. O.

Vers 2162.Laisent. O. V. la note du vers 265.

Vers 2164.Irez. O. Le cas sujet exige un t. ═ Lire, en assonances, à la fin des vers de cette laisse : Iriet, espleitier, enchalciez, destrier, aidier, chief, legier, detrenchiet, enbraciet, culchiet, chiers, laissier, entercier, enrengier, repairiez, miens.

Vers 2165.Ten [dent]. Les quatre dernières lettres sont ajoutées en interligne.

Vers 2166.Encalcer. O. L’r final est une erreur évidente. — La forme enchalcez est plus fréquemment adoptée dans notre texte. (Enchalcent, vers 2462 ; ad enchalcet, vers 2785, 2796 ; enchalz, vers 2446, 3635.)

Vers 2168.Piet. O. La forme la plus usitée et la plus étymologique est pied.

Vers 2170.Elme. O. V. la note du vers 996.

Vers 2172.Blialt. C’est, dans notre Roland, le vêtement de dessous. V. notre note du vers 994, sur les armures.

Vers 2175.At. O. V. la note du vers 2.

Vers 2177.Car. O. V. la note du vers 275. ═ Lire Dunez. O., au lieu de dunes. ═ Cunget. O. Notre manuscrit nous offre deux formes de ce mot : cungied (vers 337), et cunget (vers 2177 et 2764). La première est seule conforme à la théorie des assonances en ier. (V. la note du vers 1500.)

Vers 2178.Tanz. O. Erreur évidente. Suivant que l’on construit la phrase, le mot cumpaignuns peut passer ici pour régime ou sujet. Si l’on admet le sujet, il faut lire cumpaignun.

Vers 2179.Morz. O. Pour le sujet pluriel, il faut mort. ═ Devuns. O. V. la note du vers 42. ═ Laiser. V. la note du vers 265.

Vers 2180.Voell. O. V. la note du vers 40. Voeill se rencontre onze fois dans notre texte. (Vers 309, 492, 522, 651, 1027, 1091, 1701, 3283, 3593, 3907, 3909.) Voell, une seule fois, ici ; et voel, une seule fois aussi. (V. 3836.) ═ Lire entercier. O. Mi. G. Mu. Entercier signifie reconnaître. Lire dans notre traduction : « Je vais aller chercher et reconnaître tous leurs corps. »

Vers 2181.Vos. O.

Vers 2182.Arcevesque. O. Pour le cas sujet, il faut un s final.

Vers 2183.Camp. O. Même remarque. ═ E li n’est pas dans le Ms. ═ Mien. O. V. la note du vers 149 et celle du vers 1500.

Vers 2186.Gerin, Gerer. V. la note du vers 107. ═ Lire Gerier.

Vers 2187.Berenger. O. V. la note du v. 795, et lire Berengier. ═ Atum. O. D’après le v. 795, il faut Otun. V. cette note. ═ Ajouter après ce vers les deux suivants, d’après Venise IV, Paris. Versailles, etc.

Iluec truvat Ivorie et Ivun,
Et si truvat Engelier le Guascuin.

Vers 2188.Anseis e Sansun. V. la note du vers 105.

Vers 2189.Gerard de Russillun. V. la note du vers 797. ═ Lyon donne une autre énumération : Si trove mort et Morel et Guion. — Girat i truve, Garin son compagnon, — Et si trova Anseïs de Dijon. — Puis a trové Angelier le Gascon, — Ensanble Otun Girat de Rossillon. ═ Lire viell.

Vers 2190.Par uns e uns. O. ═ Le barun. O.

Vers 2194.Lievet. Pour le cas sujet, il faut levet. O. L’i ne s’est glissé qu’une fois dans ce mot. Partout ailleurs on lit levet. (Vers 163, 264, 409, 669, 708, 853, 1520, 1748, 2848 ; levet sa main, 3098, 3633.) ═ Beïçun. O. ═ Tut en plorant lor fit benoïçon, Lyon.

Vers 2197.Sentes. O. Partout ailleurs on trouve seint, seintes.

Vers 2198.Mort. O. V. la note du vers 611.

Vers 2200. — Lire en assonances, à la fin des vers de cette laisse : Recercier, Olivier, enbraciet, culchiet, seigniet, pitiez, Olivier, Renier, Runiers (ou Riviers), desmailier, cunseillier, chevalier.

Vers 2201. — Avant ce vers, Bartsch en ajoute un autre tiré de Venise IV : De soz un pin e folut et ramer. Nous l’ajouterons aussi, mais en nous servant du Ms. de Paris :

De suz un pin, de lez un eglentier...

Vers 2202.Encontre sun piz. O. Cuntre. G. Mu. — Encuntre rompt la mesure ; cuntre est justifié par le Ms. de Paris : Contre son pis le prent à embraier.

Vers 2203.Arcevesques. O. Erreur évidente. ═ Vent. O. Nous avons adopté vient, qui est plus fréquemment usité (v. 793, 2055, 2117), comme tient au lieu de tent. D’ailleurs l’assonance l’exige.

Vers 2205.Arcevesque. O. Il faut l’s final pour le cas sujet. ═ Asols. O. Pour le cas régime, il faut asolt (absolutum).

Vers 2206.Pitet. O. Pour le cas sujet, il faut pitiez.

Vers 2207.Bels. O. V. notre note sur les vocatifs (au vers 15).

Vers 2208.Vos. O. V. la note du vers 17. ═ Bon n’est pas dans le Ms. ; mais Versailles, Paris, Lyon et Venise VII nous le donnent. ═ Le comte Renier de Gennes joue un rôle très-important dans le Roman de Girars de Viane. Il est fils de Garin de Montglane, frère de Girart de Vienne, de Mille de Pouille et d’Hernaut de Beaulande. Après avoir soulagé la misère de son vieux père, il part avec Girart et arrive, en quête d’aventures, à la cour de Charlemagne. (Éd. P. Tarbé, pp. 1-12.) Il ne s’y fait d’abord connaître que par ses brutalités, et force ainsi l’Empereur à le prendre à son service. (Ibid., pp. 11-20.) Alors il fait oublier sa grossièreté et son orgueil, en se rendant véritablement utile au roi de France et en délivrant les environs de Paris des brigands qui les infestaient. Mais sa nature violente prend bientôt le dessus, et il réclame à Charles la récompense de tant de services. (Ibid., pp. 20-30.) Le roi de Saint-Denis s’empresse de se débarrasser de ce dangereux ami. Il l’envoie à Gennes épouser la fille du feu duc. (Ibid., pp. 30-32.) Renier part, épouse la dame et fortifie sa ville : car il ne rêve que de guerre. (Ibid., pp. 32-33.) Il a bientôt deux beaux enfants : l’un est Olivier, l’autre est Aude. C’est durant le siége de Vienne par Charlemagne, que le premier révèlera son courage, et la seconde sa beauté. D’ailleurs les fils de Garin chargent de leur querelle le seul Olivier, qui combat plusieurs jours contre le champion de l’Empereur, contre Roland. C’est alors que Roland se prend pour Olivier d’une amitié que rien ne pourra plus éteindre ; c’est alors aussi qu’il aime la belle Aude et se fiance avec elle. (Girars de Viane, l. I, pp. 53 et ss.) ═ Un Roman spécial a été consacré à Renier de Gennes : par malheur, il ne nous en reste qu’une version en prose. (Arsenal, 226, f° 34, r°, et suiv.) On y assiste à l’arrivée de Renier dans la ville de Gennes, à son combat avec le Sarrazin Sorbrin et à son mariage avec la belle Olive, qui devint la mère d’Olivier et d’Aude... (Cf. également le début de Fierabras.)

Vers 2209.Ki tint la marche de l’ val de Runers. O. Mu. a substitué : de Genes de sur mer, d’après le texte de Venise IV : Chi tint la marche de Çenevra sor la mer. Mais desur mer ne peut convenir dans un couplet en ier. Lire plutôt avec Génin : Dusqu’à l’ val de Runiers (?) ou peut-être de Riviers. — Lyon ajoute ici assez platement : Ay ! Bele Aude, or m’estuet esloignier. — De vostre amor n’aurai mès recovrier.

Vers 2210.E pur escuz pecier. O. Peceier est la vraie forme. (V. 97, 3584.)

Vers 2211.Pur orguillos veintre e esmaier. O. Nous n’avons pas fait entrer dans notre texte ce vers, que le scribe a sans doute intercalé à tort, en le confondant avec le vers 2212. ═ Venise, après le vers : Por aste francer e por scu peçoier, nous donne celui-ci : E pur osberg rompre e desmaier, que nous avons rétabli dans notre texte, en le conformant aux lois de notre dialecte. Le texte de Paris donne la même variante.

Vers 2212.Conseiller. Mu. Le Ms. porte bien cunseiller.

Vers 2213.Glutun. O. Erreur évidente.

Vers 2214.Ad meillor. O. Lyon et Versailles donne ot. Venise IV : Ne fu. Lire plutôt out. — Pour meillor, v. la note du vers 51.

Vers 2217.Desculurer. O. Erreur évidente.

Vers 2220. — Lire u au lieu de o et chiet. ═ Pasmet. O. Le cas sujet exige pasmez.

Vers 2224.Olifan. O. V. la note du vers 1059.

Vers 2225.Un ewe. O. Erreur évidente.

Vers 2226.Volt. O. V. la note du vers 40.

Vers 2227. — Avant ce vers, Bartsch intercale, d’après Venise IV, le vers suivant qui nous paraît nécessaire à l’action :

Tant s’esforçat qu’il se mist en estant.

Cancelant. O. Pour le cas sujet, il faut cancelanz.

Vers 2228.Fieble. O. Il faut un s, à cause du cas sujet.

Vers 2230.Qu’om. Mu.

Vers 2231.Chaeit. O. Le cas sujet exige chaeiz.

Vers 2231.Morz. O. V. la note du vers 611. ═ Li. O. Il faut le à cause du régime direct. ═ Anguissant. O. Il faut un z final, à cause du cas sujet. (V. la note du vers 611.) Anguissanz, O. s’explique par les formes anguissent (v. 3634), anguisables (v. 3444, 280, 3126).

Vers 2233.Pasmeisuns. O.

Vers 2238.Arcevesque. O. Pour le cas sujet, arcevesques.

Vers 2240. — Lire ciel. O. V. la note du vers 545. ═ Amsdous. O. La forme la meilleure est ambesdous. (V. 255, 2015.) Et ici, à cause de la mesure, ambsdous. (V. 1711.) ═ Juinz. O. Il faut soit juintes, que ne comporte pas l’assonance, soit juint au neutre.

Vers 2242.Turpin le guerreier. O. Pour le cas sujet, il faut Turpins li guerreiers. ═ Charlun. O. V. la note du vers 94.

Vers 2243.Sermons. O. V. la note du vers 30.

Vers 2244.Campiuns. O. V. la note du vers 1.

Vers 2245.Li otreit la sue sainte. O. La sue a été, bien à tort, ajouté en interligne.

Vers 2246. — Ici se trouve, dans le manuscrit de Venise, une laisse qui appartient évidemment au texte primitif, et que nous allons ramener au dialecte de notre Chanson :

Quant Rollanz veit que l’Arcevesques est morz,
Seinz Olivier unc mais n’out si grant doel,
E dist un mot ki detrenchet le coer :
« Chevalchiez, reis, tant cume vus puez.
« En Rencesvals damage i ad des noz :
« Li reis Marsilies i ad perdut ses oz ;
« Cuntre un des noz ad bien quarante morz. »

Le quatrième vers, d’après Venise plus servilement suivi, serait : Carles de France chevalchet cume il poet. Mais le texte de Paris dit clairement : Chevauchiez, rois, qu’alez vos delaiant ?L’arvesque. O. Erreur évidente.

Vers 2250.Cruisiedes. O. V. notre note sur les participes passés au vers 703. ═ Mains n’est pas dans le manuscrit. Restitué d’après Venise et Versailles.

Vers 2252. — Lire chevalier.

Vers 2254. — Lire plutôt iert et volentiers. ═ Hume. O. V. notre note sur la déclinaison de hom, au vers 20.

Vers 2255.Hom tel. O. Erreur évidente. ═ Tel prophete. O. Pour le cas sujet, il faut tels prophete ou prophetes.

Vers 2257.Doel ne n’est pas dans le manuscrit. Excellente restitution de Mu., d’après Venise IV.

Vers 2260.Fors li ist. Mu.

Vers 2261.Priet Deu qu’es apelt. O.

Vers 2262.Pois. O. V. la note du vers 656.

Vers 2263.Olifan. O. V. la note du vers 1059.

Vers 2265.D’un arcbaleste ne poet traire un quarrel. O. Ce vers corrompu a induit en erreur tous les traducteurs. Les autres manuscrits nous viennent en aide : Plu c’arballeste non poit trair un carelle (Venise IV) ; Plus qu’arbalestre ne traist quarrel tranchant (Paris) ; Pluis qu’arbaleste ne vait quarrel jetant (Lyon). Le sens n’est donc pas douteux : il s’agit de la distance « du jet d’une arbalète ». Le fragment néerlandais de Looz, publié par M. Bormans, confirme cette leçon d’une façon décisive. ═ Le manuscrit d’Oxford porte très-clairement : arcbaleste. Pourquoi Mi., G. et Mu. ont-ils écrit arbaleste ?

Vers 2267.De suz un arbre bele. O. Au vers 2874, Charlemagne trouve son neveu mort « de suz dous arbres ». La correction de M. Müller est justifiée d’ailleurs par Venise IV : Desuç dous arbes belle ; Versailles : deus pins floris, et Lyon, que l’éditeur allemand ne cite jamais : Illucques sont .II. arbre aut et grant.

Vers 2268.Faite. O. Erreur évidente.

Vers 2269.Là est. Mu. La leçon du manuscrit si est est bonne et ne mérite pas d’être changée. ═ Caeit. O. Pour le cas sujet, il faut un z au lieu du t final. Le ch a pénétré définitivement dans ce mot. (V. chéent, vers 1981, 3574, 3881 ; cheded, vers 769 ; cheet, vers 1064 ; chet, vers 981, 1356, 2220, 2536, 2825, 3720, 1267 ; est chaeit, vers 2231 ; chaiete, vers 1986 ; chaïr, vers 2034.)

Vers 2270.Là, s’est. O. Si s’est. Mu. Le manuscrit est acceptable. ═ Mort. O. V. la note du vers 611.

Vers 2271. — Le deuxième sunt n’est pas dans le manuscrit. ═ Arbre, d’après les vers 2267 et 3953, étant évidemment masculin, il faut li arbre au lieu de les arbres. (V. la note du vers 20.)

Vers 2279.Orgoill. O. V. la note du vers 292.

Vers 2281.Vencut. O. Pour le cas sujet masculin, il faut vencuz.

Vers 2283. — Avant ce vers, Bartsch intercale le suivant qui se trouve dans le manuscrit de Venise et que nous proposons également d’intercaler, mais en le ramenant la langue de notre manuscrit :

Prist l’en sun puign, Rollant tirat sa barbe...

Cette addition est justifiée par le texte de Paris, qui consacre un assez long développement à cet épisode. Le Sarrazin notamment y dit à Roland : Je vos trairai les grenons de la barbe. Et en effet : Par la barbe prinst Rollant le très saige.

Vers 2285.Uvrit. Mu.

Vers 2286. — Lire mien et ies. O. V. la note du vers 648.

Vers 2287.Olifan. O V. la note du vers 1059. ═ Qu’unkes. Mu. ═ Nous avons laissé volt (au lieu de voelt) à cause de l’assonance. En général, nous avons partout respecté l’assonance et avons fait céder, devant ce principe, le principe même de l’unité orthographique.

Vers 2288.Elme. O. V. la note du vers 996. ═ Gemmet. O. Pour le s. s. m., il faut gemmez. ═ A or. O. Nous avons adopté ici le d euphonique si fréquemment employé par notre scribe.

Vers 2289. — Lire acier.

Vers 2290. — Lire chief. ═ Amsdous. O. V. la note du vers 2240.

Vers 2291. — Le Ms. d’O. écrit ici jus, et au v. 2296, juz. Lire partout jus.

Vers 2292.Culvert païen, cum fus unkes si os. O. Pour la mesure, G. et Mu. ont dû, d’après Venise IV, supprimer les deux mots païen et unkes. — Oultre culvert, t’arme soit hui dampnée. Lyon.

Vers 2294.Hume. O. V. la note du vers 20. ═ Por. O.

Vers 2295. — Le trait de ce Sarrazin qui veut s’emparer de l’épée de Roland a donné lieu, dans le Ruolandes Liet, à un épisode calqué sur celui du texte d’Oxford. Dans un manuscrit du poëme allemand, qui remonte à la seconde moitié du xiie siècle, on trouve un certain nombre de miniatures grossières que W. Grimm a fait reproduire au trait et dont il a enrichi son édition. Nous avons nous-même fait graver deux de ces miniatures, et notamment celle qui se rapporte aux deux strophes clxxii et clxxiii. Roland y est représenté au moment où il frappe le païen de son « olifant ». Rien n’est moins artistique. Mais l’archéologue ne dédaignera pas ces dessins naïfs, qui sont, tout au moins, précieux pour l’histoire du costume et de l’armure. On trouvera un peu plus loin (au v. 2452) la reproduction de l’autre miniature, laquelle représente saint Gabriel apparaissant à Charlemagne. ═ Nous avons déjà parlé du Ruolandes Liet dans notre Introduction, et avons particulièrement insisté sur le caractère ecclésiastique de cette œuvre. Mais nous n’en avons cité qu’un fragment insuffisant. Nous devons à l’obligeance de M. Gaston Paris la traduction de deux autres épisodes du poëme allemand, qui correspondent, le premier aux vers 1124 et ss. ; le second aux vers 1325 et ss. de notre Chanson française. Nous les plaçons ici sous les yeux de notre lecteur, qui se convaincra par là combien l’œuvre du curé Conrad offre une physionomie plus religieuse, plus cléricale que notre Roland. Telle est, du moins, la conclusion que l’on tirera, suivant nous, de la lecture des deux fragments suivants.

I. Quand les héros apprirent — que les païens étaient en nombre, ils demandèrent à leur prêtre — de se préparer. — Ils allèrent à leur « service », — reçurent le corps de Dieu, — se prosternèrent, priant pour leurs péchés, — jetèrent des cris au ciel ; — bien plus d’une fois — ils conjurèrent Dieu, par les blessures — avec lesquelles il racheta les siens, — de les soutenir, — de leur pardonner leurs péchés — et d’être lui-même leur témoin. — Ils se garantirent par la confession ; — ils se préparèrent à la mort. — Et pourtant c’étaient de bons vassaux, — disposés au martyre — pour le salut de leur âme. — C’étaient vraiment des guerriers de Dieu. — Ils ne songeaient pas à s’enfuir ; — mais ils désiraient reconquérir notre ancien héritage ; — et tel était le but des efforts de ces héros. — Oui, c’étaient de nobles seigneurs, — d’une vie chrétienne. — Ils n’avaient tous qu’un seul courage ; — leur cœur était dirigé vers Dieu ; — ils avaient de la retenue et de la honte, — de la chasteté et de l’obéissance, — de la patience et de l’amour ; — ils brûlaient véritablement en dedans — d’amour pour la douceur de Dieu. — Il faut qu’ils nous aident — à oublier la misère de cette vie, — maintenant qu’ils possèdent le royaume céleste.

Quand les héros de Dieu, — par des psaumes, par des prières, — par la confession, par des actes de foi, — avec leurs yeux en pleurs, — en grande humilité, — et par des bontés de toute sorte, — se furent joints à Dieu, — quand ils eurent nourri leurs âmes — du pain sacré — et du sang divin — pour la vie éternelle, — alors les héros s’armèrent ; — alors ils louèrent Dieu, — Ils étaient tous ensemble joyeux, — comme ceux qui sont à des noces. — Ils s’appelaient tous enfants de Dieu ; ils méprisaient le monde ; — ils offraient le sacrifice pur — en prenant sur eux la croix. — Ils s’avançaient rapidement vers la mort, — ils achetaient le royaume de Dieu. — Ils ne voulaient pas se faire défaut l’un à l’autre : — ce qui semblait bon à l’un, — c’était le sentiment de tous. — David psalmista — a écrit d’eux en cet endroit : — « Combien Dieu mon Seigneur les récompense, — ceux qui sont fraternels avec les autres ; — il leur donne lui-même sa bénédiction, — et ils vivront toujours joyeux. » — Une confiance et un amour, — une foi et une espérance, — une fidélité était en eux tous ; — aucun d’eux ne faisait défaut à l’autre ; — la même vérité était en eux tous, — et c’est de quoi se réjouit la chrétienté tout entière. (Ruolandes Liet, édit. W. Grimm, pp. 120-123. ═ À ce morceau se rapporte la min. n° 15, ou la Communion.)


II. Alors arriva le roi Cursabile, — monté sur son cheval, — sous un heaume brillant. — Douze mille de ses héros — chevauchaient après leur seigneur ; — ils brillaient tous comme les étoiles, — d’or et de pierreries : — c’étaient de hardis païens. — Le roi était noblement armé ; — il s’élança loin de sa troupe, — sur le champ raboteux ; — il n’attendit guère, — avant de trouver Turpin. — Alors il cria, au-dessus du bord de son écu : — « Es-tu ici, Turpin ? — Tu dois être bien sûr — que, si l’on me donnait ton poids d’or, — je ne le prendrais pas pour ne pas t’avoir vu. — Tu m’as causé beaucoup de douleurs : — où pourrais-tu sur cette terre — jamais mieux mourir ? — Je suis un roi très-puissant. — Maintenant, guerrier, pousse ta lance contre moi. — Oui, je suis un des plus riches rois — que le soleil ait jamais éclairés. — J’emporterai aujourd’hui ta tête — pour plaire à Mahomet et pour honorer ma race, — afin qu’on chante toujours ma louange. »

Alors dit l’évêque Turpin : — « Le saint Christ sera l’arbitre, — Celui qui est mon Sauveur, — dont tu es l’ennemi — et dont je suis le serviteur. — Un autre homme aura ton royaume ; — ton écu est bien mince ; — bien faible est ta brogne ; — ton heaume gemmé, si brillant, — ne pourra aujourd’hui te servir à rien ; — la mort est bien près de toi — et les Diables t’attendent là-bas. » — Il poussa le cheval des éperons, — il perça Cursabile à travers l’écu et l’arçon, — droit à travers le corps ; — il retira la lance avec force, — il le frappa sur la coiffe du heaume, — et la lui brisa en morceaux : — Cursabile tomba mort, — et les chrétiens crièrent : Monsoy ! Monsoy !

Turpin et les siens — s’avancèrent courroucés — vers la troupe épaisse ; — ils rendirent blême — plus d’un homme hardi. — Le feu jaillissait de l’acier ; — là tombaient sans cesse — les morts sur les blessés ; personne ne peut vous dire — quelle détresse il y eut là... (Il doit y avoir ici une lacune.)... Le marquis Waldram — frappe le païen ; — si bien qu’il jette au loin son gonfanon ; — il tombe mort sous son cheval. — Les païens sont forcés de plier ; — les vrais champions de Dieu — leur laissent peu de repos : — au delà de trois lieues — on entendait leurs cris de détresse. — Ils brisaient les heaumes, — ils perçaient les hauberts. — La forte chaleur les fatiguait : — ils étaient comme dans une fournaise, — tant au dehors qu’au dedans. — Les chrétiens combattaient selon leur désir.

Les païens n’osaient pas fuir ; — en grand nombre ils tombèrent morts ; — ils se firent périr eux-mêmes. — Le Diable a gagné en eux — aussi bien le corps que l’âme. — Alors le Seigneur céleste voulut — reposer un peu les siens : — il descendit sur les chrétiens — une rosée céleste, — une fraîcheur sur leurs yeux. — Cela eut lieu à l’heure de none. — Leurs corps à tous se rajeunirent ; — ils devinrent forts et fermes. — Quand ils virent cette consolation céleste, — ils crièrent : Monsoy ! Monsoy ! — Et ils s’approchèrent de plus près. — Là il y eut un grand bruit de heaumes, — et grande fut la chute des païens. — Ni écu ni maille — ne leur protégea le corps — mieux que l’éponge : — Les chrétiens abattaient cheval et cavalier — avec leurs lances acérées. (Ruolandes Liet, éd. Grimm., pp. 154-157. À ce miracle se rapporte la min. n° 20.)


Vers 2296.Juz. O. Lire jus, qui vient de jusum.

Vers 2300. — Avant ce vers, M. Bartsch a restitué avec raison le vers qui suit, d’après Venise IV :

Tint Durendal s’espée tute nue.

Perre byse. O. La correction est de G. et de Mu., d’après Venise IV.

Vers 2302. — Lire plutôt aciers. ═ Freint n’esgruignet. O. Correction de Mu. — Lire p.-e. esgruniet.

Vers 2303.Sancte Marie. M. G. Mu. Sancte nous paraît une mauvaise lecture, et il faut évidemment seinte, qui est partout employé dans notre texte. Le scribe, qui était sans doute habitué à transcrire aussi des textes latins, s’est servi d’une abréviation latine dont il a francisé la dernière lettre : Sce.

Vers 2305.N’i ei. O. Mauvaise leçon. ═ Vos. O. V. la note du vers 17.

Vers 2309.Vos. O. ═ Hume. V. la note du vers 20. ═ S’en n’est pas dans le manuscrit. Correction de Mu.

Vers 2310.Bon vassal. O. Pour le cas sujet, il faut l’s final. ═ Vos. O. V. la note du vers 17.

Vers 2311. — Lire plutôt iert. ═ Tel. O. Le cas sujet exige tels.

Vers 2312.Sardonie. O. Sardenie est une excellente correction de Bartsch. L’assonance la réclamait absolument. Venise IV, d’ailleurs, donne Sardegne et Paris Sartaingne.

Vers 2313.Esgrunie. O. Esgraniet est une correction de M. Bartsch, aussi nécessaire que la précédente. Le manuscrit de Venise IV donne graine, et celui de Paris, degraingne. ═ Lire aciers.

Vers 2314. — Dans la Keiser Karl Magnus’s Kronike, il faut noter des variantes très-importantes : « Tu es une bonne épée, Durendal, et j’ai conquis bien des pays avec toi ! Dieu fasse que le comte de Cantuaria te possède : car il est un noble guerrier et chevalier. Voici les pays que j’ai conquis avec toi, dont l’Empereur est le maître, et qui sont : Angleterre, Allemagne, Poitou, Bretagne, Provence, Aquitaine, Toscane, Lombardie, Hibernie, Écosse, et ce serait dommage qu’un homme de rien te possédât. »

Vers 2316.Cum es e bele e clere. O. D’après Venise IV et pour la mesure, il a fallu supprimer e bele.

Vers 2318. — Voy. notre notice sur Durendal. (Vers 926.) ═ Dans le manuscrit de Lyon, cet épisode est omis.

Vers 2319.Agle. O.

Vers 2320. — Le manuscrit donne cataignie. Cf. : catanie (vers 3709), cataigne (vers 1845), cataignes (vers 1850, 2912, 3085). Lire ici catanie, qui est la forme la plus étymologique. ═ Si l’on veut voir jusqu’où allait parfois l’inintelligence des Remanieurs, il faut lire ce vers dans le texte de Paris : Qu’il la donnast au prince de Chastaigne (!!).

Vers 2322. — Cette énumération des conquêtes de Roland nous permet de supposer (mais sans certitude) que nous avons perdu un certain nombre de nos Chansons de geste. En effet, nous n’avons aucun poëme qui se rapporte de près ou de loin à la conquête de l’Anjou, de la Bretagne, du Poitou, du Maine, de la Normandie, de la Provence, de l’Aquitaine, de la Flandre, de la Bavière, de la Bourgogne, de l’Islande, de l’Écosse, du pays de Galles, de l’Angleterre. Tout au plus voyons-nous, dans le Voyage, Roland visiter Constantinople. Dans Aspremont, il aide Charles à conquérir la Pouille, et traverse la Romagne et la Lombardie soumises. Dans la Chanson des Saisnes, il est mort. D’ailleurs il faut faire la part de la poésie, et croire qu’il y a beaucoup plus d’imagination et de fantaisie que de légende et de tradition dans cette liste de victoires et conquêtes. ═ Il est inutile d’ajouter que chaque manuscrit donne ici une énumération différente. Paris : J’en ai conquis Anjou et Alemaingne ; — J’en ai conquis et Poitou et Bretaingne, — Puille et Calabre et la terre d’Espaingne. — S’en ai conquise et Hungrie et Poulaingne, — Constantinnoble qui siet en son domaigne, — Et Monbrinne (?) qui siet en la montaigne. — Et Berlande prins-je et ma compaingne, — Et Engleterre et maint païs estraingne. Lyon : J’en ai conquis Poitou et Alamaigne, — Puelle et Calabre et la terre Romaine. — S’en ai conquis Ongrie et Aquitaine, — Constantinnoble et la terre d’Espaigne. — Je en pris Borge qui siet sur la montaigne, — Et Engleterre... ═ Au vers 2322, le manuscrit d’Oxford porte Namon, leçon évidemment fautive pour Anjou.

Vers 2324.Normendie la franche. Cet éloge donné à la Normandie, tandis que l’Angleterre est assez cavalièrement appelée le pays que Charles teneit sa chambre, nous paraît une preuve de plus en faveur de l’origine normande de notre poëme.

Vers 2327.Flandres. O. Erreur du scribe, à moins peut-être d’écrire tutes.

Vers 2328.Puillanie. Mot dont le sens est bien douteux. Est-ce la Pologne ? est-ce la Pouille ? Le texte de Paris dit que Roland conquit d’une part la Puille, de l’autre la Poulaingne. Nous avons traduit ce mot par Pologne pour trois motifs : 1° parce que ce pays est nommé ici à côté de la Bulgarie, et que, dans toute cette énumération, on nomme ensemble les pays qui sont situés à peu près dans une même zone ou dans une même direction ; 2° parce que le mot Puillanie répond à celui des Polanes, ou Slaves de la plaine, qui envahirent les vallées de la Vistule au vie siècle, et donnèrent plus tard leur nom à tout ce pays ; 3° parce que Puille se trouve au vers 371.

Vers 2335.Dulor. O. V. la note du vers 489.

Vers 2336.Mielz. O. V. la note du vers 1500. ═ Remaigne. O. Le scribe a oublié le t final, qui est étymologique.

Vers 2337.Damnes n’est pas dans O. La restitution est de G. ═ Laiser. O. Lire laisser. V. la note du vers 265. ═ Cet emploi de l’infinitif peut être constaté plusieurs fois dans notre texte : Sire cumpainz, amis, ne l’ dire ja. (Vers 1113, etc.)

Vers 2338.Ferit est le parfait, fiert le présent. (Cf. vers 2312.)

Vers 2339.Vos. O.

Vers 2340.Brise. O. Le scribe a encore omis le t étymologique, qui est scrupuleusement conservé dans les 3mes personnes de tous les verbes de notre Chanson.

Vers 2341.Le n’est pas dans O. ═ Lire Ciel. O. V. la note du vers 545 et celle du vers 1500.

Vers 2344. — « Dans ton pommeau se trouvent un morceau de dent de saint Pierre, du sang de saint Blaise et des cheveux de saint Denis. » (Keiser Karl Magnus’s Kronike.)

Vers 2345.Oriet. O. La forme correcte est oret, qui se trouve plusieurs fois dans notre texte. (Vers 1283, 1605, 1811.)

Vers 2346.Pere. Mu. Le manuscrit porte Perre.

Vers 2347.Seignor. O.

Vers 2349.Païens. O. Pour le cas sujet du pluriel, il faut païen.

Vers 2351.Vos. O. ═ Hume. O. V. la note du vers 20.

Vers 2352.Avrai. Mu.

Vers 2353.Tent. O. Nous avons préféré tient, qui se trouve dans notre texte huit fois (vers, 7, 116, 253, 470, 755, 874, 956, 2287 ; v. aussi tienget, vers 2294 et 3183), tandis que tent ne s’y trouve qu’une seule fois. Mais surtout on ne trouve ce mot en assonance que dans les laisses en ier.

Vers 2354.Empereres. O. V. la note du vers 1. ═ Lire ber. O. ═ En est ber e riches. O. Pour la mesure, il faut ajouter e devant ber.

Vers 2355.Mort. O. V. la note du vers 611.

Vers 2356. — Lire en deux mots de vers. ═ Quer. O. On ne trouve cette forme qu’une seule fois ici. Partout ailleurs, coer.

Vers 2357.Alet curant. O. Pour le cas sujet, il faut alez curanz.

Vers 2359.Olifan. O. V. la note du vers 459. ═ À la fin du vers, le scribe a ajouté par erreur : en sumet.

Vers 2361.At. O. V. la note du vers 2.

Vers 2363.Mort cunquerant. O. Le cas sujet exige morz cunqueranz.

Vers 2365.Pur ses pecchez Deu recleimed en puroffrid lo guant. La correction est de G. et de Mu. Paris et Lyon disent simplement : Por ses pechés vers Dieu son gaige tent. Il y avait peut-être dans le texte original ces deux vers : Recleimet Deu, vers lui sun gage tent ; — Pur ses pecchiez li puroffrid son gant. ═ Lire pecchiez et puroffrit. ═ Lo. O. Lo, pour le ne se trouve qu’une seule fois (et c’est ici) dans tout notre texte.

Vers 2368.Batud. O. V. la note du vers 2.

Vers 2370. — Lire plutôt pecchiez.

Vers 2372.Consoüt. O. Pour le cas sujet, consoüz.

Vers 2374.Angles. Le cas sujet du pluriel exige Angle. ═ Lire Ciel. O. V. la note du vers 545 et celle du vers 1500

Vers 2378.Cum. O. La mesure veut cume. ═ De totes terres que li bers a conquis. (Lyon.) ═ Lire ber.

Vers 2380.Seignor. O. V. la note du vers 30.

Vers 2382.Volt. O. V. la note du vers 40.

Vers 2384.Patene. O. Erreur évidente.

Vers 2385.Lazaron. O. V. la note du vers 30.

Vers 2386.Lions. Mu. Le manuscrit porte leons, que nous avons imprimé à dessein : leuns. V. la note du vers 30.

Vers 2387.Guaris. Les deux dernières lettres ne sont pas dans O.

Vers 2390.Seint. O. Il faut seinz pour le cas sujet. ═ Seint Gabriel de sa main l’ad pris. O. Ce vers est faux, et nous avons dû en changer la construction pour le rendre juste.

Vers 2392.Juntes. O. V. la vraie forme juintes (vers 2015), et juindre (vers 993). ═ Alet. O. Pour le cas sujet, il faut alez.

Vers 2393.Li n’est pas dans O.

Vers 2394.E seint Michel de l’ Peril. Le vers est faux. Pour le rétablir j’ai, d’après Venise (E santo Michael de la mere de l’ Perin), ajouté : de la mer. Le nom liturgique de saint Michel, honoré in monte Tumba, était : de Periculo maris. (V. notre note du vers 37.)

Vers 2395.Seint. O. Pour le cas sujet, il faut seinz. Dans la Karlamagnus Saga, on nomme les anges Michel, Gabriel et Raphaël.

Vers 2397. — Lire ciels, et, en assonances, à la fin des vers de cette laisse : sentier, Oliviers, Geriers, Berengiers, chiers, Engeliers, Anseïs lifiers, vielz, laissiet, cumencier, iriez, chevalier, millier, pitiet.

Vers 2398.Renceval. O. La forme Rencesvals se trouve aux vers 892, 901, 912, 2225, 2483, 2516.

Vers 2400.Ne voide tere ne alne un plein pied, et en marge Illi. O. Correction de Mu.

