Illuminations (éd. 1886)/Barbare

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Les Illuminations, Texte établi par Félix FénéonPublications de la Vogue (p. 11-12).


BARBARE


Bien après les jours et les saisons, et les êtres et les pays,

Le pavillon en viande saignante sur la soie des mers et des fleurs arctiques ; (elles n’existent pas).

Remis des vieilles fanfares d’héroïsme, — qui nous attaquent encore le cœur et la tête, — loin des anciens assassins, —

Oh ! Le pavillon en viande saignante sur la soie des mers et des fleurs arctiques ; (elles n’existent pas).

Douceurs !

Les brasiers, pleuvant aux rafales de givre. — Douceurs ! — Ces feux à la pluie du vent de diamants jetée par le cœur terrestre éternellement carbonisé pour nous. — Ô monde !

(Loin des vieilles retraites et des vieilles flammes, qu’on entend, qu’on sent.)

Les brasiers et les écumes. La musique, virement des gouffres et choc des glaçons aux astres.

Ô Douceurs, ô monde, ô musique ! Et là, les formes, les sueurs, les chevelures et les yeux, flottant. Et les larmes blanches, bouillantes, — ô douceurs ! — et la voix féminine arrivée au fond des volcans et des grottes arctiques… — Le pavillon…