Vers 2401.O Franceis o Paien. O. La forme u est plus employée dans notre texte.

Vers 2402.Bels niés. O. V. notre note du vers 15 sur les vocatifs et la Notice sur Roland à la note du vers 194.

Vers 2403.Arcevesque e Oliver. O. Pour le cas sujet, il faut arcevesques e Oliviers. Voyez la Monographie du Turpin à la note du vers 264, et celle d’Olivier à la note du vers 255.

Vers 2404. — Sur Gerer et Gerin, voyez la note du vers 107.

Vers 2405. — Sur Berenger et Oton, voyez la note du vers 795.

Vers 2406. — Pour le cas sujet, nous avons écrit Ives et Yvories au lieu d’Ive et Yvorie. O.

Vers 2407.Engeler. O. Même remarque.

Vers 2408. — Sur Samson et Anseis, voyez la note du vers 105. ═ Lire fiers à cause de l’assonance, au lieu de bers.

Vers 2409.Gerard. O. Pour le cas sujet, il faut Gerarz.

Vers 2410.Laiset. O. Voyez la note du vers 265.

Vers 2411.Chelt. O. La forme la plus usitée, la plus étymologique, est chalt. ═ Nul. O. Le cas sujet exige nuls.

Vers 2412.Pois. O. Pour la phonétique de notre texte, puis est préférable. (Vers 254.)

Vers 2414.Iret. O. Le cas sujet veut iriez.

Vers 2415.Baron. O. Voyez la note du vers 30.

Vers 2416.Millers. O. Pour le cas sujet du pluriel, millier.

Vers 2420.Nevolz. Pour l’assonance, nevulz, qui d’ailleurs se trouve au vers 216.

Vers 2421.Lige. O. Le rég. pl. veut liges.

Vers 2424.Tuz. O. C’est un adverbe, et non un adjectif : donc il faut tut.

Vers 2426.Veer. O. V. la vraie forme veeir aux vers 1104, 1720. ═ Veoir poez ou chemin grant pudror. (Lyon.)

Vers 2428.Car. O. V. la note du vers 275. ═ Dulor. O. V. la note du vers 489.

Vers 2430.Cunselez. O. Correction de Mu., d’après Venise IV. ═ Dans le mot dreiture, les trois dernières lettres paraissent avoir été effacées dans le manuscrit.

Vers 2434.Champ. O. V. la note du vers 555.

Vers 2435.Cun. O. Partout ailleurs on trouve la forme exacte cum.

Vers 2436.Lion. O. la forme étymologique leun se rencontre plus souvent dans notre texte. (Vers 128, 1888, 2886.)

Vers 2437.Esquier. O. Pour le cas sujet, il faut un s final.

Vers 2439.Josque. O. La forme jusque, plus étymologique, se trouve aux vers 972, 3927. ═ Qu’en. Mu.

Vers 2440.Voeile. O. Lire voeillet, qui se trouve aux vers 1244, 1873, 2043, 3834.

Vers 2442.Chevaler. O. Le régime pluriel exige un s. Lire chevaliers.

Vers 2443.Empereres. O.

Vers 2444. — Lire ber. O. V. la note du vers 430.

Vers 2445.Unt lur les dos truvez. O. D’après Paris, Mu. a restitué esclos. Après ce vers, on peut intercaler le suivant emprunté à Paris : Mais li soleilz se prist à escunser.

Vers 2446. — Lire tienent.

Vers 2447.Vespres. O. Erreur évidente.

Vers 2448.Descent li reis en un pred. O. Correction de G. et de Mu. ═ Pred. O. Voyez la note du vers 2.

Vers 2450.Facet pur lui arester. O. Vers faux qu’on a rétabli par l’interversion de facet et pur lui.

Vers 2452.Ais li un angle ki od lui soelt parler. Nous donnons ici une seconde miniature du Ruolandes Liet, qui se rapporte à ce passage.

Vers 2453.Comandet. O. V. la note du vers 309.

Vers 2454.Charle. O. V. la note du vers 94. ═ Tei ne faudrad. O. Venise IV porte falt. ═ Clartet. O. Pour le cas sujet, il faut clartez. ═ Lire plutôt : Carle, chevalche : ne te faldrat clartez. C’est la forme la plus simple.

Vers 2456.Poez. O.

Vers 2457.L’Emperere muntet. O. Omission évidente. Pour le cas sujet, est muntez.

Vers 2460.Les chalcent. O. Correction de Mu., d’après Venise IV, qui donne encalcent, et Versailles et Paris, qui donnent enchaucent. Lyon seul a chaçant.

Vers 2461.El val Tenebrus. O. Le vers est faux ; mais la faute est facile à corriger avec le manuscrit de Venise IV et celui de Versailles, qui donnent tous deux : En val Tenebre.

Vers 2462.Enchalcent franc. O. Correction de Mu., d’après le vers de Venise IV : Ver Sarragoce les emmenent ferant.

Vers 2465.El (??).

Vers 2466.Merveille. O. Erreur évidente. ═ Curant. O. Pour le cas sujet, il faut curanz.

Vers 2467.Il n’en i ad. O. En, qui d’ailleurs est inutile pour le sens, est de trop pour la mesure.

Vers 2468.Païens. O. Pour le cas sujet, païen. ═ Le drotmund, dromont, est, en général, le navire de guerre, le navire de marche ; le chaland est le navire de commerce, le transport.

Vers 2470.Adubez. O. Pour le sujet pluriel, il faut adubet.

Vers 2471. — Au-dessus d’envers, il y a dans le manuscrit une abréviation inutile. ═ Les. O. ═ Alquanz. O. Pour le cas sujet (aliquanti), il faut alquant.

Vers 2472.Vunt cuntreval. O. Le manuscrit de Versailles nous donne encontreval, qui est nécessaire pour la mesure.

Vers 2473. — Lire Mielz. O. V. la note du vers 1500. ═ Guariz. O. Le cas sujet veut guarit. ═ Boud. O. V. la note du vers 2.

Vers 2474.Taz sunt neiez. O. Le cas sujet exige tuit et neiet.

Vers 2475.Païens. O. À cause du s. p., il faut païen.

Vers 2476. — Lire, en assonances, à la fin des vers de ce couplet, chevalier, culchiez, herbergier, repairier, chiefs, refreidier, bien, O.

Vers 2477.Alquanz. O. Pour le s. p., alquant.

Vers 2479.Descendut est. O. Au cas sujet singulier, descenduz. ═ Piet. O. Pied, plus étymologique, est plus usité dans notre texte.

Vers 2481.Culchet. O. Pour le cas sujet, il faut culchiez.

Vers 2484.Cheval... ennuiez. O. Le sujet pluriel exige cheval et ennuiet.

Vers 2485.Le freins. O. Erreur évidente.

Vers 2486. Laisez. O. V. la note du vers 265.

Vers 2487. Bien. O. V. la note du vers 1500.

Vers 2490.Toleites. O. Ce participe nous semble presque un barbarisme. Le participe (2e formation) de tolir est tolut, qui se trouve aux vers 235 et 2434. — Pour le verbe cadeir, nous avons également deux participes : Chaüz et chaeiz, chaeite. Nous n’avons pas changé cette dernière forme, consacrée par l’assonance.

Vers 2491.A or. O. Nous avons employé le d euphonique. ═ E metent. O.

Vers 2492.Livrent. Mu.

Vers 2496. — Lire culchet.

Vers 2497. — Lire ber. O.

Vers 2498.Ne s’volt. Mu. Le manuscrit porte nettement ne se.

Vers 2499.Saffret. O. Safret ne prend le plus fréquemment qu’un seul f.

Vers 2500.Laciet. O. La forme lacet se trouve au vers 212. ═ Elme. O. V. la note du vers 996. ═ A or. O. V. la note du vers 2491. ═ Gemmet. O. Pour le cas sujet, il faut gemmez.

Vers 2501.Unches. O. V. la note du vers 629. ═ Joiuse. — Nous allons résumer, en quelques propositions brèves, l’histoire de l’épée Joyeuse. a. D’après Fierabras (vers 654-657), l’épée Joyeuse est l’œuvre de ce fameux forgeron Veland, qui, d’après le Chevalier au Cygne, Doon de Mayence, Huon de Bordeaux, etc., avait aussi forgé Durendal ; Floberge, l’épée de Renaud ; Hauteclere, l’épée d’Olivier ; Courtain, l’épée d’Ogier ; Merveilleuse, l’épée de Doon, etc. (Cf. Veland le Forgeron, Dissertation sur une tradition du moyen âge, par Depping et F. Michel, pp. 32-46 et 80-95.) ═ b. D’après le Charlemagne de Girart d’Amiens (B. N. 778, f° 35 r° B.), l’épée Joyeuse aurait d’abord appartenu à Pépin. Ses deux bâtards, Heudri et Lanfroi, s’en étaient d’abord emparés ; mais elle fut rendue à Charles, après ses premiers exploits chez le roi Galafre (B. N. 778, f° 35 r° B.), alors qu’il venait de tuer Braimant et allait être adoubé chevalier. ═ c. Cette version est loin d’être adoptée par tous les légendaires. D’après la Cronica general de España d’Alfonse X, ce fut Galienne qui donna au jeune Charles l’épée Giosa, et elle lui avait été donnée à elle-même par le Sarrazin Braimant. Aussi, lorsque Charles engagea cette lutte terrible contre l’émir, se servit-il de Joyeuse pour conquérir Durendal : car Braimant possédait alors la fameuse « Durendarte », et il en porta tout d’abord un rude coup à son jeune adversaire. Mais Charles ne se déconcerta point et coupa, d’un coup de Joyeuse, le bras droit du païen, qui prit la fuite. « Et l’enfant Charles descendit de cheval, et prit l’épée Durendal qui gisait à terre ; puis, il suivit Braimant avec les deux épées dans les mains, » et le tua. (V. l’Histoire poét. de Charlemagne, p. 237.) ═ d. Quoi qu’il en soit, Charles portait Joyeuse à son côté, quand il fit ce fameux voyage à Constantinople, dont la Karlamagnus Saga nous a conservé un récit simple et primitif (indépendamment de sa 8e branche, où elle reproduit le Voyage en vers français qui est parvenu jusqu’à nous). À la suite d’un vœu qu’il avait fait, l’empereur des Francs entreprend un pèlerinage à Jérusalem : à son retour, il passe par Constantinople et délivre le roi grec des païens envahisseurs. Celui-ci, pour lui témoigner sa reconnaissance, lui offre les reliques de la Passion, et notamment le fer de la lance dont Notre-Seigneur avait été percé sur la croix. (Bibl. de l’École des Chartes, XXV, 102, Analyse de la Karlamagnus Saga, par G. Paris.) Et c’est alors que Charles mit cette très-précieuse relique dans le pommeau de son épée. ═ e. C’est alors aussi (suivant la Karlamagnus Saga, l. I. et la Chanson de Roland, v. 2508) qu’il donna à son épée le nom de Joyeuse. (Giovise, dans la Saga ; Joiuse, dans le poëme français.) Depuis lors, le cri national des Franks fut Munjoie. (Dans la Saga, Mungeoy.) Le Faux Turpin, de son côté, appelle l’épée de Charles Gaudiosa ; l’auteur de Philomena, Jocosa, et Guillaume le Breton, Jucunda. ═ f. Le mot Joyeuse signifie « précieuse », et ce nom de Monjoie (meum gaudium) se rapporte à l’épée de Charlemagne dans le sens de joyau précieux. « Ce qui achève de le prouver, c’est le nom de Précieuse donné à son épée par l’amiral Baligant, en rivalité de la Joyeuse de Charlemagne. » (Génin, Roland, p. 422.) ═ j. Joyeuse a certains caractères distinctifs qu’il convient d’énumérer. Sa clarté est incomparable : Unches ne fut sa per. — Ki cascun jur muet XXX clartez. (Vers 2501, 2502). Ki pur soleil sa claretet n’en muet. (Vers 2990.) Elle tremble quand on la tient nue. (Prise d’Alexandre, xiiie s., cité par G. Paris, Hist. poet. de Charlemagne, 373.) Enfin, elle préserve de l’empoisonnement son heureux possesseur ; nous croyons du moins qu’il faut ainsi comprendre ces vers d’Aspremont : Qui l’a sor lui ja ne soit en pensé — Que au mangier l’ait on empoisonné. (G. Paris, l. I.) Aux mains de Charles, c’est une arme terrible : « Il était d’une si grande vigueur, dit la Chronique de Turpin, que d’un seul coup de son épée il tranchait le cheval et le cavalier. » (Cap. xx.) Au combat de Saint-Faconde, le roi des Franks le fit bien voir. Tirant Joyeuse du fourreau, il trancha par le milieu du corps un grand nombre de païens. (Ibid., cap. viii.) ═ g. C’est cette épée cependant qui lui fut très-insolemment volée par l’enchanteur Maugis. (Renaus de Montauban, édit. Michelant, p. 306.) ═ h. D’après le Couronnement Looys (B. N. 774, f° 19, 2°), on n’a pas couché, mais assis dans son tombeau le grand empereur mort ; son épée a été placée dans son poing, et elle menace encore les païens, « la pute gent averse. » ═ i. D’autres poëtes mettent ensuite Joyeuse aux mains de Guillaume au Court-Nez : Cho est Joiuse où durement se fie. (Aliscans, vers 469 de l’éd. Guessard. — Voir aussi d’autres textes dans le Roland de Fr. Michel, 1re éd., pp. 193, 194.)

Vers 2502-2505. — Karlamagnus resta ceint de son épée, nommée Joius, qui était à trente couleurs pour chaque jour. Et il possède un clou avec lequel Notre-Seigneur fut attaché à la croix. Il l’a mis dans le pommeau de son épée, et, à l’extrémité, quelque chose de la lance du Seigneur, avec laquelle il fut percé. (Karlamagnus Saga, ch. xxxviii.) Notre Chanson ne parle pas du saint Clou. ═ La Keiser Karl Magnus’s Kronike abrége violemment tout ce passage.

Vers 2504.Naffret. O. Pour le cas sujet, il faut nafrez.

Vers 2505.Carles en a l’amure... La lance dont Notre-Seigneur fut percé sur la croix, a été l’objet de nombreux récits pendant toute la durée du moyen âge. Il est facile de reconnaître ici deux grands courants légendaires tout à fait distincts l’un de l’autre, et qui ne se sont jamais confondus. Le premier est celui de nos Chansons de geste ; le second celui des Romans de la Table Ronde. Nous les étudierons l’un après l’autre. 1° L’auteur de notre Roland ignorait absolument les traditions « celtiques », qui ne se sont guère répandues en France qu’une cinquantaine d’années plus tard. Mais, en revanche, le Voyage à Jérusalem et à Constantinople nous montre, dans notre cycle carlovingien, le grand empereur rapportant de Jérusalem les reliques de la Passion, qu’il dépose à Saint-Denis, et cette légende remonte tout au moins à la fin du xe siècle. Seulement dans le vieux poëme il n’est pas question de la lance. C’est la Karlamagnus Saga, reproduisant sans doute une autre Chanson française, qui nous en parle très-explicitement, et considère la pointe de cette lance comme un présent que le roi de Constantinople fit au roi de Saint-Denis. Et la Saga ne manque pas de nous apprendre que Charles incrusta cette précieuse relique dans le pommeau de son épée, que, depuis lors, il nomma Giovise : d’où le cri de Mungeoy. (V. la note du vers 2501.) ═ 2° Tout autre est la tradition « celtique » ; mais il est malaisé de pénétrer ici jusqu’à la véritable source de la légende. Deux systèmes, deux écoles sont aujourd’hui en présence : d’une part, M. de la Villemarqué ; de l’autre, M. P. Paris. ═ M. de la Villemarqué fait remonter au delà des temps chrétiens l’histoire merveilleuse de la lance. Suivant lui, le célèbre Graal existait de temps immémorial dans les poésies bardiques (?). C’était dès lors un vase magique communiquant la science universelle, guérissant toutes les blessures etc. La lance sanglante aurait été, avec ce bassin merveilleux, le symbole militaire des Bretons dans leur lutte contre les Anglo-Saxons. Depuis le vie jusqu’au xiie siècle, les fables s’accumulent autour de la lance et du bassin magique. Au commencement du xiie siècle, un conteur gallois (?) donne un corps à la légende de Peredur (le Compagnon du bassin), qui quitte la cour d’Arthur et qui, pour conquérir le bassin et la lance, combat lions, serpents, sorcières et monstres de toutes sortes. Cette histoire de Peredur (H. de la Villemarqué, Romans de la Table Ronde, 3e éd., pp. 145-146) se raconte encore aujourd’hui dans les campagnes bretonnes, et M. Ém. Souvestre assure l’avoir écrite sous la dictée d’un paysan. Il s’agit, dans ces récits populaires, d’un certain Peronik, que l’on appelle « l’idiot », et qui est, en effet, un enfant aussi simple que pauvre. Cependant Peronik, à force de patience et d’observation, parvient à conquérir, au fond d’une caverne magique, le bassin d’or qui guérit tous les maux et ressuscite les morts, et la lance à pointe de diamant qui tue et brise tout ce qu’elle touche. Pour y arriver, il traverse le bois enchanté, cueille la fleur qui rit, passe le lac des dragons, combat l’homme à la boule de fer, franchit le vallon des plaisirs, etc. (E. Souvestre, Foyer breton, II, p. 137.) C’est, comme on le voit, l’histoire de Perceval le Gallois, modifiée par le temps et le peuple... ═ b. M. Paulin Paris parle tout différemment. (Romans de la Table Ronde, I, pp. 93 et suivantes.) La légende, suivant lui, aurait une origine chrétienne. Il aurait, dès les iiie et ive siècles, circulé chez les Bretons insulaires certains récits qui faisaient de Joseph d’Arimathie le premier apôtre de la Bretagne. Or Joseph possédait le vase où il avait recueilli le sang du Sauveur : il avait, d’ailleurs, reçu de Dieu des dons plus précieux, et était notamment investi du droit de faire des évêques. De telles idées s’accordaient trop bien avec les prétentions des Bretons à l’indépendance religieuse. Pour ne pas dépendre de Rome, ils s’armèrent de ces prétendues traditions. Vers l’an 720, un clerc du pays de Galles écrivit, dans l’intérêt de ce schisme, le fameux Gradale ou Liber gradalis, qui donnait un corps à la légende du vase miraculeux. Mais il ne semble pas être ici question de la lance. Ce livre, d’après M. P. Paris, serait demeuré secret depuis le viiie jusqu’au xiie siècle, et ce secret s’expliquerait assez bien par les idées d’indépendance qu’une telle œuvre pouvait favoriser contre la suprématie des papes. C’est en France que le Gradale fut un jour traduit, développé, embelli, et ce fait important doit être placé entre les années 1160 et 1170. Telle est, en effet, la date du Joseph d’Arimathie de Robert de Boron. Quelques années après, un auteur inconnu écrivait le Saint-Graal en prose. De là à Parceval le Gallois, il n’y a qu’un pas... ═ Nous venons d’exposer tour à tour les deux systèmes de MM. Paris et H. de la Villemarqué : notre intention n’est pas de décider entre les deux. Nous nous contenterions volontiers de croire qu’il y a du vrai dans l’un comme dans l’autre, et que les deux légendes, païenne et chrétienne, ont pu se fondre. Quoi qu’il en soit, leur point d’arrivée à toutes deux est, comme nous l’avons vu, Perceval le Gallois, dont l’auteur est Chrestien de Troyes, mort avant l’année 1190. En voici le résumé... Perceval est le fils d’une pauvre veuve du pays de Galles, que sa mère veut à tout prix éloigner de la condition militaire, mais qui rencontre un jour des chevaliers de la cour d’Arthur, et ne peut résister à sa vocation chevaleresque. Il traverse mille aventures, et, après s’être oublié dans l’amour de Blanche-Fleur, arrive un jour dans un château merveilleux. Un valet paraît, portant une lance d’où coule une goutte de sang ; puis deux damoiselles, dont l’une tient un bassin d’or, un graal. Perceval est dans le palais du Roi-Pécheur. Par malheur, il n’est pas assez curieux pour demander l’explication de « la lance qui saigne ». De là ses infortunes. Il perd soudain la mémoire ; bien plus, il reste cinq ans sans entrer dans une église. Mais enfin, un jour de vendredi saint, il confesse ses péchés, il communie, il renaît à une vie nouvelle. Ici commencent d’autres aventures. Perceval, réhabilité et pur, se met à la recherche du bassin d’or et de la lance. Mille obstacles l’arrêtent ; mille séductions le tentent : il en triomphe et arrive de nouveau chez le Roi-Pécheur. Il n’oublie pas cette fois de demander « pourquoi la lance saigne ». On lui répond que c’est celle dont Longus perça le côté du Sauveur sur la croix, et que le bassin d’or est celui où Joseph d’Arimathie a recueilli le sang divin. Le graal guérit toutes blessures et ressuscite les morts ; mais il faut, pour en approcher, être en état de grâce. Perceval donne alors la preuve qu’il est le plus pieux chevalier de la terre, et se met tout aussitôt à la poursuite d’un certain Pertinax, qui a jadis volé au Roi-Pêcheur une épée merveilleuse. Il atteint ce misérable, il le tue. Le Roi-Pécheur abdique alors en sa faveur, et Perceval règne glorieusement pendant sept ans. Mais, au bout de ce temps, il se fait ermite et meurt en odeur de sainteté. Le jour de sa mort, le bassin et la lance furent transportés au ciel. Ils y sont encore et y seront toujours... ═ Telle est l’analyse, très-rapide, de l’œuvre de Chrestien de Troyes, qui, par malheur, est encore inédite. La lance, comme on le voit, y tient une place considérable ; mais la Chanson de Roland est absolument étrangère à toutes ces fables. On voit par là quel abîme sépare les deux Cycles.

Vers 2506. — Il ne s’agit ici que de l’amure ou de la pointe de la lance, mais non pas de la lance elle-même. Or, suivant une tradition ancienne reproduite par Guillaume de Malmesbury (Pertz, X, p. 480), Hugues Capet envoya à Ethelstan, roi d’Angleterre, la lance de Charlemagne. « Elle passait, dit l’écrivain anglais, pour être la même qui fut enfoncée dans le côté du Seigneur par la main du centurion. » Cette citation est de M. G. Paris. (Histoire poétique de Charlemagne, p. 374.) ═ Manuvrer. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 2508.Dunet. O. Li nums étant un masculin, il faut, pour le s. s., dunez.

Vers 2509.Baruns. O. D’après notre note du vers 20, il faut barun.

Vers 2511.Gent. O. Lire genz, d’après notre note du vers 611.

Vers 2512.Noit... luisant. O. Pour le cas sujet, il faut noiz et luisanz. (V. la note du vers 611.) Lire nuiz.

Vers 2514. — Lire Olivier, d’après la théorie exposée dans la note du vers 1500.

Vers 2515.Pers, de. Mu. Le manuscrit porte e, que nous avons conservé pour laisser intacte la question de prononciation. On prononçait peut-être : E d’ la franceise gent.

Vers 2516.Qu’en. Le manuscrit offre seulement en. Correction de Mu., d’après les manuscrits de Venise IV et Versailles.

Vers 2518.Guarent. O. Pour le cas sujet, guaranz.

Vers 2519.Grant. O. Le cas sujet exige un z au lieu d’un t.

Vers 2522.Ester en. O. Erreur évidente.

Vers 2523.Herbe. O. Voir la note du vers 1569.

Vers 2524.Bien. O. V. la note du vers 1500.

Vers 2525.Karles. O. V. la note du vers 94. ═ Traveillet. O. Le cas sujet veut un z. ═ Lire, en assonances, à la fin des vers de ce couplet : traveilliez, guardier, chief, iert, grief, ciel, O. tempiez, apareilliez, chiet, pumier, mier, O. acier, chevaliers, mangier, aversier, milliers, giet, aidiez, pitiet, desturbier, requiert, loitier, chiet, O. et esveilliet.

Vers 2530.Une bataille. Mu. Le manuscrit porte D’une, qui peut s’expliquer grammaticalement.

Vers 2538.Escuz. O. Pour le sujet pluriel, il faut escut. Ardent et fruissent sont-ils verbes actifs ou neutres ? Dans le second cas, il faudrait p.-e. cist escut et cist helme. ═ Mier. O. V. la note du vers 1500.

Vers 2539.Fruisez. O. Erreur évidente.

Vers 2540.Osbercs. O. Pour le cas sujet, osberc. ═ Helmes. O. Même remarque. ═ Lire p.-e. cist helme.

Vers 2541.Dulor. O. V. la note du vers 489.

Vers 2542.Leuparz. O. Pour le s. p., leupart.

Vers 2543. — Les quatre substantifs de ce vers se rapportent au verbe du vers précédent, et en sont les sujets. Il faut donc serpent, au lieu de serpenz. O. Müller a donc eu tort d’ajouter de son chef un s à dragun et averser. ═ Guivres. Mu. Le manuscrit porte guiveres.

Vers 2545.S’agiet. O. La correction est de Mu.

Vers 2548.Volt. O. V. la note du vers 40.

Vers 2549.Leons. O. V. la note du vers 1 pour la suppression de l’s, et la note du vers 30 pour le changement d’u en o. ═ Vint. O. Correction de G. et de Mu.

Vers 2550.Ert. O. Lire plutôt iert.

Vers 2552.Por. O. Voir la note du vers 17. ═ Loitier. Mu. Le manuscrit porte distinctement loiter, mais c’est l’assonance qui réclame l’ier. ═ Ce vers a douze syllabes ; lire ═ A braz ambsdous prenent sei pur loitier.

Vers 2553.Li quels abat. O. Li rompt inutilement la mesure.

Vers 2554.N’est mie. O. La correction est de tous les éditeurs, Mi., G., Mu.

Vers 2555.Icel[e]... vien[t]. O. Les dernières lettres sont effacées dans le manuscrit.

Vers 2556. — Lire plutôt iert.

Vers 2558. — La Karlamagnus Saga a mal compris ce passage : « Karlamagnus rêva qu’il était chez lui, au pays des Franks, dans son palais. Et il lui sembla qu’il avait les fers aux pieds. Et il vit trente hommes voyageant vers une ville nommée Ardena, et qui disaient entre eux : « Le roi Karlamagnus a été vaincu, et il ne portera plus la couronne au pays des Franks. » (Chapitre xxxviii.) Rien de tout cela dans la Kaiser Karl Magnus’s Kronike.

Vers 2559.Cascun. O. Pour le cas sujet, il faut cascuns.

Vers 2561.Vos. O. V. la note du vers 17. Remarquons, encore une fois, que vos est ici en assonance dans un couplet en ur, un, et rime avec nus. Ce qui justifie cette dernière forme.

Vers 2563.Vers les altres acurt. O. Erreur du scribe, qui a écrit par avance quelques mots du vers suivant. G. et Mu. ont restitué veltres, d’après Venise IV : Vit un ventre rocors. ═ Signalons ici dans le manuscrit de Lyon une grande lacune qui ne se trouve dans aucun de nos autres Remaniements. Cette lacune correspond à nos vers 2570-2844. Le rajeunisseur saute par-dessus tout l’épisode de la fuite de Marsile. Il omet de nous raconter son retour à Saragosse, le désespoir de la reine, l’arrivée de Baligant, qui envoie deux messagers à Marsile, le message de Clarien et de Clarifant près du roi de Saragosse et de Bramimonde, leur retour auprès de Baligant, auquel ils apprennent la bataille de Roncevaux et la mort de Roland, et enfin le voyage de Baligant lui-même à Saragosse avant d’engager la grande bataille. L’auteur du manuscrit de Lyon nous transporte immédiatement sur le champ de bataille de Roncevaux, où Charles vient pleurer sur le corps de son neveu. Il omettra également tout le récit de la bataille de Saragosse. Les mêmes lacunes peuvent se constater dans la Karlamagnus Saga (chapitre xxxiii-xxxix) et dans la Keiser Karl Magnus’s Kronike, pour lesquelles l’épisode de Baligant n’existe pas.

Vers 2570.Marsilie. O. Pour le cas sujet, Marsilies.

Vers 2571.Descendut. O. Le s. s. m. veut descenduz.

Vers 2573.Herbe. O. Voir la note du vers 1569. ═ Culcet. O. La forme culchet est employée beaucoup plus fréquemment dans notre texte. (Vers 12, 2013, 2175, 2204, 2358, 2449, 2481.)

Vers 2575.Angoiset. O. V. la note du vers 2232.

Vers 2578. — Lire lui. V. la note du vers 13. ═ Xx. milie. Mu. Xxx. mil. G. Lire xx. milie.

Vers 2579.Ki tuit maldient. Mu. Ki si maldient. G. Le manuscrit porte si maldient. — La correction de Mu. est la meilleure ; lire tuit maldient.

Vers 2582.Por. O.

Vers 2583.Por. O. ═ Lessas. O. V. la note du vers 265.

Vers 2585.Les sceptre. O. Erreur du scribe.

Vers 2586.Par mains. Mu. Je suppose qu’on pouvait prononcer Par les mains l’pendent, et n’ai pas voulu supprimer les que porte le manuscrit en marge. ═ Sur. O.

Vers 2591. — Lire plutôt chien. V. la note du vers 1500.

Vers 2592.Paismeisuns. O. Erreur du scribe, plusieurs fois reproduite quant à la finale.

Vers 2594.Peinz est une faute manifeste qu’il a été nécessaire de conserver. Lire peut-être : Tante culur i ad peinte e escrite.

Vers 2598. — Lire Ies. O. V. la note du vers 648. ═ Oi. O. V. la note du vers 1210.

Vers 2601.Oi. O. V. la note du vers 1210. ═ Ui. Mu.

Vers 2604.Fiers. O. Pour le s. p., il faut fier. ═ Lor. O. V. la note du vers 17.

Vers 2612.Marsilie. O. Il faut Marsilies pour le sujet singulier.

Vers 2613. — Lire plutôt premier.

Vers 2614.Baligant. Dans la Chronique de Turpin, qui est suivie par vingt auteurs, Marsire et Beligand sont deux frères qui ont été l’un et l’autre envoyés en Espagne par l’émir de Babylone, et qui règnent à Saragosse. Ils attaquent ensemble l’arrière-garde commandée par Roland. Marsire est tué par le neveu de Charles ; Beligand s’enfuit. (Cap. xxi, xxii.)

Vers 2615.Amiraill. O. Pour le cas sujet, la forme amiralz, qui est la correcte, se trouve douze fois dans notre poëme ; amiraill, au s. s., ne se trouve par erreur que cinq fois. ═ Le vieil. O. Pour le cas sujet, li vielz. V. la note du vers 171 et celle du vers 1500.

Vers 2616.Survesquit. Mu. Nous nous demandons pourquoi Mi., G. et Mu. ont changé la leçon survesquiet, qui est excellente. V. les formes abatied, vers 98 ; abatiet, 1317 ; perdiet, 2795 ; respundiet, 2411.

Vers 2617.En Sarraguce alt. O. Mu. Nous avons dû ajouter l’ avant ce dernier mot. ═ Lire ber. ═ Tuz. O. Supprimé pour la mesure du vers. De plus, ydeles est du féminin. (Cf. le vers 3604.) ═ Adorer. O. Ne se trouve qu’une fois dans notre manuscrit. La forme aürer (vers 124 et 429) est plus conforme à l’esprit de notre texte.

Vers 2619.Tuz.

Vers 2620.Sancte. O. Même remarque que pour le vers 1634.

Vers 2621.Charlemagne. O. V. la note du vers 94.

Vers 2624. — Pour le sens exact du mot drodmunt, se reporter à la note du vers 2467. ═ Dans le drodmund on faisait entrer les chevaux : témoin ce passage curieux de l’Entrée en Espagne, où l’on voit Roland mettre son cheval dans un dromond à l’aide de cordes et de poulies. Seulement l’estormant du bateau : Desor li dos bastiaus fait bastir un soler, — Tant com li bon cival poit à leisir ester. (Manuscrit français de Venise, n° xxi, f° 228.)

Vers 2628.Ested. O. V. la note du vers 2. ═ Lire premier.

Vers 2630.Granz. O. Pour le s. p., il faut grant. V. la note du vers 20.

Vers 2632-2637. — Vers précieux pour l’historien de la marine.

Vers 2635. — Ajouter p.-e. que au commencement de ce vers. Nous l’aurions fait volontiers ; mais tel ne se rencontre pas dans notre texte avec que. ═ Lire plutôt nuit.

Vers 2636.Vienent. O. On trouve vienent ici et au vers 3945 ; venent se trouve plus souvent (vers 818, 2640, 2645) ; mais, d’un autre côté, vient ne se trouve, comme assonance, que dans les couplets en ier.

Vers 2637.Tut. O. Pour le s. s., il faut tuz.

Vers 2638.Jesque. O. V. la note du vers 510.

Vers 2639.Gent. O. V. la note du vers 611. ═ Paienor. O. V. la note du vers 30.

Vers 2640.Venent. V. la note du vers 2836.

Vers 2641.Marbrise et Marbrose sont à tort placés dans le manuscrit l’un à la place de l’autre.

Vers 2642.Naviries. O. Navirie. Mu. La forme navilie, au vers 2627, est d’une formation plus exacte.

Vers 2645.Venent. V. la note du vers 2636.

Vers 2646.Luisant. O. Pour le cas sujet, luisanz.

Vers 2647.Calan. O. Cf. les formes caland (vers 2467) et calant (2728). Nous avons conservé le d final à cause du latin chelindrus, chelandium.

Vers 2648.Adestrant. O. Pour le cas sujet, adestranz.

Vers 2649.Reis. O. Pour le s. p., rei. Voir la note du vers 20.

Vers 2650. — Lire plutôt bien.

Vers 2652.Palie vient de pallium. Or, dans la basse latinité, le substantif pallium « avait un sens beaucoup plus étendu et se disait des tentures et des tapisseries, lesquelles n’étaient pas toujours en soie. Au milieu de mille exemples, j’en choisis un dans l’histoire d’Ingulph. Cet écrivain fait mention du don fait par l’abbé Egelric (mort en 992) de plusieurs tapis de pied représentant des lions avec des fleurs, et il ajoute : Dedit etiam multa pallia suspendenda in parietibus ad altaria sanctorum in festis ; quorum plurima de serico erant, aureis volucribus quœdam insita, quœdam intexta, quœdam plana. (Rerum anglic. Script. ed. H. Savile, Francfort, 1601, page 889, l. 17.) » La citation précédente est due à M. Fr. Michel. (Recherches sur le commerce, la fabrication et l’usage des étoffes de soie, d’or et d’argent, I, 275.) M. Fr. Michel établit ensuite que palie signifie seulement une « étoffe de prix ». La ville du monde, et en particulier de l’Afrique, la plus renommée pour ses tissus était Alexandrie, « dont les pailes sont devenus comme un lieu commun de nos anciens Romans, où ils sont nommés à chaque vers. » Et ces mentions ne sont pas moins fréquentes dans les écrivains arabes. Alexandrie « était en réalité l’entrepôt des marchandises de l’Orient et de l’Occident, le marché principal où venaient s’approvisionner les grands négociants du moyen âge. » (Id., ibid., page 279.) Or le principal objet de ce commerce, c’étaient les pailes, les étoffes de soie qui, « jusqu’au xve siècle, furent comptées au nombre des étoffes les plus précieuses. » (Id., page 280.) V. les vers 403, 463. ═ Lire plutôt lorier.

Vers 2653.U[n]. Mu. La dernière lettre n’est pas visible dans le manuscrit. ═ Olifan. O. V. la note du vers 1059.

Vers 2654.Li païen Baligant. O. Pour le cas sujet, il faut Li païens Baliganz.

Vers 2655.E tuit li altre. O. E n’est pas dans le manuscrit.

Vers 2656.Premer. O. Pour le cas sujet, premers. Lire premiers.

Vers 2657.Oiez ore. O. Oiez tuz ore. G. Ore oiez. Mu. J’ai adopté la leçon qui convient le mieux pour la mesure du vers. ═ Vaillant. O. V. notre note sur les vocatifs, au vers 15. ═ Lire chevalier et (?) vaillant.

Vers 2659.Manger. Ce mot ne se trouve, comme assonance, que dans une laisse en ier.

Vers 2660.At. O. V. la note du vers 2.

Vers 2661.Voeill n’est pas dans le manuscrit. ═ Querant. O. Pour le s. s. m., il faut queranz.

Vers 2663.Josqu’il. O. V. la note du vers 510. ═ Mort... vif... recreant. O. Le cas sujet exige morz... vifs... rccreanz.

Vers 2664.Genoill. O. Genuilz, plus conforme à notre phonétique, se trouve au vers 2192.

Vers 2665. — Lire en assonances, à la fin des vers de ce couplet, afichiet, ciel, O. plaidier, cunseilliet, chevaliers, volentiers, algiez, aidier, iert, O. chalcier, mier, chief et bien, O.

Vers 2666. — Lire lerrat. (Vers 574, 785, 803, 2063, et aussi 457) ═ Ciel. O. V. la note du vers 545.

Vers 2667.Que il ainz. O. G. a restitué il alge, et Mu. il alt. ═ Oxford porte o Carles. Nous avons préféré la leçon u, plus étymologique.

Vers 2668.Loent. O. Mais on voit encore nettement les traces d’un d effacé. (Cf. lodet, vers 226.) Le scribe a pu hésiter ; car le d commençait à se retirer de ce verbe (loez, vers 3948 ; loat, 420 ; loerent, 206 ; loement, 1709).

Vers 2671.Vos. O.

Vers 2672.Mes n’est pas dans le manuscrit. Restitué par Mu. d’après Venise IV.

Vers 2673.Vos. O.

Vers 2675.Venut. O. Pour le cas sujet, il faut venuz.

Vers 2676.Se jo truis o. O. Mi. G. ═ Ost. Restitué par Mu. Paris donne : Se truis Karle ; et Versailles : Se ge’s ateing. ═ Grant. O. Pour le cas sujet, il faut granz. ═ Lire Iert. O. V. la note du vers 517 et celle du vers 1500.

Vers 2678.Poign. O. V. la note du vers 415.

Vers 2679.Bastuncel. Les quatre premières lettres font défaut dans le Ms. Mi. a imprimé Cest uncel, et G. (I)cest uncel. Mu. a restitué bastuncel d’après Venise IV (quest baston uer) et Versailles (cest baston qi est d’or entaliez). Venise VII dit : Si li donez cest gant qui est pleiez. — El destre poinz, veiant toz, le fichiez — E cist baston qui est d’or entailliez.

Vers 2680.Feu. O.

Vers 2681.Carle. O. Au cas oblique, Carlun.

Vers 2684.Corune. O. La forme curune, qui est la plus conforme à notre phonétique, se lit dans notre Ms. aux vers 388 et 2585. Corune ne se trouve qu’ici, et corone aux vers 3236, 3538 et 3639. (V. aussi coronez aux vers 1563 et 2956.)

Vers 2686.Baligant. O. Pour le cas sujet, Baliganz. ═ Car. O. V. la note du vers 275. ═ Lire plutôt chevalchiez. ═ Barun. O. V. notre note sur les vocatifs, au vers 15. ═ Après ce vers ou le suivant, il y en avait peut-être d’autres dans le texte primitif, analogues aux suivants que nous lisons dans le texte de Paris : « Vos en irez au roi Marsillion. — Dites-lui bien sans nulle arestison — Que de mei tiengne sa terre et son roion. — Ce qu’a perdu conquerrai vers Charlon. » — E cil respondent : « Volentiers li dironz. » Toutefois, nous ne proposons pas de les intercaler dans notre texte critique, parce qu’ils ne nous semblent pas absolument nécessaires.

Vers 2687.L’un. O. Pour le cas sujet, l’uns. ═ Li alte. O.

Vers 2688. — Lire chier sire.

Vers 2694.De cele gent paienur. O. Cele rompt la mesure du vers.

Vers 2695.Dolor. O. V. la note du vers 489.

Vers 2698.Dit cascun à l’altre. O. Tous les autres Mss. sont unanimes à nous offrir : Dist l’uns à l’altre, qui est nécessaire pour la mesure.

Vers 2701.Ier. O. Her, qui se trouve au v. 2745, est la forme la plus étymologique ; mais d’un autre côté ce mot ne se trouve, comme assonance, que dans un couplet en ien. Lire plutôt ier, ici comme partout. ═ Poign. O. V. la note du vers 415.

Vers 2703. — Lire Iert. O.

Vers 2708.Muntez. O. Le cas s. p. exige muntet.

Vers 2710.Par bel amur malvais saluz li firent. O. Leçon évidemment fautive, que nous avons été obligé de corriger. Venise IV porte : Al roi Marsilio (sueve) salu li dixe. Versailles : Cil le salue(nt) soef par bon talent. Et Paris : Si la saluent et bel et gentement. G. a proposé : Par bele amur soef salut i firent ; et Mu. : Par bel amur Marsilie salut firent.

Vers 2716.Rencesval. O. La forme correcte Rencesvals se trouve aux vers 892, 901, 912, 2225, 2516, 2453, etc. ═ Muaves vertus. O. Erreur évidente, corrigée par Mu. d’après Venise IV, dont le texte est assez corrompu : Malvasio vertu li fe.

Vers 2717. — Lire chevaliers.

Vers 2718. — Lire plutôt mien. O. V. la note du vers 1500.

Vers 2719.Poign. O. V. la note du vers 415.

Vers 2722.Avrat. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 2723. — Ce vers de douze syllabes pourrait être ramené à un décasyllabique. Lire : Lasse ! que n’ai un hume qui m’ociet.

Vers 2724.Clarien. O. Pour le cas sujet, il faut Clariens. (V. 2725.) ═ Messages. O. Pour le s. p., message. (V. 2726.) ═ Guarant. O. Le cas sujet veut guaranz.

Vers 2731.Puisant. O. Pour le cas sujet, il faut un z au lieu du t final.

Vers 2732.Querant. O. Même remarque.

Vers 2733. — Le Ms. porte mort o recreant. Nous avons partout adopté la forme u, comme plus étymologique et plus conforme à notre phonétique.

Vers 2737. — Lire ber. O. ═ Cumbatant. O. Pour le cas sujet, il faut cumbatanz.

Vers 2738.Voel. O. Erreur du scribe. V. la note du vers 40.

Vers 2739. — Lire ciel. O. V. la note du vers 1500.

Vers 2740.Home. O. V. la note du vers 20. ═ Vivant. O. Le cas sujet exige vivanz.

Vers 2743.Vos. O. V. la note du vers 17. ═ Destreit. Pour le s. s., il faut destreiz.

Vers 2744.Filz. O. Au cas régime, fil.

Vers 2745.Her. O. V. la note du vers 2701.

Vers 2746.Vienge. O. Le t final a été oublié par le scribe. Il y avait dejà tendance à sen passer. ═ La forme venget, sans l’i, se trouve aux vers 1091, 1744, 2680. Cf. vienge au vers 2939.

Vers 2747.Amiraill. O. V. la note du vers 2615.

Vers 2749.Li Franceis. O. Au cas oblique du pluriel, les.

Vers 2750.Conseill. O. V. la note du vers 30.

Vers 2751.Avrat. Mu. ═ Oi. O. V. la note du vers 1210.

Vers 2753. — Vers très-obscur. Le Ms. porte : Pui li dites il n’en irat s’il mcreit. Mu. propose de rectifier ce vers ainsi qu’il suit : Carles, li dites, n’en irat, s’il me creit. — Le texte de Paris saute ce vers, que le rajeunisseur peut-être ne comprenait plus. Venise VII porte : De Sarraguce les clés emporterois. — De Karlemeine li direz sanz grezois, — Jamès n’ira à Chartres ne à Blois.

Vers 2754.E n’est pas dans le Ms.

Vers 2755.Marsilie. O. Pour le cas sujet, il faut l’s final.

Vers 2758.Cel ewe. O. Erreur évidente.

Vers 2759.N’i ad mais. O. Mais rompt inutilement la mesure du vers, et Mu. a eu raison de le supprimer.

Vers 2760.Amiraill. O. La forme correcte est amiral, d’après le s. amiralz. V. le Glossaire. ═ Host. O. V. la note du vers 739.

Vers 2761.Vos. O.

Vers 2762.Livrées. Mu.

Vers 2764.Cuiget. O.

Vers 2767.Amiraill. O. V. la note du vers 2760. ═ Vunt esfréedement. O. Erreur évidente, rectifiée par G. et Mu., d’après Venise IV et Versailles.

Vers 2768.Sarrace. O. ═ Clés. O. Mi.

Vers 2769.Baligant. O. Pour le cas sujet, Baliganz. ═ Vos. O. V. la note du vers 17.

Vers 2770.Marsilie. O. Le cas sujet exige l’s final.

Vers 2771.Clarien. Même remarque. ═ O. Naffret. O. Pour la même raison, il faut naffrez.

Vers 2772. — Lire ier. O. V. la note du vers 2701.

Vers 2773.Vuolt. O. Correction de G. et Mu. d’après le texte de Paris. Dans le Ms. de la Bodléienne, vuolt est écrit une deuxième fois en marge.

Vers 2775. — Lire : Li quens Rollanz, sis niés, i fut remés.

Vers 2776.Oliver. O. Pour le s. s., il faut un s. — Lire Oliviers.

Vers 2777.Adubez. O. Pour le s. p., adubet.

Vers 2778.Marsilie. O. Il faut un s à cause du cas sujet.

Vers 2781.Poign. O. V. la note du vers 415. ═ Sevret. Mu.

Vers 2782.Filz. O. Pour le régime, il faut fil.

Vers 2783.Li baron. O. Au r. p., les baruns. V. aussi la note du vers 30.

Vers 2784.Fuiant. O. Pour le cas sujet, fuianz.

Vers 2785.Enchacet. O. La leçon correcte, enchalcer, se trouve aux vers 2462, 2796. (Cf. li enchalz, v. 2446, 3635.)

Vers 2786.Vos. O. V. la note du vers 17. ═ Sucurez. O. Les deux c (qui se trouvent aux v. 3996, 3443, 1061, 3378) sont plus étymologiques.

Vers 2787. — Après ce vers, il semble qu’il faille imprimer le vers suivant. (Cf. le v. 2749.)

Defendez la encuntre les Franceis.

Vers 2788.Baligant. O. Pour le cas sujet, Baliganz.

Vers 2789.Por. O. ═ Desvet. O. Au s. s., il faut desvez.

Vers 2790.Ço li n’est pas dans le Ms. Restitution de G. d’après le texte de Versailles. ═ Lire en assonances, à la fin des vers de ce couplet : ier, O. Oliviers, chiers, milliers, enchalciet, chevaliers, herbergiet, griefs, targiez, chevalchiez, O. vielz, vengiez, chief.

Vers 2791.Ier. O. V. la note du vers 2701.

Vers 2792.Oliver. O. V. la note du vers 176. Lire Oliviers.

Vers 2795.Marsilie. O. Pour le cas sujet, il faut Marsilies. ═ Poign. O. V. la note du vers 415. — Le Ms. d’Oxford porte le destre poign. ═ Perdit. O. Pour l’assonance, il faut perdiet. (Cf. : Abatiet, v. 98, et respundiet, v. 2411.)

Vers 2797.Chevaler. O. À cause du cas sujet, il faut chevaliers.

Vers 2798.Neiet. O. Pour la même raison, neiez.

Vers 2799.Herbergiez. O. Au s. p., herbergiet.

Vers 2800.Aproeciez. O. Nous avons supprimé l’e du milieu de ce mot, lequel n’a rien d’étymologique, et provient sans doute d’une erreur du scribe. ═ Pour le cas sujet, il faut aprociet.

Vers 2801.Volez. O. (Cf. le v. 433.) ═ Lire iert.

Vers 2802.Baligant. O. Pour le cas sujet, Baliganz. ═ Fiers. O. Erreur évidente.

Vers 2803.Liet. O. Pour la même raison, liez.

Vers 2804. — Faldestod. O. V. la note du vers 407.

Vers 2805. — Puis (si) escriet, de Mu. Si n’est pas dans le Ms. ═ Vos. O.

Vers 2806.Chevalciez. O. L’h et l’a ont été ajoutés entre les deux lignes. La forme chevalchez se trouve aux vers 366, 706, 1183, 1189, 1351, 1630, 1631, 1834, 1920, 2454, 2689, 2812, 2851, 3214, 3234, 3697. On ne trouve qu’une fois chevalcez (v. 3018), et une seule aussi chevalciez (à ce v. 2806). Mais ce mot se trouve uniquement, comme assonance, dans les couplets en ier. Cf. cevalchet, v. 1619, 1812 et 3695 ; cevalchum, v. 3178, et enfin cevalcent, v. 3195.

Vers 2807.Karlemagne. O. V. la note du vers 94. Pour le cas sujet, il faut un s final. ═ Veilz. O. V. la note du vers 2409.

Vers 2808.Marsilie. O. Pour le cas sujet, il faut Marsilies. ═ Enqui. O. V. la note du vers 1194. ═ Venget. O. Pour le cas sujet, il faut vengiez.

Vers 2809.Poign. O. V. la note du vers 415. ═ Liverai. O. La correction est de G. et de Mu. ═ Ches. O. erreur évidente.

Vers 2810.Eissut. O. Cf. v. 2647, issut. Pour le r. p., issuz.

Vers 2811.Muntez. O. Pour le cas sujet, muntet.

Vers 2815.De tute mes oz l’aünade. O. La correction (indispensable pour l’assonance) est de M. Müller.

Vers 2816.Muntez. Puis en sun destrer brun est munte. Ce dernier mot a été ajouté postérieurement à la fin de la ligne. ═ Lire destrier.

Vers 2820.Cuntes. O. V. la note du vers 20, sur le sujet pluriel des noms masculins de la troisième déclinaison latine.

Vers 2822.Bramidonie. O. Jusqu’ici la reine a été nommée « Bramimonde » : nous lui avons partout laissé ce nom. Ce n’est pas ici le lieu de discuter cette variante importante. (V. notre Introduction, I, pp. lxix, lxx.) En tout cas, et au pis-aller, elle prouverait que deux scribes ont travaillé à la copie de notre Chanson, et non pas deux poëtes à sa composition. Son unité, sa très-profonde unité littéraire nous paraît au-dessus de toute contestation. ═ Curant. O. Pour le cas sujet, curanz.

Vers 2824. — Supprimer le mot sire. ═ Mon. O. V. la note du vers 20. ═ Seignor. O Même renvoi.

Vers 2826. — Lire sus, et non pas suz. ═ Chambre. O. Nous avons adopté cambre, d’une prononciation plus étymologique, et qui se trouve aux vers 2332, 2593, 2709, 3992. Chambre, au contraire, ne se trouve qu’ici.Od. Aucun des éditeurs n’a lu ce mot, que le Ms. porte très-distinctement. Ils ont tous lu ad, qui ne s’expliquerait pas avec son d euphonique devant doel. ═ On pourrait ajouter ici le vers suivant du texte de Paris : Là Marsilies en un riche lit fut.

Vers 2827.Marsilie. O. Pour le cas sujet, Marsilies.

Vers 2828.Dui. O. Le cas régime veut dous. M. Müller, avec raison, a changé dui en dous ; mais c’est là faire un texte critique, et, nulle part ailleurs, M. Müller ne se l’est proposé.

Vers 2831.Marsilie. Comme au v. 2827.

Vers 2832. — Le texte ici est absolument incompréhensible : Teres tutes ici rengnes vos rendemas. Nous adoptons, d’après Venise IV, la correction longuement motivée de Mu. (V. pp. 196, 197.) — G. avait proposé : Tutes ici mes teres je vous rend. Nous pourrions encore supposer : Ma tere tute e mun regne vus rend.

Vers 2833.Onur. O. V. la note du vers 45.

Vers 2835. — Lire Dolenz, à cause du cas sujet.

Vers 2836.Vos. O.

Vers 2840. — Malgré l’aoi, qui se trouve à la fin du précédent couplet, il est évident que les cinq vers suivants en faisaient partie. Fondre ces deux couplets en un seul.

Vers 2841.Ceval. O. V. la note du vers 1379. ═ Puignant. O. Pour le cas sujet, puignanz.

Vers 2842. — Lire plutôt premiers.

Vers 2843. — Le Ms. porte très-distinctement : De uns ad altres, qui nous paraît une excellente leçon, malgré le Da l’ora avanti de Venise IV et le D’eures en autres de Paris. ═ Escriant. O. Pour le cas sujet, escrianz.

Vers 2844.Car. O. Lisez Kar. (V. la note du vers 275.) ═ Frant. Erreur évidente.

Vers 2845. — C’est ici que la Karlamagnus Saga et la Keiser Karl Magnus’s Kronike se raccordent avec le récit des Songes de Charlemagne. (Vers 2525, 2569.) ═ À partir d’ici, la Compilation islandaise suit un texte français notablement différent de celui d’Oxford, et d’où l’épisode de Baligant est absent. Nous noterons avec soin toutes les différences. ═ Matin. O. G. et Mu. ont adopté matin(et), d’après Venise et Versailles. ═ Li albe. O. Li est une erreur manifeste, que Mu. n’a pas corrigée.

Vers 2847.Sein. O. Mi. et G. ont bien à tort suppléé seins. Sanctus a dû donner seinz, puisque zts. — Lire de part. O.

Vers 2853.Vedeir. Mu. Dans le manuscrit, le d semble avoir été postérieurement effacé. C’est qu’à un moment donné le d ne fut décidément plus en usage, et que la forme veeir demeura seule. Ces corrections de notre manuscrit sont éloquentes. (On trouve vedeir aux v. 270 et 1992 ; mais veeir aux vers 1104, 1720. Cf. veez de videte ou videtis, vers 925, 1099, 1131, 1694, 2425, 2743, 3315, et veeit de videbat, vers 2558.)

Vers 2854. — Le manuscrit nous donne ò fut. Nous avons partout adopté u, qui est plus étymologique, et qui, d’ailleurs, se trouve fréquemment dans notre texte. (Vers 108, 1326, 1363, 2402, 2403, 2405, 2409, 2691, 2912, etc.)

Vers 2855.Carles venuz. O. Erreur du scribe. Venuz ne convient pas à l’assonance de ce couplet. Il était facile de restituer entrez, d’après Venise IV et Paris.

Vers 2857.Segnus. O. Erreur évidente.

Vers 2859.Neud. O. Même remarque.

Vers 2860.Feste à Noel. O. Ad una festa Noel. Venise IV.

Vers 2861.Vanteent. O. Erreur du scribe.

Vers 2864.Jà ne ne murreit. O. Erreur évidente.

Vers 2865.Hume. O.

Vers 2866.Avreit. Mu.

Vers 2867. — Lire ber.

Vers 2868.Qu’en. O. Je pense qu’il y a ici une erreur du scribe. (Q̅u̅e̅ pour q̅u̅o̅.) Sans doute on trouve dans certains dialectes en pour on ; mais nous n’avons pas ici affaire à ces dialectes, et nous doutons, d’ailleurs, qu’à la fin du xie, au commencement du xiie siècle, cette forme se rencontre ailleurs.

Vers 2869.Muntet. O. Pour le cas sujet, il faut muntez.

Vers 2870.Empereres. O. V. la note du vers 1. ═ Nevold. O. Pour l’assonance, nevuld, qui d’ailleurs se rencontre au v. 216.

Vers 2871.Pre. O. Pre[d]. Mu. Pour la leçon pret, voyez la note du vers 2. ═ Flors. O. Pour l’assonance, flurs. Flors ne se rencontre que deux fois (ici et au vers 2898), tandis que flurs est fort usité. (Vers 1276, 1354, 1856, 2431, 3162, 3173, 3503. Cf. flurit, flurie, vers 117, 970, 1771, 2353, 3087, 3211, 3361.)

Vers 2872.Vermeilz. O. Erreur du scribe. Flurs est du féminin. ═ Barons. O. V. la note du vers 30.

Vers 2873. — Lire pitiet.

Vers 2874.Parvenuz est li Reis. O. Li Reis a été ajouté postérieurement. Pour avoir l’assonance, G. s’est contenté de changer les mots de place, comme nous avons fait. — Mu., d’après Venise IV, a suppléé : Parvenuz est à munt. Il faut adopter cette correction, qui est la bonne. En effet, parvenuz n’est pas admissible comme assonance dans un couplet en un, ur, ou. Tout autres sont les couplets en u, tels que le ccii. Cette différence est capitale.

Vers 2877.Karles. O. Lire Carles, d’après la note du v. 94.

Vers 2878.Aled. O. Pour le cas sujet, il faut alez. ═ Pleins. O. Il nous semble que le singulier est ici préférable.

Vers 2879.Entre ses mains ansdous le priest suus. O. La correction de Génin : Entre ses mains ambedous le prist sus, est inadmissible au même titre que celle du vers 2874. (Ces couplets, en effet, sont terminés par des mots en ur, un et ou, comme ansdous.) ═ Ansdous. O. Forme incorrecte. — On peut, au lieu d’ambesdous, lire ambsdous.

Vers 2881.Empereres. O. V. la note du vers 1. ═ Pasmeisuns. O.

Vers 2882.Acelin. O. Pour le cas sujet, Acelins.

Vers 2883.Gefrei. O. Pour la même raison, Gefreiz. ═ Sun frere Henri. O. Erreur évidente. Correction de Mu.

Vers 2885.Nevod. O.

Vers 2887.Amis Rollanz. O. V. la note du vers 15 sur les vocatifs.

Vers 2888.Unques. O. V. la note du vers 629.

Vers 2889.Por. O.

Vers 2890.Honor. V. la note du vers 45. ═ Turnet. O. Erreur évidente. Correction de Mu.

Vers 2892.Se vint de pasmeisuns. O. Deux erreurs du scribe. Toutefois il importe d’ajouter ici que pasmeisuns est toujours écrit, dans notre manuscrit, avec un s final.

Vers 2893.Par mains le tienent. Mu. Nous avons conservé la leçon du manuscrit. On prononçait sans doute : Par les mains l’tienent (?). ═ IV. Mu. Le manuscrit porte IIII. ═ Barons. O.

Vers 2894.Guarde. O. Mi. Mu, Nous avons rétabli le t étymologique. ═ Vei. O. Erreur évidente. ═ Neuld. O. Id.

Vers 2896.Tenebros. O. Pour l’assonance, tenebrus.

Vers 2898.Rollanz. O. V. la note du vers 15. ═ Flors. O.

Vers 2900.Venis mal. O. Venis mare. G. La correction adoptée est de Mu.

Vers 2901. — Lire iert. ═ Juurn. O. Il faut, au cas sujet, jurz.

Vers 2903.Avrai. Mu. V. la note du vers 38. ═ Onur. O. V. la note du vers 45. Le vers 2890, la meie honor, nous prouve que l’h n’était pas aspirée.

Vers 2904. — Lire ciel. O. V. la note du vers 545.

Vers 2906.Amsdous. O. V. le Glossaire.

Vers 2909.Rollanz. V. la note du vers 15.

Vers 2910.Chambre. O. Cambre, plus étymologique, est aussi beaucoup plus usité. (Vers 2332, 2593, 2709, 3992.)

Vers 2912. — Au lieu de cataignes, lire catanies. V. la note du vers 2320.

Vers 2913. — Lire dirai. O.

Vers 2915.Jur. O. Il faut ici le cas sujet jurz. ═ Plur. O. Pour la 1re pers. (plorem), il faut plure.

Vers 2916.Rollanz. O. V. notre note sur les vocatifs (au vers 15). ═ Prozdoem. O. On trouve le plus souvent, dans le texte de la Bodléienne, la forme prozdom, vers 26, 1474, 1593, 2068, et prozdomes, au pluriel, vers 2212, 3076. — Prodome se rencontre au vers 1501 ; produme, aux vers 1288, 1485, pour le s. ; aux vers 3204, 3875, pour le pluriel. — Une seule fois, en dehors du vers 2916, on trouve la leçon prozdoem (vers 314), mais c’est pour l’assonance, dans un de ces très-rares couplets en oe...

Vers 2917.Chapele. O. Capele, d’une prononciation plus étymologique, se lit aux vers 52 et 3744. Remarquer que le ch se trouve presque toujours employé devant l’e dans notre texte, et plus rarement devant l’a.

Vers 2918.Noveles. O. La forme la plus fréquemment employée dans notre texte, la plus conforme à sa phonétique, est nuveles. (Vers 55, 665, 810, 1699, 1257, 1699.) Cf. noveles, vers 336, 2638, 3747, et novelet, vers 2118.

Vers 2919. — Le manuscrit porte visiblement dirrai. Lire dirai.

Vers 2920.Cunquere. O. Les deux rr se trouvent dans cunquerrai (vers 988), cunquerrat (vers 401) ; mais surtout dans le simple querre (vers 1782, 2180, 2870, 2947) et querreient. (Vers 404.) On ne trouve que deux fois quere. (Vers 1700 et 3296.) Cette dernière forme est moins étymologique.

Vers 2923.Puillain. S’agit-il ici des gens de la Pouille, ou de ceux de la Pologne ? Nous croyons que, dans la géographie du moyen âge, et même dans notre seule Chanson de Roland, le mot a eu tour à tour les deux sens. Dans le voisinage du mot Romain, les Puillain me paraissent se rapporter ici à me région italienne ; au vers 2328, la Pullanie, nommée après la Bulgarie, peut signifier la Pologne. Bien de plus incertain...

Vers 2925. — Le manuscrit porte entrerrunt. Erreur manifeste.

Vers 2927.Morz n’est pas dans le manuscrit. Restitution de tous les éditeurs. ═ Nos. V. la note du vers 17.

Vers 2928. — Le manuscrit n’a pas les mots dulce et oi, qui ont été aisément restitués : le premier, par tous les éditeurs ; le second, par Mu., d’après Venise IV. ═ Remeines. O. La correction est de Mu.

Vers 2932.Francs. O. Pour le s. p., il faut Franc.

Vers 2933.Rollanz. O. V. la note du vers 15, sur la règle des vocatifs. Changer ainsi, d’après le texte de Paris, les vers 2933-2935, qui ne sont pas assonancés comme il faut :

Ami Rollant, as perdue la vie ;
L’amne de tei en Pareïs seit mise !
Ki tei as mort bien ad France hunie.

Vers 2936.Dol. O. Cette forme ne se rencontre qu’une seule fois dans tout notre manuscrit. En revanche, la forme doel est constante. (Vers 304, 834, 904, 971, 1196, 1219, 1446, 1501, 1536, 1538, 2082, 2206, 2513, 2608, 3627, 3646.) ═ Voldereie. O. Est également une forme inusitée, et c’est vuldreie que l’on rencontre le plus souvent. (Vers 412, 2859, 2929.) Cf. vuldrat, vulderez, vers 76, 155, 2621. ═ Lire vivere, comme au vers 1923.

Vers 2938.Sancte. Mu. L’abréviation sce est, comme nous l’avons dit, une abréviation latine. Le scribe, habitué à transcrire du latin, l’a employée pour désigner le mot seinte, plusieurs fois employé par lui in extenso. (V. seint, aux vers 53, 921, 973, 1134, 1479, 1581, 2346, 2395, 2526, 3610, 3685, 3693, 3746, 3993 ; et seinte, vers 1856, 2245.) ═ Sancte est une forme qui n’a véritablement rien de français.

Vers 2939. — Lire plutôt Vienge. O. Cf. la forme venget, vengent, aux vers 1091, 1764, 1838, 2680. ═ Sirie. O. Erreur manifeste du scribe. (V. Sizer, aux vers 583, 719.)

Vers 2940.Oi. V. la note du vers 1210.

Vers 2941.Fust n’est pas dans le manuscrit. — G. avait suppléé seit.

Vers 2943.Bare. O. Erreur ou distraction du scribe.

Vers 2944. — Il y a ici, dans la Karlamagnus Saga (ch. xxxix) et dans la Keiser Karl Magnus’s Kronike, un très-curieux épisode qui ne se trouve nulle part ailleurs... Le roi envoie tour à tour plusieurs chevaliers pour prendre l’épée de Roland. Ils ne réussissent pas à l’arracher des mains du mort. Charles en envoie cinq autres à la fois, « un pour chaque doigt. » Peines perdues. L’Empereur s’aperçoit que pour toucher à cette épée merveilleuse, il faut être aussi bon chevalier que Roland. Il se met à prier Dieu, puis s’approche de l’épée de son neveu, et s’en empare très-facilement. Il en garde précieusement le pommeau, qui était plein de reliques ; mais, quant à la lance, il la jeta dans l’eau, loin de terre, « parce qu’il savait qu’il n’appartenait à personne de la porter après Roland. » (V. notre traduction de la Saga et de la Chronique danoise, au vers 4002.)

Vers 2945.Gefrei. O. Au cas sujet, Gefreiz.

Vers 2946.Dolor. O. V. la note du vers 489.

Vers 2948.Mort. O. Le verbe est actif ici, et l’on peut ad libitum mettre morz ou mort.

Vers 2949.Que hom. O. V. la note du vers 20, sur la non-aspiration de cet h initial.

Vers 2951.Gefreid. O. Pour le sujet, il faut Gefreiz.

Vers 2952.Comandet. O. V. la note du vers 309.

Vers 2954. — Lire p.-e. carnier. ═ Ici se trouve raconté, dans la Karlamagnus Saga (ch. xl) et dans la Keiser Karl Magnus’s Kronike, le miracle des Aubépines, qui se lit, avec une légère variante, dans le récit de Philippe Mouskes... « Charles ne sait comment reconnaître les cadavres chrétiens des païens : Dieu fait un grand prodige, et des buissons d’épines sortent du corps des mécréants. » (Cf. la Chronique rimée, vers 8063-8068.)

Vers 2956.Munies, canonies. G. Mu. Muines, canonies. Mi. V. notre note du vers 1881. ═ Coronez. O. V. la note du vers 2684.

Vers 2960.Honor. V. la note du vers 45.

Vers 2963. — Lire Olivier. ═ La Keiser Karl Magnus’s Kronike, par égard sans doute pour la Chronique de Turpin, ne peut se résoudre à la mort du fameux Archevêque... On trouve Turpin encore vivant sur le champ de bataille, on bande ses blessures, on le met en un bon lit. « Il marcha depuis avec deux béquilles, mais il resta dans son archevêché tant qu’il vécut. »

Vers 2964.Devant sei. O. La correction est de G. et Mu. ═ Uvrir. Mu. L’abréviation est très-claire. (V. la note du vers 38.)

Vers 2965.Quers. O. La forme correcte est coer, qui se trouve aux vers 317, 1107, 1278, 1438, 1447, 1566, 2019, 3628.

Vers 2966.Un blanc sairou de marbre. O. Mi. G. La correction est de Mu., d’après Venise IV : En blancho sacuer...

Vers 2967.Barons. O. D’après la note du vers 30, lire baruns.

Vers 2968.Treis n’est pas dans le manuscrit. Correction de Mu.

Vers 2969. — Lire bien. ═ Lavez. O. Pour le cas sujet, lavet. ═ Lire ici la note de M. d’Avril (p. 150 de son éd. in-8) : « D’autres poëmes, dit-il, mentionnent l’opération de laver les corps avec de l’eau, du vin et du piment, notamment Raoul de Cambrai : Le cors li leve de froide eaue et de vin. » (P. 329.) Dans Garin le Loherain (trad. P. Paris, pp. 249-253), on dit aussi que les corps sont mis en des outres de cuir, etc. etc.

Vers 2970.Tetbalt. O. Nous avons adopté la forme plus étymologique Tetbald, qui se trouve, dans notre manuscrit, employée deux fois sur trois. (Aux vers 173 et 3058.)

Vers 2972.Les guiez très ben. O. Correction de Mu.

Vers 2973. — Lire bien. O. V. la note du vers 1500. ═ Cuverz. Pour le cas sujet, cuvert.

Vers 2974.Volt. O. V. la note du vers 40. ═ La Karlamagnus Saga et la Keiser Karl Magnus’s Kronike passent ici (en omettant tout l’épisode de Baligant) au récit des dernières funérailles des héros morts à Roncevaux (vers 3682 et ss.) et du jugement de Ganelon. (Vers 3704 et ss.)

Vers 2976.Messages. O. Pour le cas sujet, il faut message.

Vers 2977.Amiraill. O. V. la note du vers 2760.

Vers 2979.Veiz. O. Le z ne nous paraît pas ici à sa place. Il égale généralement ts, qui n’existe ni dans vides ni dans vide.

Vers 2982. — Réunir en un seul couplet les deux laisses ccxvi et ccxvii.

Vers 2983.Del doel. Correction de Mu.

Vers 2985.Grand. O. Partout ailleurs, grant.

Vers 2987.Empereres. O. V. la note du vers 1.

Vers 2990. — Pour la mesure du vers, lire claretet.

Vers 2991.Un escut de Biterne. O. D’après Venise IV, nous imprimons : Un escut de Girunde, qui est conforme à l’assonance de notre couplet. ═ Quant à Biterne, qu’on a bien à tort assimilé à Viterbe, voyez F. Michel, 1re éd., 173.

Vers 2992.Tient sun espiet, si’n fait brandir la hanste. O. Ce vers n’est pas encore assonancé comme il conviendrait : Venise IV nous donne : Ten sun espieu che fu fato à Blandone, que nous avons adopté.

Vers 2993.Ceval. O. V. la note du vers 1379.

Vers 2995.Nerbone. O. Nous avons adopté Nerbune, pour l’assonance.

Vers 2996.Esperonet. O. Même remarque.

Vers 2997.Mil humes. O. Correction de Mu.

Vers 2998.Rome. O. Même observation qu’au vers 2995.

Vers 2999.Champ. O. V. la note du vers 555.

Vers 3001. — Lire bien. ═ Lor. O. V. la note du vers 17. ═ Atalentet. O. Le pluriel est nécessaire.

Vers 3002.Cevals. O. V. la note du vers 1379.

Vers 3003.Muntez. O. Pour le cas sujet, il faut muntet. ═ Grande. Mu. Grante. G. Le manuscrit porte grant. Nous avons rétabli la mesure du vers autrement que Mu. Il est vrai que grande se trouve deux fois dans notre texte (vers 281, 3656) ; mais grant se rencontre au fém. sing. un nombre de fois bien autrement considérable. (Vers 242, 301, 335, 356, 651, 666, 734, 1575, 1584, 1620, 1622, 1630, 1639, 1705, 2090, 2334, 2417, 2519, 3305, 3745.) Il en est de même du fém. plur. (Vers 29, 1005, 1431, 1633, 1756, 3346, 3688, 3861, etc.)

Vers 3004.S’il trovent oi. O. L’e de troevent avait été écrit, mais il a été effacé. ═ Pour la restitution du mot ost, Mu. s’est servi du vers 3025 et de ses équivalents dans le manuscrit de Venise IV : S’ei trova stormo et bataia pesant, etc. ; et dans celui de Versailles : Se trovent ou, bataille feront grant. ═ Lire truevent, comme au vers 3025.

Vers 3008.Naimon. O. ═ Li. O. Pour le cas régime, il faut le.

Vers 3011.Si. O. La conjonction conditionnelle est ordinairement se. ═ Arrabiz. O. Lire peut-être Arrabit, qui parait avoir été le sujet pl. (V. 3481.)

Vers 3013.Nos. O. V. la note du vers 17. ═ Cunsente. O. Nous avons dû restituer le t étymologique.

Vers 3014.Rabe. O. Lire Rabel. (Comme au vers 3348.)

Vers 3015.Vos. O.

Vers 3016. — Lire Olivier.

Vers 3018. — Lire chevalchiez, d’après la note du vers 2806 et celle du vers 1500.

Vers 3019.Milies. O. ═ Francs. C’est ici que le manuscrit de Versailles introduit les Parisiens en scène, et les couvre d’éloges : Ensemble o vos, XX. M. Parisant, — Tuit baceler e nobile conquerant, etc.

Vers 3020.Meillors. O. V. la note du vers 51.

Vers 3021.Avrat, Mu.

Vers 3022.Gibuins et Guinenans. O. Il y a là une erreur manifeste. Paris donne : Joiffrois et Joscerans ; Versailles : dan Richer le Normant. Mais la meilleure version est donnée par Venise IV : Geboin et Loran. Ce dernier mot vient-il de Laurentius ? ou de Loteramnus ? Dans le premier cas, il faudrait Loranz. Mu. a imprimé Lorains, d’après le vers 3469.

Vers 3024. — Lire bien.

Vers 3025.S’il troevent oi. O. V. la note du vers 3001. ═ Iert. O. V. la note du vers 517. ═ Grant. O. Pour le cas sujet, granz.

Vers 3026. — Lire premières. ═ Je pense que nous avons peut-être affaire ici à un couplet féminin en ier, et qu’il faut plutôt lire en assonances : eschieles, tierce, Bavière, preisièrent, laissiée, chière, cunquièrent. Voyez le couplet ccxlix, qui nous semble dans le même cas.

Vers 3029.Milie n’est pas dans le manuscrit, mais a été aisément restitué d’après tous les autres manuscrits. ═ Lire chevaliers.

Vers 3030. — Lire iert, et, au vers suivant, ciel.

Vers 3033.Oger. O. Il faut Ogiers pour le cas sujet. Pour la légende d’Ogier, voy. la note des vers 96 et 749. ═ Puinneres. O. Les mêmes raisons qui nous ont décidé à écrire partout emperere et non empereres, nous font ici supprimer l’s final. V. la note du vers 1.

Vers 3035. — Pour rétablir la mesure du vers, on pourrait écrire : Or treis escheles ad l’emperere Carles.

Vers 3037.Barons. O. V. la note du vers 30. ═ Qu’asez. O. Comme ici c’est ki, et non pas que, dont la dernière lettre est supprimée, nous écrivons k’asez. (V. la note du vers 586.)

Vers 3038.Alemans. O. Pour le cas sujet, Aleman.

Vers 3040. — Lire bien. ═ Guarniz. O. Le cas sujet exige garnit.

Vers 3041.Por. O.

Vers 3042.Murat. O. Correction de G. et Mu.

Vers 3047.Cevals. O. V. la note du vers 1379.

Vers 3048. — Lire ierent. ═ Recreanz. O. Pour le cas sujet, il faut recreant.

Vers 3049.Ciel. O. V. la note du vers 545 et celle du vers 1500.

Vers 3050. — Lire vielz. ═ Richard. O. Le cas sujet exige Richarz. ═ Résumons brièvement la légende de Richard de Normandie. a. Comme on le voit, il n’est pas compté par l’auteur du Roland au nombre des douze Pairs. Mais, en revanche, il est élevé à cet honneur dans Renaus de Montauban, Gui de Bourgogne, l’Entrée en Espagne (?), Fierabras, Simon de Pouille. — b. Dans Renaus de Montauban, Richard joue son rôle à côté des autres Pairs. Il se refuse énergiquement à pendre son homonyme, Richard, le fils d’Aymon, que Charlemagne a injustement condamné à mourir : Richars est de ma geste et de mon parenté ; — Je ne l’pandroie mie por quan que vos avés. (Éd. Michelant, p. 268, vers 30, 31.) — c. Richard fait, dès le début, partie de la grande armée qui passe les Pyrénées. Au commencement de l’Entrée en Espagne, il est représenté comme un partisan de la guerre, contre Ganelon, chef du parti de la paix (f° 3, r°, du manuscrit de Venise, xxi), etc. etc. — d. Mais le poëme où il tient le plus de place, c’est la Chanson de Saisnes, et il en tenait encore davantage dans ce roman perdu qui avait pour titre les Barons Herupés. Dans les Saisnes, en effet, Richard est un des chefs des Herupois. Or les Herupois, « ce sont les Normands, les Angevins, les Manceaux, les Bretons et les Tourangeaux. » À leur tête on voit le vieux Huon du Mans, Geoffroi d’Angers, Richard de Normandie et Salomon de Bretagne. Or ces peuples jouissent de priviléges exorbitants, et, quand un jour l’Empereur veut les contraindre à payer le chevage, ils se mettent en marche... contre Charles. Ce sont des rebelles, et de formidables rebelles. L’Empereur pâlit et tremble à leur approche : il va au-devant d’eux, pieds nus, avec le Pape, les évêques et les barons. C’est alors, mais alors seulement, que les Herupois daignent s’apaiser. (V. la Chanson de Saisnes, couplets xix-xliv.)

Vers 3053.Milie. O. Et non pas milies. Mu. ═ Lire chevaliers.

Vers 3054.Baron. O. Le pluriel est nécessaire. Pour l’u à la place de l’o, voy. la note du vers 30.

Vers 3055.Peintes lur hanstes. O. Correction de Mu. ═ Gunfanun. O. Le pluriel est nécessaire.

Vers 3056.Le seigneur d’els. O. Au cas sujet, li sire. ═ Apelet. O. Pour le s. m., il faut apelez.

Vers 3059.Vos. O. V. la note du vers 17.

Vers 3062.Barons. O.

Vers 3063.Chevalers. O. Pour le cas sujet, il faut chevalier.

Vers 3069.E n’est pas dans le manuscrit.

Vers 3070. — Lire chevaliers.

Vers 3073.Hamon. O.

Vers 3075.Naimon. O.

Vers 3078. — Lire chevaliers.

Vers 3079.Lor. O. V. la note du vers 17. ═ Bronies. O. Pour l’assonance, brunies.

Vers 3081.Arrabiz. O. Pour le s. p., il faut Arrabit, comme au vers 3481.

Vers 3082.Cis. O. La forme exacte est cist, dont nous rappelons ici la déclinaison : S. s. : cist ; r. s. : cest ; s. p. : cist ; r. p. : cez.

Vers 3083.Argone. O. Pour l’assonance, Argune.

Vers 3085.Meillors. O. V. la note du vers 51. ═ Cataignes. Lire catanies. (V. la note du vers 2320.)

Vers 3090. — V. la note sur les armures. (Vers 994.) Cf., dans Aspremont, ces deux vers : Et à lor armes vont la crois acousant ; — Por ce sera l’un l’autre conoisant. (B. N., 2495, f° 125, v°. — V. aussi la note de F. Michel.)

Vers 3091.Muntez. O. Pour le cas sujet, muntet.

Vers 3092.Carlemagne. O. Le cas sujet exige un s final.

Vers 3093.Gefreid. O. Pour le sujet, Gefreiz.

Vers 3095.Eschange. O. La forme la plus étymologique est escange. (Vers 840.)

Vers 3097.Se est culchet. O. — Ven. IV : Si se colce. — Paris : se coucha. — Versailles : s’est cochez.

Vers 3098.Sun. La dernière lettre n’est pas dans le manuscrit.

Vers 3100.Jor. O. V. la note du vers 30. La forme jur se trouve aux vers 162, 664, 717, 816, 1780, 2107, 1915 ; jurz, aux vers 54, 667, 851, 1002, 1807, 1882, 2147, 3345, 3560, 3745, 3991, et jurn, aux vers 971, 1477, 2901.

Vers 3102.Enz n’est pas dans le manuscrit. Correction de Müller, d’après Venise : lu tint, pour l’ot ent.

Vers 3105.Leons. O. V. la note du vers 30. La forme leun se trouve aux vers 128, 1888, 2286. ═ Le manuscrit porte o. Nous avons adopté partout la forme étymologique u.

Vers 3107.Amur. O. V. la note du vers 611.

Vers 3109.Nevold. O. Voyez nevuld, au vers 216. ═ Poisse. O. V. la note du vers 1993.

Vers 3110.Si s’drecet. Mu.

Vers 3111.Poisant. O. Même remarque que pour poisse, au vers 3109.

Vers 3113.Neimes. O. Le nom du duc de Bavière est tantôt, dans notre manuscrit, écrit Neimes, et tantôt Naimes. Lire partout Naimes, qui est la forme la plus usitée dans tous nos Romans.

Vers 3115. — Lire bien.

Vers 3118.Greisle. O. V. la note du vers 700.

Vers 3119.Olifan. O. Au cas sujet, il faut olifanz.

Vers 3120. — Lire plutôt pitiet.

Vers 3122. — Lire bronie. O.

Vers 3123.Amor. O.

Vers 3124.Francs. O. Pour le cas sujet, il faut Franc.

Vers 3126.E ces parfunz valées. O. Correction de G. et de Mu., d’après le manuscrit de Paris.

Vers 3128.Alez. O. Pour le cas sujet, il faut alet.

Vers 3129.En mi em plain. O. Erreur évidente.

Vers 3131.Ki ad. O.

Vers 3132.Veud. O. V. la note du vers 2. ═ Carles. O. Erreur du scribe.

Vers 3133.Fiers. O. Pour le cas sujet, il faut fier.

Vers 3134.Avrez. Mu.

Vers 3135.Baligant. O. Le cas sujet exige Baliganz.

Vers 3136.Sacet. O. Erreur manifeste.

Vers 3138.Greisles. O. V. la note du vers 700.

Vers 3141. — Lire bronie et safret. V. la note du vers 1453.

Vers 3142.Elme. O. V. la note du vers 996. ═ Gemmet. O. Il faut gemmez pour le cas sujet.

Vers 3144.Orgoill. O. Les deux premières lettres ont été ajoutées en interligne. — V. la note du vers 292.

Vers 3145.Par la spée Carlun. O. Spée a été ajouté en interligne.

Vers 3146. — Ce vers n’est pas dans le manuscrit d’Oxford ; mais il était absolument indispensable de l’intercaler ici, d’après les manuscrits de Venise IV, Paris et Versailles. C’est ce qu’ont fait Génin et Müller.

Vers 3147. — Lire iert.

Vers 3148.Chevalers. O. Lire chevaliers.

Vers 3153.Fut n’est pas dans le manuscrit. Ajouté par tous les éditeurs, d’après le manuscrit de Versailles. ═ Tinel. O. Pour le cas sujet, tinels.

Vers 3154.Trusset. O. Pour le cas sujet, trussez.

Vers 3155.Baligant... muntet. O. Le cas sujet exige Baliganz... muntez. ═ Lire destrier.

Vers 3157.Forcheüre. O. ═ Lire ber. O.

Vers 3159.Mollet. O. Au cas sujet, mollez.

Vers 3160.Lées les espalles. O. Les rompt inutilement la mesure du vers. ═ Lire plutôt chief.

Vers 3162. — Lire iert. ═ Flur. O. V. la note du vers 611.

Vers 3163.Esprovet. O. Pour le cas sujet, esprovez.

Vers 3164.Baron. O.

Vers 3167.Pez i a été ajouté en interligne. — Nous avons partout adopté pied, qui est presque exclusivement en usage.

Vers 3169.V[i]ent. Mu. I a été effacé postérieurement. V. la note du vers 2203.

Vers 3170. — Au lieu de o (du manuscrit), lire u, qui est presque partout usité. (Vers 41, 1279, 1626, 1730, 2733, 3364.)

Vers 3172.Amirals. O. Après la lettre l, il faut ici le z, et non pas l’s. ═ Lire iert.

Vers 3173.Flur. O. V. la note du vers 611.

Vers 3174.Hom. O. Pour l’assonance, hum.

Vers 3176.Malpramis. O. La correction était tout indiquée par les manuscrits de Venise IV, de Versailles et de Paris, aussi bien que par la mesure.

Vers 3177.As ces. Erreur évidente.

Vers 3178.Perre. O. Erreur du Scribe. ═ Car. O. V. la note du vers 275. ═ Cevalchum. O. V. la note du vers 1379, où tout ce que nous disons de cheval peut s’appliquer à chevalchier.

Vers 3180.Baligant. O. Pour le cas sujet, il faut Baliganz. ═ Car. O. V. la note du vers 275.

Vers 3181.Granz honurs. O. Au cas sujet du pluriel, il faut grant honur. V. la note du vers 20.

Vers 3182.At. O. V. la note du vers 2. ═ Nevold. O. Pour l’assonance, nevuld.

Vers 3183.Avrat. Mu.

Vers 3184.Bel. O. V. notre note du vers 15, sur les vocatifs. — Filz. O. ═ Malpramis. O. V. la note du vers 3176. ═ Baligant. O. Pour le cas sujet, Baliganz.

Vers 3185.Li altrer. O. Rompt la mesure. Correction de G. et Mu., d’après Venise IV. ═ Lire iert. ═ Le bon vassal. O. Pour le cas sujet, li bons vassals.

Vers 3186.Oliver. O. Pour le cas sujet, Oliviers. V. la note du vers 176 et celle du vers 1500.

Vers 3187.Cumbatanz. O. Le cas sujet exige cumbatant.

Vers 3190.Empereres. O.

Vers 3191.Mes. O. V. la note du vers 39.

Vers 3192.X. escheles en vunt. O. Correction de Mu., d’après Venise IV et Versailles.

Vers 3193.Cil. O. La première lettre manque dans le manuscrit.

Vers 3194.Cumpaignz. O. La forme cumpainz est de beaucoup la plus usitée.

Vers 3195.Cevalcent. O. V. la note du vers 1379. ═ Lire premier.

Vers 3199.Orgoillusement. O. V. la note du vers 292.

Vers 3200.Ço n’existe pas dans le manuscrit. Restitué d’après le texte de Paris. ═ Malpramis. O. V. la note du vers 3176. ═ Vos. O. V. la note du vers 17.

Vers 3201.Bel fil. V. la note du vers 15. ═ Malpramis. O. V. la note du vers 3176. ═ Baligant. O. Pour le cas sujet, il faut Baliganz.

Vers 3202.Vos. O.

Vers 3205.Leutis. Mu. Le manuscrit porte distinctement leutiz, qui est une excellente leçon. V. les notes de Fr. Michel, qui cite de nombreux exemples. (Ire éd. de Roland, p. 222.)

Vers 3206.Orgoill. O. V. la note du vers 292.

Vers 3209.E n’est pas dans le manuscrit.

Vers 3212.Ore. O. Cf. ure, au vers 2371. ═ Unches. O. V. la note du vers 629.

Vers 3213.Vestut... saisit. O. Pour le cas sujet, il faut vestuz, saisiz.

Vers 3214.Amiraill. O. Au cas sujet, amiralz.

Vers 3216.Dapamort. O. Au cas sujet, Dapamorz.

Vers 3218. — Lire chevaliers.

Vers 3219.XXX. milie. Mu. XV. milie. G., d’après Versailles .C. milie. Mu. — Le manuscrit nous semble donner L. milie.

Vers 3220 et suiv. — Lire première. ═ L’énumération suivante montre bien quel cas il faut faire de la « Géographie de nos Chansons de geste », et en particulier de l’exactitude des vocables géographiques. Parmi ces trente-huit peuples qui composent la grande armée de Baligant, il en est quelques-uns qui ont une physionomie réelle, historique. Tels sont les Esclavoz (v. 3225) et les Clavers (3245), et peut-être la gent de Bruise (3245, Brousse ?), les Ermines (Arméniens, v. 3227), les Mors (Id.), les gens de Jericho (v. 3254) et de la gent Samuel (3344), les Turcs (3240), les Pers (Id.), les Avers (3252) (V. Aliscans, B. N. ms. fr., 368 f° 210), les Astrimonies (Strimonii, les Thraces, v. 3258), les Hums et les Hungres (v. 3254), peut-être les Micenes(3220) et les Nubles (Nubiens ? v. 3224). Butentrot enfin dérive peut-être de « Buthrotum », ville de l’Épire, aujourd’hui Butrinto. ═ C’est tout, et remarquez que ce sont là des indications très-vagues, des souvenirs se rapportant soit aux invasions, soit à l’histoire sainte, quelques-uns seulement à l’Orient fort mal connu. ═ D’autres appellations paraissent être seulement des sobriquets donnés au hasard, suivant l’imagination du poëte. La plus exacte est celle des Nigres (v. 3229). Mais que penser des Blos (3224), des Bruns (3225), des Sorz (3226), des Gros (3229), des Leus (3258) ? Ce ne sont sans doute (nous le répétons) que des sobriquets empruntés à la physionomie extérieure des païens. D’autres noms sont encore plus fantaisistes ; tels sont : Malperse (3253), fort et Baldise la lunge (3230 et 3255), et surtout Val-Penuse (3256), Balide la Clarbone (3259), Val-Fronde (3260). Ces trois derniers noms sont employés dans d’autres Romans pour désigner des localités très-chrétiennes. ═ En somme, nous venons d’établir trois catégories fort distinctes : 1° les noms historiques, 2° les sobriquets, et 3° les vocables purement fantaisistes. Je rangerais dans une quatrième et dernière famille les mots « inexpliqués ou douteux ». De longues discussions se sont produites autour du mot Canelius (3238), et Génin a été jusqu’à y voir les « luminiers » (laïques s’entend) de l’armée païenne. Peut-être y a-t-il là un sobriquet qui, comme le dit Michel, se rapporte vaguement « aux gens du pays de la cannelle ». Les Pinceneis (3241), les Solteras (3242), les Sorbres (3226), les Ormaleus et les Eugiez (3243), la gent d’Occient le desert (3246), celle de Joi e de Maruse (3257), celle d’Argoilles (3239), tous ces vocables me paraissent peu explicables, et je suis bien loin de partager l’idée de M. d’Avril, disant à la page 51 de sa traduction : « Il n’est guère admissible que le trouvère, si exact dans ses mentions géographiques relatives à la France, ait imaginé arbitrairement les noms des pays sarrasins. Je crois que ces noms se rattachent tous (!) à quelque souvenir et à quelque tradition. » Si l’on veut bien relire l’énumération précédente, on se convaincra aisément que l’imagination y a eu le plus grand rôle. ═ À coup sûr les auteurs de nos Remaniements avaient absolument perdu le fil de ces prétendues traditions. Le texte de Paris nous parle de la gent de Butancor, dont Judas faisait partie et qui comptait dans ses rangs « Mucement le guerrier ». Ce Mucement-là nous paraît né de nos Micènes as chefs gros : un nom d’homme pris pour un nom de peuple. Puis viennent « les gens de Blondernie, les Esclamor, la gent Licanor, celle que conduit Maligors, les Amoraives et ceux de Carthage, ceux de Valtornée et de Valfonde. » Il faudrait avoir une bien grande complaisance pour transformer ces pauvres inventions en documents sérieusement géographiques. ═ Et telle est aussi notre conclusion pour les deux tiers des vocables employés dans la Chanson de Roland.

Vers 3223. — Supprimer l’aoi que le manuscrit, par erreur, nous donne après ce vers.

Vers 3229.Et l’oïtme. O. La mesure est rompue par e que nous avons supprimé.

Vers 3231.Gent. O. V. la note du vers 611.

Vers 3232. — Réunir ce couplet au précédent.

Vers 3234.Karles. O.

Vers 3236.Avrat. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 3238. — Lire première. ═ Les Canelius, ou M. P. Paris voit à tort des habitants d’Iconium, sont cités dans plus d’un autre roman, et M. Fr. Michel a réuni là-dessus des textes assez nombreux. Ils sont assez souvent réunis aux Achoparz : Cheneleu, Acopart, Persan, Tur, Beduin. (Chanson des Saisnes, manuscrit de sir Thomas Philipps, f° 78.) De la terre prestre Jehan... — D’Alixandre et de Babilone, — Li Kenelieu, li Achopart, — Tuit vegnent... (Jus de saint Nicholai.)

Vers 3239.Sun. O. Erreur évidente. ═ Traver. O. ═ Venuz. O. Pour le cas sujet, il faut venut.

Vers 3246.La desert. O. Erreur du scribe.

Vers 3247.Gent. O. V. la note du vers 611.

Vers 3250.Elme. — O. V. la note du vers 996.

Vers 3252.Justedes. O. V. la note du vers 703 sur les participes passés. ═ Lire ajustet.

Vers 3253. — Lire première. ═ Jaianz. Mu. emploie un J majuscule. ═ Malperse. Mu. Au v. 3285, nous lisons Malpreis. Mais pour l’assonance, il faut ici Malprose ou Malpruse, qui se trouve dans les manuscrits de Venise et de Versailles, dans le Karl Meinet, dans le Ruolandes Liet, etc. Voy., au v. 2641, la leçon Marbrose (?).

Vers 3257.Joi e de n’est pas dans le manuscrit ; ces mots y ont été effacés par le correcteur, qui s’est véritablement montré bien sévère pour quelques parties de notre texte.

Vers 3258.Astrimonies. O. V. la note du vers 30.

Vers 3259.Argoilles. « Je propose, dit M. Raymond, de traduire les mots : cels d’Argoilles par les « habitants des Arbailles ». On appelle Arbailles une partie du pays de Soule qui borne à l’est le pays de Cize. Cela tendrait à prouver que l’armée française fut attaquée par deux tribus basques, les Navarrais et les Souletains. » (Revue de Gascogne, sept. 1869, t. X, p. 365.) Nous avons déjà dit, plusieurs fois, pourquoi nous ne pouvions admettre des assimilations aussi précises.

Vers 3260.(Val)frunde. ═ Val n’est pas dans le Ms. Restitué, d’après Venise IV. ═ Valfonde est indiqué, au v. 23, comme le château de Blancandrin. (Voir des exemples de ce mot dans l’édition de M. Fr. Michel, p. 222.)

Vers 3261.Gent. O. V. la note du vers 611.

Vers 3262.Geste francor. Il s’agit de ces Chroniques imaginaires sur lesquelles aimaient à s’appuyer les auteurs de nos Chansons.

Vers 3263.Granz. O. Pour le cas sujet, grant.

Vers 3264.Produmes. O. La forme prozdumes est la plus généralement adoptée.

Vers 3265.Hoem. O. V. la note du vers 20.

Vers 3266.Dragon. O.

Vers 3268.Un ymagene. O. Ymagene est du féminin ; il faut une.

Vers 3269.Des. O. Mu a le premier restitué dis d’après Venise. Paris donne XX chevaler, et Versailles, trente chamels (!).

Vers 3273.Mentun. O. Le r. p. exige un s.

Vers 3274.Lor. O.

Vers 3275.Franceis. L’r n’est pas dans le Ms.

Vers 3276.Vos. O.

Vers 3278.Juicget. O. Erreur évidente, corrigée par Mu.

Vers 3280.Fiz. O. Pour le cas régime, il faut fil.

Vers 3281.Barons. O.

Vers 3282. — Lire Mes XXX escheles.

Vers 3283.Meillors. O. V. la note du vers 51.

Vers 3284.L’un. O. Le féminin est nécessaire. ═ Lire iert.

Vers 3286.Ierent. O. V. la note du vers 517 et celle du vers 1500.

Vers 3287.Charles. O.

Vers 3290.Avrat. Mu. V. la note du vers 38.

Vers 3291.Granz. Pour le s. p., il faut grant.

Vers 3292.At. O. V. la note du vers 2.

Vers 3294. — Lire bien.

Vers 3295.Baligant. O. Pour le cas sujet, il faut Baliganz. ═ Gent. V. la note du vers 611.

Vers 3296.Car. O. V. la note du vers 275. ═ Lire chevalchiez, et aussi querre, qui est plus étymologique. (V. la note du vers 2920.)

Vers 3299.Vos. O. ═ Grant. O. Pour le s. s., granz.

Vers 3302.L’olifan. O. V. la note du vers 1059.

Vers 3303.Calun. O. Erreur évidente.

Vers 3304.Avrum. Mu.

Vers 3305.Grant. O. Pour le cas sujet, il faut granz.

Vers 3306.Elme. O. V. la note du vers 996.

Vers 3307. — Lire cil escut et bronies. O.

Vers 3308. — Lire cil espiet.

Vers 3309.Greisles. O. Il ne faut d’s à cause du cas sujet. Nous avons adopté la forme graisle. (V. la note du vers 700.) ═ Lire cil graisle.

Vers 3310.Olifan. V. la note du vers 1059.

Vers 3314.Charlun. O. V. la note du vers 94. ═ Lire Les X escheles.

Vers 3315.Orgoil. O. V. la nobe du vers 292.

Vers 3318. — Lire bronies. O.

Vers 3319.Neif. O. Pour le cas sujet, neifs.

Vers 3321.Avrum. Mu. V. la note du vers 3321.

Vers 3324.Baligant. O. Pour le cas sujet, Baliganz.

Vers 3325.Dit. O. Erreur manifeste.

Vers 3328.Karlun. O. V. la note du vers 94.

Vers 3329.Amiraill. O. V. la note du vers 2615.

Vers 3330.Dragon. O.

Vers 3332.Contrée. O.

Vers 3333.Empereres. O.

Vers 3335.Barons. O. ═ Vos. O. ═ Bons vassals. O. Pour le cas sujet, il faut bon vassal.

Vers 3337.Païen. O. Le cas régime exige au pluriel païens.

Vers 3338. — Lire denier. ═ Lor. O.

Vers 3341.Esperons. O.

Vers 3344.Bers. Lisez ber. (V. la note du vers 430.)

Vers 3346.Granz. O. Il faut grant pour le s. p.

Vers 3349.Lascent. O. Nous avons adopté la forme la plus usitée dans le texte de la Bodléienne. ═ Lor. O. ═ Cevals. O. V. la note du vers 1379.

Vers 3350.Laisent. O. V. la note du vers 265. — Lire Franc, qui est un s. p.

Vers 3352. — Lire chevaliers.

Vers 3355. — Lire bronie. O. ═ Escut. Il faut escuz à cause du cas sujet.

Vers 3357.Boissun. O. En conformité à notre phonétique générale, buissun.

Vers 3358.Fanceis. O.

Vers 3359.Devom. O.

Vers 3360.Guineman. O. Pour le cas sujet, Guinemans. ═ A un rei Leutice. O. Restitué par Mu. d’après Venise IV et Versailles.

Vers 3362. — Lire bronie.

Vers 3363.L’ad. O. Erreur évidente et contraire à la mesure du vers.

Vers 3366.Baron. O. V. la note du vers 30, pour le changement de o en u. Pour l’s final, voyez notre note sur les vocatifs, au v. 15. ═ Vos. O. V. la note du vers 17.

Vers 3367.Gent iesnie. O. Resnie. M. et G. Restitution de Mu., d’après Venise IV et Versailles. Vers la gent paganie, et A la paienie.

Vers 3369.Malpramis. O. V. la note du vers 3176.

Vers 3371.De uuns es altres. O. D’ures en altres. Mu. Devant les altres. Mi. V. la note du vers 2843. ═ Ferant. O. Pour le cas sujet, il faut feranz.

Vers 3372.Trescevant. O. Correction de Mu. Pour le cas sujet, il faut tresturnanz.

Vers 3373.Baligant. O. Au cas sujet, il faut Baliganz.

Vers 3374. — Lire Mien. O.V. la note du vers 149. ═ Baron. O. Pour le changement de l’o en u, voyez la note du vers 30. ═ Pour l’s final (?), voyez notre note sur les vocatifs au vers 15. ═ Vos. O. V. la note du vers 17.

Vers 3375.Filz. O. Pourle cas régime, il faut fil. ═ Filz, Carlun te. O. Erreur corrigée par Mu., d’après Venise IV : Che Carlo vait chirant, et le fragment lorrain : Qui vai Karlun querant. ═ Querant. O. Pour le cas sujet, il faut queranz.

Vers 3376.E n’est pas dans le manuscrit, mais a été restitué par Mu., d’après Venise IV et le fragment lorrain. ═ Barons. O. V. la note du vers 30. ═ Calunjant. O. Pour le cas sujet, il faut calunjanz. Lire peut-être chalenjanz.

Vers 3377.Meillor. O. V. les notes des vers 30 et 51.

Vers 3381.Pesant. O. Au cas sujet, il faut pesanz.

Vers 3382.Fort. O. Pour le s. f., il faut forz.

Vers 3383.Granz. O. Le cas sujet exige grant. ═ Je pense, comme je l’ai dit plus haut, que nous avons ici affaire à une laisse féminine en . Peut-être donc faut-il lire en assonances, à la fin des vers de ce couplet, eschieles, brisiées, desmailiées, junchiée, delgiée, envermeilliée, afichiée...

Vers 3387. — Lire Bronies. O.

Vers 3388. — Lire Veissez, qui est plus étymologique.

Vers 3390. — Ce vers n’est pas dans le manuscrit. Il a été très-justement restitué par G. d’après le manuscrit de Paris.

Vers 3392.Baron. Pour l’s final, voyez la note du vers 15, et, pour l’o changé en u, la note du vers 30.

Vers 3395.Mort n’est pas dans le manuscrit. Paris donne : Jusqu’[à] la nuit. Mais Venise IV : Tresqui à, la mort. ═ Lire iert.

Vers 3397.Por. O. ═ Venud. O. V. la note du vers 2.

Vers 3398.Vos. O.

Vers 3399.Vos. O. ═ Durai. O. ═ Feus. O. V. la note du vers 76. ═ Honors. O. V. la note du vers 45.

Vers 3400.Devuns. O. V. la note du vers 42 sur les premières personnes du pluriel. ═ Lire bien.

Vers 3401.Lor. O.

Vers 3403.Ais. O. Nous avons préféré la forme as, presque partout adoptée. (Vers 263, 413, 889, 1187, 1989, 2009, 3495, 3708.) Ais ne se trouve que trois fois, ici et aux vers 2452 et 3818. ═ Vos. O. ═ Pesmes. O. Le singulier exige pesme.

Vers 3404.Volt. O. V. la note du vers 40.

Vers 3406.Seignors barons. O. ═ Vos. O.

Vers 3409. — Lire bien. ═ Vos. O.

Vers 3411.Fiz. O. L’l paraît avoir été effacé par ce même correcteur, qui a si souvent supprimé, dans le manuscrit, ce qui lui paraissait contraire à la langue plus avancée de son temps. ═ Lire vengiez. Ce mot, en effet, ne se trouve comme assonance que dans les laisses en ier.

Vers 3412.Qu’en. O. Il s’agit ici du relatif ki ; nous l’avons restitué d’après la forme presque uniquement adoptée dans notre texte. ═ Morz. O. Lire mort, à cause du cas sujet.

Vers 3413.Vos. O. V. la note du vers 17.

Vers 3414.Vos. O.

Vers 3415.Itels XX miliers en ad od sei. O. Mi. Itels XX milie en ad (evud) od sei. G. Nous avons adopté la correction de Mu., d’après la première rédaction du texte de Paris. La correction de G. est inadmissible, et c’est oüt qu’il eût fallu suppléer.

Vers 3416.Lor. O. V. la note du vers 17. ═ Feiz. O. Au pluriel. Nous avons préféré le singulier : feid.

Vers 3421.Li ber, qui n’est pas dans le manuscrit, a été restitué par Mu. d’après Venise. Lire ber. ═ Malpramis. O. V. la note du vers 3176.

Vers 3424.Vertudable. O. Pour le cas sujet, vertudables.

Vers 3428.L’abat n’est pas dans le manuscrit. Restitué par G. et Mu.

Vers 3429.Amiraill. O. V. la note du vers 2615.

Vers 3430.Esporuns. O. La forme esperuns est la plus usuelle. (Vers 345, 1225, 2996.) ═ Lire bien.

Vers 3431.Le punt. O. Le cas sujet exige li punz.

Vers 3432.Elme. O. V. la note du vers 996.

Vers 3433.Meitiet. O. Cf. la forme meitet, qui se trouve aux vers 473 et 1484. ═ Fruissed. O. V. la note du vers 2.

Vers 3436.Char. O. Car se trouve au s. s., 2942, et au r. s., 2141 ; carn au r. s., 3606 ; char au r. s., 1119 et 3346, et charn, 1265 ; enfin chars au r. p., 1613. Nous préférerons partout car pour le s. s. et carn pour le r. ═ Lire ici carn.

Vers 3440. — Lire destrier.

Vers 3441.Recuvrast. Mu.

Vers 3442.Mort... vassal. O. Pour le cas sujet, morz et vassals.

Vers 3443. — Pour le sens, il faut vient et non pas vint. O.

Vers 3452.Duc n’est pas dans le manuscrit. Restitué d’après Mu., d’après le manuscrit de Paris.

Vers 3454.Empereres. O.

Vers 3455.Naimes. O. Voir notre note du vers 15 sur les vocatifs. Quelque étymologie que l’on donne au mot Naimes, le vocatif latin n’aurait pas d’s final. ═ Chevalcez. O. V. la note du vers 1379 et celle du vers 1500. Ce mot ne se trouve en assonances que dans les laisses en ier.

Vers 3458.Vos. O.

Vers 3459.Avreiz. Mu.

Vers 3460.Justez. O. Pour le cas sujet du pluriel, il faut justet. Lier plutôt justiet (?).

Vers 3461.Tels. Le cas sujet exige tel.

Vers 3462.Celoi. O. Pour la phonétique, celui, qui se trouve d’ailleurs au vers 427. ═ Le manuscrit nous donne o. Nous avons partout adopté u. ═ O n’i copleit. O. o capleit. Mu.

Vers 3464.Guneman. O.

Vers 3467.Deseivret. Mu.

Vers 3469. — Lorain. R. O. Venise nous donne Loterant. V. la note du vers 3022.

Vers 3470. Li sire. O. Pour le cas régime, il faut le seignur. ═ Lire viell.

Vers 3471.Vaillant. O. Pour le cas sujet, il faut vaillanz.

Vers 3472.Baron. O. Il faudrait barons au vocatif, d’après notre règle du vers 15. ═ Pour le changement de l’o en u, voyez la note du vers 31. ═ Avons. O. Id.

Vers 3473.Li chevaler. O. Le cas régime exige les chevaliers.

Vers 3474.Argoillie. O. V. la note du vers 2259, où le poëte nous fournit la leçon Argoilles. ═ Bascles. Faut-il voir là les Gascons ? (Cf. Fr. Michel, 1re éd., p. 173.)

Vers 3478.Fort. O. Pour le cas sujet, forz.

Vers 3479.Barons. O. ═ Gran. O. Partout ailleurs, grant.

Vers 3480.Avrat. Mu. ═ Departed. O. V. la note du vers 2.

Vers 3481. — Lire bien.

Vers 3482.Fruissent. Ce verbe est tantôt actif, tantôt neutre. Ici, il nous paraît actif, et c’est pourquoi il faut, au cas régime, ces espiez furbiz (au lieu de : cil espiez furbit. O.).

Vers 3483.Dulor. O. V. la note du vers 489.

Vers 3486. — Lire chevaliers.

Vers 3489.Fort. O. Pour le cas sujet, forz.

Vers 3491.Mahumet altresi. O. Erreur évidente, contraire à la mesure du vers.

Vers 3492.Vos. O.

Vers 3493.Tutes vos ymagenes ferai d’or fin. O. La correction est de Mu., d’après Venise IV. (Nefaro d’or fi.) Pour avoir un décasyllabe, il faudrait peut-être : Jà voz imagenes vus referai d’or fin. — Le scribe a écrit à tort un Aoi à la suite de ce vers.

Vers 3494. — Ce vers n’est pas dans le manuscrit. Tous les autres textes nous le donnent. Mu. a choisi la version de Venise IV.

Vers 3497.Baliganz. O. Lire Baligant. (V. la note du vers 15.) ═ Este. O. Erreur évidente. ═ Oi. O. V. la note du vers 1210. ═ Baillit. O. Pour le cas sujet, il faut bailliz.

Vers 3498.Malpramis. O. V. la note du vers 3176. ═ Filz. O. Au cas régime, fil.

Vers 3501.Empereres. O. ═ Au vers suivant, lire bien.

Vers 3503.Blanc ad la barbe. O. Erreur manifeste. ═ Flur. O. V. la note du vers 611.

Vers 3506.Quiad. O. V. la note du vers 2.

Vers 3508.Amiraill. O. Il faut l’amiralz au cas sujet. (V. la note du vers 2615.)

Vers 3509.Vos. O. ═ Grant. O. Pour le cas sujet, granz. ═ On peut supprimer e.

Vers 3510.Conseill. O. V. la note du vers 30.═ Vostre conseill oc evud. O. Corrigé par Mu., d’après Venise IV (otrie tute tamp) et Paris (ai otroié lonc tans).

Vers 3511.Vos. O.

Vers 3512.Averum nos la victorie. O. Correction de Mu. ═ Nos. O. V. la note du vers 17.

Vers 3513. — Lire Baligant. O.

Vers 3516.Cumbatant. O. Pour le cas sujet, cumbatanz.

Vers 3517.Barons. O. V. la note du vers 30.

Vers 3519.Demurant. O. Pour le cas sujet, demuranz.

Vers 3520.Amiraill. O. V. la note du vers 2615.

Vers 3521.Flur. O. V. la note du vers 611.

Vers 3527.E cil d’ n’est pas dans le manuscrit. ═ Lire chien.

Vers 3528.Franc. O. Il faut, pour le cas régime, Francs.

Vers 3529.Se’s. O. Ses est ici pour sic illos, et non pour si illos. C’est pourquoi nous avons imprimé si’s.

Vers 3531.Oger. O. Pour le cas sujet, Ogiers.

Vers 3532.Meillor. O. V. la note du vers 51. ═ Bronie. O. Pour l’assonance, brunie. Il vaut peut-être mieux lire, pour la mesure du vers : Meillur vassals jà ne vestit brunie.

Vers 3534.Argone. O. Pour l’assonance, Argune.

Vers 3535.Gefrei. Nous avons conservé ici la forme Gefreid, qui est la forme la plus usitée et la plus étymologique.

Vers 3536.Carle. O. Au cas régime, Carlun.

Vers 3537.Païen. O. Il faut païens au cas régime, et Mu. l’a rétabli. Mais pourquoi l’a-t-il fait en cet endroit, et non pas en mille autres ?

Vers 3538. — Lire chief. ═ Corone. O. V. la note du vers 2684.

Vers 3541.Eit. O. On ne trouve qu’une ou deux fois ce mot sous cette forme. Partout ailleurs, c’est ait. (Vers 1184, 1381, 1802, 1844...) ═ Lor. O. V. la note du vers 17. ═ Cevals. O. V. la note du vers 1379. ═ Cure. O. Cf. le vers 3547.

Vers 3542. — Le manuscrit donne o il. Mais u est à la fois plus usité et plus étymologique.

Vers 3543. — Lire bien.

Vers 3544.Oger. O. Pour le cas sujet, Ogiers.

Vers 3545.Geifreid. O. Au cas sujet, Gefreiz.

Vers 3546. — Lire Ogiers.

Vers 3547.Ceval. O. V. la note du vers 1379.

Vers 3548. — Pour ramener ce vers à un décasyllabe, on peut écrire : Si fiert celui.

Vers 3549. — Ajouter un t à cravente.

Vers 3551.Baligant. O. Pour le cas sujet, Baliganz.

Vers 3555, 3556. — Nous avons été forcé d’adopter ici, pour la justesse de l’assonance, la variante, légèrement modifiée, que Mu. propose en note. Le manuscrit porte : Païen d’Arabe s’en turnent plus (de) cent. — Li Emperere recleimet ses parenz. Notre premier vers est emprunté presque textuellement à un autre passage de notre poëme. (Vers 3797.) Pour cette rectification, Mu. s’est servi surtout du manuscrit de Venise IV, et aussi de celui de Paris.

Vers 3557.Baron. O. Pour le changement de l’o en u, voyez notre note du vers 30. ═ Pour l’s final, voyez la note du vers 15. ═ Por. O.

Vers 3558.Francs. O. Pour le cas sujet, Franc.

Vers 3559. — Lire fel. O. ═ A espleit. O. Nous avons employé le d euphonique, comme au vers 3547.

Vers 3563.Mais n’est point dans le manuscrit. Emprunté par Mu. à Venise IV et Paris.

Vers 3564.Li amiraz. O. V. la note du vers 2615.

Vers 3566.E cleres. Mu.

Vers 3567.Amdui. O. V. la note du vers 1355.

Vers 3568.Si s’vunt. Mu.

Vers 3569.Lor. O.

Vers 3571.Lor. O.

Vers 3573. — Lire desevererent, qui est dans le manuscrit.

Vers 3574.Trabecherent est dans le manuscrit. Müller propose : Se tru[ve]rent, d’après Venise IV.

Vers 3575.Lor. O.

Vers 3577. — Lire iert.

Vers 3579.Vassal. O. Il faut vassals, à cause du cas sujet.

Vers 3581.Lor. O. V. la note du vers 17.

Vers 3585.Bronies. O. Brunies pour l’assonance.

Vers 3586.Fuus. Mu. Fous est très-distinctement dans le manuscrit.

Vers 3588.Josque. O. V. la note du vers 510.

Vers 3589.Amirail. O. V. la note du vers 2615. ═ Carles. O. V. la note du vers 15 sur les vocatifs. ═ Purpenses. O. ═ Le manuscrit de Paris suit ici plus volontiers qu’ailleurs le texte primitif. Dans la partie de ce manuscrit qui correspond à nos vers 3520-3675, nous trouvons, en effet, sur neuf laisses féminines, huit couplets assonancés par la dernière voyelle, comme ceux du manuscrit d’Oxford. ═ Tout au contraire, le rajeunissement de Venise VII n’offre partout que des laisses rimées, alors même que ceux de Paris et de Versailles conservent textuellement quelques couplets de la version originale. ═ Nos Refazimenti, comme on le voit, ne se ressemblent pas les uns aux autres, et chacun d’eux, en outre, ne se ressemble pas à lui-même. ═ Ainsi (et pour ne parler que du manuscrit de Paris), le rajeunisseur a refait presque entièrement le vieux poëme, et a, pour tout le moins, changé en rimes toutes les assonances jusquau couplet 205 (éd. Fr. Michel) ; puis, à partir delà, et très-probablement par paresse, il a parfois conservé les laisses primitives (et c’est ce qui a lieu notamment pour le passage de notre poëme qui est l’objet de cette note) ; puis enfin, depuis la strophe 230, il a modifié le fond même de la Chanson, et, partant, la forme du texte original, et l’on ne trouve plus désormais, dans son œuvre véritablement nouvelle, une seule assonance à l’ancienne mode. ═ Au total, sur 87 laisses féminines que nous offre le texte de Paris, 67 ont été rajeunies, mais il est demeuré vingt couplets originaux. ═ Ajoutons que quelquefois, dans cette même rédaction, les laisses anciennes ont été conservées par le scribe à côté des laisses rajeunies : c’est le cas des strophes 307 et 308 (éd. F. Michel), qui sont en réalité la version primitive des strophes 305, 306 et 309. Faut-il uniquement attribuer un tel fait à la négligence ? Le scribe n’était-il pas heureux de fournir aux jongleurs quelques variantes pour chanter à leur guise tantôt un couplet, tantôt un autre ? Les jongleurs eux-mêmes ne le demandaient-ils point ? Autant de questions difficiles à résoudre.

Vers 3591.Filz. O. Pour le cas régime, fil. ═ Lire mien. ═ Esciente. O. V. la forme escientre, aux vers 539, 552, 1791, 1936.

Vers 3592. — Cf. chalenges aux vers 394 et 1926.

Vers 3593.En fedeldet voeill. O. La correction est de Mu. ═ Fieu. V. la note du vers 76. ═ Devien est préférable, et vien au vers suivant.

Vers 3594.Oriente. O. Nous persistons à croire, comme nous l’avons dit dans nos Épopées françaises (I, 2e p., ch. iv), qu’Oriente est une détestable « licence poétique ».

Vers 3595.Viltet. O. Pour le cas sujet, viltez. — Sembl. O.

Vers 3596.Amor. O.

Vers 3597.Nos. O.

Vers 3598.Pui. O.

Vers 3599.Omnipotente. Même remarque que pour Oriente, au vers 3594.

Vers 3600.Baligant. O. Pour le cas sujet, Baliganz.

Vers 3603.Fier. O. Omission évidente du t final. ═ Lire acier.

Vers 3607.Li, indiquant clairement qu’on a voulu faire d’os un masculin, il faut nuz, au lieu de nud. O.

Vers 3608.Por. O. ═ Caüt. O. Au cas sujet du m., caüz.

Vers 3609.Volt. O. V. la note du vers 40.

Vers 3610.Seint. O. Pour le cas sujet, seinz. ═ Repairet. O. Le cas sujet exige repairiez.

Vers 3611.Magnes. O. V. la note du vers 15, sur les vocatifs.

Vers 3612. — Lire seinte, qui se trouve partout ailleurs.

Vers 3614.Loi. O. Loi ne se trouve que rarement dans notre texte ; presque partout, c’est lui, qui est conforme à notre phonétique. (Vers 4, 13, 41, 239, 279, 364, 376, 380, 750, 842, 958, 1036, 1510, 2090, 2282, etc. etc.)

Vers 3615.Amiraill. O. V. la note du vers 2615.

Vers 3616.Elme. V. la note du vers 996. ═ Le manuscrit nous donne o. Nous avons partout adopté u. ═ Gemme. O. Erreur évidente.

Vers 3618.E n’est pas dans le manuscrit.

Vers 3619.Recuverance (?).

Vers 3623.Volt. O. V. la note du vers 40. ═ Qu’il remainent. Mn.

Vers 3624.Or sunt Franceis à icels que ils demandent. Correction de G. et de Mu., d’après Venise IV (Or a Fransois ço che illi domande), et Paris (Or ont Fransois tout ce que il demandent).

Vers 3625.Volt. O. V. la note du vers 40.

Vers 3626.Encalcent. O. La forme régulière est enchalcent. (V. les vers 2482, 2796, et aussi les vers 2446, 3635.)

Vers 3627. — Lire vengiez.

Vers 3629.Vos. O.

Vers 3630.Respondent. O.

Vers 3633.Calz ne se trouve qu’une fois dans notre manuscrit. Au contraire, on trouve chald, vers 950 ; chalt, 2100, et chalz, vers 1011, 1118. On peut dire, mais sans aller plus loin, que la forme adoptée dans le dialecte de notre scribe était chalz.

Vers 3636.Bramidonie. O.

Vers 3637. — On peut lire aussi canonie. Mu. V. la note du vers 1881.

Vers 3639.Lor. O. V. la note du vers 17. ═ Corones. O. V. la note du vers 2684. ═ Lire chiefs.

Vers 3641.Mahum. O. L’assonance féminine demande rigoureusement Mahume.

Vers 3642.Vencuz. O. Pour le cas sujet, il faut vencut. ═ Hume. O. V. la note du vers 20..

Vers 3644.Marsilie. O. Le cas sujet veut Marsilies. ═ Tout le monde a traduit jusqu’ici pareit par mur. (Génin, d’Avril, Saint-Albin et même Littré, en son Dictionnaire, au mot paroi.) Cette opinion s’appuie sur un texte célèbre de la Bible (Isaïe, xxxviii, 2), où l’on voit le roi Ézéchias, frappé d’une maladie mortelle, se tourner vers la muraille pour prier Dieu et fondre en larmes : Et convertit Ezechias faciem suam ad parietem, et oravit ad Dominum. Si l’on adopte ce sentiment, que justifient assez bien les vers suivants de la Chanson : Pluret des oilz, etc., il faut écrire : La pareit. Mais, d’un autre côté, le texte de Paris nous donne : Oit la Marsiles, vers la dame se torne. Pareit, en ce sens, serait un synonyme de per, mais qui, philologiquement, serait assez difficile à expliquer. À tout le moins, il y a doute.

Vers 3645.Enbrunchet. O. Cf. le vers 3505 : Ad enbrunket sun vis.

Vers 3646. — Lire pecchiet.

Vers 3648.Morz. O. Pour le cas sujet, mort. ═ Alquant cunfundue. O. Correction de Mu., d’après Venise IV : Torni en fuge, et Paris : Turnet en fuie.

Vers 3651.Or set il ben que elle n’est... O. Les deux mots : elle n’est, ont été ajoutés postérieurement. ═ Lire bien.

Vers 3652.Od sa gent. O. Erreur évidente. Od a été ajouté après coup.

Vers 3655.Bramidonie. O. V. la note du vers 2822.

Vers 3656.Grandes. O. La forme la plus usitée, la plus antique, est grant, que nous avons restitué.

Vers 3657. — Lire bien.

Vers 3658.Noit. O. Pour le cas sujet, noit. V. la note du vers 611.

Vers 3659. — On peut supprimer e.

Vers 3661.Fait. Le manuscrit porte funt.

Vers 3664. — C’est un vers de 12 syllabes. Mu. propose : Fruissent Mahum e trestutes les ydeles. Nous adoptons volontiers cette forme, qui rétablit la mesure.

Vers 3666.Creit Deu. Mu. En a été ajouté au manuscrit : Creit en Deu. Ces corrections, que nous avons plusieurs fois relevées, ont été faites, cinquante ans après le manuscrit lui-même, par un homme qui déjà n’en comprenait pas suffisamment la langue, ou qui craignait qu’on ne la comprît plus.

Vers 3667.Eves. O. Partout ailleurs, ewes.

Vers 3668.Païen. O. Au cas régime, il faut païens. ═ Entesqu’al. O.

Vers 3669.Cuntredie. O. Nous avons restitué le t étymologique. ═ Voillet a été ajouté en marge.

Vers 3670.Prendre. O. Pendre est rétabli d’après le texte de Versailles. ═ O ardeir o ocire. O. Nous avons rétabli u partout, qui est la forme la plus usitée et la plus étymologique.

Vers 3673. — Lire Iert. O. V. la note du vers 517.

Vers 3675.Noit. O. Au cas sujet, Noiz. V. la note du vers 611. ═ Jor. O. Pour le cas sujet, jurz.

Vers 3677. — Lire chevaliers.

Vers 3678.A oes. O. Nous avons adopté le d euphonique. ═ L’Empereor. O.

Vers 3679.Mandet. O. Erreur évidente, et qui montre une fois de plus la profonde inintelligence de notre scribe. ═ Trestuz. O. Il faut trestuit.

Vers 3680.Bramidonie. O. V. la note du vers 2822. ═ C’est ici que les Remaniements cessent de suivre, même de loin, le texte primitif. 1° Le manuscrit de Venise IV intercale ici l’épisode de la prise de Narbonne par Aimeri. Après avoir si bien commencé en serrant de près la version primitive, ce texte sera désormais et jusqu’à la fin semblable aux autres Refazimenti. C’est à partir d’ici qu’à proprement parler il mérite le nom de Remaniement. — 2° Le texte de Lyon, comme nous l’avons vu, a omis tout l’épisode de l’arrivée de Baligant en Espagne, etc. (Vers 2570 et suivants.) Il omet également tout le récit de la bataille de Saragosse. De la victoire de Charles sur Marsile et de ses pleurs à Roncevaux, il passe directement à la rentrée de l’Empereur en France et à l’histoire du message près de Girart et de Gilles, etc. — 3° Le texte de Paris est ici le plus mal construit. Déjà il avait inséré, en le rajeunissant, le récit du pèlerinage de Charles au champ de bataille de Roncevaux. (Vers de notre Chanson 2855 et ss.) Le rajeunisseur ne craint pas ici de refaire ce récit sous une autre forme, avant d’en arriver au récit du message près de Girart et de Gilles... — 4° Dans les textes de Versailles et de Venise IV, on ne commet point cette faute. Les rajeunisseurs y parlent bien de Charles pleurant à Roncevaux sur le corps de son neveu, etc. ; mais du moins ils ont eu soin de ne pas nous faire une première fois ce récit. Ces manuscrits ne renferment aucun couplet qui corresponde à nos vers 2855 et suivants. Ils ne se répètent pas ; ils attestent plus de soin et sont, à ce point de vue, meilleurs que le texte de Paris. — 5° À partir de notre vers 3680, tous les Remaniements, — Venise IV (en ne tenant pas compte de la légende d’Aimeri de Narbonne), Paris, Versailles, Venise VII et Lyon, — nous offrent la même affabulation, que nous allons faire connaître à nos lecteurs. Il s’agit ici d’épisodes tout nouveaux et qui ne se trouvent pas dans le texte primitif. Et cela est si vrai, que le manuscrit de Paris présente en cet endroit une disposition particulière : la grande lettre qui commence le couplet : Grans fu li diaus la nuit à Ronsevauls, est là pour indiquer une branche nouvelle. Résumons cette branche... Charles est à Roncevaux, qui se pâme de douleur devant le corps inanimé de Roland. Il fait ensevelir son neveu, il maudit Ganelon. Prières interminables. (Couplets 330-336 du texte de Paris, éd. F. Michel.) On enterre les Français morts dans la grande bataille. Les Anges chantent, une lumière divine éclate, des arbres verts sortent miraculeusement de chaque tombe. (337.) Charles passe alors les défilés pyrénéens : il s’arrête à Saint-Jean-Pied-de-Port, où il fonde un moutier. (338, 339.) L’Empereur ordonne ensuite à Girart d’Orléans, à Guion de Saint-Omer et à Geoffroi d’Anjou de se rendre en message auprès de Girart de Viane pour le prier de venir le rejoindre et de lui amener la belle Aude. (339.) Puis il envoie Bazin le Bourguignon, Garnier d’Auvergne, Guyon et Milon dans la cité de Mâcon, à sa propre sœur Gilles : ils sont chargés de la conduire à l’Empereur. (340, 341.) Les messagers partent : Charles s’avance en France. Il arrive à Sorgues (à Sorges, dit le manuscrit). C’est là que Ganelon s’échappe une première fois sur le destrier de Garin de Montsaor : il se dirige vers Toulouse, ou « Chastel-Monroil », ou Saragosse. Deux mille Français se jettent à sa poursuite ; le plus ardent est Othes. (342-344.) Ganelon rencontre des marchands qu’il trompe et qui trompent Othes sur la distance qui le sépare du fugitif. (345.) Il arrive par là que les Français se présentent devant l’Empereur sans s’être emparés de Ganelon. Colère de Charles. (346.) Un paysan indique à Othes la retraite de Ganelon. Le traître s’est endormi sous un arbre. (347, 348.) Le bon cheval de Ganelon éveille son maître. Combat entre Ganelon et Othes. Ils luttent d’abord à pied. Puis le beau-père de Roland propose à Othes de combattre en vrais chevaliers, à cheval. Le traître s’élance sur le cheval de son adversaire et s’enfuit. (349-354.) Othes se remet à la poursuite de Ganelon. Dieu fait un miracle pour lui : ses armes ne lui pèsent plus sur les épaules. Puis le fugitif tombe de cheval : nouveau combat. Sur ces entrefaites, arrivent Samson et Isoré, et l’on peut enfin se rendre maître de Ganelon, que l’on remet aux mains de l’Empereur. (355-361.) Charles traverse toute la Gascogne et arrive à Blaives. (362.) Le poëte ici change la scène de son roman et nous transporte près des messagers du Roi qui vont à Viane. Ils y arrivent et font leur message. Ils cachent à Girart la mort de Roland et d’Olivier : « Charlemagne, ajoutent-ils, veut faire le mariage de son neveu avec la belle Aude. Amenez-lui sur-le-champ votre nièce. » Joie de Girart et de Guibourg. (363-368.) On part à Blaives. Pressentiments d’Aude : ses songes lugubres. (368-375.) Un clerc savant en ningremance cherche à les lui expliquer favorablement ; mais il en voit bien lui-même la triste signification. (377.) Pour ne pas étonner trop douloureusement la belle Aude, on contrefait la joie dans le camp français. On essaie de lui cacher la grande douleur ; on va jusqu’à lui dire que Roland est allé « en Babiloinne » épouser la sœur de Baligant. Aude n’en veut rien croire : « Roland, s’écrie-t-elle, Roland est mort ! » (378-383.) Sur ce, arrive Gilles, la sœur du Roi, la mère de Roland : Charles lui annonce sans aucun ménagement la mort de son fils. Une mère, pense-t-il, est mieux préparée à de tels coups qu’une fiancée. Enfin, c’est Gilles elle-même qui a la force d’apprendre à la sœur d’Olivier la mort de Roland ; douleur d’Aude. (384-390.) Elle veut voir du moins le corps de son fiancé, que Charles rapporte d’Espagne. Ses prières, ses larmes. Un ange lui apparaît sous les traits d’Olivier et l’invite à songer au bonheur du ciel. Aude, enfin, se décide à mourir. (391-399.) Retour de Charlemagne à Laon. Il n’a plus désormais qu’une seule pensée : se venger de Ganelon. Le jugement du traître va commencer. Gondrebuef de Frise s’offre à le démentir juridiquement, la lance au poing. Ganelon donne des otages, ses propres parents. Mais, au moment où on va commencer le grand combat de l’accusateur et de l’accusé, celui-ci s’enfuit encore une fois les grans galos. Gondrebuef le poursuit de près. Il l’atteint. Combat. On se saisit de Ganelon. (400-417.) C’est alors que fait son entrée dans le poëme le neveu du traître, Pinabel. Il sera le champion de son oncle. Le défi est relevé par un « valet » du nom de Thierry, fils de Geoffroy d’Anjou, qui veut défendre la cause de Roland. Préparatifs du duel. (413-431.) La Chanson se poursuit ici en vers de douze syllabes, et raconte le combat singulier de Pinabel et de Thierry. Celui-ci pense un instant périr d’un formidable coup que lui porte Ganelon. (432-439.) Le poëme se termine en décasyllabes. Pinabel est vaincu et meurt. (440-445.) Il ne reste plus dès lors qu’à délibérer sur le châtiment de Ganelon. Chacun des barons français propose un supplice spécial : qui la corde, qui le bûcher, qui les bêtes féroces. On se décide à l’écarteler. (446-450.) Ici s’arrête le manuscrit de Paris. Lyon nous donne une strophe de plus, et nous fait assister au départ des barons de France, qui prennent congé de Charlemagne... — Le texte de tous nos Remaniements est maintenant connu de nos lecteurs.

Vers 3681.Bien. O. V. la note du vers 1500.

Vers 3682.Repairez. O. Pour le cas sujet, il faut repairiet.

Vers 3683.Passent Nerbone... Narbonne n’est pas sur le chemin des Pyrénées à Bordeaux. De là une difficulté réelle. M. Raymond propose l’église d’Arbonne (anciennement appelée Narbonne, comme le prouvent des actes de 1187-1192 et 1303). Cette église est située près de celle de Saint-Jean-de-Luz et conviendrait, par sa situation, à ce passage de notre poëme. Mais comment s’imaginer que le poëte ait attaché tant d’importance à un lieu si peu considérable ? — M. G. Paris propose « un nom de fleuve (à cause du verbe passer) ; peut-être l’Adour ». Quant à nous, nous croyons fort naïvement que notre poëte ignorait la géographie. Une légende de son temps attribuait la conquête de Narbonne à Charles revenant d’Espagne : ne voulant pas raconter la légende, le poëte se contente de dire que l’Empereur passa cette ville par force et par vigur, c’est-à-dire, la prit. Telle est notre hypothèse. (V. au vers 706 notre note sur la géographie de la Chanson de Roland.)

Vers 3684.Burdeles. O. ═ Valur n’est pas dans le manuscrit. ═ Pour tout cet itinéraire, voyez notre note géographique au vers 706.

Vers 3685.Baron. O.

Vers 3686.Oliphan. O. V. la note du vers 1059.

Vers 3689.Nevold. O. Pour l’assonance, nevuld. ═ Ces funérailles, d’après la Karlamagnus Saga et la Keiser Karl Magnus’s Kronike, ont lieu à Arles. (Cf. la Chronique de Turpin.)

Vers 3690. — Lire Olivier.

Vers 3693.Baron. O.

Vers 3694. — C’est à Paris que la Karlamagnus Saga fait ici revenir Charlemagne. ═ Francs. O. Pour le cas sujet, Franc.

Vers 3695.Cevalchet. O. V. la note du vers 1379.

Vers 3696.A Ais. O. On pourrait lire ad Ais avec le d euphonique. ═ Volt. O. V. la note du vers 40.

Vers 3698.Halcur. O.

Vers 3699.Jugeors. O.

Vers 3700. — Lire p.-e. Baviers.

Vers 3703.Des plus. O.

Vers 3704.Le plait. O. Ce mot se trouve ailleurs au masculin. (V. 3780 et 3841.)

Vers 3705.Empereres. O. V. la note du vers 3705. ═ Repairet. O. Pour le cas sujet, repairiez. ═ L’épisode de la belle Aude, très-allongé dans les Remaniements, est abrégé par la Keiser Karl Magnus’s Kronike et omis tout à fait par la Karlamagnus Saga.

Vers 3706.A Ais. O. Nous avons, comme ailleurs, adopté le d euphonique, qui est d’ailleurs justifié par de nombreux exemples. ═ Meillor. O. V. la note du vers 51.

Vers 3707.Venut. O. Pour le cas sujet, venuz.

Vers 3708. — Pour ramener ce vers à un décasyllabe, on peut proposer : Alde li vient, une bele damisele.

Vers 3709. — Le texte de la Bodléienne nous donne o est ; nous avons partout adopté u. ═ Le catanie. O. Il faut ici le cas sujet. — Lire catanies.

Vers 3711.Dulor. O. V. la note du vers 489.

Vers 3712.Trret, avec un signe abréviatif s au-dessus du premier t. O. ═ Blance. O. Blanche se trouve aux vers 89, 117, 1655, 1843, 2250, 2316, 3173, 3319, 4001. Blance ne se trouve qu’ici.

Vers 3713.Cher amie. O. Erreur évidente. ═ De hume. O.

Vers 3714.Durai. O. V. la forme durrai aux vers 30, 75, 1805, 2750, 3207, 3398, 3399. ═ Eschange. O. La forme escange, plus étymologique, se rencontre au vers 840.

Vers 3715.Mielz. O. V. la note du vers 1500.

Vers 3716.Mes. O. V. la note du vers 39.

Vers 3717. — Lire moz et estranges.

Vers 3720.Culor. O. Même remarque que pour dulor. (Note du vers 489.)

Vers 3721.De l’an. O.

Vers 3722.Barons. O. — Ajouter ici la traduction omise de ce vers : Les barons français la plaignent, ils sont tout en pleurs...

Vers 3723.La bel. O. Erreur manifeste.

Vers 3724. — Lire quidet. O.

Vers 3725. — Lire pitiet.

Vers 3727.De sur les. O. G. et Mu. ont restitué sur, qui ne rompt pas le vers.

Vers 3730. — Lire mustiers.

Vers 3733. — Nous n’avons pas besoin ici de signaler longuement la statue de la belle Aude dans le fameux monument de Saint-Faron. Nous renvoyons nos lecteurs à la dissertation et à la gravure que les Bénédictins nous donnent dans leurs Acta Sanctorum ordinis sancti Benedicti (ive s., 1re partie, pp. 665-667). Aude est représentée avec Turpin, Roland et Olivier, et ces deux vers sont mis sur les lèvres de ce dernier : Audœ conjugium tibi do, Rotlande, sororis, — Perpetuumque mei socialis fedus amoris. Le monument de Saint-Faron est du xie-xiie siècle.

Vers 3734.Repairet. O. Pour le cas sujet, repairiez. ═ Le procès de Ganelon est raconté en quelques lignes seulement par la Karlamagnus Saga (ch. xli) et la Keiser Karl Magnus’s Kronike. D’après ce dernier texte : « Le jugement fut que le comte Ganelon devait être traîné par toute la France. Ce qui fut fait ; en sorte que pas un os ne resta à côté de l’autre dans tout son corps. »

Vers 3735 et suiv. — Sur le procès de Ganelon, qui commence à ce vers, nous allons reproduire quelques pages de notre Idée politique dans les Chansons de geste. (Revue des questions historiques, 1869, pp. 101 et suivantes.) « Que nos Épopées françaises soient d’origine germanique ; qu’elles soient barbares par leurs héros, par leur action, par leur esprit, c’est ce qui a été déjà démontré plusieurs fois. Et néanmoins il semble que la plus forte démonstration n’ait pas encore été donnée. Il reste, en effet, à prouver le germanisme de nos Épopées par le germanisme de la procédure qui est exposée dans ces poëmes.

« Or, dans cette procédure, rien de romain ; rien qui, de près ou de loin, porte la trace de la législation romaine ou du droit canonique. Tout est emprunté aux lois barbares. Le procès de Ganelon suffit à le démontrer. Nous suivrons avec soin toute la marche de cette procédure criminelle et politique, la plus ancienne que nous rencontrions dans nos Chansons de geste. Et nous n’aurons pas de peine à établir, par une comparaison attentive, que chacun des vers de notre poëme se rapporte à quelque titre des lois germaines.

« Il semble que dans ce Drame intitulé : Le Procès de Ganelon, on puisse distinguer sept « Actes » ou sept « Tableaux », s’il est permis de se servir d’une expression aussi moderne à l’occasion d’un poëme aussi antique. Ces sept Actes pourraient recevoir les titres suivants : la Torture, — le Plaid royal, — le Duel, — les Champions, — la Messe du Jugement, — la Mort des Otages, — le Supplice de Ganelon. Et, pour chacun de ces sept Tableaux, nous avons sept familles de textes empruntés aux législations barbares…

« La belle Aude vient de mourir. Charlemagne, les yeux pleins de larmes, se retourne avec plus de fureur du côté de Ganelon et se promet de donner au supplice du traître un éclat plus terrible encore. Et d’abord des serfs s’emparent de Ganelon, qui est tout chargé de fers : « Ganelon, le traître, tout enchaîné, — est dans la cité devant le palais. — Les serfs l’attachent à un poteau, — lui lient les mains avec des courroies en cuir de cerf, — et le battent à coups de bâton et de corde… » Ce supplice est d’origine purement germanique. « Les coups de discipline, dit Davoud-Oglou (Histoire de la législation des anciens Germains, I, 161), étaient pour toutes les classes, et le nombre en pouvait monter jusqu’à trois cents. Dans la règle, ils étaient administrés publiquement au coupable, qui avait été préalablement attaché et étendu sur un chevalet. » Ce que cet érudit avance ici au sujet des Wisigoths peut s’entendre de tous les autres peuples germains. Le même supplice se retrouve dans la loi des Bavarois (liv. VIII, ch. vi, etc., et l’on se servait de fléaux pour administrer ce châtiment), chez les Bourguignons (30 et 33, 2 ; 4, 4 ; 5, 6, 38, 63, etc., et ils se servaient du bâton), chez les Franks-Saliens (Constitution de Childebert, Davoud-Oglou, loc. cit. I, 580), chez les Lombards (Liutp., 6, 26, c ; 6, 88 ; 6, 50), chez les Frisons (3, 7). Nous ferons seulement remarquer que, dans notre Chanson, Ganelon est châtié, de même qu’il est, emprisonné, préventivement. N’y a-t-il pas encore un travail à faire sur la législation barbare, un travail que l’on pourrait intituler : De la Pénalité préventive chez les Germains ?

« À peine Ganelon a-t-il été détaché tout sanglant du pilori, de l’estache, que Charlemagne convoque son plaid : « Il est écrit dans l’ancienne geste — que Charlemagne mande ses hommes de plusieurs terres : — alors commence le plaid... » (Vers 3742 et suiv.) Personne n’aura de peine à reconnaître ici le Placitum Palatii, qui s’était sensiblement modifié à travers les âges, mais dont les plaids féodaux donnaient encore une certaine idée aux gens des xie et xiie siècles. Dans le plaid de la première et de la seconde race, le roi ou l’Empereur était assisté par les leudes et les évêques ; dans notre poëme il est assisté par ses comtes et ses ducs au nombre d’environ quarante. Il ne semble pas que les évêques aient pris part au procès de Ganelon ; mais toutes les parties de l’Empire sont, d’ailleurs, représentées au plaid impérial, et, parmi les assistants de Charles, on signale des Bretons, des Poitevins, des Saxons, des Normands, des Français, des Allemands, des Auvergnats. (Vers 3792 et suiv.) Il faut encore observer que, dans la Chanson de geste, comme dans la véritable procédure de nos deux premières races, l’Empereur n’a que le droit de présider le tribunal, et n’a même pas voix délibérative : « Seigneurs barons, dit le roi Charlemagne, jugez-moi le droit de Ganelon. » Il leur expose lucidement toute l’affaire, Ganelon présente librement sa défense, les barons prennent le parti de l’accusé, et Charlemagne enfin se trouve désarmé devant ses juges : « Quand Charles voit que tous lui font défaut, — Il en cache sa tête et son visage, — et, à cause de sa grande douleur : — « Malheureux que je suis ! » dit-il. (Vers 3815 et suiv.) Encore une fois, tout cela est barbare, et rien ne vous donne ici l’idée d’un tribunal romain. C’est bien là le tribunal germanique, où le président était presque réduit à l’impuissance, comme Charles dans l’affaire de Ganelon. L’Empereur est heureusement tiré de sa douleur par le frère du duc d’Anjou : « Beau sire roi, dit le chevalier, trêve à vos lamentations ! » Et il défie en champ clos tous les parents de Ganelon : Pinabel accepte le défi. Les deux champions échangent leurs otages, accomplissent les formalités légales, et Ogier de Danemarche proclame à haute voix qu’elles ont été remplies. Pinabel et Thierry se revêtent alors de leurs armes ; le jugement de Dieu va commencer. (Vers 3852-3857.)

« Ici encore le doute n’est pas possible, et nous sommes en pleine Germanie. Le campus ou duel est, en effet, commun à toutes les tribus barbares, excepté aux Anglo-Saxons. Cette ordalie recevait deux noms, celui de wehadinc, quand les deux parties combattaient en personne, et celui de camfwic, quand elles étaient représentées par des champions à gages. Il arrivait souvent qu’un parent se proposait pour combattre à la place d’une des parties, et c’est le cas de notre Chanson de Roland. Toutes les lois germaines offrent d’ailleurs des dispositions remarquables sur le combat judiciaire. (Loi des Bavarois, 17, 1, Decr. Tass., ch. xi. — Loi des Alamans, 44, 1 ; 84. — Loi des Bourguignons, tit. 80, 1-3. — Loi des Lombards, Roth., 164, 165, 166, 198, 203. Grimoald, t. VII. — Loi des Thuringiens, 15. — Loi des Frisons, 14, 7 ; 5, 1. — Loi des Saxons, 16. — Loi des Anglo-Normands, Guill. II, 1-3 ; III, 12, etc.)

« Nous n’avons rien à ajouter touchant les champions qui se substituaient souvent aux véritables intéressés dans l’épreuve du duel ou campus. Quand ils n’étaient pas les parents de l’une ou de l’autre des deux parties, les champions étaient l’objet d’un mépris universel. Ils s’en étaient montrés bien dignes. C’étaient de misérables hercules qui se mettaient platement aux gages du plus enchérissant. Chez les Bavarois (Loi des Bavarois, 17, 1, 2) et les Frisons (Loi des Frisons, 14, 7 ; 5, 1), le wehrgeld du champion est inférieur à celui de l’esclave : or, chez les Germains, c’est là le grand critérium de l’estime publique. Dans notre poëme rien de semblable : Pinabel lui-même ne manque pas d’une certaine grandeur, et Thierry nous apparaît moins comme le champion de Roland que comme celui de la Justice et de la Vérité.

« Le cinquième Tableau de notre drame épique s’ouvre d’une façon imposante. Sur le point d’engager la lutte, les deux champions « se confessent, reçoivent l’absolution, sont bénis par le prêtre, entendent la messe et y reçoivent la communion. » (Vers 3858 et suiv.) Puis, ceux qui tout à l’heure étaient humblement prosternés devant Dieu et qui avaient ouvert doucement leurs lèvres pour le recevoir, se relèvent tout à coup, le regard allumé et terrible. Ils chaussent les éperons d’or et les blancs hauberts, couvrent leurs têtes de heaumes étincelants, suspendent leurs écus à leurs cous et placent à leurs ceintures leurs épées à garde d’or. Les voilà enfin qui se lancent sur leurs chevaux rapides, et cent mille chevaliers se mettent à pleurer, « qui, pour Roland, de Thierry ont pitié. » (Vers 3862 et suiv.) Comme pour les quatre Tableaux qui précèdent, rien n’est plus facile que de découvrir ici l’origine germanique. L’Église, qui a le regard clairvoyant, qui comprend les hommes, qui lit si bien dans leurs âmes, l’Église condamnait ces combats judiciaires dans l’intime de son âme maternelle, et c’est grâce à son influence, n’en doutons pas, que dans la loi des Lombards furent écrites ces remarquables paroles : « Si, par respect pour les usages de la nation lombarde, nous ne pouvons défendre le jugement de Dieu, il ne nous en semble pas moins incertain, ayant appris que beaucoup de personnes avaient injustement perdu leurs causes par un combat singulier. » Mais l’Église s’était aperçue qu’elle ne pourrait aisément déraciner une telle coutume, et elle avait pris le sage parti de la pénétrer de christianisme, autant qu’il était possible. C’est pourquoi elle avait institué cette messe et ces cérémonies liturgiques qui devaient précéder le combat judiciaire. Rien n’est plus beau que ces prières. (M. Léopold Delisle a publié, dans la Bibliothèque de l’École des Chartes, le Cérémonial d’une épreuve judiciaire au commencement du xiie siècle. V. la 18e année de ce Recueil, p. 253 et suiv.) Quand le champion allait entrer en champ, on disait pour lui la messe de la Résurrection, ou celle de saint Étienne, ou celle de la Trinité : « Missa. de la Resurrectiun, missam de sancta Trinitate, missa de sancto Stephano deit l’om dire por le campium quant il entret el camp. » Et après la « Messe du jugement » on chantait devant le champion le Symbole de saint Athanase. Touchante idée de faire une dernière fois professer publiquement toute la foi chrétienne à celui qui peut-être allait mourir ! (Cérémonial d’une épreuve judiciaire au xiie siècle, p. 257.)

« Nous ne suivrons pas toutes les phases du combat entre Pinabel et Thierry. Toutes les sympathies des Français sont évidemment pour l’avoué de l’Empereur et de Roland. Les yeux de tous les barons sont trempés de larmes, et le poëte prend plaisir à constater plusieurs fois cette douleur. (Vers 3880 et suivants.) Les deux champions, d’ailleurs, s’interpellent à la façon d’Homère : « Pinabel, dit Thierry, tu es un vrai baron ; tu es grand, fort et beau ; les Pairs connaissent ta valeur. Laisse ce combat, je te réconcilierai avec l’Empereur et lui ferai telle justice de Ganelon que jamais on n’en parlera plus. » Et Pinabel, qui mérite véritablement de défendre une cause meilleure, s’écrie avec une belle fierté : « Ne plaise à Dieu ! je veux soutenir toute ma parenté. Pour aucun homme vivant je ne renoncerai à ce combat. Mieux vaut mourir que d’encourir un tel reproche. » (Vers 3892 et suiv.) Et ils se précipitent de nouveau dans la fureur d’une lutte qui ne peut se terminer « sans homme mort ». On connaît, d’ailleurs, la fin de ce combat. Thierry tue Pinabel, et les trente otages de Ganelon sont pendus. Ce terrible châtiment infligé à la famille du traître et à ses otages ne se retrouve pas dans les lois barbares, bien qu’il soit entièrement dans leur esprit. Le principe de la solidarité de la famille est un principe absolument germain, et la coutume des pleiges ou garants vient certainement de la même source. Mais, encore une fois, un châtiment aussi cruel ne se retrouve dans aucune législation : on ne tue pas ainsi trente hommes judiciairement. Il s’agit donc ici d’une pénalité extraordinaire, parce qu’il s’agit d’un crime extraordinaire. Charles appelle ses comtes et ses ducs : « Que me conseillez-vous de faire de ceux que j’ai retenus, qui sont venus au plaid pour Ganelon et se sont rendus otages de Pinabel ? — Qu’ils meurent, » répondent les Français. Et les trente otages sont pendus. « Ainsi meurent tous les traîtres ! » (Vers 3947 et suiv.)

« Quant à la mort de Ganelon, elle est vraiment terrible dans notre poëme. Vaincu et déclaré coupable par la mort de son champion, Ganelon ne peut lui-même échapper à la mort. Le jugement de Dieu s’est déclaré contre lui : il faut qu’il périsse et lave dans son propre sang son crime de lèse-majesté. Dans la rigueur du droit féodal, qui est évidemment issu du droit germanique, celui dont le champion était vaincu devait périr : les Assises de Jérusalem ne laissent aucun doute à cet égard : « Si la bataille est de chose qu’on a mort deservie et le garant est vaincu, il et celui pour qui il a fait la bataille seront pendus. » (XXXVII et XCIV.) En 1248, la peine de mort n’était plus réservée au vaincu, mais seulement une amende de cent sous. Dans la Chanson de geste, qui est au moins contemporaine de la première rédaction des Assises, Ganelon est puni de mort. Et le supplice décerné contre lui ne sera pas la pendaison : ce sera le grand supplice réservé plus tard aux traîtres, à ceux qui livrent leur pays, à ceux qui offensent la majesté du roi ; ce sera l’écartèlement, qui cependant n’est indiqué spécialement dans aucune loi germaine. Bavarois et Allemands, Poitevins, Bretons et Normands, Français surtout, sont d’avis que Ganelon meure d’un supplice extraordinaire. On fait venir quatre destriers ; on lie Ganelon par les pieds, par les mains. Les chevaux sont sauvages et forts coureurs : quatre sergents les excitent. Tous les nerfs du misérable sont effroyablement tendus, tous ses membres sont déchirés : « Sur l’herbe verte coule le sang clair. Ganelon meurt en vrai félon. » (Vers 698-710.)

« Tels sont les sept Actes de notre Supplice de Ganelon. Nous aurions voulu rendre aussi transparente aux yeux de nos lecteurs qu’elle l’est à nos propres yeux, l’origine germanique de toute cette procédure. On la retrouve d’ailleurs en quelques autres poëmes, et notamment dans Amis et Amiles. Dans cette Chanson qui est d’une antiquité respectable, le traître Hardré surprend Amile avec Bélissende et accuse publiquement le séducteur. Tout aussitôt on fait appel au jugement de Dieu. Hardré, qui véritablement a surpris les deux amants, paraît sûr de la victoire ; mais c’est alors qu’Amis se dévoue et remplace Amile : Hardré reçoit la mort. Il est à remarquer que chacun des combattants doit, encore ici, présenter un certain nombre de garants ou d’otages. C’est la reine, sa fille et son fils Beuves qui sont les otages d’Amile. On ne retrouvera plus ces particularités si remarquables dans les poëmes postérieurs. Le jugement de Dieu, en effet, fut peu à peu supprimé par la sagesse de l’Église et la prudence de nos rois, et l’élément judiciaire de nos Chansons de geste perd ainsi son plus vif intérêt. Il n’entre point dans notre plan de tirer de nos poëmes tout un cours de droit féodal, quoiqu’il y soit implicitement contenu. »

Vers 3735.Fels. O. Lire fel.

Vers 3737.Cil serf a été ajouté dans le manuscrit par une main plus récente.

Vers 3739. — Lire bien, ainsi qu’au vers suivant.

Vers 3744.Asemblez. O. Pour le cas sujet, asemblet.

Vers 3745.Grant. O. Pour le cas sujet, granz.

Vers 3746.Alquanz. O. Le cas sujet veut alquant. ═ Baron. O.

Vers 3747.Le plait. O. V. la note du vers 3704. ═ Noveles. O. V. la note du vers 2118.

Vers 3750.Seignors. O.

Vers 3751.Car. O. V. la note du vers 275. Lire jugiez.

Vers 3752.Tresqu’en. Mu. Le manuscrit porte nettement tresque en.

Vers 3754.Nevold. O. La forme nevuld se trouve au vers 216. Aux vers 824, 1219, 2420, 2870, 3182 et 3689, nevuld est aussi tout indiqué pour l’assonance, bien que le scribe ait écrit nevold.

Vers 3755. — Lire Olivier. ═ Li proz e li curteis. O. Pour le cas régime, il faut deux fois le au lieu de li.

Vers 3756.Por. O. V. la note du vers 17.

Vers 3757.Dist Guenelun. O. À cause du cas sujet et malgré le vers 2762, nous proposons : Guenes respunt. ═ Lire fel. O.

Vers 3759.Pur que[i]. Mu.

Vers 3763.Color. O. On peut exactement appliquer à ce mot ce que nous avons dit de dolor à la note du vers 489.

Vers 3764. — Lire bien.

Vers 3767.Voiz. O. La correction est de Mu. Pour l’assonance, on peut encore proposer un autre vers : Puis s’escriat dans le paleis haltur.

Vers 3768.Amor. O. ═ Car. O. V. la note du vers 275. ═ Barons. O.

Vers 3769.Seignors, jo fus. O. Pour obtenir un décasyllabe, Mu. a supprimé seignurs.

Vers 3773. — Lire messages, à cause du cas sujet.

Vers 3775.Poigneor. O. Lire puigneür.

Vers 3776. — Lire Olivier. ═ Cumpaignun. O. Il faut un s, à cause du cas régime.

Vers 3777.Oid. O. V. la note du vers 2. ═ Lire plutôt nobile, qui se prononçait noble. ═ Baron. O.

Vers 3778. — Lire plutôt vengiet.

Vers 3780.Ses. O. V. la note du vers 39.

Vers 3783.Pinabel. O. Pour le cas sujet, Pinabels.

Vers 3784. — Lire bien.

Vers 3785.Por. O.

Vers 3786.Vos. O. ═ Ami a été ajouté postérieurement. Les deux derniers mots sont omis. ═ Se fient ou me fie serait contraire à l’assonance, ainsi que calunie du vers suivant. Nous proposons les deux vers : En vus, ami, me fie, ço dist Guenes. — Getez mei hoi de mort e de chalenge.

Vers 3788.Pinabel. O. Pour le cas sujet, Pinabels. ═ Vos. O. ═ Guarit. O. Pour le cas sujet, guariz.

Vers 3789.Frances. O. ═ Vos. O.

Vers 3790.L’emperere les noz dous cors en asemblent. O. Deux erreurs évidentes.

Vers 3791.Al barant. O. ═ Lire plutôt acier, qui, comme nous l’avons dit, ne se trouve en assonance que dans les couplets en ier.

Vers 3792. — Lire presentet, avec la restitution nécessaire du t étymologique.

Vers 3793.Saisnes. O. Il faut Saisne au cas sujet. ═ Conseill. O. V. la note du vers 30.

Vers 3796.Icels. O. Pour le cas sujet, icil. Le scribe a trouvé le secret de commettre deux fautes en un mot. ═ Alvernene. O.

Vers 3797.Quei[z]. Mu. Le cas sujet ne veut pas de z.

Vers 3798.L’un. O. Pour le cas sujet, l’uns. ═ Lire bien.

Vers 3801.Feiz. O. Erreur évidente.

Vers 3802.Revereiz. O. Cf. reverrunt, au vers 1402.

Vers 3803.Recuveret. O. Recuvret. Mu. ═ Le cas sujet exige le z final au lieu du t. Pour l’addition du premier e, voy. la note du vers 38. ═ Por. O.

Vers 3804. — Au lieu de , le manuscrit porte aa.

Vers 3805.Nen i ad celoi. O. La mesure est rompue. Génin propose : N’i ad celoi. Nous avons adopté la restitution de Mu.

Vers 3806.Geifreit. O. Nous avons partout adopté Gefreid, qui est plus étymologique.

Vers 3807.Charlemagne. O.

Vers 3808.Vos. O.

Vers 3810.Vos. O. ═ Amor. O.

Vers 3811. — Lire plutôt vivere. O., comme au vers 1923. ═ Laisez. O. Lire laissez. V. la note du vers 265. ═ Car. O. V. la note du vers 275. ═ Hoem. O. V. la note du vers 20.

Vers 3812.Ja por murir n’en ert veüd gerun. O. Il y a ici une méprise évidente du scribe, qui s’est embarrassé dans ce vers et dans le suivant, et a écrit por murir, à cause de por aveir. Il serait préférable d’admettre : Morz est Rollanz ; jamais ne l’reverrum. (V. la note de Mu.) ═ Lire plutôt iert. ═ Veüd. O. Pour le cas sujet, veüz.

Vers 3813.Por. O. — Recuverum. O. Le futur exige deux r.

Vers 3814.Vos. O.

Vers 3815.Tuz. O. Pour le cas sujet, tuit. ═ Faillid. O. V. la note du vers 2.

Vers 3817.Caitifs. O. Au cas régime, caitif.

Vers 3818.Ais. O. Lire as et chevalier. ═ Tierris a été ajouté par G. et Mu. Mi. avait proposé gentilz.

Vers 3820.Eschewid. O. V. la note du vers 2.

Vers 3821. — Le vis n’existe pas dans le manuscrit. ═ Bruns. O. — G. substitue : Les oils alques brun[i]s.

Vers 3824.Bels. O. V. la note du vers 15 sur les vocatifs. ═ Vos. O.

Vers 3825.Vos. O.

Vers 3828. — Lire Bien. O.

Vers 3829.Fels. O. Lire fel.

Vers 3830.Vos. O.

Vers 3831. — Parjurez. O. Pour le cas régime, parjuret.

Vers 3832, 3833. — Ces deux vers ont été réunis en un seul par le scribe, distrait ou ignorant : E sun cors metre si cum fel qui felonie fist. Les deux vers ont été rétablis par tous les éditeurs. Mi., suivi par Mu., a proposé : El champ por les mastins, d’après les Quatre Livres des Rois, p. 332, et deux vers de la Mort de Garin. (Vers 2398, 3439.) ═ Mu. a seulement changé par en pur. ═ Génin avait proposé : En un feu e bruir. ═ Lire plutôt camp.

Vers 3834.Se or. O. ═ Peut-être doit-on supprimer ki.

Vers 3836.Voel. O. Nous avons adopté la forme voeill, qui est de beaucoup la plus usitée.

Vers 3837.Vos. O. ═ Lire bien.

Vers 3838.Lu rei. O. ═ Pinabel. O. Pour le cas sujet, Pinabels.

Vers 3839.Isnel. O. Le cas sujet exige isnels.

Vers 3842.Car. V. la note du vers 275.

Vers 3845.Poign. V. la note du vers 415.

Vers 3846.Empereres. O.

Vers 3847. — Lire parent, au lieu de parenz, O.

Vers 3848.Vos. O. ═ Recrrai. O.

Vers 3850.Tierri. O. Pour le cas sujet, Tierris.═ Lire iert.

Vers 3852.Hostage. O. V. la note du vers 147.

Vers 3855. — Lire bien. ═ Malez. O. Pour le sujet pluriel, malet.

Vers 3856.Oger. O. Le cas sujet exige Ogiers.

Vers 3858.Justez. O. Pour le s. p., il faut un t au lieu d’un z. ═ Lire en assonances, à la fin des vers de ce couplet : justiet, seigniet, mustiers, repairiet, chalciez, legiers, chiefs, mier, O. quartiers, destriers, chevalier, pitiet, O. iert.

Vers 3859. — Lire bien. ═ Asols. O. Pour le s. p., asolt. ═ Seignez. O. Il faut seigniet pour la même raison.

Vers 3860.Acuminiez. O. Le cas sujet exige acuminiet.

Vers 3861.Par cez. O. Erreur du scribe, corrigée par Mu.

Vers 3862.Andui. O. V. la note du vers 1355. ═ Repairez. O. Le cas sujet exige repairiet.

Vers 3863.Esporons. O. (?) ═ Lor. O. ═ Calcez. O. Cf. le vers 2678, et le verbe enchalcer, vers 2362, 2785, 2796.

Vers 3864.Osberc. O. Pour le cas régime, osbercs.

Vers 3865.Lor. O.

Vers 3866.Mier. O. V. la note du vers 1500. Ce mot est un de ceux qui ne se trouvent en assonances que dans les laisses en ier.

Vers 3868.Puinz. O. V. la note du vers 415.

Vers 3869.Muntez. O. Pour le cas sujet, muntet.

Vers 3870.Chevalers. O. Le cas sujet exige, au pluriel, chevalier.

Vers 3871. — Lire ki. V. la note du vers 586. ═ Lire Pitiet.

Vers 3874. — Lire plutôt justiée.

Vers 3875.Produme. O. Lire prozdume. Les deux formes se trouvent presque aussi fréquemment dans notre texte.

Vers 3876.Chevals. O. Pour le cas sujet, cheval. ═ Pour la même raison, curant et aate, au lieu de curanz et aates, O.

Vers 3877.Bien. O.V. la note du vers 34 et celle surtout du v. 1500.

Vers 3878.Lasquent. O. Cette forme ne se rencontre qu’une fois dans le manuscrit. La forme laschent s’y rencontre plusieurs fois. (Vers 1290, 1381, 1574, 2996.) Cf. lascent, vers 3349.

Vers 3880, 3881. — On pourrait ramener ces deux vers à la rigueur de l’assonance. Lur cengles rumpent e lur osbercs desmailent. — Les seles turnent, ça jus chéent les alves (?).

Vers 3882.Mil. O. Correction de Mu. ═ Humes. O. V. la note du vers 20.

Vers 3883. — Lire en assonances, à la fin des vers de ce couplet : chevalier, legiers, destriers, mier, acier, detrenchier, chevalier.

Vers 3889.Granz. O. Le cas sujet exige grant. ═ Les colps. O. Pour le cas sujet, li colp.

Vers 3892.Pinabel. O. Pour le cas sujet, Pinabels. ═ Car. O. V. la note du vers 275.

Vers 3893.Tes. O. V. la note du vers 39.

Vers 3896.Respont. O. V. la note du vers 30. ═ Tierri. O. Pour le cas sujet, Tierris.

Vers 3897. — Lire fel. O. V. la note du vers 1924.

Vers 3899.Tierri. O. Il faut Tierris, à cause du cas sujet. ═ Lire ies.

Vers 3900.Ies. O. V. la note du vers 648. ═ Lire bien.

Vers 3901.Conoissent. O. V. conuis (cognosco), au vers 3409 ; conuistre, au vers 530, etc.

Vers 3902.Car. O. V. la note du vers 275. ═ Laisse. Mu. Laisses nous paraît acceptable. En général, les impératifs ne prennent pas l’s à la 2e personne du singulier, laxa. Mais on peut également admettre l’étymologie : laxes.

Vers 3904. — Lire iert, et tels, à cause du cas sujet.

Vers 3905.Jur. O. Pour le cas sujet, jurz. ═ Lire iert.

Vers 3906.Pinabel. O. Le cas sujet veut Pinabels.

Vers 3909.Mielz. O. V. la note du vers 58 et surtout celle du vers 1500.

Vers 3911.Gemez. O. Ailleurs on emploie les deux m, qui sont étymologiques. Pour le cas sujet, gemmet.

Vers 3912.Ciel. O. V. la note du vers 545.

Vers 3913.Desevrez. Mu. Le manuscrit porte deseverez. Pour le cas sujet, il faut deseveret.

Vers 3915.Pinabel. O. Au cas sujet, Pinabels.

Vers 3916.Elme. V. la note du vers 996.

Vers 3918. — Lire acier.

Vers 3919. — La première lettre de ce vers et des trois suivants manque dans le manuscrit. — Mu. propose en note (pour ne pas imprimer de suite deux vers à peu près semblables) la leçon suivante, que nous faisons volontiers entrer dans notre texte : L’helme li en detrenchet.

Vers 3922.Osberc del dos. O. Erreur évidente. ═ Josque. O. V. la note du vers 510.

Vers 3923.Mort. O. On peut entendre ce vers de deux manières : « Dieu est là qui l’empêche d’abattre mort Thierry, » ou, « Dieu est là qui empêche la mort d’abattre Thierry. » Dans ce dernier cas, qui est plus improbable, mais non pas impossible, il faut, au cas sujet, morz.

Vers 3924.Ferut. O. Pour le s. s. m., feruz.

Vers 3925.Chiet. O. V. la note du vers 2082 et celle du vers 1500. ═ Pred. O. V. la note du vers 2.

Vers 3926.Elme. O. V. la note du vers 996. ═ Lire acier.

Vers 3927.Fait. O. Erreur manifeste.

Vers 3928. — Lire chief.

Vers 3930.Vencut. O. Il faut, au cas sujet, vencuz.

Vers 3932.Pendut. O. Pour le même motif, penduz.

Vers 3937.Oger. O. Au cas sujet, Ogiers.

Vers 3938.Geifrei. O. Lire Gefreis. ═ Willalme. O. Pour le cas sujet, Willalmes.

Vers 3942. — Lire chevalier.

Vers 3943. — Les deux premiers mots manquent dans le manuscrit. Restitution de Mi.

Vers 3946.Or. Mu. Nous écrivons ore, comme dans le Ms., pour laisser intacte la question de prononciation.

Vers 3949.Venuz. O. Pour le cas sujet, venut.

Vers 3950.Renduz. O. Il faut, pour la même cause, rendut.

Vers 3951.Vivrat. Mu. V. la note du vers 38. ═ Je préférerais nuls, nus, au lieu de uns.

Vers 3954. — Les quatre premières lettres de ces vers manquent dans le manuscrit, ainsi que la première lettre des deux vers suivants. ═ Canut pour le cas sujet, au lieu de canuz. O.

Vers 3955.Ies. O. Voir la note du vers 648 et celle du vers 1500.

Vers 3959.Altroi. O. V. la forme altrui, plus conforme à notre phonétique, aux vers 380 et 1963.

Vers 3960. — Lire p.- e. Bavier.

Vers 3961. — Lire E Peitevin, au lieu de et.

Vers 3962.Sor ne se trouve guère qu’ici dans notre texte d’Oxford. En revanche on trouve sur aux vers 12, 110, 272, 778, 823, 961, 1553, 1617, 2298. Il s’emploie fréquemment dans le sens d’au-dessus de. (Vers 823, 961, 1553, 1617.)

Vers 3964. — Lire destriers.

Vers 3966.Orgoillus. O. V. la note du vers 292.

Vers 3967.Serjanz. O. Pour le cas sujet, serjant.

Vers 3968.Eive peut s’entendre par eau (aqua), ou jument (equa). Nous avons adopté ce dernier sens, qui nous paraît ici le seul intelligible. On se sert d’une jument pour attirer plus violemment les chevaux...

Vers 3972.Li cler sanc. O. Pour le cas sujet, clers sancs.

Vers 3973.Mort... recreant. O. Le sujet exige morz et recreanz. ═ Lire fel.

Vers 3975.Empereres. O.

Vers 3982.Faite. Erreur évidente. ═ Lire la note de Génin sur ce vers. (P. 460.) Il montre que l’usage d’avoir plusieurs parrains et marraines a existé dans plusieurs églises, et que, d’autre part, il a été prohibé par plusieurs Conciles.

Vers 3983.Cruiz e linées. O. La correction est de Mu. G. a supposé : Asez avez ben enlinées dames.

Vers 3984.Cumpaignes. La première lettre de ce mot est la seule qui existe encore dans le manuscrit. Restitution de tous les éditeurs.

Vers 3985.Baptizent. O. Pour la mesure, baptizerent.

Vers 3986.Truvée. O. Erreur évidente.

Vers 3987.Conoisance. O. Cf. les vers 530, 2524, 3409, 3566.

Vers 3989.Esclargiez. Erreur évidente.

Vers 3990.Bramidonie. O. V. la note du vers 2822.

Vers 3991. — Pour le cas sujet, nuiz. Lire nuit aux vers 162, 517, 2495, 2498, 3731, et nuiz, au vers 717.

Vers 3992.Culcez s’est. O. Au cas régime, culcet s’est. Lire culchet. ═ On peut encore écrire : Li reis se culchet, ce qui donne un vers à mesure exacte.

Vers 3993.Seint. O. Pour le cas sujet, seinz.

Vers 3994.Carles. O. V. la note du vers 15 sur les vocatifs.

Vers 3995-3997. Ces vers sont encore inexpliqués. Qu’est-ce que la terre de Bire ? Génin écrit hardiment : Tere de Sirie, et Mi. : Tere d’Ebre. Nous proposons de lire : En tere de Libie. ═ Qu’est-ce encore que cette ville d’Imphe ou de Nymphe ? La rédaction la plus ancienne de la Karlamagnus Saga manque précisément ici ; mais nous lisons dans la Keiser Karl Magnus’s Kronike, qui reproduit exactement l’affabulation de la Saga : « Va dans la terre de Libie secourir le bon roi Iwen ; car les païens font une guerre terrible dans ce pays. » Et plus loin l’auteur raconte cette guerre, mais trop succinctement pour qu’on puisse en tirer parti. On voit seulement que le roi païen s’appelait Gealwer, et qu’il fut tué par Ogier le Danois. » (G. Paris, Histoire poétique de Charlemagne, p. 277.)

Vers 3996.Reis. O. Pour le cas sujet, rei. ═ Succuras. O. Pour le futur, succurras.

Vers 4002.Ci falt la geste que Turoldus declinet. V. les p. lxv et suivantes de notre Introduction.


Nous avons eu soin d’indiquer, dans le courant de ces notes, toutes les différences qui séparent de notre texte la Karlamagnus Saga d’une part, et, de l’autre, la Keiser Karl Magnus’s Kronike. Nous allons donner ici, pour la première fois, la traduction partielle de la Saga du xiiie siècle, et la traduction totale de la Keiser Karl Magnus’s Kronike, œuvre danoise du xve siècle. Il ne nous a pas paru nécessaire de traduire la première partie de la compilation islandaise. C’est aux chapitres i-xxxvi que se rapportent, en effet, ces mots de M. G. Paris : « Le texte islandais se rapproche tellement du poëme français que l’analyse serait peu intéressante... Les différences sont assez faibles pour que la comparaison puisse être poursuivie presque vers par vers. » D’ailleurs la Keiser Karl Magnus’s Kronike est un abrégé fidèle de la Saga et a été faite d’après le même texte.


I. — Traduction de la Karlamagnus Saga. (Ch. xxxvii-xli.)


Chap. xxxvii. — Peu après, le roi Karlamagnus vint à Runzival. Il n’y pourrait jamais chevaucher une seule aune en long, un seul pied en travers sans trouver quelque corps de païen ou de chrétien. Et il s’écria à haute voix : « Où es-tu, Rollant ? Où est Oliver et Turpin l’archevêque ? Où êtes-vous, les douze Pairs, que j’avais postés derrière moi pour garder le pays, et que j’aimais tant ? » Le roi Karlamagnus déchirait ses vêtements, tirait sa barbe : accablé de douleur, il tomba de cheval. Et il n’y eut pas là un seul homme qui ne versât des larmes pour un sien ami. Le duc Nemes ressentit cet événement. aussi vivement que tout autre ; cependant il s’approcha du Roi : « Levez-vous, lui dit-il, et regardez devant vous à deux milles de distance. Vous devez voir la poussière (mot à mot, la fumée) des chevaux de ces païens qui étaient ici. Or il serait plus digne d’hommes de venger nos amis que de nous désoler devant des morts. » Le roi Karlamagnus répond ainsi : « Ils sont loin maintenant. Cependant, je vous prie, suivez-moi. » Puis il laissa trois comtes à Runzival pour garder le champ de bataille ; ils se nommaient Begun, Hatun et Melun, et dix mille chevaliers avec eux. Ensuite le Roi fit souffler dans ses trompes, et chevaucha en hâte après les païens. Et il s’approchait rudement. Mais comme il [commençait à] faire nuit sur eux, le roi Karlamagnus descendit de son cheval, se jeta à terre, et pria Dieu afin que le jour se pût allonger, et la nuit se raccourcir. Et à peine eut-il prié, voici qu’un ange de Dieu vint du ciel, et parla avec lui : « Dieu a dit oui à ta prière, et il te donnera abondamment la lumière du soleil et le jour. Chevauche en hâte contre les païens, et venge tes hommes sur cette gent maudite. » Lorsque le roi Karlamagnus entendit ces paroles, il se réjouit, et sauta sur son cheval. Cependant les païens fuyaient vers la terre d’Espagne : les Franks (Frankismenn) coururent après eux rudement. Et ils les abattaient à deux mains. Alors ils arrivèrent à une grande eau, ces païens, et ils appelèrent à leur secours leurs dieux : Terogant, Apollo, Maumet ; puis ils sautèrent à l’eau et plongèrent au fond, et d’aucuns flottèrent morts, d’aucuns furent noyés sous l’eau. En ce moment les Franks poussèrent des cris, et dirent : « Il nous est précieux d’avoir vengé Rollant et ses compagnons. » Alors arrive le roi Karlamagnus, et il voit que tous les païens sont noyés, et il parle à ses hommes : « Descendez de vos chevaux : il serait trop long pour nous de retourner cette nuit ; prenons nos quartiers pour la durée de la nuit et reposons-nous tous ensemble jusqu’au jour. » Les Franks répondent : « Bien dit à toi, Sire. » Ils firent ainsi, et restèrent là durant cette nuit.

Chap. xxxviii. — Le Roi ne retira pas son vêtement de combat ; il plaça son écu à sa tête, et resta dans sa brunie, ceint de son épée si bonne, nommée Joius, qui était à trente couleurs pour chaque jour. Il possède un clou avec lequel le Seigneur a été attaché à la croix : il l’a mis dans le pommeau de l’épée, et, à l’extrémité, quelque chose de la lance du Seigneur, avec laquelle Dieu fut blessé. Après cela, tout oppressé de sa grande douleur, Karlamagnus se mit à dormir comme un homme fatigué. Or un ange de Dieu vint à lui et s’assit à son chevet toute la nuit. Puis il rêva... Il lui semblait voir une grande agitation en l’air, une tempête horrible, la pluie, la neige, et une flamme violente. Et aussitôt ce prodige tomba sur ses hommes, si bien qu’ils eurent peur et qu’ils criaient à haute voix et appelaient le roi Karlamagnus à leur secours, et ce qui tombait du ciel brisait leurs armes. Et incontinent apparurent au roi Karlamagnus un grand nombre de loups et de lions, et de ces oiseaux qu’on appelle gamm (griffons), et toutes sortes de bêtes effroyables. Et il lui sembla qu’elles voulaient dévorer ses hommes, et qu’il voulait les défendre. Incontinent vint un lion qui sauta sur lui, lui mit ses deux pattes dans la bouche, et fit comme s’il voulait lutter (? mot à mot se prendre) avec lui et le dévorer ; mais il ne sut pas lequel des deux succomba. Et le Roi ne s’éveilla pas encore. Alors se fit voir clairement devant lui un troisième songe... Il lui sembla être chez lui, au pays des Franks (Frakkland), dans son palais, et qu’il avait les fers aux pieds ; et il vit trente hommes voyageant vers leur ville qui s’appelait Ardena, et qui causaient entre eux, et disaient ainsi : « Le roi Karlamagnus a été vaincu, et il ne portera plus désormais la couronne au pays des Franks ! »

Chap. xxxix. — Or, après que le Roi se fut réveillé, lorsqu’il pensa à ses rêves, il lui sembla que toutes ces horribles choses étaient vraies. [Les Francs] alors harnachèrent leurs chevaux, et, quand ils furent harnachés, chevauchèrent vers Runzival. Et quand ils y furent arrivés, ils reconnurent les élus (les morts sur le champ de bataille), et trouvèrent Rollant gisant entre quatre belles pierres. Son épée gisait sous sa tête ; il tenait sa main droite autour de la poignée, et, dans sa main gauche, il avait son cor Olivant. Lorsque le roi Karlamagnus vit tout cela, il descendit de cheval, alla vers le fils de sa sœur avec grande tristesse, le baisa, lui mort, tomba à terre, et dit ensuite : « Béni sois-tu, Rollant, mort comme vivant (lifandi ok kvikr, vivens et vivus), par-dessus tous les autres chevaliers de la terre ; ton pareil ne pourra jamais être trouvé dans le monde terrestre, parce que tu es à la fois aimé de Dieu et des hommes. » Alors le Roi tomba évanoui, et ses hommes crurent qu’il était mort, bien qu’il fût vivant. Mais le duc Nemes se tenait auprès et voyait ; il s’élança vers une eau courante en toute diligence, prit de cette eau et en jeta sur la face du Roi, et lui dit ensuite : « Levez-vous, Sire roi, personne ne doit aimer son prochain mort au point de s’oublier, lui, vivant. » Lorsqu’il eut entendu ces paroles de Nemes, le Roi s’y rendit : il se redressa sur ses pieds, et dit au plus fort de ses chevaliers qu’il allât prendre l’épée de Rollant et la lui apportât. Le chevalier alla, mais ne put l’avoir. Alors le Roi envoya un second chevalier, et elle ne fut pas plus facile à détacher. Puis il envoya cinq chevaliers, pour que chacun d’eux pût tenir un des doigts de Rollant, et l’épée ne fut pas plus facile à détacher. Alors le roi Karlamagnus parla : « Aucun homme n’eût pu obtenir de prendre l’épée de Rollant tandis qu’il vivait ; à l’heure présente, vous ne trouverez pas grâce devant lui mort. » Et, après cela, il tomba pâmé. Le duc Nemes le pria d’avoir du courage, et parla ainsi : « L’homme doit toujours survivre à l’homme, et prendre souci surtout de soi-même, parce que Dieu a ordonné qu’il en fût ainsi. » Le roi Karlamagnus écouta ce conseil et rejeta loin de soi son chagrin ; et il demanda comment ils pourraient obtenir l’épée de Rollant. « Voici qu’il me vient un avis : c’est de prier le Dieu tout-puissant qu’il nous veuille assister pour cette fois ; mais je crois savoir d’avance que personne ne sera digne de détacher l’épée de Rollant, à moins que ce ne soit un aussi bon guerrier qui la touche au pommeau. » Alors le roi Karlamagnus se mit à prier en lui-même un long moment. Et, quand il eut fini sa prière, il se leva et alla là où Rollant gisait ; il toucha à l’épée, et elle gît libre devant lui. En ce moment, le Roi sut que ce que le duc Nemes lui avait dit était vrai. Il prit le pommeau de l’épée à cause des reliques qui s’y trouvaient, et il jeta la lame à l’eau loin de terre, parce qu’il savait qu’il n’appartenait à personne de la porter après Rollant. Ensuite il alla sur le champ de bataille rechercher les chrétiens, et il trouva les douze Pairs, qui gisaient l’un à côté de l’autre ; et cela, il sut que Rollant l’avait fait (?).

Chap. xl. — Puis le roi Karlamagnus fit enlever les corps des douze Pairs et les fit envelopper de bons linceuls ; et quand cela fut achevé avec grands égards, il se sentit vivement ému pour ses autres hommes qui étaient tombés, et il lui sembla que ce serait un grand malheur s’il ne pouvait réussir à distinguer leurs corps de ceux des païens. Alors Karlamagnus en parla avec le duc Nemes et tous ses gens : « Comment pourrait-il arriver à reconnaître les corps des chrétiens au milieu des morts ? » Le duc Nemes lui répondit, bien sagement et en homme de sens (veg-mann-liga, mot à mot, en homme qui connaît les voies et moyens), et parla de cette façon : « Il [m’]est avis d’admettre qu’ici, comme le plus souvent lorsqu’un grand embarras se présente, c’est Dieu, cause de tout, qui y peut et veut le mieux. Mon avis est donc pour cette fois d’invoquer le Dieu tout-puissant de tout cœur, afin qu’il nous aide en cette affaire. » Ceci parut au roi Karlamagnus un excellent conseil ; il veilla toute la nuit, et tous ses gens avec lui. Ils se mirent en prière, et demandèrent à Dieu tout puissant de leur faire voir clairement lesquels étaient ou les chrétiens qui avaient succombé, ou ces méchants païens qui s’étaient soulevés contre eux. Or, le matin suivant, lorsqu’ils vinrent pour la seconde fois reconnaître les élus, le Dieu tout-puissant avait ainsi exaucé leur prière, et la distinction suivante était faite entre les chrétiens et les païens : des buissons avaient poussé sur les corps des païens, tandis que ceux des chrétiens étaient tout découverts, tels qu’ils venaient de tomber. Alors le roi Karlamagnus fit faire un grand nombre de tombeaux très-vastes dans lesquels il réunit ceux qui étaient tombés sur le champ de bataille, et il fit ensuite recouvrir leurs corps de terre ; il fit amener là presque tout ce qu’il y avait [de ces corps], excepté Rollant et les douze Pairs. Or, la nuit suivante, les anges de Dieu dirent en songe au Roi que tous étaient sauvés, parmi les hommes de Karlamagnus qui avaient succombé. Puis le Roi fit faire de grandes et fortes bières, et y fit déposer les corps de Rollant, des douze Pairs, des chefs qui avaient succombé ; il fit mettre leurs douze corps dans les bières, et ensuite se mit en marche, lui et tous ses gens, avec grand éclat et honneur. Et ils avaient, cheminant avec eux, ces douze corps ; et ils voyagèrent jusqu’à ce qu’ils fussent arrivés à leur ville qui se nomme Arlis (Arles), et qui est la capitale du pays qu’on appelle Provincia. Il y avait là des clercs nombreux, bons et célèbres, qui vinrent au-devant d’eux avec grande pompe et vénération. Alors on chanta des messes pour les âmes dans tous les moutiers de la ville. Le roi Karlamagnus fit des offrandes, aux messes qui furent chantées, avec grande magnificence et générosité : on dit qu’il y offrit douze mille marcs pesants d’argent avant que les corps fussent recouverts de terre, et qu’il donna (litt. fit retourner ?) de grandes propriétés pour l’emplacement où reposent les douze Pairs. Et il établit de grosses rentes ou prébendes qui, depuis lors, ont toujours été continuées. Après cela le roi Karlamagnus s’en retourna dans sa ville de Paris avec tous ses gens, et il eut beaucoup de chagrin dans son cœur, quoiqu’il lui eût été donné de faire la découverte de ces corps.

Chap. xli. — Lorsque le roi Karlamagnus eut habité chez lui quelque temps et qu’il se fut reposé de ces voyages, il fit dresser le pieu (symbole des convocations générales, surtout des levées d’armes) dans toutes ses terres et provinces, et fit convoquer tous les commandants en chef (höfding) de ses États, et tout homme valide et capable de porter les armes, afin qu’ils eussent à venir vers lui pour délibérer sur ce qu’on devait faire du comte Guinelun, lequel avait trahi Rollant et les vingt mille hommes morts avec lui à Runzival. Et quand tout ce monde fut réuni dans un même lieu, l’affaire fut exposée et racontée par des hommes sages, et ensuite portée devant l’Assemblée générale. Alors tous ces hommes se déclarèrent incompétents pour juger une pareille cause, et on ne put arriver à aucune conclusion pour cette fois. Mais il arriva, comme toujours, que le duc Nemes en vint à se lever en face de cette multitude, et leur fit une longue harangue tout particulièrement habile. Il termina ainsi son discours : « Mon avis est que le comte Guinelun doit mourir de la mort la plus épouvantable et la pire qu’on pourra jamais trouver. » Cet avis parut juste au roi Karlamagnus et à toute l’Assemblée. Alors le comte Guinelun fut retiré du cachot où il avait été jusque-là gardé dans les fers, depuis que Rollant et ses compagnons étaient partis pour Runzival. Puis le traître fut attaché entre deux chevaux sauvages qui l’entraînèrent tout autour du pays des Franks, jusqu’à ce que sa vie finît ainsi, jusqu’à ce qu’un seul de ses os ne restât plus attaché à l’autre dans tout son corps, et ils étaient eux-mêmes en morceaux (?). Après cela le roi Karlamagnus fit rendre libres ses États ; il les fit fortifier, et plaça dans ses provinces des hommes pour les bien administrer et gouverner, et aussi pour repousser au loin ses ennemis et ses adversaires. On dit aussi que l’empereur Karlamagnus eut depuis plusieurs guerres, et remporta rarement la victoire ; mais il conserva ses États tout entiers jusqu’au jour de sa mort. Ainsi finit cette branche (de la Saga).


II. — Traduction de la Keiser Karl Magnus’s Kronike.


L’Empereur ayant soumis l’Espagne et la Galice, ainsi qu’il a été dit plus haut, il restait néanmoins encore un château qu’il n’avait pu réduire. On l’appelait Saragus, et il était situé sur une montagne élevée. Il avait un roi qui se nommait Marsilius et qui était païen. Marsilius dit à son conseil : « Voilà l’empereur Charlemagne qui vient ravager notre pays ; arrêtons de bonnes résolutions. » Un roi qui se nommait Blankandin lui répondit (il était vieux et sage) : « Ne craignez pas, seigneur, lui dit-il ; mais écrivez à l’Empereur que vous voulez devenir son homme lige et embrasser la foi chrétienne, et faites-lui de riches présents. L’Empereur est vieux et se reposerait volontiers, s’il le pouvait. S’il désire quelque otage, envoyez-lui mon fils et le vôtre ; il vaut mieux perdre deux hommes que nous perdre tous avec tous nos domaines. » Tous dirent que c’était un bon conseil.

L’Empereur, étant en Espagne, assiégeait un château appelé Flacordes ; l’envoyé du roi Marsilius y vint et exposa son message, disant que le roi Marsilius voulait passer en France pour voir l’Empereur, se constituer son vassal et lui rendre hommage pour l’Espagne. L’Empereur, ayant lu la lettre, donna l’assaut au château de Flacordes ; il l’emporta du coup et tua tous ceux qui ne voulurent pas se faire chrétiens. Puis il réunit son conseil et fit lire devant lui la lettre de Marsilius. Quelques-uns dirent qu’il fallait s’en rapporter à cette lettre ; c’étaient ceux qui auraient bien voulu s’en retourner chez eux. Ils prièrent l’Empereur d’accepter les otages. Mais Roland dit à l’Empereur : « Si vous vous fiez à la lettre du roi Marsilius, vous vous en repentirez tant que vous vivrez ; vous savez bien que c’est un homme faux. Nous avons conquis toute l’Espagne ; conquérons aussi maintenant ce seul château qui reste, avant de partir d’ici. D’ailleurs Marsilius ne peut pas se défendre contre vous ; les hommes d’Afrique et les Turcs sont tous battus, et il ne peut recevoir d’eux aucun secours. Marchons sur Saragus et ne désemparons pas que nous n’ayons tué Marsilius, ou qu’il ne soit chrétien ! »

Le comte Gevelon, beau-père de Roland, se leva ensuite et dit à l’Empereur : « Il me semble que les paroles de Roland ont plus d’emportement que de sagesse. Le roi Marsilius vous offre son hommage et veut se faire chrétien. Il est impie de vouloir la guerre, quand on peut avoir la paix. Mon avis, en conséquence, est que vous envoyiez un homme sage à Marsilius, pour faire avec lui une alliance qui soit solide, et ramener ici des otages. » L’Empereur demanda qui il conviendrait le mieux d’envoyer à cet effet. Le duc Neimis s’offrit pour partir ; l’Empereur lui lança un regard courroucé, et dit : « Tu resteras auprès de moi cette première année (?). » Roland s’offrit aussi pour partir ; Olivier dit : « Il n’est pas bon que tu partes, car tu es trop vif ; tu serais plutôt il une cause de désunion que de concorde. » Roland dit : « Y a-t-il quelqu’un plus propre pour ce message que le duc Gevelon, mon beau-père ? » Tous furent de cet avis. L’Empereur ordonna donc à Gevelon de se rendre auprès du roi Marsilius. Et Gevelon dit à Roland : « C’est toi qui es cause de ce qui arrive ; aussi ne serai-je plus désormais ton ami. Et c’est toi qui es cause aussi que nous restons si longtemps après la victoire gagnée. Si je reviens de ce voyage, je causerai ta mort et celle de tes compagnons. Donc je vais partir ; mais je sais bien que je n’en reviendrai pas en vie, car le roi Marsilius me fera tuer. » Roland et les douze Pairs rirent de ces paroles, et Gevelon fut si furieux qu’il hésita sur ce qu’il devait faire. Des lettres furent écrites, et le secrétaire les remit à Gevelon pour qu’il les portât à Marsilius ; mais Gevelon détourna les mains, et les lettres tombèrent par terre. Les douze Pairs sourirent, et Roland dit : « Si l’Empereur m’avait confié les lettres, la peur ne me les aurait pas fait lâcher, et elles ne seraient pas tombées par terre. »

Gevelon reprit les lettres, partit pour aller trouver le roi Marsilius et lui remit le message. Le roi Marsilius le reçut amicalement. Blankandin dit à Gevelon : « Je sais bien que l’empereur Charlemagne est un puissant (géant ou guerrier, sens étymologique) ; mais maintenant il est vieux. Je crois que Roland, un des douze pairs, le pousse beaucoup à la guerre et aux combats. » Le duc Gevelon répondit : « C’est vrai, comme tu le dis ; Roland surtout est cause de tout cela, et nous avons eu beaucoup de mal par sa faute. Plût à Dieu qu’il fût mort ! nous aurions aujourd’hui une bonne paix. Mais il ne sera satisfait que lorsqu’il aura conquis le monde entier. » Quand le roi eut lu la lettre, il vit que l’Empereur se qualifiait de « roi légitime de la terre d’Espagne » ; c’est pourquoi il entra en colère et frappa Gevelon avec un bâton. Gevelon tira son épée, et dit : « L’Empereur demandera que ma mort soit vengée. » Le conseil du roi intervint, et dit que le roi avait tort. Un des hommes de Marsilius, nommé Langelif, lui dit : « Écoute les paroles de Gevelon : ce peut être meilleur pour nous que tu ne le penses. » Le roi Marsilius dit alors à Gevelon : « Je reconnais que j’ai eu tort envers toi, et j’en userai mieux à ton égard. » Et il lui donna un manteau qui valait cent livres d’argent, et dit : « Je m’étonne que ton maître soit si avare (ou ambitieux, au sens allemand), étant si âgé. » Gevelon répondit : « L’Empereur est un noble seigneur, favorisé (mot à mot bien vu) de Dieu, et j’aimerais mieux mourir que d’avoir son inimitié. Tant que Roland vivra, nous n’aurons jamais la paix ; les douze Pairs sont tellement fiers (superbes rendrait mieux le sens et le mot à mot, qui est prodigue, luxueux), qu’ils ne craignent personne. » Le roi Marsilius dit : « J’ai quatre cent mille hommes de troupes : puis-je avec eux résister à la puissance de l’Empereur ? » Gevelon lui répondit : « Il n’y a pas à y songer pour l’instant. Je veux te donner un meilleur conseil : envoie à l’Empereur de l’or, de l’argent, des pierres précieuses, et deux hommes en otage que l’Empereur emmènera en France. Roland restera pour la garde du pays. Marche alors sur lui avec toutes tes troupes et divise ton monde en quatre parties, afin qu’elles ne combattent pas toutes ensemble et sur un seul point. Et tu le fatigueras plus facilement. » Le roi Marsilius le remercia de son conseil et dit : « Il est bien sûr qu’avec un tel plan nous vaincrons Roland. » Gevelon lui en fit serment et demanda que le roi lui jurât aussi de ne pas le trahir ; le roi jura qu’il ne le trahirait point. Les conseillers de Marsilius jurèrent ensuite et dirent qu’ils vaincraient sûrement Roland.

Gevelon partit pour retourner auprès de l’Empereur, emportant avec lui beaucoup d’or et d’argent, et il dit à l’Empereur : « J’ai ici beaucoup d’or et d’argent que le roi Marsilius vous envoie, ainsi que les clefs du château fort de Saragus, avec les otages ; il se fera certainement chrétien et deviendra votre vassal. » L’Empereur remercia Dieu et dit : « Tu as accompli le message en fidèle serviteur. » L’Empereur réunit alors son conseil et ses hommes sages, et leur demanda qui d’entre eux voulait rester en arrière à Runtseval, qui était sur la frontière. Gevelon répondit : « Roland est celui qui convient le mieux, et il est parfaitement l’homme qu’il faut pour rester ici à garder le pays. » L’Empereur jeta sur lui un regard courroucé et dit : « Quel sera donc le capitaine qui ramènera mon armée en France ? » Gevelon répondit : « Ce pourrait être Olger le Danois. » Roland reprit et dit : « Gevelon, si je reste ici avec l’arrière-garde, je ne serai pas aussi effrayé que tu l’as été quand tu as laissé tomber la lettre de tes mains. » L’Empereur dit à Gevelon : « Tes paroles ont un sens étrange. » Roland dit : « Seigneur, je resterai volontiers avec l’arrière-garde. » L’Empereur fut tellement touché de ces paroles que les larmes lui coulèrent des yeux, et il dit : « Restez aussi, vous, les douze Pairs, avec vingt mille hommes, et Roland sera votre capitaine. » Puis l’Empereur fit ployer les tentes et lever le camp, et il se mit en marche pour la France.

Tous les hommes du pays de France eurent peur pour Roland, et des larmes furent versées à cause de lui. L’Empereur lui-même étant fort contristé, le duc Neimis lui dit : « Que craignez-vous ? Pourquoi êtes-vous soucieux et triste ? » L’Empereur lui dit : « J’ai rêvé, cette nuit, que l’ange de Dieu venait vers moi et qu’il brisait mon épée entre ses mains. C’est pourquoi je crains que Gevelon n’ait tramé quelque mauvaise machination avec Marsilius et n’ait trahi Roland. Si j’éprouve ce malheur, je ne m’en consolerai jamais. C’est pourquoi je recommande mon neveu à Dieu tout-puissant. »

Le roi Marsilius s’étant enquis que Roland était à Runtseval, comme il a été dit auparavant, rassembla de tout son pays les rois, ducs et comtes, chevaliers et écuyers, de sorte que, dans les trois jours, il eut quatre cent mille soldats. Il fit placer ses dieux sur le rempart, et on leur fit des sacrifices. Puis il choisit douze de ses hommes, les meilleurs qu’il eût, pour les opposer aux douze Pairs : le premier était Adelrot, le fils de sa sœur ; le second, Falsaron, son frère ; le troisième, Corsablin ; le quatrième, le comte Turgis ; le cinquième, Eskravit ; le sixième, Estorgant ; le septième, Estormatus ; le huitième, le comte Margaris ; le neuvième, Germiblas ; le dixième, Blankandin ; le onzième, Timodes ; le douzième, Langelif, qui était le frère du père du roi Marsilius.

Le roi Marsilius s’arma avec tous ses hommes, et marcha vers Runtseval. Olivier était sur une haute montagne, et voyant venir cette grande armée, il dit à Roland : « Voici venir une grande armée d’Espagne ; il est donc évident que Gevelon nous a trahis. » Mais Roland fit semblant de ne pas entendre ce qu’il disait. Olivier reprit : « Voici venir une grande armée avec des harnais bleus, des bannières rouges et des boucliers polis, et nous avons bien peu de monde. C’est pourquoi il serait prudent de souffler dans ton cor pour rappeler l’Empereur, qui viendrait à notre secours. » Roland répondit : « Je serais malade si l’Empereur et la France perdaient de leur réputation et de leur gloire par ma faute ; mais j’aurai auparavant entassé de si grands monceaux avec Durendal qu’on en parlera tant que durera le monde. » Olivier répondit : « On n’est point pour cela peureux, parce que l’on recherche son avantage et son bien. J’ai vu tant de païens que toutes les montagnes en étaient couvertes, toutes les vallées remplies, et tu ne tarderas pas à voir un grand choc entre nos gens, car nous sommes trop peu de monde contre tant de milliers d’hommes et une aussi puissante armée. » Roland répondit : « Soient brisés en deux les cœurs et les poitrines des hommes pusillanimes ! »

Quand Roland vit que les païens étaient arrivés tout près, il dit à ses hommes : « Vous savez tous que l’Empereur nous a choisis dans son armée et nous a placés ici pour garder ce pays s’il en était besoin : nous supporterons et souffrions tout ce qu’il plaira à Dieu de nous faire. Piquez bravement de la lance et de l’épée ; tranchez de vos glaives. Je trancherai, moi, de mon épée, si bien que chrétiens et païens diront qu’un homme en tenait la poignée. » L’archevêque Turpin, monté sur son coursier, tout armé, leur dit : « Chers amis, ce combat, nous l’allons supporter. Tombez à genoux. Je vous donne l’absolution de tous vos péchés, et chacun de vous qui mourra sera un martyr de Dieu. Et je vous impose, comme pénitence et expiation pour vos péchés, que vous combattiez vaillamment contre les païens. » L’archevêque Turpin prononça sur eux sa bénédiction ; après quoi, les Français montèrent sur leurs chevaux. Et Olivier dit à Roland : « Tu dois voir maintenant que Gevelon nous a vendus pour tout cet or et cet argent qu’il a rapporté avec lui. L’Empereur en tirera vengeance sur le traître, si nous ne pouvons le faire nous mêmes. » Roland courut sus aux païens, et tous les Français avec lui.

Adelrot dit aux soldats chrétiens : « Comment êtes-vous assez hardis pour oser nous attendre ? L’Empereur a agi comme un insensé en vous laissant ici derrière lui. À cause de vous, la France va perdre de sa grandeur. » Roland entendit ces paroles ; il frappa d’estoc sur son casque et le pourfendit jusqu’à la ceinture, tellement qu’il en roula mort à terre ; après quoi Roland dit : « Tiens, méchant païen, la France ne perdra pas son prix à cause de moi ! »

Alors les hommes de France coururent sus durement. Falsaron, frère du roi Marsilius, était large d’un pied entre les deux yeux. Oliver frappa de taille sur son casque, et le pourfendit jusqu’à la poitrine, et dit : « Je te fais voir ce qui se passe en enfer. Et maintenant en avant, hommes de France, en avant ! Nous trouverons la victoire aujourd’hui ! » Le roi Corsablin dit aux païens : « En avant et courage ! les chrétiens ne sont qu’une poignée en face de nos gens. » L’archevêque Turpin le piqua entre cuirasse et ventre, et l’envoya si loin de son cheval, qu’il en tomba mort à terre. Engeler le fier soutint un rude choc ; Geris aussi soutint un fier combat. Le duc Samson trancha un païen qui tomba mort à terre, le sabre étant entré dans la selle. Et l’archevêque Turpin dit : « C’était vaillamment tranché. » Chacun des douze Pairs abattit un guerrier au premier engagement. L’agile comte Margaris piqua Oliver entre écu et harnais, et l’écu ne fut point retiré (?) ; car il avait éprouvé un grand dommage. On se serra de près des deux côtés. Roland s’élança comme un lion au milieu de l’armée ennemie ; ses bras étaient couverts de sang jusqu’à l’aisselle ; pas un casque ne tenait sous ses coups. Oliver, lui, avait brisé son glaive ; il frappa un païen sur son casque avec le marteau (?) qui lui restait à la main, tellement que tête et casque furent mis en pièces, et que les deux yeux furent chassés dehors. Alors Roland dit : « Dans un combat, il faut du fer pour se battre. Je ne me bats pas avec un bâton, comme les gardeurs de bestiaux. » Oliver répondit : « Je n’ai pas pris le temps de tirer mon épée, tant j’étais colère contre ce diable. » Et il tira son épée, qui s’appelait Hattagisser ; il en frappa un coup sur le casque d’un chef puissant, et le pourfendit jusqu’à la selle. Alors Roland dit : « Pour un tel coup, nous obtiendrons une grande récompense de l’Empereur. » Gerin et Geris tuèrent tous deux un chef appelé Timodes ; l’archevêque Turpin tua un guerrier païen nommé Sipor. Ils combattaient vaillamment des deux côtés. Alors il commença à tomber beaucoup (d’hommes) parmi les chrétiens. Cependant chacun d’eux avait frappé à mort dix ou douze païens. Les douze Pairs étaient les plus intrépides de tous au combat.

Pendant quelques jours, il se produisit alors ce prodige en France, qu’il fit aussi sombre que s’il eût été nuit, et que le soleil ne donna aucune lumière de lui-même, et que maint homme eut peur pour sa vie. Saint Gilles dit que ce prodige arrivait à cause de Roland, parce qu’il devait mourir en ce jour. Les païens [cependant] s’élancent par milliers à la fois [et succombent], si bien que, sur cent mille hommes, il n’échappa que l’agile comte Margaris. Et il ne méritait pas de reproches, encore qu’il fût en fuite : car toute son armure avait été brisée sur lui, et il avait été transpercé de quatre épées. Il dit au roi Marsilius que les païens étaient tous occis.

Alors le roi Marsilius envoya derechef contre les chrétiens cent mille hommes. Quand l’Archevêque vit venir les païens, il dit : « Avancez vaillamment, nous porterons couronnes au ciel ! » Les chrétiens répondirent : « Car nous voulons tous mourir plutôt que la France perde son bon los et renommée. » Ainsi ils recommencèrent à combattre avec un nouveau courage. Un païen, appelé Libanus, piqua Engeler entre écu, harnais et ventre, et il tomba mort de son cheval. Alors Oliver dit : « Il faut que je tire vengeance de ceci, si je le puis. » Et il frappa sur le casque de Libanus, et pourfendit homme et cheval, si bien que la pointe de l’épée se tint en terre. Au second coup, il occit un duc. Alors Roland dit : « Voici que tu es en colère. » Un païen, nommé Vallebrus, — il avait pris Jérusalem par trahison, était entré dans le temple de Salomon et avait occis le patriarche devant le maître-autel, — piqua Samson entre harnais et poitrine, et il tomba mort. Roland vit cela, il frappa sur le casque de Vallebrus, le pourfendit jusqu’à la selle. Et les païens dirent : « C’était un terrible coup. » Roland répondit : « J’en donnerai encore plus d’un tout semblable aujourd’hui, car nous voulons vous faire connaître le chemin de l’enfer. » Un fils du roi d’Afrique, nommé Malchan, — son armure était dorée comme une flamme, — frappa l’un des Pairs, nommé Angases, et le pourfendit jusqu’aux épaules. L’Archevêque vit ceci, et dit : « Oh ! méchant païen ! que Dieu s’irrite contre toi ! L’homme que tu as tué, tu le payeras bien cher ; » et il le frappa tellement sur son cou, que la tête de Malchan vola par la campagne.

Le fils du roi de Cappadoce, appelé Grandones, fit beaucoup de mal aux chrétiens ; il frappa à mort quatre Pairs, l’un après l’autre : Gerin et Geris, Bering et Antoine de Valtaborg (?). Les hommes de France s’en affligeaient beaucoup ; les païens se criaient les uns aux autres, et encourageaient leurs gens. Roland dit à Grandones : « Que Dieu se venge de ceci sur toi ! Moi, j’en vais tirer vengeance, si je puis. » Et il courut sur lui avec une épée ensanglantée ; Glandones se baissa ; Roland le frappa par derrière à la nuque, et lui fendit la tête jusqu’à la bouche ; il frappa un autre coup sur son épaule, et le fendit avec son cheval en deux. Alors les hommes de France s’écrièrent : « Nous avons un capitaine accompli. » Le combat était dur ; les païens tombaient si nombreux, que personne ne pouvait connaître le nombre des morts. Roland courait au milieu de sa troupe en long et en large, et disait aux païens : « Maintenant vous allez éprouver si vos faux dieux de mascarade (?) sont plus puissants que le Fils du Dieu du ciel. » Les païens dirent : « Les hommes de France sont difficiles à combattre, aussi allons-nous fuir. » Ils s’enfuirent vers le roi Marsilius, et lui dirent qu’ils avaient perdu deux batailles. Alors le roi Marsilius partit pour la troisième bataille. Et il avait avec lui deux cent mille hommes.

L’Empereur était couché là-bas dans une lande qui se nommait Sintes (?). Là, il rêva qu’il était élevé en l’air au milieu d’une grande pluie, de la tempête et des éclairs, et tout cela tombait et jetait ses hommes à la renverse. Il lui sembla aussi qu’un lion voulait prendre et dévorer ses gens, et qu’un lion lui mettait ses deux pattes dans la bouche. Il lui sembla encore qu’il était rentré en France, qu’il avait une corde autour de ses deux jambes, et que trente hommes venaient à lui en courant, et disaient : « Maintenant l’Empereur est vaincu, et jamais plus il ne portera la couronne. » Là-dessus il s’éveilla et dit : « J’ai rêvé des choses étonnantes cette nuit ; j’ai peur que Roland ne soit plus en vie. »

Les païens et les chrétiens se combattirent donc à Runtseval une troisième fois. Turpin l’archevêque frappa un païen nommé Ambori, et le pourfendit jusqu’à la selle. Alors Roland dit : « Notre archevêque est un bon chevalier, et maintenant, s’il se trouve en danger, il est d’un bon secours ! » (?) Et ainsi tombent les chrétiens si serrés devant les païens, que, sur vingt mille hommes, il n’en reste plus guère que six cents. Les païens commencèrent à lutter de nouveau ; et alors tombe plus d’un homme parmi les chrétiens. Lorsque Roland vit ses hommes tomber ainsi, il courut tout au milieu de l’armée, et frappa des deux mains ; Oliver en fit autant. Et Roland dit à Oliver : « Restons ensemble, le jour est venu où nous devons mourir. Dieu veuille nous accorder que l’Empereur le sache ! Prie Dieu qu’il nous fasse miséricorde. » L’Archevêque dit : « Il a été trouvé dans les vieux livres que nous devons être tués pour la cause de la sainte foi. Nous ne sommes plus maintenant que soixante hommes. »

Roland fit serment, et dit : « Il faut que les païens disent, avant que nous mourions, qu’ils nous ont encore acheté bien cher ; » et il dit à Oliver : « Je vais souffler dans mon cor ; l’Empereur retournera en arrière et viendra à notre secours. » Oliver répondit : « Ce n’est pas mon avis, et jamais tu n’amèneras ma sœur dans ta couche, si tu fais cela, » Roland lui dit : « Tu es conrroucé, beau-frère. » Oliver répondit : « Tu as un cœur vaillant, mais point de sagesse. Voilà ici maint chrétien immolé pour ton orgueil ; si tu avais soufflé dans ton cor lorsque je t’en ai prié, l’Empereur serait arrivé sur-le-champ à notre secours, et maintenant le roi Marsilius et tous ses gens seraient occis. » Alors l’archevêque Turpin leur dit : « Chers amis, ne soyez point courroucés. Le jour est venu que nous devons tous mourir pour la cause de Dieu ; or il importe fort peu que tu souffles dans ton cor ou non, à moins que tu n’y souffles pour que l’Empereur puisse venir venger notre mort. » Roland dit : « Je veux souffler au nom de Dieu ! » et alors il souffla si haut que l’Empereur l’entendit ; et cependant il y avait entre eux la distance de quinze milles de France.

Lorsque l’Empereur entendit le cor, il dit : « Voilà que Roland combat, et mes hommes. » Gevelon répondit : « Sire Empereur, tu parles étrangement ; Roland peut bien souffler dans son cor, s’il voit seulement un lièvre courir, ou toute autre bête. » Roland souffla encore une autre fois. Alors l’Empereur dit : « Roland ne soufflerait pas si fort, s’il n’avait pas besoin de le faire. » Le comte Gevelon répondit : « Tu as beau être vieux, tu es encore bien incrédule. Tu connais bien la grande fierté de Roland : il souffle souvent pour bien peu de chose. » Roland sonna une troisième fois si serré et si dur, que le sang jaillit de son nez et de sa bouche, et que sa cervelle lui sortit par les tempes. Alors l’Empereur dit : « Ce cor a un cruel son. » Le duc Neimis lui répondit : « Tu dois tenir pour certain, Sire, que Roland se trouve en grande angoisse. » L’Empereur fit sur-le-champ saisir le comte Gevelon, le fit enfermer dans une tour et partit pour Runtseval avec toute son armée.

Alors Roland dit à Oliver : « Maintenant tu peux voir que l’Empereur a perdu ici beaucoup de ses meilleurs hommes : il nous faut mourir avec eux. » Puis Roland s’élança au milieu des armées païennes, et, durant une petite heure, il leur tua plus de vingt-quatre guerriers ; et il disait : « Fuyez arrière, chiens de païens : vous n’aurez jamais la victoire sur moi ! » Le roi Marsilius, alors, piqua un chrétien, nommé Begun, au milieu de ses épaules, si bien qu’il en tomba mort à terre. Roland n’était pas loin, car il dit au roi Marsilius : « As-tu entendu nommer une épée qui s’appelle Durendal ? Tu vas savoir quel goût elle a. » Et il lui coupa le bras tout au ras de l’épaule ; puis Roland fit le moulinet de son épée et trancha la tête des fils du roi Marsilius. Alors les païens dirent : « Nous allons maintenant nous mettre à fuir, car Roland nous a vaincus. » Et ainsi s’enfuit le roi Marsilius avec un millier d’hommes, et aucun d’eux n’était sans blessure.

Puis vint un païen, nommé Langelif, avec soixante mille hommes noirs, qui combattirent vaillamment contre les chrétiens. Roland alors dit à Oliver : « Ces gens vont causer notre mort. Défendons-nous vigoureusement, pour que ces hommes noirs puissent dire qu’ils ont trouvé Roland et Oliver ! » Langelif piqua Oliver entre les épaules, si bien que la pointe sortit par la poitrine, et dit : « Misérable, viens ici te coucher pour garder le pays ! » Oliver se retourna et frappa Langelif sur son casque, de façon que son épée lui entra dans les dents, et il dit : « Tu ne te vanteras pas de ce que tu viens de faire. » Et Langelif roula mort à terre. Oliver s’élança au milieu des troupes païennes ; il frappait des deux mains ; Roland le rencontra, et Oliver ne le reconnut point, parce que ses yeux étaient pleins de sang ; il frappa sur le casque de Roland, et le fendit jusqu’aux cheveux. Alors Roland dit : « Oliver, ne frappe pas ici, mais là-bas, où c’est plus utile. » Oliver répondit : « Dieu te voie mieux que je ne te voyais : pardonne-le-moi pour Dieu ! » Roland répondit : « Que Dieu te pardonne tes offenses, comme je te pardonne celle-ci de bon cœur ! » Oliver sentit que la mort allait venir ; aussi descendit-il de cheval et tomba-t-il à genoux. Il pria Dieu de lui pardonner ses péchés, et aussitôt se trouva mort.

Lorsque Roland vit qu’Olivier était mort, il se pâma sur son cheval ; cependant il ne tomba pas à terre. Les chrétiens étaient là tous tués, excepté Roland, Turpin l’archevêque, Volter, fils de la sœur de l’Archevêque et Irot. Le vieux Irot dit à Roland : « Secours-moi ! Je n’ai jamais eu peur dans aucun combat avant ce jour. » Roland se retourna et commençait à combattre, quand Volter et Irot furent tués. Alors Roland entendit le cor de l’Empereur, et les païens dirent : « Voilà que nous entendons le cor de l’Empereur. Dépêchons-nous maintenant de mettre à mort Roland, avant que l’Empereur arrive ! » Et aussitôt sept cents, tous ensemble, lui coururent sus ; mais Roland et l’archevêque Turpin se défendirent rudement : « Nous voici en mauvais état, dirent alors les païens. Nous avons entendu le cor de l’Empereur ; si nous l’attendons, nous n’en reviendrons jamais vivants. » Donc ils s’enfuirent et dirent : « Roland est un si bon combattant, qu’il n’est jamais vaincu. » Sur ce, ils tuèrent le cheval de Roland, et s’enfuirent le plus rapidement qu’ils purent.

Roland roula en bas et tomba, et l’Archevêque lui retira son armure, qui était brisée en plusieurs morceaux. Lorsque Roland revint à lui, il se dressa, s’en alla où le combat avait eu lieu, y trouva les corps de ses pairs et les apporta aux pieds de l’Archevêque. Lorsqu’il trouva Oliver, il roula à terre et s’évanouit. L’Archevêque prit le cor Olivant et voulut puiser de l’eau pour en verser sur Roland ; mais il était lui-même coupé en deux entre les épaules et transpercé d’une épée ; aussi roula-t-il à terre. Roland reprit ses sens et dit à Oliver : « Voici pourquoi tu étais au monde : c’était pour défendre le Droit et établir la Rectitude ; c’était pour confondre l’Orgueil et l’Injustice. Aucun chevalier au monde n’était meilleur que toi. » Alors il le baisa sur la bouche, puis s’en alla vers l’Archevêque et lui demanda s’il vivait. L’Archevêque lui répondit tout bas, car il n’était plus bien vaillant : « Dieu nous accorde que l’Empereur arrive et aperçoive le dommage qui lui a été fait ! Et pourtant le roi Marsilius nous a encore payés bien cher. » Puis Roland s’en alla sur un tertre, s’assit entre quatre pierres de marbre et s’évanouit. Un païen alla à lui, qui semblait avoir été tué au milieu de l’armée ; il crut que Roland était mort, et dit : « Voilà que le fils de la sœur de l’Empereur est vaincu ; je vais emporter son épée et son cor en Arabie. » Il saisit la barbe de Roland et la tira très-fort ; sur ce, Roland reprit ses sens et dit : « Tu n’étais pas de nos hommes. » Alors il le frappa de son cor à la tête, si bien que ses deux yeux pendirent le long de ses joues et que sa tête fut fendue en deux. Et Roland dit : « Tout le monde t’appellera un fou, d’avoir osé voler ma barbe et mon cor. »

Puis Roland alla jusqu’à une montagne et voulut briser en deux son épée Durendal. Mais il ne put la briser de ce coup, et dit : « Durendal, tu es une bonne épée. Dans maint combat je t’ai portée, mais maintenant nous allons nous séparer. Or je prie Dieu qu’aucun ne te possède après moi, qui soit pusillanime et lâche. » Derechef, il frappa sur la montagne, et ne put briser son épée. Alors il dit : « Tu es une bonne épée, Durendal, et j’ai conquis bien des pays avec toi ! Dieu m’accorde que le comte de Cantuaria te possède, car il est un noble guerrier et chevalier. Voici les pays que j’ai conquis avec toi, dont l’Empereur est le maître, et qui sont : Angleterre, Allemagne, Poitou, Bretagne, Provence, Aquitaine, Toscane, Lombardie, Hibernie, Écosse ; or ce serait dommage qu’un homme de rien te possédât après ma mort. Dans ton pommeau se trouvent un morceau de dent de saint Pierre, du sang de saint Blaise et des cheveux de saint Denis. » Alors Roland sentit qu’il allait mourir ; il tomba sur ses genoux et dit : « Ô toi, Père qui es aux cieux, qui secours et sauves tous ceux qui ont foi en toi ; qui as ressuscité Lazare de la mort et délivré Daniel des horribles lions de Babylone, délivre maintenant mon âme des peines de l’enfer, et pardonne-moi tous mes péchés. » Puis il tendit ses deux mains vers le ciel, et là-dessus rendit son âme.

Après cela, l’Empereur vint à Runtseval et vit le grand dommage qui était arrivé : personne ne pouvait y venir à bout des corps morts. Alors l’Empereur dit à haute voix : « Où es-tu maintenant, Roland, et Oliver, et vous, les douze Pairs, que j’avais laissés ici derrière moi ? » Lorsqu’il comprit qu’ils étaient tous morts, il s’évanouit et tomba de son cheval. Personne des hommes de France n’eut en ce lieu le cœur assez dur pour ne point verser des larmes. Le duc Neimis dit : « Nous pouvons encore voir où les païens se sont enfuis. Courons après eux pour venger la mort de nos amis, et ne nous inquiétons pas des hommes morts. » L’Empereur se releva, pria vingt mille de ses hommes de rester auprès des morts, et chevaucha lui-même contre les païens. Et cela le conduisit presque au soir, avant qu’il les eût atteints. Donc il descendit de cheval et pria Dieu que le jour pût être prolongé. L’ange Gabriel vint à lui, et dit : « Dieu a entendu ta prière. Cours après tes ennemis : tu trouveras encore jour et lumière. »

L’Empereur courut après eux et en tua bientôt trois cents ; puis tous les autres païens s’enfuirent vers un lac, s’y noyèrent et prirent le chemin de l’enfer. Mais l’Empereur, ayant vengé la mort de ses amis, resta là pour la nuit. Au matin, il retourna à Runtseval, et là commença par voir où Roland était assis, et qu’il avait son épée dans une main et son cor dans l’autre. Il alla à lui avec une très-grande émotion (?), le baisa et dit : « Béni sois-tu, Roland, aussi bien mort que vivant ! Ton pareil n’a jamais été enfanté : tu étais et l’ami de Dieu et l’ami des hommes de bien. » Alors il tomba et s’évanouit, tellement que plusieurs disaient qu’il était mort. Oger le Danois versa de l’eau fraîche sur lui, et l’Empereur reprit ses sens, et pria un de ses chevaliers de prendre l’épée de Roland. Mais celui-ci ne put pas la retirer de la main de Roland. Alors l’Empereur envoya deux hommes pour prendre l’épée, mais ils ne purent détacher un seul doigt de la poignée. Alors il envoya cinq chevaliers, un pour chaque doigt, mais ils ne purent en aucune façon délivrer l’épée. Et l’Empereur dit : « Il n’eût pas été bon de vouloir la lui enlever de la main tant qu’il vivait. Aussi ne pouvons-nous pas l’avoir, maintenant qu’il est mort. Il a demandé à Dieu que personne ne pût la lui prendre de la main, personne qui fût de moindre valeur qu’il n’était. Je vais voir si je puis lui tirer son épée de la main. » Alors il saisit l’épée, et tous les doigts se détachèrent à l’instant de la poignée. Il prit l’épée, en détacha le pommeau et la boule, qu’il conserva comme relique (?). Quant à la lame, il la noya dans un lac.

Ensuite il fit porter les cadavres chrétiens, mis à part de ceux des païens, et vit alors où l’Archevêque gisait sans voix. L’Empereur fit bander sa blessure et lui fit avoir un bon lit. Turpin resta encore couché ; il marcha ensuite avec deux béquilles tant qu’il vécut, et ne fut plus jamais capable de porter la cuirasse ; mais il demeura depuis dans son archevêché, jusqu’à la fin de sa vie. Ensuite l’Empereur veilla toute la nuit et pria Dieu qu’il voulût bien lui permettre de reconnaître les chrétiens d’entre les païens qui avaient été tués. Et, au matin, il y avait une bourrée d’épines à la tête de chaque païen, tandis que les chrétiens étaient restés tels qu’ils avaient été tués. Alors il les fit enterrer. Mais, pour Roland et les douze Pairs, il les fit conduire à la ville d’Arles, où ils sont enterrés ; et l’Empereur y fit chanter nombreuses messes, et offrit douze cents marcs d’argent et le cor de Roland plein d’or. Ensuite l’Empereur retourna à Paris et fut affligé tant qu’il vécut. Puis il fit sortir le comte Gevelon pour le mettre en justice, et le jugement fut ainsi rendu « qu’il devait être traîné par toute la France », ce qui fut fait ainsi, en sorte que pas un os ne resta à côté de l’autre dans tout son corps.

Un jour que l’Empereur était assis tranquillement en France, entra à pied la sœur d’Oliver, qui était la fiancée de Roland. Elle s’adressa à l’Empereur, et lui dit : « Où est Oliver mon frère, et Roland, mon fiancé ? » L’Empereur se tut longtemps, mais il dit enfin : « Ma chère damoiselle, Roland et Oliver ont été tués dans la lande de Runtseval. » La jeune fille roula aux pieds de l’Empereur, et, par sa grande douleur, son cœur se brisa en pièces. L’Empereur s’évanouit de la grande compassion qu’il eut pour elle, et tomba sur le cadavre. Lorsqu’il revint à lui, il fit enterrer son corps avec de grands honneurs.

La nuit suivante, l’ange Gabriel vint à l’Empereur et dit : « Va-t’en au pays de Libia et aide le bon roi Iven ; car les païens combattent rudement contre son pays. » Dans la semaine de Pâques, l’Empereur rassembla une grande armée à Rome et s’en alla vers le roi Iven. Le roi païen, qui combattait contre lui, s’appelait Gealver. Quand il apprit l’arrivée de l’Empereur, il marcha contre lui et combattit, et beaucoup d’hommes tombèrent des deux côtés. Olger le Danois frappa sur le casque du roi païen et le pourfendit jusqu’à la selle. Et l’Empereur gagna une grande victoire en ce jour, et délivra le pays du roi Iven.

Ensuite il s’en retourna en France. Là vint à lui Boldevin, fils de sa sœur. L’Empereur fut content de sa venue, car c’était un bon chrétien et guerrier. L’Empereur reçut aussi une lettre : « La reine Sibilla et son fils Justam étaient venus en Saxe avec cent mille hommes. » L’Empereur réunit son armée, et lui donna pour chefs Boldevin, Olger le Danois et Namlun. Ils marchèrent contre la reine Sibilla et arrivèrent à l’improviste dans son camp pendant la nuit ; ils renversèrent les païens et prirent là bon nombre de leurs chefs ; Boldevin en personne s’empara de la reine Sibilla. Mais son fils Justam accourut au secours avec un certain nombre d’hommes, et s’écria : « En avant vaillamment ! je n’ai plus peur d’aucun chevalier ni combattant, depuis que Roland est mort. » Ils combattirent tout le long du jour. Enfin Justam fut pris et tous ses gens tués. L’Empereur fit baptiser la reine Sibilla et la donna à Boldevin, et il le fit roi sur toute la Saxe. Et l’Empereur retourna en France, et, pendant quelques années encore, régna en paix.


Nous avons résumé plus haut (V. la note du vers 96) toute la « Légende de Charles antérieure à la mort de Roland ». Il nous reste à poursuivre ici ce résumé jusqu’à la mort de Charles lui-même. Notre lecteur aura de la sorte un abrégé de toutes nos Chansons de geste, et toute une Histoire poétique du grand empereur avant, pendant et après le désastre de Roncevaux... ═ Celui qui avait vengé la mort de Roland, le vainqueur de Pinabel, Thierry, au moment de son combat contre le champion de Ganelon, avait vu un geai se poser miraculeusement sur son heaume. De là le nom de « Gaydon », qui resta désormais à Thierry. C’est ce Gaydon qui va continuer Roland ; c’est aussi contre lui que toute la famille de Ganelon va se liguer. Les traîtres essayent d’assassiner l’empereur Charlemagne, et accusent Gaydon de ce crime. Par bonheur, le complot est déjoué. Un nouveau duel est décidé entre Gaydon et le chef des traîtres, Thibaut d’Aspremont. Dieu prononce une seconde fois en faveur de Gaydon : Thibaut meurt. (Gaydon, poëme du commencement du xiiie siècle, v. 1-1790.) — Charles cependant se laisse encore séduire par la race de Ganelon, et Gaydon est disgracié. Une terrible guerre éclate alors entre l’Empereur et Gaydon. Celui-ci a pour auxiliaire un petit noble campagnard, un vavasseur du nom de Gautier, qui s’illustre par cent exploits admirables. (V. 1791-2468.) Gaydon, d’ailleurs, a dans son armée tous les jeunes chevaliers dont les pères combattent à côté de Charlemagne. Après des péripéties nombreuses et compliquées (v. 2469-9677), Charles essaye, mais en vain, de pénétrer dans Angers, qui est le boulevard de son jeune adversaire. L’Empereur s’était caché sous les habits d’un pèlerin ; mais il est reconnu par Gaydon, et forcé d’accepter toutes les conditions que son vassal veut lui imposer. Le champion de Roland est alors nommé grand sénéchal de France ; mais, un an après, il se fait ermite. (V. 9678-10878.) ═ Un autre continuateur de Roland, c’est Anseïs de Carthage, qui a également donné son nom à un de nos Romans... Avant de quitter l’Espagne pacifiée, Charlemagne veut lui donner un roi : il choisit Anseïs, le fils de Rispeu de Bretagne. (Anseïs de Carthage, poëme composé vers le milieu du xiiie s., B. N., 793, f° 1) Anseïs étant trop jeune, on lui donne le vieil Isoré pour tuteur. (Ibid., f° 1, 2.) Par malheur, cet Isoré a une fille qui s’éprend du jeune roi d’Espagne, et se fait déshonorer par lui. De là une implacable colère d’Isoré contre Anseïs. Le père indigné va jusqu’à s’allier aux païens pour mieux lutter contre le jeune roi chrétien. (Ibid., f° 2-14.) La guerre s’engage, et elle est véritablement interminable. (Ibid., f° 14-52.) Anseïs, en détresse, demande à grands cris le secours de Charlemagne. Malgré ses deux cents ans, Charlemagne accourt et le délivre. (Ibid., f° 52-71.) Le traître Isoré est pendu, et Marsile, dont l’auteur d’Anseïs n’a pas craint de prolonger la vie, est enfin mis à mort sur l’ordre du roi de France pour avoir obstinément refusé le baptême. Quant à Anseïs, il règne désormais sans conteste dans l’Espagne soumise et apaisée. (F° 68-72.) ═ Ici s’achève, dans notre légende, ce que les Italiens ont appelé la Spagna, et des Pyrénées nous sommes transportés sur les bords du Rhin. ═ Dans la Chanson des Saisnes, Charlemagne ne joue qu’un rôle assez effacé, et surtout assez vil... Guiteclin (Witikind) vient d’entrer vainqueur dans Cologne ; les Saisnes menacent l’empire chrétien. L’Empereur apprend ces tristes nouvelles, et en pleure. (Chanson des Saisnes, des dernières années du xiie s., Couplets v-xii.) Donc la guerre commence ; mais tout semble conspirer contre Charles : la discorde éclate parmi ses peuples. Les Hérupois (c’est-à-dire les Normands, les Angevins, les Manceaux, les Bretons et les Tourangeaux) jouissent de certains priviléges que les autres sujets de l’Empereur leur envient. De là une sorte de révolte qu’il ne sera pas aisé de calmer. Charles voudrait contenter tout le monde, et enlever néanmoins leurs priviléges aux Hérupois ; mais ceux-ci montrent les dents, et arrivent menaçants jusque dans Aix. Ils parlent haut, et l’Empereur pousse la bassesse jusqu’à marcher pieds nus à leur rencontre. Tout s’arrange. (Couplets xiii-xlvii.) C’est alors, mais alors seulement que Charles peut entrer en campagne contre les Saisnes. Et c’est ici qu’apparaît un frère de Roland, Baudouin, qui se prend d’un amour ardent pour la femme de Guiteclin, Sibille, et pour elle s’expose mille fois à la mort. La guerre se prolonge pendant plus de deux ans. Les Hérupois daignent enfin consentir à venir au secours de Charlemagne, et remportent tout d’abord une éclatante victoire sur les Saisnes. (Couplets xc-cxix.) Cependant l’amour adultère de Baudouin pour Sibille ne fait que s’enflammer au milieu de tant de batailles sanglantes. C’est pour Sibille qu’il livre un combat terrible au païen Justamont. Charles, lui, ne se préoccupe que de la grande guerre contre ses ennemis mortels. Un cerf lui indique miraculeusement un gué sur le Rhin, et l’Empereur fait construire un pont par les Thiois. Derrière ce pont sont deux cent mille Saxons, avec le roi Guiteclin. (Couplets cxx-clvii.) Une nouvelle bataille éclate, et jamais il n’y en eut d’aussi terrible. Mais enfin les Français sont vainqueurs, et Guiteclin meurt. (Couplets clviii-cxlvii.) Sibille se console trop aisément de cette mort, et s’empresse trop rapidement d’épouser son ami Baudouin, dont Charlemagne fait un roi des Saxons, et qui s’installe à Tremoigne. (Couplets cxcviii-ccx.) Ce règne ne doit pas être de longue durée : toujours les Saisnes se révoltent, toujours ils menacent Baudouin. C’est en vain que Charles arrive au secours du jeune roi : Baudouin, après des prodiges de bravoure, se trouve seul au milieu de l’armée païenne, et meurt. Charles le pleure, Charles le venge : les Saxons sont une dernière fois vaincus et soumis : ils ne se révolteront plus. (ccxi-ccxcvii.) ═ Ainsi se termine le poëme de Jean Bodel ; mais il a existé un poëme français plus ancien que la Chanson des Saisnes. Nous n’en avons pas l’original ; mais la Karlamagnus Saga nous en a du moins conservé un résumé... La scène s’ouvre sous les murs de Noble, assiégée par Charles. Tout à coup l’Empereur apprend que « Guitalin » vient de brûler Cologne. Il court au-devant des Saisnes ; mais il est enfermé dans Cologne et va succomber, lorsqu’il est secouru par Roland. Guitalin remporte un premier avantage sur les Français, mais ceux-ci reprennent l’offensive et s’emparent de Germaise (Worms). C’est alors qu’Amidan vient au secours de son père Guitalin. Mais Charles fait construire un pont sur le Rhin, et voilà les Saisnes menacés. Ici apparaît Baudouin, qui va devenir le principal personnage de notre poëme. Ici se place également le trop long épisode de ses amours avec Sibille. Une action décisive s’engage : Guitalin est terrassé par Charles, et Amidan tué par Roland, qui conquiert alors le fameux cor Olifant. La victoire des Français est complète, et tout se termine par un baptême général des païens. Tel est le Guitalin de la Karlamagnus Saga. (5e branche. Cf. le résumé qu’on en trouve dans la 1re branche.) Toutes les variantes de cette légende des Saisnes se divisent en deux groupes distincts, suivant qu’elles se rapportent à ce Guitalin, que nous venons de résumer, ou à la Chanson de Jean Bodel. ═ Ne perdons pas de vue Charlemagne, dont nous écrivons l’histoire légendaire. Il joue également un rôle dans ce poëme curieux que M. Guessard a publié sous le titre de Macaire, et M. Mussafia, sous celui de la Reine Sibille... Charles était parvenu à l’extrême vieillesse. Il était faible et partagé entre deux influences. D’un côté l’on voyait dans l’ombre cette indestructible race de Ganelon, ces traîtres de Mayence qui ne songeaient qu’à venger la mort et le déshonneur de leur parent ; de l’autre brillait la belle impératrice Blanchefleur, femme de Charlemagne, fille de l’empereur de Constantinople. Parmi les traîtres, le plus redoutable était Macaire : c’est Macaire qui veut perdre la reine. Il l’accuse d’adultère avec un nain qui est le complice des Mayençais ; Charles a l’étrange faiblesse d’en croire cet infâme, et condamne à mort la pauvre Blanchefleur. On la jette dans un bûcher ; elle va mourir, lorsque l’abbé de Saint-Denis obtient sa grâce. Mais on l’exile, et la voilà forcée de quitter la France. Un bon chevalier l’accompagne : c’est Aubri. Macaire, qui ne veut point lâcher sa proie, attaque à main armée la reine proscrite et son compagnon. Blanchefleur lui échappe, mais Aubri est tué. C’est alors qu’apparaît dans le drame un nouveau personnage destiné à un grand rôle, et qui n’est autre que le lévrier d’Aubri. Voyant son maître assassiné, le chien s’éloigne de ce corps sans vie, court à Paris, attire par ses cris désespérés l’attention de Charlemagne et de ses barons. Grâce à lui, le crime se découvre. Quel est le coupable ? On le cherche, et c’est encore le lévrier qui le découvre et le dénonce. Un duel en champ clos est décidé entre le traître et le chien. Celui-ci est vainqueur : l’innocence triomphe. (Macaire, chanson du xiie s., vers 1-1259.) Quant à la pauvre reine, elle veut chercher près de son père un asile à Constantinople, et arrive en Hongrie. Pendant tout ce long voyage, elle est conduite et protégée par un pauvre bûcheron du nom de Varocher. Enfin elle met au monde celui qui sera un jour l’héritier de Charlemagne, Louis. (Ibid., vers 1260-1414.) Il reste néanmoins, il reste toujours à proclamer son innocence. Tout l’empire d’Orient prend en main la cause de Blanchefleur contre l’empire d’Occident ; Constantinople se jette sur Paris. Une guerre terrible éclate dans la France envahie. (Ibid., vers 1415-3220.) Enfin la paix est faite, et Blanchefleur pardonne à Charlemagne. (Ibid., vers 3221-3548.) ═ Il existe de cette légende deux versions très-distinctes. La première, celle que nous venons de résumer, c’est Macaire ; la seconde (dont il ne nous reste que quelques fragments en vers et une version en prose) est connue sous le nom de la Reine Sibille. Entre ces deux textes, les différences ne sont cependant que peu considérables. La Reine Sibille a été tant bien que mal rattachée au cycle de Guillaume d’Orange, et c’est Aimeri de Narbonne qui lutte contre l’empereur de Constantinople. Malgré la postériorité évidente de cette rédaction, c’est elle qui a le plus longtemps conservé sa popularité en France et à l’étranger. Elle est très-longuement développée dans le manuscrit de l’Arsenal, B. L. F., 226. (Voy. nos Épopées françaises, II, 527 et ss.) Elle est adoptée par les auteurs du Tristan de Nanteuil (xive s.) et de la Chronique du manuscrit 5003 (achevé vers 1380). L’Hystoria de la reyna Sibilla a été imprimée plusieurs fois en Espagne. (À Séville, en 1532 ; à Burgos, en 1551, etc.) Des livres populaires ont répandu cette même version dans les Pays-Bas. (1500-1644, à Anvers, chez Worsterman, etc.) — M. Guessard, dans sa belle préface de Macaire, a d’ailleurs suivi jusqu’en ses plus petits détails les destinées de cette légende, depuis les temps les plus anciens jusqu’à nos jours. ═ Dans Huon de Bordeaux, Charlemagne ne paraît guère que comme un accessoire, et, à coup sûr, comme un personnage secondaire. Au début de son œuvre, l’auteur nous représente l’Empereur comme un vieillard tout près de la mort. Même il est tellement épuisé par l’âge, qu’il veut se faire élire un successeur. Par malheur, il n’a qu’un fils qu’il engendra à cent ans. C’est Charlot, c’est un étourdi de vingt-cinq ans. Le vieux roi veut du moins lui donner ses derniers conseils, et il les lui donne très-religieux, très-beaux. (Huon de Bordeaux, poëme composé entre les années 1180 et 1200, v. 29-199.) Là-dessus arrive un traître, Amaury, qui soulève la colère du vieil empereur contre Huon et Gérard, fils du duc Seguin de Bordeaux. Dans ce conseil perce la haine personnelle d’Amaury, que Seguin a jadis plus ou moins justement appauvri et dépouillé. Mais Naimes est là, et il défend les Bordelais. On envoie un message à Huon et à Gérard ; on leur mande de venir à la cour de Charlemagne. (Ibid., vers 200-392.) Ils se mettent en route, mais sont forcés de franchir mille obstacles accumulés par les traîtres ; Huon doit en venir aux mains avec le propre fils du Roi, avec Charlot, et il le tue. (Ibid., vers 393-890.) Grande colère de Charles contre le meurtrier de son fils : Huon est condamné à un combat singulier avec le traître Amaury. Il tranche la tête du misérable, et le jugement de Dieu se prononce en sa faveur. (Ibid., v. 891-2129.) Malgré tout, Charles ne veut point pardonner au vainqueur, et il faut que les Pairs menacent de le quitter pour qu’il se décide enfin à accorder à Huon une paix dont il se réserve de dicter les conditions. Il est ordonné au jeune Bordelais d’aller à Babylone porter un message à l’amiral Gaudisse, etc. etc. Huon part sur-le-champ, et court à ses aventures. (Ibid., vers 2130-2386.) Nous n’avons pas à les raconter ici, ni à faire suivre à notre lecteur les péripéties de l’amitié d’Huon avec le nain Oberon. (Ibid., vers 2387-8647.) Huon revient en France, et il y trouve son propre héritage occupé par son frère Gérard. (Ibid., v. 8648-9110.) Charlemagne est encore vivant, et la cause des deux frères ennemis est portée devant sa cour. Huon est très-injustement condamné à mort, et va périr, lorsque Oberon arrive à son secours et le sauve. (Ibid., v. 9111-10369.) ═ Le début du Couronnement Looys est véritablement épique… Charles sent qu’il va mourir, et veut mourir en assurant la vie de son empire. Dans sa chapelle d’Aix, il réunit un jour ses évêques et ses comtes. Sur l’autel il dépose sa couronne d’or, et annonce à ses peuples qu’il va laisser la royauté à son fils. (Couronnement Looys, poëme de la seconde moitié du xiie siècle, v. 1-61.) Alors le grand empereur élève la voix et donne, pour la dernière fois, ses derniers conseils au jeune Louis, qui, faible et timide, tremble devant la majesté terrible de son père. (Ibid., v. 62-77.) Même, il n’ose prendre la couronne, et Charles alors le couvre d’injures, le déshérite, et parle d’en faire « un marguillier ou un moine ». (Ibid., v. 78-96.) L’inévitable traître est là : c’est Hernaut d’Orléans, qui veut enlever le trône à Louis ; mais, par bonheur, il y a là aussi un héros qui met un courage et une force héroïques au service de sa fidélité et de son honneur. Guillaume prend la défense du pauvre jeune roi ; il lui met la couronne en tête (Ibid., v. 97-112), et se constitue son tuteur tout-puissant, son défenseur infatigable. Charles peut désormais mourir tranquille. Et, en effet, il meurt quelque temps après, sachant que Louis pourra régner, parce qu’il y a Guillaume auprès de lui. (Ibid., v. 113-236.) ═ La mort du grand empereur est racontée en termes très-rapides dans Anseïs de Carthage. ═ Sur la mort de cet homme presque surnaturel, deux autres légendes ont circulé, et elles sont toutes deux peu favorables à la mémoire de Charles : 1o Walafrid Strabo (Historiens de France, V, 339) reproduit un récit de l’abbé Hetto, qui le tirait du moine Wettin. Ce dernier avait vu en songe Charlemagne dans les flammes de l’enfer, où un monstre lui dévorait éternellement les parties viriles. Et pourquoi ce supplice du grand empereur ? C’était à cause de son libertinage honteux. 2o La fable du faux Turpin est plus connue… Un jour Turpin vit l’âme de Charlemagne entre les mains des démons. Or cette pauvre âme était en grand danger devant le Juge suprême, quand un Galicien sans tête (saint Jacques) jeta dans les balances éternelles toutes les pierres et toutes les poutres des basiliques construites par Charlemagne. Il fut sauvé. Le moyen âge n’a rien trouvé de plus beau pour honorer le souvenir de celui dont la Chanson de Roland a si bien dit : N’ert mais tel home desqu’à Deu juise. ═ Telle est l’Histoire poétique de Charlemagne, d’après les seules Chansons de geste du cycle carlovingien. Mais « nous n’avons pas raconté cent autres épisodes de la légende du grand empereur, qui se trouvent épars dans les Chansons des autres cycles, ou qui n’ont pas donné lieu à des Romans dont le texte soit parvenu jusqu’à nous. » Nous allons en emprunter le résumé à nos Épopées françaises, et c’est la seule citation textuelle que nous voulions y prendre…

I. — Épisodes de l’histoire poétique de Charlemagne qui ne se trouvent pas dans les chansons des autres gestes. — Dans Garin de Montglane, le héros du poëme est mis, dès la fin de ses enfances, en relation avec le grand empereur. Un ange apparaît au père de Garin et lui enjoint d’envoyer son fils à la cour de Charles. Le jeune homme part, armé de la terrible épée Florence. Il trouve le fils de Pépin en lutte avec les fils de la Serve, de la fausse Berte. L’impératrice, femme de Charles, se prend tout aussitôt d’un violent amour pour Garin, qui repousse noblement les avances de cette adultère et lui laisse, comme Joseph, son manteau entre les mains. L’Empereur, qui le croit coupable, entre dans une grande fureur et semble se radoucir un moment pour jouer gravement aux échecs avec celui que la reine a indignement accusé. Mais l’enjeu est formidable : si Garin perd, il aura la tête coupée ; s’il gagne, il sera roi de France. Notre héros, vainqueur, se contente de demander à Charles les fiefs de Montglane et de Montirant, qui sont encore aux mains des Albigeois. Puis il se met en route et marche d’aventure en aventure. Le Roman se termine par le mariage de Garin avec la belle Mabile. (Garin de Montglane est un roman de la décadence qui ne repose sur aucune tradition légendaire.)

Dans Aimeri de Narbonne, Charles revient d’Espagne après Roncevaux. Tout à coup il aperçoit une belle ville dont la situation et la richesse le tentent. C’est Narbonne ; elle est au pouvoir des Sarrasins. « Qui veut prendre Narbonne ? » s’écrie alors le grand empereur. Et il ajoute : « Celui qui s’en rendra maître en sera le gouverneur. » Tous les barons refusent, l’un après l’autre, un honneur si périlleux. « Eh bien ! c’est moi, c’est moi qui le prendrai, » dit Charles. C’est alors qu’Hernault de Beaulande réclame cette gloire pour son jeune fils Aimeri, qui est à peine chevalier. Aimeri prend la ville et en reçoit l’investiture des mains de l’Empereur ravi. Cette Chanson est une de nos meilleures et de nos plus anciennes.

Dans les Enfances Guillaume, on voit le roi de France demander à Aimeri ses quatre fils pour les adouber chevaliers : « Je veux que vous me les ameniez vous-même, » dit Charles. Mais, pendant qu’Aimeri les conduit à l’Empereur, les Sarrasins sont traîtreusement avertis de son absence et en profitent pour assiéger Narbonne. Le duc de Narbonne est lui-même attaqué par sept mille autres païens non loin de Montpellier. C’est dans ce combat que se révèle pour la première fois le courage de Guillaume : il se jette sur les Sarrasins, et délivre son père. Couvert de cette première gloire, il peut se présenter avec quelque fierté devant le grand empereur. Il triomphe, sous les yeux de Charles, d’un champion de Bretagne qui avait déjà abattu quinze chevaliers. Voilà le Roi enchanté de notre jeune héros : il veut sur-le-champ l’adouber. Mais on ne trouve pas d’armes assez fortes pour le nouveau chevalier. Après de longues recherches, on finit par rencontrer une armure qui a été jadis conquise par Alexandre ; la targe n’est rien moins que le présent d’une fée, etc. etc. Guillaume est revêtu de ces merveilleux garnimenz. Mais à peine est-il adoubé qu’un messager arrive : « Narbonne va tomber au pouvoir des Sarrasins. » Guillaume part, traverse la France, arrive à Narbonne, et fait lever le siége.

Dans le Siége de Narbonne, on voit les héros du poëme, Roumans et le fils d’Aimeri, Guibelin, aller en ambassade auprès de Charlemagne. Ils lui demandent du secours contre les Sarrasins qui cernent Narbonne. L’Empereur voudrait y aller ; mais il apprend que les Saisnes se sont de nouveau révoltés, et se contente d’envoyer aux Narbonnais une grande armée de Hérupois.

Dès le début de Doon de Mayence, le héros de la Chanson fait preuve d’une brutalité peu commune. Il se refuse net à saluer l’Empereur. Charles s’irrite ; mais Doon ne se soucie guère d’une telle colère et ne s’en montre que plus insolent encore. « Voulez-vous le comté de Nevers ? » dit le pauvre roi tout tremblant à ce fou furieux. « Non. — Voulez-vous la cité de Laon ? — Non. » Doon demande la cite de Vauclère, qui est au pouvoir des Sarrasins, avec la main de Flandrine, la fille de l’Aubigant. « Si tu me refuses, dit-il à Charlemagne, je vais immédiatement te couper la tête. » Charles s’indigne enfin, et il eût dû s’indigner plus tôt. Un grand duel est décidé entre Doon et l’Empereur ; il commence ; il est terrible. Mais un ange intervient, qui met fin au combat et ordonne à Charles d’aider Doon à conquérir Vauclère. Doon ne tarde pas à épouser Flandrine et engendre Gaufrey, qui fut père d’Ogier. Mais il ne reste pas longtemps en repos. Voilà qu’une grande guerre commence entre Danemon, roi des Danois. Les trois chefs des trois grandes gestes, Doon, Garin et Charles, y prennent part ; tous trois sont faits prisonniers. Par bonheur ils ont un puissant allié ; c’est un géant, une sorte de Varocher énorme, un vilain du nom de Robastre, qui ressemble étrangement à Renoart-au-Tinel, et qui rend d’inappréciables services à Garin, à Doon et à l’Empereur avec sa formidable cognée qui vaut bien des épées. L’impératrice Galienne envoie cent mille hommes au secours de Charles, qui revient à Paris. Quant à Doon, il a successivement douze enfants de Flandrine et les envoie tous à la cour de l’Empereur.

La Chanson de Gaufrey est consacrée à l’histoire des douze fils de Doon de Mayence, et surtout aux aventures de l’aîné. Il faut seulement noter qu’un des frères de Gaufrey, du nom de Grifon, engendre Ganelon, celui qui trahira la France à Roncevaux.

Charlemagne, dans Aye d’Avignon, veut lui-même adouber chevalier Garnier de Nanteuil. Il le nomme son gonfalonier et son sénéchal ; il lui donne Aye, fille d’Antoine, duc d’Avignon. Mais la belle Aye avait déjà été promise par son père à Bérenger, fils de Ganelon. De là les guerres et les aventures qui remplissent le reste de la Chanson.

Dans Gui de Nanteuil, le héros arrive un jour à la cour de Charlemagne et y reçoit le meilleur accueil. L’Empereur va même jusqu’à lui confier le gonfanon royal. Jalousie de la famille de Ganelon ; Hervieu de Lyon ose accuser Gui devant le Roi. Combat singulier entre Gui et Hervieu, qui est vaincu. Mais les traîtres ne se découragent pas et font tomber le « valet de Nanteuil » dans un guet-apens savamment préparé ; Gui se défend en brave ; Hardré, l’un des traîtres, reçoit la mort. Au milieu de tous ces complets odieux, Charlemagne joue le rôle le plus piteux. Il a peur des traîtres, il les caresse, il reçoit leurs présents avec un sourire. À Hervieu il veut donner Églantine ; mais Églantine aime Gui de Nanteuil, et notre héros ne permettra pas qu’elle soit ainsi mariée malgré elle. Dans sa lutte contre Hervieu, il est puissamment secouru par Ganor, second époux d’Aye, sa mère. Les traîtres sont encore une fois battus, et Hervieu est mis à mort. Charlemagne vaincu, lui aussi, dans la personne de ceux qu’il avait la bassesse de protéger, Charlemagne retourne honteusement à Paris ; Gui épouse Églantine et tient la Gascogne de l’Empereur.

C’est sous Charlemagne que se passe l’action de Parise la Duchesse ; mais le grand empereur n’y est d’ailleurs nommé qu’une fois (au 5e vers).

Dans Maugis d’Aigremont, ce cousin des quatre fils Aymon, après avoir couru mille aventures en Sicile et en Espagne, après avoir appris la sorcellerie à Tolède, revient en France, où il défend d’abord un de ses oncles contre Charlemagne, où il défend ensuite l’Empereur contre les Sarrazins.

Charles, dans Amis et Amiles, reçoit les offres de service de ces deux amis incomparables. L’un d’eux, Amis, épouse Lubias, sœur d’Hardré ; l’autre, Amiles, est aimé de Bélissent, fille de l’Empereur. Celle-ci, éhontée comme la plupart des jeunes filles de nos Romans, fait au jeune chevalier les avances les plus odieuses, et va même, à minuit, se coucher impudemment auprès de lui. Mais le traître Hardré n’était pas loin ; il a tout vu ; il dénonce Amiles, qui est très-innocent de ces agressions impures de Bélissent. Un duel est décidé entre le traître et l’accusé. Mais celui-ci n’a pas en vain un ami, un frère comme Amis. « Je me battrai pour toi, » dit ce nouveau Pylade. Il combat Hardré, il le tue, et l’Empereur le prenant pour Amiles, lui donne sa fille Bélissent, avec laquelle Amis garde la chasteté la plus complète. Le reste du Roman est étranger à la légende de Charlemagne.

Une partie de Jourdain de Blaives est consacrée au récit de la lutte entre Charlemagne et le héros de la Chanson... Ces deux ennemis se réconcilient, et Jourdain épouse Oriabel, fille de l’Empereur.

II. — Épisodes de l’histoire poétique de Charlemagne qui n’ont pas donné lieu à des Chansons de geste dont le texte soit parvenu jusqu’à nous. — La prise de Narbonne a été l’objet de plusieurs récits, et nous avons résumé avec soin, dans notre premier volume des Épopées françaises, celui du Philomena...Charlemagne vient de conquérir Carcassonne ; c’est en 789. Narbonne est alors assiégée par l’Empereur et défendue par Matran. Les Sarrazins se jettent sur l’abbaye de la Grasse et sont repoussés par les Moines. Borel de Combe-Obscure arrive au secours des païens : grande bataille qui met Narbonne au pouvoir des Français. Aimeri de Beaulande est créé duc de la ville ainsi conquise, et Marsile essaye en vain de reprendre cette conquête aux chrétiens...

La Prise de Carcassonne n’est racontée que dans certains récits qui sont restés à l’état oral. On connaît la fable d’après laquelle une des tours de la ville assiégée par le grand roi s’inclina respectueusement devant lui. On connaît la légende plus curieuse encore de « dame Carcas », qui sut défendre sa ville contre l’effort du puissant empereur et de tout l’Empire. C’est peut-être faire beaucoup d’honneur à ces contes que de les discuter scientifiquement. (V. à la Bibliothèque nationale, fr. 8648, page 157 des « Antiquités de Rullmann », le dessin d’une tête représentant « dame Carcas » qui se trouvait à Béziers, au dehors de la porte de Carcassonne. — V. aussi l’Histoire ecclésiastique et civile de la ville de Carcassonne, par le R. P. Bouges, 1711.)

La Prise d’Arles est l’objet d’un récit curieux dans la Kaisercronik que cite M. G. Paris (l. I., p. 258) ; Charles en fit le siége pendant sept ans, et n’en vint à bout qu’en détournant les eaux du grand canal qui apportait aux assiégés toutes leurs munitions, tous leurs vivres. (Vers 14901 et suiv.) » ═ Ici se terminent la citation de nos Épopées françaises (pp. 590, 591), et tout notre résumé de la Légende de Charlemagne.